vendredi 31 mai 2013

Repose en paix mon oncle Fernand

Fernand René, le frère de ma mère, mon oncle et mon parrain, est décédé vers dix-sept heures, mercredi le 29 mai dernier. Il était atteint du cancer.

Il affichait une certaine sérénité les dernières fois que je l'ai vu. Il était prêt pour ce dernier et ultime voyage.

Je ne lui connaissais aucun ennemi. Mononcle Fernand n'était pas très loquace et pas très achalant non plus. Sa force de caractère se manifestait dans ses remarques cinglantes qui résumaient bien  les choses. Je n'ai pas d'exemples précis sinon ce que j'ai entendu dire de lui maintes et maintes fois.

-Fernand parle pas souvent mais quand i' parle, ça dit toutte c'qu'y'a à dire!

Je me souviendrai toujours des randonnées dans le Sud dans la grosse Chrysler de mon oncle Fernand, des tours de yotte à Saint-Roch-de-Mékinac, des ses airs d'harmonica et de ses chansons du temps des Fêtes...

Je me souviendrai aussi qu'il a travaillé pour l'aluminerie Reynold's et qu'il est mort d'un cancer, comme mon père. Je me souviendrai qu'il est décédé sur les coups de cinq heures, comme mon père... Une coïncidence qui ravive d'anciennes douleurs.

La vie nous oblige à survivre au chagrin.

Je me permets néanmoins de la nostalgie en pensant à mon parrain, Fernand René.

Je ne sais pas combien de fois ma mère m'a dit que j'étais comme mon parrain, Fernand, un genre de Roger Bontemps dans son coin qui n'est pas achalé par quoi que ce soit. Je l'ai toujours pris pour un énorme compliment de lui ressembler sur ces points.

Mes plus sincères condoléances à ma tante Nicole, mon cousin François, sa conjointe et leurs deux enfants. Mes sympathies à ma mère, à sa soeur, ma tante Rose-Hélène, ainsi qu'à tous ceux et celles qui l'ont aimé.

Mon oncle Fernand était aimé. Il a réussi sa vie.

Que son âme repose en paix.


Son fils spirituel et filleul, 

Joseph Fernand Gaétan Bouchard





mercredi 29 mai 2013

Aux bons soins de Réjeanne

Réjeanne est à la fin de sa vie. Elle est en train de crever d'un cancer. Le médecin lui prescrit de la morphine pour combattre la souffrance.

Avant-hier, Réjeanne est tombée en pénurie de morphine. Cette imprévoyante n'a pas songé au fait que sa prescription est expirée. Le pharmacien refuse de lui vendre de la morphine parce qu'il suit les règles de son corps de métier.

On envoie donc Réjeanne à l'hôpital pour rencontrer un médecin, puisque son médecin de famille est parti dans le Sud.

On la fait attendre dans un corridor. Réjeanne crie au meurtre. Ces malades-là, tout le monde sait qu'ils n'ont plus toute leur tête.

Puis Réjeanne rencontre un médecin qui renouvelle sa prescription de morphine spontanément, le brave homme.

Puis elle retourne toute déconcrissée vers une nouvelle résidence, puisque l'ancienne ne convenait plus selon X, Y ou Z raisons.

Aux Hirondelles, on lui permettait de manger végétarien.

Au Bon Saint-Frusquin, on lui ordonne de manger de la viande sans quoi y'aura rien d'autre...

Réjeanne déteste la viande. Elle la laisse dans son assiette et elle retourne vite dans sa chambre pour boire de l'Ensure.

Heureusement que sa prescription de morphine a été renouvelée.

Elle pourra être gelée tight toute la journée en se calissant de tout.

Et tout, en somme, c'est l'argent. L'argent pour l'ambulance. L'argent pour les ambulanciers. L'argent pour le médecin, le pharmacien et les pharmaceutiques. L'argent pour ceci ou cela. L'argent pour le béton. L'argent pour le député. Comme dans la Salle No. 6 de Tchekhov. La santé corrompue à l'os, comme tout le reste, moi je le fais, toi tu le fais, tout le monde le fait, et hop! C'est la débâcle.

En bout de ligne, il n'y avait aucun sage pour dire simplement renouvelez-la sa calice se prescription de psychotrope sacrament!!! Et faites comprendre aux gus qui gèrent Au Bon Saint-Frusquin qu'il y a des végétariens qui se font vieux et qui ont aussi besoin de bons soins.

Merci beaucoup.


mardi 28 mai 2013

La politique

Quand je pense à la politique je me surprends toujours à paraphraser Jésus: éloignez de moi ces calices... Mais la coupe est pleine et il faut tout de même la boire, que l'on soit ou pas du parti de Socrate, celui qui troublait l'ordre public en incitant la jeunesse athénienne à penser plutôt qu'à travailler dur pour réduire la dette très antique de la Grèce.

Je suis plutôt du côté de celui qui ne boirait pas sa ciguë et se réfugierait vers sa blonde, sa guitare et ses pinceaux sous des cieux plus hospitaliers. Pour le peu que j'ai voyagé je sais que c'est possible que ce soit mieux ailleurs quant à certains aspects. J'aimerais bien vivre au Rwanda, par exemple. C'est le pays des mille collines et du printemps perpétuel. Il fait 20 degrés Celsius trois cent soixante-cinq jours par année. N'est-ce pas le paradis? Cependant, le paradis n'y est jamais très loin de l'enfer. Les violences ethniques menacent d'éclater n'importe quand. J'ai des craintes d'aller vivre là-bas.

Voilà pourquoi j'aime mon pays, purgatoire oublié du monde, banquise flottant sur des océans, la tête de l'île de la tortue, l'île Mékinak, Wabanaki, comme ça s'appelle depuis au moins vingt-cinq mille ans sinon plus.

Ici, il y a des arbres, puis des roches, du sable fin, de l'eau potable, du manger et du boire plus qu'il n'en faut, de l'électricité et, bien sûr, une bande de vauriens qui nous parasitent au sommet.

On entend bien plus souvent chialer contre les béhesses* qu'on entend dire quoi que ce soit envers ceux qui détournent trente pourcent des contrats publics pour nous construire des routes décrépies et remplies de nids de poule en moins d'un an d'utilisation. Taper sur le petit, l'étranger ou le pauvre, on n'a encore rien trouvé de plus naturel. Comme si le monde était rempli d'andouilles qui auraient une boule d'excrément malodorante à la place du coeur.

