Jamais les journalistes et commentateurs politiques du Canada anglais n'oseraient tenir des propos semblables à ceux que l'on entend dans le paysage médiatique québécois suite au dépôt du rapport de la Commission Bouchard-Taylor.
«We are Canadians and immigrants ought to give us respect as Canadians. They should know what are our values if they want to stay here.» Seuls les membres de l'Heritage Front ou du Ku-Klux-Klan oseraient s'exprimer ainsi à la télévision ou bien à la radio canadienne-anglaise.
Traduisons pour le Québec: «Nous sommes Québécois et les immigrants nous doivent du respect en tant que Québécois. Ils doivent savoir quelles sont nos valeurs s'ils veulent vivre parmi nous.»
Je l'ai entendu, lu et vu partout hier, chez plusieurs de nos commentateurs.
Au Québec, exiger des immigrants qu'ils nous respectent (quand on ne dit pas qu'ils nous obéissent!), ça passe comme du beurre dans la poêle.
Nos élites en place sont encore contaminées par l'histoire telle que trafiquée par l'abbé Groulx et autres poètes qui se croyaient historiens. Nous sommes encore au XIXe siècle au plan des idées.
Nos petits caporaux et majorettes de garde paroissiale se chargent de définir ce «Nous» qui exclue tous ceux qui ne pensent pas comme eux et ne votent pas du bon bord.
Ce «Nous»-là, compte tenu de la situation démographique du Québec et de l'évolution rapide des droits de la personne dans les régimes parlementaires, n'a tout simplement plus sa place. Ce «Nous»-là n'a pas d'avenir. Ce «Nous»-là occulte la moitié de la population, dès le départ.
On revient donc, nécessairement, à Pierre-Eliot Trudeau, ce visionnaire qui avait compris que les Québécois devaient transcender leur vision tribale de la société pour accéder pleinement à la modernité. D'où le multiculturalisme, l'abolition de la peine de mort, la levée des sanctions pénales contre les homosexuels, l'adoption de la charte des droits et libertés de la personne, etc.
La laïcité ouverte, prônée par le rapport Bouchard-Taylor, est la clé de ce roman-savon dans lequel nous évoluons depuis les derniers mois.
Personne n'a le monopole du Nous au Québec, surtout pas les nationalistes qui n'ont jamais franchi la barre des 50% lors des deux référendums. Il manque pas mal de monde pour ce Nous dont les nationalistes québécois parlent sans cesse, au détriment de la moitié de la population qui ne demande pas mieux que de les inclure dans un nous à 100%, un nous pluriel, multiculturel et ouvert, un Nous qui, jusqu'à preuve du contraire, s'appelle aussi le Canada.
J'approuve les recommandations du rapport Bouchard-Taylor, vous vous en doutez bien.
Je suis fier de savoir que les droits de la personne sont respectés au Canada d'un océan à l'autre. Je suis content de voir que mon foyer et mes droits sont protégés du fiel suscité par les espoirs déçus de nos élites qui, comme celles du passé, sont toujours déconnectées de la base, bref du peuple. Elles se croient le peuple, pourtant. Et c'est là qu'il faut rire plus fort que d'habitude, comme Voltaire, pour leur rappeler qu'ils ont perdu la guerre et qu'il nous faut maintenant gagner la nôtre, tous ensemble, sans créer de nouvelles barrières à la circulation des hommes, des femmes, des idées, des biens.
Le peuple ne donne jamais raison à ses élites. Pourquoi? Parce que le peuple, le Nous, n'est tout simplement pas cette vision chimérique, ce puéril romantisme révolutionnaire que certains se font du monde dans lequel nous vivons.
Ça va pleurnicher fort encore quelques jours. Puis tous nos journalistes et commentateurs vont progressivement prendre leur trou. Les péquistes et les adéquistes vont déchirer leur chemise et pousser de grands cris. Ils seront zappés par les vacances d'été. Leurs délires nationalistes rétrogrades ne survivra pas à une bonne partie de volleyball sur la plage.
En septembre, il y aura encore plus d'immigrants et plus de jeunes pour ridiculiser les vieux braillards laurentiens, plus de gens pour dire «on passe à autre chose, next!».
C'est dans la poche, je vous dis. Rien n'arrêtera la transformation du Québec en société ouverte, multiculturelle et respectueuse des droits de la personne.
À moins qu'il ne faille sacrifier les libertés individuelles pour préserver le sapin de Noël et les petits cocos de Pâques. Personnellement, je m'en sacre. Suis-je moins Québécois?
Tout le monde est Québécois... mais certains le seraient plus que d'autres? Hum? On fait un référendum n'importe quand pour trancher la question. Et celui qui perd, cette fois, devra être un bon perdant. Le rôle que j'ai adopté après avoir perdu au dernier référendum.
Je me permets de penser que je ne suis pas le seul même si je n'ose pas dire «Nous». Je sais bien que je ne fais pas partie de ce «Nous» dont ils parlent. Je trouve ça bien trop ringard. C'est ronflant et soporifique, tous ces sermons autour d'un «Nous» à 50%, pour des gens qui se prétendent Québécois à 100%...
Gaétan Bouchard,
Métis
Kwai Gaétan,
RépondreEffacer"...Je suis fier de savoir que les droits de la personne sont respectés au Canada d'un océan à l'autre..."
Ein bonne!...Euuhhh...Tu ironisais...n'est-ce pas?
Bonne journée!
Misko