dimanche 14 janvier 2018

Plufaude et le trou à merde

Plufaude allait à l'école depuis qu'il avait miraculeusement trouvé le moyen d'avoir accès au savoir via une tablette qu'un cousin du Québec lui avait donnée. Il lui avait expliqué comment se brancher gratuitement sur le WiFi via certains points de service de Port-au-Prince. Puis il lui avait laissé un chargeur solaire pour qu'il puisse donner du jus à sa tablette.

Plufaude avait quitté l'école le 12 janvier 2010. Ses parents avaient aussi quitté ce monde le même jour. En fait, la perle des Antilles avait été détruite ce jour-là par un tremblement de terre qui fit plus de 100 000 morts ainsi qu'une multitude de blessés et de sans-abris.

Quoi qu'il en soit, Plufaude avait traversé l'enfer au cours des sept dernières années. Tant et si bien qu'il ne savait plus par où commencer pour vous raconter son parcours. Il savait d'instinct que les gens autour de lui seraient passés à autre chose. Tout le monde était en mode survie.

Plufaude est passé par les camps de réfugiés puis a vécu de trois fois rien avec les dix fois rien qu'il trouvait ici et là.

Depuis qu'il avait sa tablette, Plufaude s'était cependant mis en tête de s'instruire.

Il n'allait pas utiliser sa tablette que pour jouer à des jeux en ligne et échanger des photos de petits chats.

Plufaude fit ses classes avec sa tablette. Il apprit d'abord le français de A à Z. Il faisait encore quelques fautes mais son niveau d'écriture était déjà supérieur en finesse et en justesse à celui de la majorité de nos étudiants de niveau collégial au Québec. Puis il se mit à utiliser sa tablette pour faire des affaires. Pour financer ses études en quelque sorte. Ce serait long de tout vous détailler ça.

Quoi qu'il en soit, Plufaude était en train de se tirer de ses malheurs.

Puis vint le 12 janvier 2018.

Le Père Ubu qui habite la Maison Blanche désigna son pays de trou de merde.

C'était les voeux du président des États-Unis aux victimes du tremblement de terre de 2010.

Il prit soin quelques semaines auparavant de se débarrasser des réfugiés haïtiens jusqu'alors protégés par Obama pour pouvoir mieux se défouler sur Haïti.

Plufaude ne fût pas très heureux d'apprendre que le président des États-Unis disait de telles sottises et indignités.

Ça lui fit un peu mal à l'âme de constater que Babylone gouvernait encore le monde.

Puis il prit son cellulaire et parla à son cousin Charles, lequel demeurait à Montréal.

La conversation eut lieu en créole. Charles le parlait mal mais il s'y tentait tout de même.

Il apprit que Plufaude avait été accepté à la faculté de médecine de l'Université Laval suite à toutes sortes de démarches difficiles à vous expliquer ici sans abuser de votre patience.

Et il promit à son cousin Charles qu'un jour les trous du cul comme Donald Trump ainsi que tous les médiocres politiciens corrompus d'Ayiti n'auraient plus aucune influence sur le sort du monde.