jeudi 29 janvier 2015

Le coût de la lecture

Les bons livres sont difficiles à trouver. J'en lis parfois des tas avant que de tomber sur la perle rare. Il m'est souvent arrivé de lire des livres qui m'ennuyaient. Je me disais que l'auteur allait finir par m'émerveiller puisque tout le monde tenait des propos flatteurs à son sujet. Ou bien il m'apparaissait possible que cet auteur soit un genre de Dostoïevski, soporifique à prime abord, qui finirait par m'entraîner vers des intuitions sublimes et inégalées dans l'histoire des lettres. La plupart du temps, je m'étais claqué des centaines de pages pour rien, avec la sensation amère d'avoir confié ma tête à quelqu'un qui ne méritait pas tant d'attention.

J'ai lu Marcel Proust avec dégoût, d'une page à l'autre, au point de me claquer toute la série des romans d'À la recherche du temps perdu. Je n'avais guère le choix puisque Proust s'inscrivait dans le cadre d'un séminaire de lecture pour ma maîtrise à l'université. Chaque roman de cette longue suite fût pour moi un supplice. Je n'ai retenu qu'une seule phrase de Marcel Proust, une phrase que je vous cite de mémoire: il se peut que certains chefs-d'oeuvre aient été écrits en bâillant... Était-il nécessaire de me claquer cinq millions de pages pour ne retenir que ce trait d'esprit? 

***

Le XVIIIe siècle m'a enseigné l'amour de la langue française. Voltaire est demeuré un phare tant pour mes lectures que pour mes écrits. C'est un sommet inégalé de beauté, de style et de perfection.

Les auteurs du Siècle des Lumières sont agréables à lire. Ils suivent l'ordre logique du discours: sujet, verbe et complément. Ils ne vous entraînent pas dans des phrases lourdes et empesées, comme celles de Balzac que je n'ai jamais vraiment réussi à lire et encore moins à apprécier. Balzac? Ennui mortel! 

Je ne prétends pas être un guide dans le domaine des lettres. Pourtant je me dois de vous avouer que quatre-vingt-dix-neuf livres sur cent ne m'ont pas intéressé. J'ai dû en lire des milliers pour trouver parfois un bon livre, au bout de tant d'efforts à me torturer les méninges avec des riens.

Quelques auteurs ont trouvé grâce à mes yeux. D'autres ne méritèrent que mon mépris. Je ne suis pas parfait et je puis sans doute me tromper. Néanmoins je mentirais de vous dire que j'ai aimé lire tel ou tel auteur qui, d'habitude, épate la galerie.

Voltaire est incontournable. Hugo a des éclairs de génie. Prévert me fait rire. Steinbeck sait raconter une bonne histoire. Varlam Chalamov est bien au-delà de toute littérature. Mikhaïl Boulgakov est un réaliste féerique... Henry Miller et Charles Bukowski semblent n'avoir écrit que pour moi seul...

Je ne les nommerai pas tous. Il est certain que j'en oublie, dont quelques auteurs de la littérature québécoise pour laquelle je manque de recul et d'objectivité. Je vous dirais que j'aime VLB, Mistral et McComber que vous me diriez que je dis n'importe quoi parce que je suis aussi mal embouché qu'eux...

Cela dit, ma bibliothèque idéale tiendrait en quelques livres. Le seul livre que j'emporterais sur une île déserte serait quelque chose comme un manuel de survie. Au pire, je passerais mon temps à récrire les aventures de Don Quichote. La littérature ne nourrit pas toujours son homme et ne nous sauve pas de tout, n'en déplaise à ceux qui pourraient m'en vouloir d'écrire cela.

***

Je viens de terminer la lecture de Récits d'un jeune médecin de Mikhaïl Boulgakov. Ces récits me rappellent que ma bibliothèque idéale contiendrait au moins 70% d'auteurs russes. Pourquoi? Parce qu'ils ne m'ennuient pas. Parce qu'ils ont une âme, forte et authentique. Boulgakov, à l'instar du docteur Tchekhov, m'entraîne dans des replis insoupçonnés de la psychologie. Rien de ce qu'ils écrivent n'est anodin. Il y a toujours beaucoup de chair autour de l'os.

J'ai tenté de lire les contes du docteur Jacques Ferron. Jacques Ferron était un grand homme, j'en conviens, mais ses récits de médecin ont moins d'emprise sur moi que ceux de Mikhaïl Boulgakov ou de Anton Tchekhov.

Jacques Ferron a écrit de superbes lettres aux journaux pour défendre la cause du socialisme et de l'indépendance du Québec. Par contre ses romans et ses récits sont fades. Il a cette manie de renverser les phrases. Il commence par le complément et termine par le verbe et le sujet. Cela donne des trucs du genre "à l'école va Luc". Luc va à l'école c'est beaucoup plus simple. Suivre l'ordre logique du discours favorise la communication entre l'auteur et son lecteur. Les fioritures et exercices stylistiques finissent par tuer la littérature. Elles me donnent l'envie de balancer le livre au bout de mes bras: parle avec mon cul ma tête est malade!

Suis-je trop intransigeant? Je déteste m'emmerder. Je n'ai aucune patience avec ceux qui font des exercices de style. Qu'on en vienne au vif du sujet le plus clairement possible.

Mon blogue ne s'intitule pas Simplement pour rien, vous l'aurez deviné.

Je déteste tout ce qui est compliqué. J'accuse de paresse mentale tous ces auteurs qui s'accrochent à des expressions creuses pour nous livrer leur message. Le contenu doit primer sur le contenant. Et on aurait beau avoir le plus beau contenant du monde, s'il n'y a pas de contenu l'oeuvre ne nourrira rien ni personne. Elle sera tout juste bonne pour servir de potiche dans un musée ou une bibliothèque empoussiérée désertée par l'idéal.



1 commentaire:

  1. T ' as raison ,
    la vie est tellement simple !
    C ' est tellement simple aussi de le dire simplement ,
    comme l ' odeur de la forêt le matin , comme les chants des oiseaux avant la nuit , comme les éclats du soleil sur l ' eau des ruisseaux , comme les sourires de nos amis , nos amies , de notre femme adorée [ notre ami ? ] -
    Comme le dit mon fils le + jeune : pourquoi tant de haine ???

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