Enfin! C'est là que la politique embarque. C'est là qu'il faut faire ce qu'il faut. Secouer les consciences. Redonner du coeur et du courage. Grandir tout un chacun sous le respect et l'entraide.

Je remercie Kitché Manitou, alias le Grand Esprit que je ne connais pas personnellement, de m'avoir donné des arbres, des lacs et des rivières, et toutes sortes de belles et bonnes choses, belles et bonnes personnes, pour cheminer dans cette vie malgré ceci ou cela.

Le combat se poursuit sous une forme ou l'autre.

L'an passé c'était le Printemps Érable.

Cette année, c'est le couvercle sur le chaudron.

La vapeur va monter.

Et puis il adviendra ce qu'il adviendra.

En attendant, pourquoi pas? aimons-nous quand même...


*béhesses: bien-être social (bs), assisté-social dans le jargon juridique





lundi 27 mai 2013

Et coetera!!!

Il y a des gros vers blancs qui ravagent les gazons du coin. Les moufettes raffolent de ces larves.

Henri Bournival a capturé une moufette à l'Île aux Sales dans l'espérance qu'elle les mangerait toutes. Sauf qu'il ne lui a pas enlevé ses glandes. Il lui a fabriquée une cabane au milieu de son terrain et elle mange tous les vers blancs de son gazon. Pour le moment, il ne coupe pas son gazon de crainte de se faire arroser par la bête qu'il a capturée à l'aide de fléchettes tranquillisantes puisque Bournival est un médecin légiste à sa pré-retraite.

Quand la moufette aura mangé tous les vers blancs, paf! Bournival lui lancera une autre fléchette tranquillisante et il ramènera la moufette dans les bois comme s'il ne s'était jamais rien passé.

Sacré Bournival! Pauvre moufette! Esclave de son appétit insatiable pour les larves! Puante créature qui vous reverdit un gazon! Et coetera!!!

dimanche 26 mai 2013

Le plein-air même sous la pluie

Il pleut depuis bientôt une semaine. Je me promène tous les jours sous la pluie, que ce soit sur mes deux jambes ou bien sur les deux roues de mon vélo.  J'ai pris l'habitude de sentir dans ma chair et mes os ces forts vents du suroît qui me renvoient l'humidité du grand fleuve Magtogoek. Je me trouve en mode survie, tant sur le plan psychique que physique, et j'ai bien hâte que mon épiderme trouve de quoi satisfaire sa photosynthèse.

Hier, après cinq jours de pluie, je suis parti prendre un peu d'air du côté du Parc de la rivière Batiscan. avec ma blonde et une amie. Évidemment, il mouillait encore. Néanmoins, le simple fait de respirer l'humus de la forêt produisit chez notre équipée une béatitude indicible. Marcher sur le roc qui est là depuis des milliards d'années, ça vous rappelle à juger du temps avec un sens plus aigu des proportions. Même s'il pleut un tant soit peu.

Toute l'aventure humaine tiendrait en deux ou trois secondes si nous ramenions à une seule journée l'histoire de notre planète. Les humains étaient là et, pfuit! ils se sont envolés en ne laissant derrière eux que des déchets et des cadavres qui deviendront des fossiles ou des artefacts.

C'est en toute humilité que j'ai foulé sous mes pieds la Terre Sacrée, hier matin. Comme si je marchais sur les planchers frais cirés d'une demeure luxueuse avec des bottes recouvertes de boue.

J'ai rapporté quelques photos de cette expédition à laquelle il manque l'épisode du pique-nique dans la camionnette. Nous gelions comme des andouilles vers l'heure du dîner. Le feu extérieur ne suffisait plus à nous réchauffer. Toutes les bêtes prirent le parti de demeurer bien au chaud dans leur tanière et nous aussi.

-Au moins c'est beau ici, même si on se les gèle, que je me suis dit.

Il pleut encore ce matin et le soleil n'est prévu que pour demain.

Il me reste ces photos à contempler pour me rappeler que nous ne sommes pas faits en chocolat et qu'il vaut mieux sortir sous la pluie que de se morfondre pendant sept jours dans nos habitats à regarder l'eau glisser sur les fenêtres.









vendredi 24 mai 2013

Avertissement à propos de Gadouas

Il n'était pas facile de se lever tous les jours avec la sensation d'être un génie. Voilà pourquoi ce trou du cul passait toujours de mauvaises journées. Il s'appelait Gadouas, Alex Gadouas, et il était chiant comme mille. Ce bas-cul n'avait pas les moyens physiques et intellectuels de regarder de haut qui que ce soit. La condescendance ne lui seyait pas du tout. C'était plutôt le mépris qui lui convenait comme une couche de mauvaise odeur.

Gadouas était seul parce qu'il était un parfait imbécile. J'étais solitaire pour d'autres raisons. Et j'ai toujours attiré les gens un peu bizarres. Peut-être parce que je le suis un peu. Ou bien parce que je suis du bon pain. Allez savoir! Et puis est-ce qu'on parlait de moi, hein?

Non. On parlait de Gadouas le bas-cul rempli de mépris qui se croyait un génie.

Il avait lu deux ou trois pages de Nietzsche et vu des films soporifiques. C'était assez pour que Gadouas se sente différent. Et même qu'il sentait fort, un problème de glandes qui frappent certains adolescents tout autant que les Gadouas. Cela dit, ce serait mesquin de réduire Gadouas à sa puanteur, mais quiconque le connaissait en venait à dire qu'il puait. J'ai plutôt retenu l'image d'un mauvais génie, méprisant et bas-cul.

-Ouais... J'estime que le surhomme s'incarne en ma personne... Les femmes sont inférieures et doivent se soumettre... Je suis pour l'emploi de la force...

Gadouas disait ça sur un ton gluant et faiblard. Il était tout sauf de la force et aucune femme ne voulait de lui et de ses sornettes. Cet être mou et flasque s'inventait une surhumanité pour oublier qu'il n'était qu'un bas-cul. Ça le confortait d'avoir lu Nietzsche, un gars différent, qui avait influencé plein de gus différents, dont Adolf et Gadouas lui-même.

Gadouas jouait à l'intellectuel en se promettant, par exemple, d'écrire un livre sur la femme inférieure et le féminisme rampant de la société québécoise. Il n'était pourtant pas capable d'écrire une seule ligne qui se tienne debout. C'était du genre l'asociéter québéquoise doie prioriterremant dire que les homme plus fords doive aître au pouvoir pour la survi de la raçe. On tolérait ce genre de charabia à l'université et même que Gadouas finit par devenir bachelier en sociologie et militant d'un parti de droite. De quoi se dire que nos diplômes ne valent absolument rien. Mais c'est encore une autre histoire que je n'ai pas envie d'écrire aujourd'hui.

