Céréale Caouette était une bonne femme. Ou bien une femme
bonne si vous préférez. Ce n’est jamais évident de jouer avec les mots.
En tout cas elle était gentille, Céréale.
Elle s’appelait Céréale parce que ses parents étaient
particuliers. Ils étaient du genre à se promener avec des fleurs dans les
cheveux. Et Céréale, ils trouvaient ça nourrissant.
Céréale adopta un surnom pour contrecarrer l’effet loufoque
de son prénom. Elle se fit surnommer Wa. Wa comme dans Oua. Wa comme pourquoi
pas. Je ne pourrais même pas vous dire d’où venait ce Wa. Mais il était clair
que Céréale Caouette n’était maintenant connue que sous ces deux lettres :
Wa.
Wa était une bonne femme. Ou bien une femme bonne si vous
préférez. Et n'était pas bonne en-soi mais plutôt bonne dans la soie. Elle faisait de la couture à vil prix. Travail, chômage et aide sociale. Puis le cycle reprenait. Inlassablement. Toujours naufragée du capitalisme sauvage et sans espoir de s'en sortir.
Et elle faisait son bonhomme de chemin dans la vie.
Le seul hic c’est qu’elle n’avait jamais d’argent même lorsqu'elle travaillait. Comme c’est
le cas de la majorité des gens en ce monde. Il ne suffit pourtant que de tomber
dans un voisinage où tout n’existe que par et pour l’argent pour se sentir
subitement diminué, sinon humilié.
Wa se sentait toujours mal de n’avoir jamais rien.
Et on la faisait sentir mal parce qu’elle n’avait rien.
À part de ça, elle était gentille, faisait sa bonne femme de
chemin même si elle n’avait pas un rond.
«Pourquoi tout ce qui compte c’est l’argent?» demandait-elle
naïvement à tout un chacun.
«Qu’est-cé tu veux qu’on fèze?» lui répondait-on en se
frottant le nez.
Céréale Caouette, alias Wa, n’était pas riche.
Elle avait donc tort sur toute la ligne.
Des gens qui n’ont rien, comme ça, si on se met à leur
prêter attention on pourrait finir par oublier de faire encore plus d’argent.
Ce n'était, bien sûr, qu'un vulgaire exercice d'anthropologie.
Oubliez ça.
La vie des vedettes est tellement plus palpitante...