J'ai écrit une longue tirade politique ce matin. Je viens tout juste de l'effacer. Et savez-vous quoi? Je ne m'en porte que mieux.
Je m'étais mis à élaborer une critique de tel ou tel petit potentat de ville ou de village. Puis ça m'a dégoûté. Je ne me reconnaissais pas dans cette absence totale de rêve, d'art et de beauté.
Un rêveur qui renie sa nature de rêveur est encore plus misérable que le réaliste qui n'en a rien à foutre de rêver. Si le rêveur ne croit pas en la puissance de ses rêves, qui le fera à sa place? Certainement pas le réaliste. Comptez sur le réaliste pour que jamais rien ne change. D'abord, ça lui ferait faire de l'urticaire. Et ensuite, il aime mener une vie réglée comme un mécanisme d'horloge. N'allez pas lui parler de sentiments: il ne voit que les engrenages. Vous lui parlez d'amour et il vous parle de mécanique. C'est soporifique...
La politique n'a que des termes mécaniques à nous offrir: la machine électorale, le robot-militant, etc.
Or, je n'ai pas le nez collé sur la machine et encore moins sur le système.
Je survis à l'inacceptable et je suppose que je ne suis pas le seul.
Je ne cherche pas tant à avoir raison qu'à ne pas perdre mon temps à enculer des mouches alors que la vie est si courte.
Je vis dans le rêve.
Je me révèle dans la création, dans la poésie, dans une conversation douce et aimable.
Je refuse l'aigreur de la politique.
Une communauté humaine sera toujours plus qu'une administration, quelle qu'elle soit.
La vie est un phénomène plutôt rare dans notre système solaire. Et c'est un phénomène extrêmement fragile. D'une telle fragilité que l'on se demande pourquoi il y a de la vie.
On devrait la célébrer, la vie.
La célébrer tous ensemble, si possible, sans tomber dans l'esprit de lourdeur.
Et c'est bien ce que j'entends faire, somme toute.
Je me ferme au cynisme réducteur, à l'aboulie, au pessimisme outrancier, aux hurlements et autres agissements qui enlaidissent la vie.
La politique? Je la regarde avec des yeux de rêveur.
Je rêve d'un monde merveilleux, pas vous?
Si ce n'est pas le cas, ne m'en parlez même pas.
Ça ne m'intéresse pas la réalité.
Ça ne m'a jamais intéressé.
Et ça ne m'intéressera jamais.
La journée où je serai réaliste, je ne serai plus artiste.
Je ne serai plus musicien.
Je ne serai plus poète ni scribe ni rien.
Évidemment, ça n'arrivera pas.
La réalité ne m'intéresse pas.
Je fais semblant de la connaître suffisamment pour payer mes factures.
Pour le reste, franchement, je suis plutôt du genre à la mépriser.
À tort ou à raison, le réaliste saura vous le dire.