Le fait demeure que Gadouas n'était pas une lumière. C'était un pauvre type, hargneux, teigneux et vaniteux pour rien qui s'étouffait dans son orgueil comme l'on meurt dans ses vomissures.

Je ne dis pas qu'il est encore mort.

Ni qu'il est toujours vivant.

Je ne sais pas ce qu'est devenu Gadouas.

Je sais seulement qu'il n'était pas un génie. Seulement un bas-cul rempli de mépris et malodorant.

Il y en a des tas comme ça par les temps qui courent.

Je me devais de produire cet avertissement.






jeudi 23 mai 2013

Mon tatouage

Je suis tatoué. Je l'avoue, oui. J'ai sur le bras gauche un corbeau à deux têtes. C'est un dessin tribal propre aux Haidas, une communauté autochtone de la Colombie-Britannique. J'étais dans ce coin-là en 1993 et j'en ai rapporté cette marque indélébile. C'était une manière d'afficher à jamais mon identité autochtone. De plus le corbeau a toujours été un oiseau qui apparaissait à des moments particuliers de ma vie. J'en ai fait mon totem. Et comme deux têtes valent mieux qu'une, mon corbeau tatoué en porte deux.

Quelques années plus tard, je me retrouve chez un notable en train de discuter d'un contrat quelconque.

Le notable, homme propre et distingué, se permet tout de même de persifler à l'endroit des personnes tatouées.

-Quelle vulgarité! Ces gars qui portent des tatouages, comme s'il fallait se vanter de porter la marque des bandits et des gens de petite vie!

Évidemment, je portais une chemise à manches longues ce jour-là de sorte que mon tatouage ne se voyait pas du tout.

Mon notable poursuivit sa montée de lait contre les tatoués pendant un bon quinze minutes. Je ne disais rien. Il n'avait jamais besoin de m'entendre lui répondre pour parler tout seul. Il était intarissable, le notable. Mais il payait bien.

Je me suis néanmoins tenu à porter des chemises à manches longues jusqu'à la fin de mon contrat...


mercredi 22 mai 2013

Ces gens de mon pays

Les gens de mon pays, ce sont gens de parole et gens de causeries qui parlent pour s'entendre... N'allez surtout pas croire que cette phrase sublime a été pondue par mon esprit bouillonnant de maximes à dormir debout. Elle est de Vigneault lui-même, Gilles de son prénom, un gars de Havre Saint-Pierre qui en a long à dire sur la fraternité humaine et que l'on a trop longtemps confiné au péquisme par pure mesquinerie. Ce type-là n'a rien d'un politicien. Sacrament! C'est évident que c'est un poète.

J'écoute Jack Monoloy ou bien Les gens de mon pays, voire Mon pays, que je me trouve tout de suite dans un lieu où il n'est pas tant question de drapeau que de la beauté de Wabanaki, le pays du soleil levant, un pays qui plonge ses racines dans plus de 10 000 années de présence humaine, peut-être même plus puisque je n'aime pas compter.

Cela dit, je me souviens d'avoir entendu Les gens de mon pays en deux occasions et d'avoir eu la gorge nouée par l'émotion.

La première fois, c'était à Regina, en Saskatchewan. Je revenais d'un long voyage sur le pouce qui m'avait mené de Trois-Rivières à Vancouver, puis de Vancouver au Yukon. Sac au dos et cheveux au vent, je vivais mes années de bohème avec la fièvre de goûter à la quintessence de la vie et de l'aventure.

Je m'apprêtais à sauter sur un train cette fois-là afin de tester On the Road de Jack Kérouac. Je suis tellement influençable que je devins trotskyste après avoir lu Trotsky et poète après avoir lu Rimbaud. Si les livres n'étaient pas là pour gâcher ma vie, je me demande bien ce que je ferais... Récemment j'ai lu Claude Blanchard... Imaginez ce qui se passera demain...

Quoi qu'il en soit, j'étais dans un parc, à Regina, et j'écoutais Radio-Canada sur mon walkman.

J'avais mal à la mâchoire à force de ne parler qu'en anglais depuis deux ou trois mois. Et je rêvais de revoir mon pays pour une raison qui m'échappe.

C'est là que Gilles Vigneault m'a fendu l'âme avec Les gens de mon pays... Les larmes se mirent à jaillir chez ce gros tarlais qui vous échappe ces lignes ici-même. (C'est moi, bien entendu.)

Quelques années plus tard, aux funérailles du légendaire Michel-Luc Viviers, le plus gros poète de Trois-Rivières de tous les temps, je me suis fait scier l'âme une fois de plus avec Les gens de mon pays et La Quête de Brel, deux chansons auxquelles tenait particulièrement le grand Viviers. J'ai pleuré une fois de plus, comme un con. Et Viviers ne m'en a pas voulu pour autant. Il devait même rire un peu de moi du haut de ses nuages.

-J'te l'ai dit que j'te f'rais pleurer mon hostie! Arf! Arf! que je l'entends se gausser de moi.

Sacré Viviers... Sacrés gens de mon pays...

Des gens de paroles qui parlent pour s'entendre...

Des gens qui m'en donnent plus que je ne saurais en demander, en qui je trouve des trésors d'imagination et de bonhomie.

Nous ne sommes rien sans les autres.

Et les autres, c'est nous, qui que nous soyons.

On chie tous à la même place -ou presque.

Viviers serait content que j'aie osé la sortir, cette phrase-là.

Cela fait partie de mon patrimoine linguistique.

Ma patrie, c'est les autres.

Fuck le reste.




mardi 21 mai 2013

Dis-moé don' si c'est pas des belles bottines!

Il n'y a rien de mieux que de belles bottines et Samuel savait en faire pour qu'elles soient tout aussi confortables que belles pour dix ans. Samuel les confectionnait avec du cuir épais comme un cou de magistrat et c'était un bonheur que de le voir travailler soir et matin sur ses bottines qui avaient chacune d'entre elles une nouveauté qui les rendaient toutes originales. Chaque nouvelle bottine était l'achèvement de sa vie en tant que cordonnier émérite. Chaque nouvelle bottine lui permettait d'étendre son savoir et d'aller encore plus loin dans son art.

-M'as-tu leu'z'en faire des belles bottines! qu'il chantait toute la journée sur l'air de Alberte, tu es ma gaie-lon-la-lurette.

