mercredi 15 février 2012

Il jouait de l'harmonica à cinq heures du matin dans le quartier Saint-Roch

Je joue de l'harmonica. Pas trop mal. Enfin, je crois. J'écoute un truc et je le reproduis presque spontanément, à quelques notes mineures près.

Mais je ne veux pas vous parler de moi, voyons. Je vous respecte beaucoup trop. Aussi, je vais vous parler d'un autre harmoniciste, anonyme celui-là. Cette anecdote va compenser mon entrée en matière narcissique. C'était pour me fondre à la mode du jour. C'est in de s'afficher un gros ego nul à chier. Surtout quand on n'a rien de substantiel à raconter.

Aussi, je vais vous raconter l'histoire de cet harmoniciste anonyme. On ajoutera ce texticule au répertoire des contes de langue françoise un jour et cela fera le plaisir de quelque amateur de langues mortes du futur.

Il jouait de l'harmonica à cinq heures du matin dans le quartier Saint-Roch (NDLA: c'est le titre)

C'était vers cinq heures le matin, un matin d'automne, sur la rue St-Roch, au coeur de la Basse-Ville de Québec.

Je m'en allais travailler, traînant mon ego de gars qui avait besoin d'un bon café. Et on s'en achetait toujours du très bon à ma job. Aussi, je m'en allais d'un pas allègre vers un travail où les jours s'écoulaient paisiblement dans une atmosphère de bonne camaraderie.

Soudain, je croise l'harmoniciste anonyme.

Il ressemble à un type qui n'a plus toute sa tête mais encore toutes ses oreilles. Il ressemble vaguement à Bourvil en deux fois plus petit et une fois plus large. Ses cheveux de paille sont éméchés et sa barbe a bien plus que trois jours. Et il souffle à pleins poumons dans son harmonica. Il souffle un air rapide et incompréhensible que je n'arrive même pas à décoder. C'est comme La chevauchée des Valkyries en trois fois soixante-dix-huit tours.

C'est l'été. Les fenêtres sont ouvertes. Et le sosie de Bourvil s'en soucie peu. Et même qu'il ajoute des paroles à son solo de ruine-babines.

-Ouaaaa! Ej'su's tout nu dans 'a rue pis j'ai p'us rrrrien! Ej'su's tout nu dans 'a rue pis j'ai p'us rrrrien! Ouep! Houba! Houba! Mama!

Je viens pour lui donner une piastre. Il s'arrête et me regarde.

-Ej'prends pas l'argent m'sieur... 'ien qu'les cigarettes...

-Je n'ai pas de cigarette...

-D'abord ej'm'en va's prendre l'argent...

L'harmoniciste anonyme a pris l'argent.

Puis il a continué sa chanson en s'accompagnant sur son harmonica, qui était probablement en clé de sol.

-Ouaaaa! Ej'su's tout nu dans 'a rue pis j'ai p'us rrrrien! Ej'su's tout nu dans 'a rue pis j'ai p'us rrrrien! Ouep! Houba! Houba! Mama!

Après coup, j'ai remarqué que le pauvre homme ne m'avait même pas mendié.

Ça s'est passé tout naturellement dans ma tête.

Pas parce que je suis si bon que ça.

Seulement parce que cet harmoniciste anonyme avait une technique infaillible pour se faire une piastre à cinq heures du matin.

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