Je suis musulman. Je ne le suis pas vraiment, bien entendu, mais je serais catholique si l'on commettait un attentat dans une église.
Je suis aussi sikh. J'en sais peu sur le gourou Nanak. Mais je comprends que cette religion était à la base une rébellion contre le système de castes qui prévalait aux Indes. Les parias, les moins que rien condamnés à boire de l'eau boueuse et croupie, se sont convertis à la religion sikh qui leur promettait l'égalité et le respect de leurs droits. Le petit poignard que portent les Sikhs symbolise cette libération.
Je suis même athée, parfois. Lorsque je vois les hommes s'entre-déchirer pour se parler de l'amour du Créateur, il m'arrive de douter de sa création.
Pour le moment, je suis musulman.
Il n'y a pas à chercher de midi à quatorze heures. Je le suis depuis l'attentat survenu au Centre culturel islamique de Québec où six personnes ont trouvé la mort sous les balles d'un forcené adepte de discours haineux et racistes.
Peut-être que je paraîtrai trop sensible. L'est-on jamais assez? Je vous avouerai en toute humilité que j'ai pleuré. J'ai eu honte de mon peuple, même si le geste n'a pas été commis par un groupe. J'ai lu et vu les liens, les discussions et les commentaires dégueulasses qui mènent un jeune homme vers le statut d'ange exterminateur. Je sais fort bien dans quelle culture a baigné l'assassin.
J'ai toujours été attiré par les étrangers. Ils me permettaient de voyager à peu de frais en plus de satisfaire ma curiosité insatiable.
J'ai commencé à fréquenter des musulmans à l'université. J'ai même passé une soirée avec un imam qui me regardait boire comme un trou sans me faire la leçon. J'ai surtout connu des Maghrébins à cette époque que les médias jaunes appellent à tort des Arabes. La géographie n'est pas la matière forte de bon nombre de nos journalistes qui ne font pas la distinction entre le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord...
Les Maghrébins m'aimaient bien j'imagine. Je savais les prendre par les sentiments. Ils étaient contents de m'entendre dire que les Juifs et les Chrétiens ne subissaient pas de persécutions en Espagne musulmane. La première chose que fit l'Espagne après la reconquête catholique fût de persécuter les juifs et les musulmans. De plus, j'aimais souligner que l'on ne connaîtrait pas Aristote, Platon et toute la médecine moderne sans ces savants du monde musulman qui ont sauvé de l'oubli le savoir antique à une époque où l'Europe s'enfonçait dans l'Âge des Ténèbres en brûlant des sorcières et des cathares.
Je suis musulman. Je n'ai jamais lu le Coran. Je ne pratique pas ce culte. Mais seuls des idiots peuvent refuser à une personne humaine cette possibilité de transcender ce monde physique incomplet et imparfait. Seuls des insensibles peuvent renier à l'homme cet attrait pour la méditation et les espaces infinis.
Il s'en trouve malheureusement dans notre société.
Cela me fait tout de suite penser à la parabole du Bon Samaritain tirée des Évangiles. Un type de confession juive gît au sol, blessé par des voleurs qui l'ont abandonné sur le bord de la route. Un prêtre et un Lévite, tous deux juifs, passent devant lui sans l'aider. Finalement, c'est un Samaritain, un membre d'une communauté jugée impie, qui porte secours au blessé. Cette parabole est mise en lumière par une épître de Paul de Tarse dans laquelle il rappelait que la foi n'est rien sans la charité. Bref, on juge un arbre à ses fruits. Pas à ses idées . Ni à sa religion.
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Je crois encore faire partie des souverainistes. Je suis, aux dires de plusieurs des militants de cette cause, un mou. Je professe sans vergogne ce multiculturalisme à la Trudeau tant honni. Je rappelle constamment que le nationalisme est un piège qui peut conduire au totalitarisme. Porter un chef sur un bouclier comme dans une tribu de Gaulois: très peu pour moi!