En cette année-là, c'était en 1937, Samuel devait bien avoir trente-trois ans. Il était au sommet christique de son aventure humaine, prêt à affronter toute croix et toute servitude. Il n'était pas aussi lyrique, Samuel, mais il ne savait pas raconter des histoires. Donc, chacun son métier.

Et le métier de Samuel était de fabriquer les plus belles bottines du monde, avec du cuir épais comme ça, et  des fantaisies d'une parfaite sobriété d'effets.

Dans ce temps-là, c'était un type qui semblait tisser de fils de fer torsadé. Samuel n'était pas gros mais tout en nerfs. Des nerfs qui gonflaient à chaque nouvelle bottine qu'il confectionnait avec grâce et d'aucuns disent encore que cela tenait du génie. Il ressemblait vaguement au gars des films muets, Harold Lloyd, vous savez celui qui se retient après une horloge, menaçant de tomber dans le vide du sommet d'un building de Manhattan. Sauf qu'il portait la barbe. Ses oreilles produisaient beaucoup de cérumen mais il se les faisait déboucher à l'eau tiède mélangée à un peu de vinaigre.

Sa bottine de draveur, entre autres, était conçue selon un procédé qui la rendait parfaitement imperméable. Il retenait la semelle de cuir par des chevilles de bois qui gonflaient au contact de l'eau. Il ne restait qu'à bien huiler les bottines et hop! on pouvait s'en aller crever dans le Nord pour un salaire de misère. N'empêche que les bottines de Samuel étaient pour tous ces gars un sujet de conversation tout à fait naturel. On se passait tous le message qu'il n'y avait pas de meilleures bottines.

Ce qui fait que Samuel obtint tous les contrats de bottines de draveurs de la région, pour lesquels il faisait aussi  travailler son fils Raynald, alors âgé de seize ans.

La cordonnerie de Samuel était située aux Trois-Rivières. Tout le monde passait par là pour remonter dans le Nord.

Samuel ne s'en tenait pas qu'aux bottes de draveurs, bien entendu. Il s'adonnait à créer toutes les sortes de bottines possibles et imaginables. On n'avait qu'à lui emmener la photo d'un grand catalogue de Paris pour qu'il vous reproduise la même bottine avec de la valeur ajoutée.

Ses prix défiaient toute concurrence. Parce que Samuel invitait tous les cordonniers de la ville une fois par mois pour manger du steak ou bien du blé d'Inde tout en trinquant un peu, autour d'un feu ou bien d'un lancer ou deux de fer à cheval. Il était le grand chum de tous les cordonniers parce qu'il aimait tout le monde, naïvement, comme un Roger Bontemps.

-T'es don' un maudit Roger Bontemps toé Samuel! disait tout le monde.

-Qu'est-cé tu veux j'te dise? Moé, j'su's heureux d'faire mes bottines ma-lu-ron lu-ré! répondait Samuel en jouant de la cuillère.

Tous les autres sortaient leur instrument, qui une scie, qui un violon.

Et Samuel, au milieu de toutes ses belles bottines et de tous ses bons amis, chantait et rechantait encore sa chanson sempiternelle.

-Ah! dis-moé don' comme y'a d'la belle bottine! Maluron lurette! Maluron luré!

C'était du temps où il avait trente-trois ans.

Après? Bah. Il est mort, bien entendu. Quand? L'histoire ne le dit pas.



lundi 20 mai 2013

Remerciements à tous ceux et celles qui sont venus à mon vernissage


 Je ne sais pas par où commencer en ce matin consacré congé férié en l'honneur des Patriotes de 1837.

Je vais y aller à la bonne franquette, avec des photos plutôt qu'avec des mots.

Mon vernissage entre proches, amis et intimes m'a permis de vivre une expérience formidable. C'est une réussite où je tiens un rôle secondaire. Nous ne sommes rien sans les autres. Et ce sont les autres qui m'inspirent ces visions colorées.

J'exprime sur mes toiles mon amour de l'humanité. Il n'est que plus nécessaire de partager cet amour avec toutes ces bonnes âmes qui sont passées chez-moi samedi dernier pour voir de quoi aura l'air mon atelier-galerie d'art à temps partiel.

J'ai rencontré des gens extraordinaires qui finiront par être peints sur mes toiles s'ils viennent me visiter plus souvent.

Je ne saurais nommer tout le monde sans vexer quelques-uns que j'aurais pu oublier par mégarde. Aussi, je me réserve le devoir de leur brasser amicalement les mains chaque fois que je les rencontrerai.

À tous et à toutes, un gros merci! Vous m'encouragez à ouvrir mon atelier-galerie d'art au grand public pour lui en montrer de toutes les couleurs et de tous les formats.

Au plaisir de vous revoir tout un chacun.

Je vous aime.

















jeudi 16 mai 2013

Guy Vatencour, ex-maire de Longval

Cela faisait bien trente ans que des citoyens dénonçaient la corruption qui régnait dans ce trou perdu qui s'appelait Longval. Le maire de Longval et toute sa bande de crosseurs leur riaient en pleine face chaque fois qu'ils faisaient appel aux autorités provinciales ou fédérales pour que justice soit faite.

-S'i' pensent qu'i' vont arriver à què'que chose ces hosties d'béhesses pis ces artistes crottés... On laissera pas Longval se faire mener par du monde qu'i' ont pas une cenne!

Voilà, pour résumer, ce que répétait souvent le maire de Longval, Guy Vatencour, un type aux airs gluants qui se croyait le plus beau, le plus intelligent, le plus ceci ou cela. Dans les faits, il avait l'air d'une grosse baudruche alcoolique qui sniffe de la poudre. 

Sa vanité ne connaissait aucune limite. Et tout son entourage, aussi narcissique et hédoniste que cette pourriture, en remettait une tranche.

Vatencour et sa bande de pleins d'marde contrôlaient tout dans cette ville remplie de pleutres, de peureux et, disons-le, d'esclaves soumis et obéissants. Hormis les béhesses et les artistes, il y avait deux ou trois retraités pour crier à la fraude et à l'injustice, au nom de ces milliers de Longvallois qui s'en foutaient éperdument parce que ça s'était toujours passé comme ça et qu'ils l'aimaient serrer dans le cul sans vaseline.

-Qu'est-cé qu'vous voulez qu'on faize? disaient ces sodomites passifs pour ensuite réélire Vatencour et ses caciques.

Le Courrier de Longval, un torchon publié par un cartel, débordait de photographies et d'articles élogieux à propos du maire Vatencour. Pendant ses trente ans de règne, on le vit toujours souriant, en train de distribuer des chèques ou bien de faire semblant de donner du sang aux chauves pour faire oublier ses crosses.

