POÈME SUR LA ROUMANIE
Que je les chie dans le nez les deux doigts
Yep yep yep yep pif paf prout
Carpathes et Transylvanie
Sans efforts et sans réfléchir
À l'ire de la lyre vendue à la livre
La rime est morte et la plume du vol c'est
Du vol au vent au pou laid
Roux comme la Roumanie
Quo Vadis, quiproquo et qui va-là?
Gnangnan gnan!
C'est la valse des valseuses
C'est la danse des danseurs
C'est le tango des tangueurs
Et c'est donc quoi n'importe coi
N'importe comment
N'importe quand
French cancan
Danses amulettes!
Les oranges sont parfois jaunes comme une seringue
Et hop! Fini!!!
Final bâton
Nadia Comaneci!
Il relut son poème avec attention et le posta d'un seul clic à la revue Synchro Ni Cité qui publiait des poèmes en roumain sans traduction pour son numéro spécial sur la poésie de Transylvanie. On y publierait des poèmes de Alimanesco, Brutar, Gavril, Martinescu, Pretorian et Vulpesco, tous professeurs à l'Université de Bucarest où l'éditeur de Synchro Ni Cité, Gratien Lavoie, avait passé deux semaines tous frais payés pour parler de la poésie québécoise hyper-créatiste.
Este dansul dansatori
Și asta este ceea ce mut pe nimeni
În orice caz
Alimanesco écrivait des poèmes si sonores que la traduction aurait été une vraie trahison. Este dansul dansatori... Comment demeurez insensible à la musicalité de cette poésie unique, hein?
Arthur avait lu tous ces poèmes roumains et avait convaincu Gratien Lavoie de lui laisser une page pour son prochain numéro.
-Ce sera un poème sur la Roumanie! lui avait-il dit.
Arthur but son café sans lait avec du beurre. Il avait entendu dire que les Tibétains mettaient du beurre dans leur thé. Alors pourquoi pas du beurre dans le café, hein? En fait, c'était plutôt de la margarine puisque le beurre coûte la peau des fesses. Ce n'était pas du beurre, mais c'était tout comme dans le rêve éveillé du poète.
C'est que Arthur Van Rein Beau, comme il aimait lui-même s'appeler, n'était pas du genre à faire comme tout le monde. Il portait d'ailleurs un haut-de-forme difforme sur sa tête chevelue. Il l'avait trouvé dans un bac à ordures et c'en était fait une coiffe de jeune prince de la Cour des Miracles.
Arthur avait dessiné un oeil sur son haut-de-forme, un oeil surnommé affectueusement Le Tierce Oeil. Il avait appliqué plusieurs couches de vernis à l'acrylique pour immortaliser son oeuvre dont il était si fier.
Il portait ce chapeau tant pour ses récitals que dans la vie de tous les jours.
Il jurait un peu dans le décor et ça lui faisait du bien de penser qu'il n'était pas comme tout le monde, Arthur Van Rein Beau.
On ne lui connaissait pas de blonde ni d'amant. Il était souvent seul parce qu'il était plutôt désagréable et déclamait ses poèmes à tout venant en gesticulant comme un macaque.
Il en avait écrit seize en trois ans. Dont son célèbre Il y a du jus de pied.
Les jaloux disaient qu'il n'était pas poète pour deux sous.
Mais pas moi.
Je savais qu'il était un mauvais écrivain en mon for intérieur. Il ne maîtrisait ni son orthographe ni sa grammaire.
Néanmoins, je ne lui refusais pas le titre de poète.
Je crois sur parole ceux qui me disent qu'ils sont ambulancier, avocat ou serveuse dans un restaurant.
Pourquoi devrais-je douter de celui qui se dit poète?
Parce que ce n'est pas un métier?
Tout le monde sait que ce n'est pas un métier!
D'ailleurs, Arthur Van Rein Beau ne travaillait pas.
C'était comme si son Troisième Oeil intimidait les employeurs potentiels.
Il traînait donc sa misère dans toutes les rues de la ville en gambadant ou bien en sautant à cloche-pied, ce qui finissait par le fatiguer au bout de dix kilomètres. D'autant plus qu'il devait constamment replacer son haut-de-forme monoculaire.
Il était faux, bien entendu, de prétendre que la poésie cela se chiait tout seul.
Chaque fois qu'il écrivait un poème, Arthur en avait pour six mois avant que de s'en remettre. Il errait d'une urgence à l'autre, dans les pavillons de psychiatrie, et faisait la file à la pharmacie pour obtenir sa dose gratuite de méthadone.
Puis la poésie revenait le hanter. Comme la fois où la grâce l'avait touché pour écrire Il y a du jus de pied.
***
***
Je vous jure que ce gars-là est un poète.
D'aucuns d'entre vous refuseront de me croire.
Que voulez-vous qu'il soit, hein?
Seulement un paumé malade dans la tête qui ne sait pas quoi faire de sa misère?
C'est insultant pour lui.
Il ne mérite pas autant de hargne.
Laissons-lui une page dans la revue Synchro Ni Cité bon sang!
On est tout de même pas pour faire tout un numéro sur les Roumains sans laisser à nos malheureux un peu d'espoir de servir à quelque chose.
Il faut assurer la relève.
La plume de Gratien Lavoie s'est tarie depuis longtemps.
Et tous les bardes québécois meurent les uns après les autres.
Sur qui et sur quoi pourront nous compter pour sauver la poésie québécoise, hein?
Sur des gars comme Arthur Van Rein Beau.
Je vous en torche un papier.
Les grands poètes et grands artistes savent rêver dans le caniveau et par dessus les étoiles - peu importe la syntaxe .
RépondreEffacer@monde indien: moi je suis plutôt un gros poète de 1,94m et 130 kilos... ;)
RépondreEffacerMinuscule ou géant , les mensurations n ' ont rien à voire à l ' affaire ( moi j ' suis bêtement normal mais pas bien athlétique / c ' est comme ça et j ' m ' en fous ) - En tous cas toi tu es un grand poète ! généreux - génial -
RépondreEffacerBonne journée à toi -