Qui veut faire l'ange fait souvent la bête. C'est une formule qui vient de Pascal.
Cela vaut aussi pour les anges exterminateurs. Surtout pour ces derniers. Pour tous ceux qui rêvent de plonger le monde dans une fournaise pour servir je ne sais trop quelles lubies, quels massacres.
Sitting Bull ne faisait pas l'ange. Il priait le Grand Esprit et célébrait le culte de ses ancêtres dans une danse des Esprits qui résonnait dans les Prairies. Ça faisait trembler les Visages Pâles d'entendre les chants des Sioux. On les a bien sûr exterminés. À Wounded Knee entre autres. Et partout ailleurs ensuite. Jusqu'à ce que les Sioux soient parqués dans des réserves, dépouillés de tout, ruinés, punis...
On oublie que le mépris de la religion des Sioux a été déterminant pour susciter l'approbation des massacres par les «philanthropes» de la Maison Blanche. On détestait la religion du Sioux, religion satanique, démoniaque et barbare. On préférait la vraie religion. Celle du Christ conjuguée à celle du Veau d'Or.
On n'a qu'à lire les Relations des Jésuites pour prendre conscience du mépris que les Robes Noires ont pu avoir envers les moeurs de leurs hôtes. Un mépris à la mesure d'une relation qui n'est jamais partie sur de bonnes bases avec les humains de l'Île de la Tortue. Le Sauvage pue. Le Sauvage est adultère. Le Sauvage n'a que des chants sataniques. La religion du Sauvage est fausse. Par contre, ils font du bon sirop d'érable...
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On a décrit la période des années '60 comme celle de la décolonisation.
Des tas de pays déclarèrent leur indépendance en Afrique et en Asie.
Pourtant, il me semble que cette décolonisation, loin d'être terminée, est encore plus forte aujourd'hui.
Elle nous pousse à remettre en question nos préjugés sociaux, culturels et économiques.
D'autant plus que le monde a rapetissé.
Quelques heures d'avion nous séparent de l'autre côté du globe.
Même pas une micro seconde par l'Internet.
La décolonisation se poursuit par d'autres voies.
L'histoire, telle qu'on l'avait connue, n'est déjà plus.
Le doute s'est installé.
Le temps fera son oeuvre.
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Un de mes amis Bosniaques aime Geronimo. Il se reconnaît dans ce héros qui a combattu pour que son peuple ne soit pas réduit en poussière par les colons américains.
Je connais aussi des Palestiniens qui apprécient Geronimo.
Et je dirais que moi-même, lorsque j'étais jeune, je préférais toujours jouer le rôle de Geronimo ou Crazy Horse quand d'autres voulaient jouer au Général Custer. Une fierté inconsciente d'être un Sauvage. De ne pas se plier devant le Veau d'Or. De combattre pour sa tribu. Pour la rue Cloutier. Pour les travailleurs floués de l'usine de textile Wabasso. Pour les gars de la Reynold's Aluminium où travaillait mon père. Pour les préposées aux bénéficiaires des foyers et les couturières, comme le fût ma mère. Pour tous ceux et celles qui n'ont pas le sourire aux lèvres quand on leur parle des succès de la Bourse et des miracles de l'économie de marché.
Nous sommes tous traités comme des Sioux.
Nos religions dérangent.
Nos idées dérangent.
Nos existences dérangent.
On voudrait nous faire tous plier l'échine.
Tous comprendre qu'en-dehors de l'argent il n'y a rien.
Soumettons-nous tous au nouveau dieu, Moloch infâme qui réclame ses bûchers et son lot incommensurable de sacrifices humains!
Et pourtant...
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Et pourtant, un autre monde est possible.
Un monde qui ne repose pas sur ce qu'il y a de plus laid en l'homme.
Ce monde-là, je sais qu'il existe.
J'y vis. Il est bien réel. Ce n'est pas une utopie. Ce n'est pas du pelletage de nuages.
Il y a de la bonté en ce monde.
Il y a du bon monde.
Et ils ne pensent pas tous comme moi.
Et je ne leur demande pas de s'habiller comme moi.
Je demande seulement le respect des uns et des autres.
Respect pour le dieu des autres, même si je n'y crois pas.
Un respect qui ne fait pas abstraction des droits civiques et constitutionnels de tout un chacun. Surtout des marginaux.
La majorité a un devoir moral de protéger les minorités.
Ça s'appelle de la solidarité.
Et c'est vraiment post-colonialiste comme pensée et surtout comme geste...
Je ne peux pas être totalement heureux si mes frères et soeurs souffrent en ce monde.
Traitez-moi de brute hypersensible si vous voulez.
Vous ne trouverez rien en moi pour justifier les pogromes, les razzias et les guerres.
Nous sommes tous des Sioux.
Nous sommes tous des Juifs.
Nous sommes tous des Musulmans.
Nous sommes tous des Québécois.
Et puisque nous sommes dans la ligne de mire des crapules qui asservissent ce monde, il serait utile de nous entendre pour ne plus leur obéir.
Cela se fera, j'en ai la ferme conviction.
Mais je ne sais pas quand.
Kitché Manitou, alias le Grand Esprit, en décidera.