Les opposants de Longval ne réussissaient pas à obtenir gain de cause. Ils étaient rabroués par tous ces bandits qui pullulent dans l'administration publique. 

Tous les contrats publics allaient toujours à la même firme , Olympe-Bec, une entreprise sous la direction de Vito Vinaigretti, un gars un peu louche qui remplissait la caisse électorale du Parti Pro-Longvallois tout autant que les poches de Vatencour.

Puis un jour, il y eut des manifestations partout au Québec. Des jeunes et des moins jeunes descendaient dans les rues du Québec par milliers pour exiger que justice soit faite, brandissant la menace de crisser à terre ce système sale et de déclencher une révolution.

Les élites corrompues se mirent à trembler. Le chef des bandits déclara que Vatencour et sa clique devaient être sacrifiés afin de sauver tous les autres magouilleurs de la laide province.

-Ils vont nous faire tout perdre... J'aime autant qu'on s'en débarrasse... Les spotligths seront sur eux tandis qu'on consolidera notre patente dans les coulisses pour sauver la mise...

Vraiment, Vatencour avait exagéré. Et un beau matin, la police leur passa les menottes.

Il ne fallait pas croire que justice allait être rendue.

Ce n'était qu'une manoeuvre de diversion.

Une nouvelle armée de bandits plus futés allaient prendre la relève à Longval comme ailleurs.

Les quelques Longvallois qui avaient dénoncé la corruption sentaient qu'ils devraient encore se battre, non seulement contre la pègre, mais aussi contre leurs propres concitoyens, essentiellement composés de rassis, de ramollis et de cocus contents qui n'aiment ni lire ni écrire.

Le Courrier de Longval ne changea rien à sa politique éditoriale. L'ex-maire Vatencour fût vite oublié. Ils se mirent aussitôt à vanter les mérites d'un certain Georges Duchesne, ancien numéro deux du Parti Pro-Longvallois et ancien ami de ce Vatencour devenu persona non grata.

-S'i' pensent qu'i' vont arriver à què'que chose ces hosties d'béhesses pis ces artistes crottés... disait souvent Duchesne. On laissera pas Longval se faire mener par du monde qu'i' ont pas une cenne...




mercredi 15 mai 2013

La musique, la peinture et la soupe aux pois

Il n'est pas toujours facile d'alimenter ce blogue avec ce qui mijote dans mon cerveau.

Je me trouve devant mon écran ce matin avec la tête toute pleine de révoltes contre l'injustice et contre la haine pratiquée sans vergogne envers les pauvres.

Je voudrais régler le sort du monde en une ligne, deux paragraphes, voire trois pages...

Et je ne demeure que moi-même. Un gars derrière son écran qui voudrait stopper le mal par les moyens les moins maléfiques qui soient.

Heureusement qu'il y a les arts pour me situer par-delà les mots, dans une sphère où il m'est loisible de m'exprimer sans tout ce fatras idéologique qui se rattache inévitablement au vocabulaire.

Bien que je sois un homme de mots, je ne trouve pas moins de plus belles paroles que dans la musique, la peinture et la soupe aux pois. C'est ma manière de dire aimons-nous les uns les autres.


mardi 14 mai 2013

L'Oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique (W. Benjamin)

Je me souviens vaguement d'un cours de philosophie à l'université où il fallait nous pencher sur un certain Walter Benjamin qui a écrit, entre autres, un essai intitulé L'Oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique.

Cet essai me revient souvent en mémoire chaque fois que je prends une photo de l'une de mes toiles ou bien quand j'enregistre un morceau d'harmonica. 

Je suis parfaitement conscient que la copie est une altération de l'original.

La copie est souvent plus claire ou plus sombre que l'original, selon l'angle de vue et l'éclairage employé.

Prenons le cas de la photo ci-contre qui représente Mon Printemps Érable. Ce tableau pittoresque figure dans ma nouvelle collection que je présenterai très bientôt à mon atelier-galerie. On y voit des couleurs et des personnages, mais qu'en est-il des textures, des coups de pinceaux, des traits estompés et de tout le reste? Néant. J'ai perdu la troisième dimension dans cette photo.

Je me doute un peu que tout le monde sait ça.

Il me fallait le rappeler pour vous convier à voir un jour ou l'autre les originaux.

Je n'ai rien à rajouter à ce sujet et c'est tant mieux pour vous comme pour moi.

lundi 13 mai 2013

Tout accouchement se fait dans la douleur

Il est de ces maximes qu'on ne devrait que rêver. C'est parce qu'elles se sont incarnées qu'elles sont devenues des maximes.

Tout accouchement se fait dans la douleur.

C'est une maxime qui fait mal. Et qui engendre tout autant une création qu'une créature qui nous poursuivra tout au long de l'existence pour nous poser au moins cinq questions sans réponses.

***

On devient ce que l'on fait. Si l'on joue un air triste, on devient triste. Si l'on joue un air joyeux, on a du plaisir. C'est pareil pour la peinture, le dessin ou le tricot. D'où mes sourires sur tous mes tableaux. Pour soulever en moi des forces vives et triomphantes. Pour ne pas m'appesantir dans la mélancolie et la psychologie des profondeurs, où menacent de crever mes dons ou mes talents.

***

Je voulais vous montrer un de mes plus récents tableaux. Ma blonde m'a dit de que je ne savais pas garder l'exclusivité. Elle n'a pas tort. Je vais vous les montrer plus tard, disons la semaine prochaine.

Etc.

vendredi 10 mai 2013

La croix rouge de André Pratte

André Pratte, serviteur de La Presse, a publié hier une de ses fientes qui rappellent sa fable du bâton et du serpent lors des manifs de l'an dernier.

Je ne vois pas quelle gloire l'on peut tirer à tenir le rôle de l'intellectuel raté qui justifie les coups et blessures infligés par les partisans du Reich à la vermine socialiste.

Hier, il se posait en chantre de la santé, en reprochant à la canaille de ne pas manifester pour débloquer les urgences ou recruter du personnel. Il s'imagine que les manifestants de l'an dernier sont des créatures unidimensionnelles parce que c'est plus facile quand vient le temps de chier sa petite propagande manichéenne qui a des conséquences désastreuses sur les crânes des manifestants.

Après avoir soutenu les ordres de la cour et les bastonnades qui s'ensuivent, André Pratte se plaît à nous dire qu'il nous faudrait manifester. Il a bien raison. Qu'il ait le courage de la partir, cette manif.