Les partisans des régimes totalitaires sont tous repliés sur eux-mêmes et rejettent le cosmopolitisme, c'est-à-dire ces satanés étrangers qui polluent ce qu'il croit être l'esprit de la nation. Bref, je suis nettement plus socialiste et même citoyen du monde dans mon approche que je ne suis Québécois dit de souche. Peut-être que mes origines autochtones me confèrent une sensibilité à la différence. Néanmoins, je doute que cette position ait quoi que ce soit à voir avec le type de sang qui coule dans mes veines. Cela se passe dans mon cerveau, le muscle le plus important du corps humain avec le coeur. Cela dit, nos politiques manquent trop souvent de coeur et d'esprit...
L'esprit de mon pays, s'il peut se prévaloir d'en avoir un, repose essentiellement sur l'ouverture à l'autre, la compassion et l'accueil. Il n'est pas incrusté dans les fèves au lard. Il ne dépend pas d'un sapin de Noël.
À l'instar de Gilles Vigneault, je dis à tous les hommes de la Terre que ma maison c'est votre maison et que tous les humains sont de ma race.
Je m'inquiète de la montée de discours haineux tant sur les médias sociaux que dans les médias traditionnels.
Je m'inquiète des émules de la Radio des Mille Collines, cette radio rwandaise qui diffusait jour après jour des appels à la haine sous des musiques enjouées.
Je m'inquiète des partisans de Donald Trump qui croient tout à coup qu'il n'y a plus de constitution ni d'articles du Code criminel contre les discours haineux.
Je m'inquiète de ceux qui fouleraient aux pieds l'État de droit pour nous plonger dans une fournaise de glaives.
Je m'inquiète aussi du climat politique qui prévaut dans la Capitale Nationale.
J'ai vécu quatre ans à Québec. Je sais bien que cette ville n'est pas constituée que d'imbéciles racistes et xénophobes. Par contre, tout un chacun ressent bien un malaise grandissant avec ces flots de haine qui se déversent sur les ondes hertziennes de la capitale. L'insulte est l'arme des simples d'esprit. C'est l'arme utilisée jour après jour par des animateurs bas de gamme qui multiplient leurs attaques contre les féministes, les musulmans, les homosexuels, les transgenres, les syndicalistes, les artistes et les intellectuels.
Il serait approprié de savoir qui financent ces stations de radio.
Il serait utile de songer à appliquer les articles du Code criminel qui sanctionnent les discours haineux avant que de s'enfoncer toujours plus dans la bêtise.
Pour le moment, je le répète: je suis musulman.
Je suis musulman, en effet, et je prie à la mémoire des victimes de ces meurtres racistes pour que cela ne se reproduise plus jamais.
Je suis horrifié par cet attentat raciste et je condamne tous les racismes , je suis pour la fraternité humaine sans frontières , je suis pour le mysticisme - qui n ' est pas contradictoire avec le matérialisme - mais je ne peux pas dire que je suis musulman , désolé , pas plus que je ne pourrais dire que je suis catholique malgré mon admiration certaine pour un certain Jésus - Je suis avec Charlie malgré tous ses excès, qui critique toutes les religions et leurs abus - et l ' Islam n ' en est pas exempt dont je connais assez toutes les horreurs - que nous côtoyons quotidiennement en France - Quand des religieux sont valeureux je suis toujours de leur côté - Paix aux humains de bonne volonté !
RépondreEffacer@Monde Indien: Je me permets de le dire comme Gandhi l'aurait dit pour les mêmes raisons. Six musulmans sont morts à cause d'un fou qui est fan de Marine Le Pen et Donald Trump...
RépondreEffacerJe condamne moi aussi cet attentat - je suis contre la peine de mort - je suis certains qu ' il y a m^me de bons musulmans ( rares , peut-être ) comme il y a certainement de bons catholiques - Mais je ne peux passer sous silence les horreurs perpétrées par nombre de musulmans arriérés - Je ne connais pas le bouquin , mais d ' après des citations de certains passages que j ' ai pu lire le coran mériterait certainement une bonne exégèse - la bible et les évangiles ont aussi des passages complètement débiles - voilà , c ' est tout - amicalement - encore désolé pour cette horreur commise dans votre beau pays - ( merci pour ces extraits du journal du meurtrier que tu relayes et qui montre bien l ' abjection de ce genre d ' individus )
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