Comme tous ceux et celles qui, sans écrire pour La Presse  affrontent la police pour nos droits sociaux au nom de tous ceux qui ne lèveraient pas leur gros cul pour quoi que ce soit, même pour arrêter la révolution.

Je lis Mario Roy et André Dubuc pour les mêmes raisons que je lis André Pratte à la sauvette. C'est sans aucun doute pour tenter de comprendre comment l'on peut devenir le Smithers de Mister Burns.

Tout ce qu'ils peuvent dire et écrire est teinté d'idéologie. Ils prétendent les narguer, les idées fixes de la gauche et des artistes. Ils sont pourtant à cent milles lieues de Voltaire. Ils se situent au rang de serviteurs. Il y en a de bons et de mauvais. Je ne sers pas assez bien mes maîtres pour en juger.

***

La Presse a par ailleurs publié un texte  qui colore mon propos quant à mon engagement dans la lutte pour l'amélioration des soins de santé au Québec. J'en suis l'auteur. Tout ça pour dire que je ne suis pas rancunier.

J'ai participé activement aux manifs de l'an dernier et j'ai porté fièrement le carré rouge aussi. Je serai dans la rue avec ma pancarte, aux côtés de André Pratte ou de n'importe qui pour changer la situation et amener un vent d'humanisme dans notre conception des rapports sociaux.

Cette manif pourrait être l'occasion de nous pardonner l'un l'autre, moi et André Pratte, histoire de lui montrer que la gauche a du coeur, bien qu'elle n'ait pas d'argent.


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Le gouvernement du Parti Québécois (PQ) promet de récupérer un gros 50 millions de dollars de l'industrie minière...

Cinquante millions c'est deux blocs de béton. Un chantier paralysé pendant deux ans. Deux cents employés.

Wow...

Si c'est payant pour les multinationales, pourquoi ne le serait-ce pas pour tous les Québécois?

Qui remettrait en cause la nationalisation de l'électricité, sinon les serviteurs des multinationales?

C'est du pareil au même. Le Parti est encore au pouvoir. Il n'y a jamais eu d'élections.

L'avenir c'est demain. Demain c'est l'avenir... Comme dans l'épisode du téléroman La Petite Vie où Ti-Mé se trouve au coeur d'une élection. On déplace les mots entre les deux partis qui s'affrontent. On fait des joutes sémantiques. Le fin fond de l'affaire n'est jamais touché. La misère et l'exploitation continuent. L'esclavage se poursuit. Les pharaons se bâtissent des pyramides de gypse sur notre bras.

Si des jeunes manifestent dans les rues contre la pauvreté, le chômage, la dégradation des soins de santé, la pollution ou bien les éditoriaux de La Presse, eh bien on aura recours à la bastonnade, comme d'habitude, pour calmer tous ces serfs.


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On finit par envier la vie des cerfs...







jeudi 9 mai 2013

Adieu Kiki!

Kiki était le premier critique de son orgueil et de sa vanité. Il ne supportait pas la critique d'autrui parce qu'il ne critiquait jamais personne, sinon lui-même. Il n'était pas parfait, Kiki, mais ses imperfections ne nous faisaient pas oublier sa bonhomie et sa mansuétude.

Kiki, c'était le bon gars par excellence, même s'il était toujours dans la dèche, quoi qu'il fasse pour s'en sortir, tout simplement parce qu'il n'y a pas de mode d'emploi pour réussir, sinon ce bréviaire qui a changé la vie d'untel ou bien ce fameux livre des dix lois, dix questions et dix réponses publié par un sage tellement sage qu'il en est devenu riche à se faire sucer entre ses orteils sales.

Kiki, cet innocent dans le bon sens du terme, n'avait pas lu ces vérités et se contentait de vivre en évitant les coups et les blessures.

Le meilleur moyen d'éviter tout cela, évidemment, serait de ne jamais sortir de chez-soi.

Pourtant, Kiki sortait souvent. Il prenait de longues marches jusqu'au fleuve. Puis du fleuve jusqu'à la rivière. Et de la rivière au ruisseau. Enfin, vous avez compris le principe.

Je vous parle comme ça de Kiki que vous n'avez encore aucune description physique de ce bonhomme, comme s'il suffisait de parler du dedans de quelqu'un pour tout comprendre.

Kiki, de son vrai nom Karl Keyman, était un gars né quelque part entre l'Irlande et Terre-Neuve. Il s'était fait ballotter d'un orphelinat à l'autre pour finalement échouer à Montréal en 1976, pendant les Jeux Olympiques. Il avait dix-huit ans. Faites le compte pour trouver l'âge qu'il aurait aujourd'hui.

À l'époque où je l'ai connu, il avait plutôt quarante ans. C'était au début des années '90. J'avais échoué sur le boulevard Saint-Joseph, à Montréal. Kiki était mon voisin.

Kiki avait cette particularité d'être très petit. Il était atteint de nanisme. Et il atteignait la hauteur de trois pieds un pouce avec ses souliers à plateformes Hoche Popize qui le grandissaient un peu. On a beau être petit qu'on a ses coquetteries.

-Jeuh m'appelleuh Karl Keyman, qu'il m'avait dit, mais mes z'amis m'appelleuh(nt) Kiki...

Je lui avais serré la pince et, bon, on a commencé à parler de tout et de rien, dont la physique des particules et les tachyons, puisque Keyman lisait beaucoup de trucs à ce sujet dans ses temps libres.

Karl Keyman, alias Kiki, avait aussi coutume de toujours traverser le boulevard Saint-Joseph au même endroit. Il ne traversait jamais à l'intersection, même pendant les heures de pointe. Kiki se faufilait comme un toréador entre les voitures. Et c'était un miracle qu'il survive à chaque fois puisque personne ne le voyait tellement il était petit. De plus, Kiki Keyman était toujours vêtu de noir, pour faire plus sobre.

Cependant, il portait toujours une fleur à la boutonnière de sa veste. Parfois c'était du muguet. Ou bien un pissenlit. On le trouvait un peu excentrique. Mais bon, c'était Kiki.

Un jour, paf! Kiki est mort. C'était le 16 août 1991 ou 1992... Je ne me souviens plus de l'année. Je me souviens seulement qu'il a traversé la rue et que, paf! il est mort.

C'était tout de même un chic type, pour ce que je connaissais de lui.

Dont sa proverbiale bonhomie et sa non  moins respectable gentillesse.

Nous étions peut-être trois ou quatre cents personnes lors de ses funérailles. Tout le monde aimait Kiki. Oui. Mais il était mort. Et ça, ça vous raccourcit une histoire d'aplomb.

Adieu Kiki!


mercredi 8 mai 2013

Stationnement interdit

 Je prépare un petit vernissage auquel sera convié, d'abord et avant tout, mes amis et mes proches. Si vous avez l'honneur de faire partie du nombre, c'est que j'ai le privilège de vous connaître. Je voudrais bien inviter le monde entier mais c'est un événement entre intimes pour envisager la suite des choses.

Cela dit, j'envisage ouvrir une galerie d'art pour exposer, en premier lieu, mes tableaux. Ce n'est pas tant par narcissisme que par cette volonté folle d'échapper à tout ce qui s'appelle les lois du marché.

Je fais de l'art pour ne pas faire du lard. C'est ma gymnastique tant spirituelle que physique. Mes yeux et mes mains sont sollicités à un degré que l'on n'imagine guère, sans compter tous ces flashes kaléidoscopiques de couleurs primaires qui pétillent longtemps dans ma tête après que j'eusse cessé de peindre et de me plaindre...

Je ne veux pas me plaindre... Non, non... Qui prendrait en pitié ce gros bonhomme que vous voyez ici sur cette photo captée par ma blonde, complice de mes jours, de mes nuits, de mes créations et récréations? Hum?

J'ai produit de grandes fresques de personnages au cours des derniers temps pour une raison qui m'échappe. Je me suis dit qu'il me fallait, par défi, mettre plus de temps que n'importe quel artiste trop subitement gagné par la paresse qu'il déguise en transe pour bourgeois gentilshommes.

J'y ai mis du temps, du temps et encore du temps. Et j'ai oublié ce temps. Il ne reste plus que ces oeuvres qui n'échapperont pas plus au temps et pour lesquelles j'ai beaucoup appris, beaucoup trouvé.

J'ai devant moi un vaste continent inconnu. Je ne viendrai jamais à bout de l'art. Jamais. C'est un univers tellement immense que je peux y reposer mon imagination débridée loin des diguidihahas de la vie courante.

Assez parlé de moi.

Je vous laisse sur une photo de mon atelier d'où a été produite ce tableau apparaissant ici. Il s'intitule Stationnement interdit. On dirait que c'est un format 14 X 18 pouces.  Je ne sais pas trop. J'ai jeté l'étiquette et je n'ai pas de pied royal à la portée de la main.

Voilà.





Oua que j'ai l'air sérieux!!!

mardi 7 mai 2013

À propos de maladie mentale

L'Institut américain des maladies mentales (NIMH), le plus gros organisme au monde qui subventionne la recherche à ce sujet, vient de désavouer la bible des psychiatres, le fameux grimoire intitulé Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders et mieux connu sous son abréviation DSM. Il y a un petit article à ce sujet sur mon site préféré de paresseux scientifique, l'Agence science presse. Cela se trouve ici.

Cela me rappelle un petit documentaire coup de poing que j'ai vu récemment sur cet Internet diabolique accaparé par des débiles comme moi qui voient des complots partout seulement pour permettre aux oligarques de faire plus de poudre... et faire plus d'argent... Non, non, y'a pas de complot messieurs, dames! Y'a d'la poudre et d'l'argent... Tout cela pour vous dire que ce chouette documentaire est même traduit en français. Cela s'appelle Le marketing de la folie. C'est parrainé par l'Église de scientologie, et Thomas Szasz, pape de l'antipsychiatrie. Le documentaire est produit par La Commission des Citoyens pour les Droits de l’Homme (CCDH), qui se dit un groupe de comité international de surveillance de la santé mentale à but non lucratif, chargé de permettre l’adoption de plus de lois pour protéger les individus contre des pratiques abusives ou coercitives. La CCDH prétend lutter depuis 1969 afin de rétablir des droits de l’Homme inaliénables et fondamentaux dans le domaine de la santé mentale. Vous trouverez le documentaire et quelques trucs sur la CCDH ici .

J'ai de sérieuses réserves à propos de l'Église de scientologie. Il y avait un centre de thérapie pas loin de la prison de Trois-Rivières, baptisée Le Village de Nathalie pour les intimes. Et la prison approvisionnait l'Église de scientologie pour ses thérapies bidon basées sur l'art de se faire enculer l'esprit par toutes sortes de conneries de l'époque de Lost in the Space.

Par contre le documentaire suscite une certaine réflexion sur laquelle il vaut la peine de s'attarder, même si je crains que les thérapies et autres méthodes de chien de Pavlov ne soient tout aussi nocives pour l'éveil de l'esprit. On ne fait pas pousser les fleurs plus vite en tirant sur les racines...

Personnellement, il me semble qu'il y a quelque chose de louche dans les rapports entre les médecins et l'industrie pharmaceutique. Ce n'est pas tout à fait noir. Il demeure néanmoins beaucoup de zones d'ombre dans cette science qui, parfois, n'en est pas vraiment.

J'ai la conviction que l'usage des psychotropes industriels peut endommager le corps et l'esprit.

Nous nous soumettons trop facilement à l'autorité sans remettre en doute sa légitimité.

On refait tous les jours l'expérience de Stanley Milgram...

lundi 6 mai 2013

Mon avis sur la vie de l'homme-machine n'est pas essentiel

La vie passe trop vite. Il faut faire huit journées d'une seule pour avoir le sentiment de ne jamais faillir à ses obligations. Et pour ce qui est de l'art, de l'amour, de l'amitié et de tout ce qui surpasse de loin l'utile ou le nécessaire, eh bien il faut se sacrifier afin d'y goûter subrepticement, en parallèle de la routine et de l'esclavage.

Je n'écris pas ça pour susciter de la déprime chez mon lectorat qui mérite bien mieux.

Je vous dis ça comme ça vient, naturellement, simplement pour vous dire bienvenue dans mon cerveau, qui que vous soyez, et reposez-y vous un moment, comme ça, tout à fait pour rien. C'est gratuit et vous n'y perdrez que votre temps.

***

J'ai vu Iron Man 3 récemment.

C'est l'histoire d'un patriote de fer, Tony Stark, un homme riche à craquer, fortement individualiste et tout autant bricoleur, qui sauve l'Amérique cinquante fois par jour avec ses gadgets.

Il est la consécration pure de cet homme-machine dont parlait La Mettrie. Cet homme-machine qui rebutait tant à mon ami et professeur de philosophie, feu Alexis Klimov. Il voyait en l'homme-machine le summum de l'objectivation, de l'homme transformé en objet, en pièces détachables, totalement déconnecté de son âme et de la quête d'une certaine transcendance.

Tony Stark est-il détaché de son âme? Il y a tout de même une petite bluette d'amour dans Iron Man 3, comme dans les romans de l'époque chevaleresque où l'amoureux bien cuirassé s'en va combattre les dragons pour libérer sa belle aux cheveux longs et parfumés.

Iron Man affronte des créatures modifiées génétiquement qui crachent le feu comme des dragons...

Et, signe des temps, Tony Stark souffre d'anxiété sans la protection de sa cuirasse. Il se sent écrasé comme un enfant qui a grandi trop vite. Il panique bien plus qu'au coeur de l'action, quand tout explose. Il souffre d'un syndrome de stress post-traumatique. Il n'est bien que lorsqu'il tue, comme Rambo. Un autre problème mécanique auquel ne manque qu'un peu d'huile et deux ou trois tours de pipe-wrench.

***

Les vrais super-héros ne portent ni armes ni cuirasse. Ils vivent parmi nous sans qu'on ne les remarque. Ce ne sont pas nécessairement des visionnaires ou bien des génies du bricolage. L'essence même de leur personnalité c'est leur bonté intrinsèque, leur indignation heureuse et naturelle. Ils affrontent la police politique du Parti dans les rues, désarmés, sans bouclier magique ou sabre de lumière.

Tout ce qui témoigne de leur grand caractère d'âme n'a rien à voir avec toutes les protections que nous nous inventons pour respirer de l'air en conserve plutôt que de s'empoisonner à l'air libre.

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Bon. Un divertissement demeure un divertissement.

Je vous en ai servi une tranche.

Cela vaut ce que ça vaut.

Et tant qu'à vous quitter, je vous laisse sur cette chanson sur laquelle je viens d'écrire ce texte.

Cela jouait sur Espace Musique, la station musicale de Radio-Canada, tandis que je vous improvisais ce billet.

Cela s'intitule La chanson de l'Auvergnat.

Et c'est rempli de gratitude, malgré les grosses moustaches de morse mal léché qu'arborait son auteur, Georges Brassens.

Voilà.


jeudi 2 mai 2013

La police politique du Parti contre les révolutionnaires

J'apprends ce matin que plus de 300 manifestants ont été arrêtés hier par les sbires du Parti. On a envoyé les Cosaques du Québec piétiner les socialistes et les anarchistes. On a prétendu, comme toujours, qu'ils lançaient des boules de billard... Cela fait quarante ans que j'entends que des manifestants ont lancé des boules de billard sur les policiers. Je commence à douter un peu. Une roche, un bout de bois, une brique... mais une boule de billard? Elle est récurrente la boule de billard, comme toute la fallacieuse propagande des apparatchiks. Ce qui fait que je n'y crois plus. Cette fameuse boule de billard lancée sur un policier c'est encore de la bullshit pour le bulletin de nouvelles.

***

Il a changé de nom plusieurs fois, le Parti. Un jour il s'appelait l'Union Nationale, le lendemain le Parti Libéral, puis le Parti Québécois. Il s'appellerait la Coalition Avenir Québec ou bien le Nouveau Parti Démocratique que ce serait du pareil au même. C'est la même clique de bandits asociaux et amoraux qui nous gouvernent depuis toujours.

***

Les manifestants n'ont pas fourni de trajet parce qu'il n'y a pas vraiment de chef ou bien d'organisateur quand on manifeste avec ses tripes.

Ce sont des manifestations spontanées, comme on en voit lorsque les révolutionnaires ne ressentent pas le besoin d'aviser les cerbères d'un pouvoir tout à fait corrompu.

Les opprimés se souviendront de ce qui s'est passé hier. On se serait cru au royaume de Vladimir Poutine, avec beaucoup de sauce brune pour noyer le tout.

La honte rejaillira une fois de plus sur le Parti et sur ses stupides prosélytes.

L'histoire sera réécrite par les révolutionnaires un jour ou l'autre.

Chaque jour qui passe c'est un dodo de moins jusqu'au grand soir.

Il viendra, ce grand soir, quoi que l'on en médise.

L'âge moyen de l'humanité c'est 19 ans.

Nos vieux croûtons vont finir par se faire torcher par la jeunesse mondiale.

Et ce sera bien fait pour eux.

***

En attendant ce grand soir, consolons-nous avec ceci.


mercredi 1 mai 2013

Bonne fête camarades!



C'est aujourd'hui le Premier Mai et c'est la Fête Internationale des Travailleurs.

Je me permettrai ce petit mot pour souligner l'événement.

D'abord, je tiens à exprimer tout le profond mépris que j'ai pour les larbins qui ne soignent pas leur syndrome.

La syndicalisation se fait encore dans la clandestinité en 2013, ici-même dans ce merveilleux Gros-tas de droit. Les cartes sont signées en cachette de l'employeur qui peut, entre temps, user de tous les subterfuges pour mâter sa révolte d'esclaves.

Cela me prouve, hors de tout doute, que le syndicalisme est encore une force révolutionnaire qui contribue à la libération de tout le genre humain.

J'emmerde ceux et celles qui crachent sur les syndicats. J'emmerde les larbins, les lucides et les peureux qui souhaitent nous ramener à l'époque où les enfants travaillaient dans les mines et où les vieux crevaient avant que d'atteindre l'âge de la retraite fixée à 88 ans...

Il n'y aurait jamais eu de progrès humain sans les syndicats, sans tous ces Moïse notoires ou bien inconnus qui se sont battus pour libérer leur tribu des pharaons et des coups de fouet qui venaient avec.

Ma tribu est essentiellement constituée de pauvres édentés et à demi rassasiés.

Ma tribu c'est l'humanité que l'on fouette et qui souffre de l'oppression partout dans le monde.

Ma tribu, c'est le syndicaliste d'un quelconque pays en voie de sous-développement qui est découpé en rondelles par quelque pourriture de droite financée par les banquiers d'ici ou d'ailleurs.

Ma tribu défile dans les rues le Premier Mai et tous les autres jours de l'année.

C'est aujourd'hui la Fête des Travailleurs et des Travailleuses. La Fête de ceux et celles qui se tiennent debout face aux maîtres arrogants et trop sûrs d'eux-mêmes.

Bonne fête à tous ceux et celles qui n'ont pas froid aux yeux.

Bonne fête à tous ceux et celles qui se battent pour leurs droits et pour ceux d'autrui.

Bonne fête camarades!