vendredi 12 décembre 2008

AU RESTO CHEZ TI-BEN




















Je me suis remis à mes pinceaux une fois de plus pour peindre mon ami Ti-Ben, un cuisinier populaire qui accueille toute une faune hétéroclite dans son logement adapté du quartier Ste-Cécile. Adapté à la chaise roulante de Ti-Ben qui a survécu à une chute d'un sixième étage en y laissant une jambe et quelques autres os ici et là. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir l'air bien plus en forme que bien des geignards autour de nous. Il ne se plaint jamais. Pourquoi? Parce qu'il ne s'ennuie jamais.

Il règne chez Ti-Ben une atmosphère permanente de cour des miracles et j'y vais régulièrement pour prendre les nouvelles et piquer au passage quelques récits truculents. On se croirait presque dans un conte russe chez Ti-Ben.

-Un comte russe? Certainement, de dire Ti-Ben. Je m'appelle Igor Lapoffe, pour vous servir. Mou-ha-ha-ha!

C'est que Ti-Ben est un sacré conteur. L'une n'attend pas l'autre, comme on dit, et vous ne sauriez deviner à quel point je tiens en haute estime l'art de bien raconter une histoire. C'est mon côté barde, que voulez-vous. Et chez Ti-Ben, c'est toujours du dix pour un par histoire, chacune s'imbriquant dans une autre pour se terminer en chef d'oeuvre de littérature orale. Quand t'es en panne d'inspiration, tu vas chez Ti-Ben et tu lui piques des histoires, il en a tellement qu'il ne s'en rendra même pas compte.

Ti-Ben aura bientôt cinquante-neuf ans. C'est un vieux freak des années '70, un Hellzhaimer, comme il dit, bref un «vieux motard que jamais». Son chanteur préféré? Ben voyons, c'est Neil Young. Son guitariste préféré? Steve Hill bien sûr. Et si l'un ou l'autre passe dans le coin, sûr que Ti-Ben vous en parlera en vous obligeant à acheter un billet sous peine de vie ou de mort. Ce qui en fait un agent aux communications inestimable pour tout artiste digne de ce nom. Croyez bien que j'en profite. Le tableau reproduit ci-dessus, une toile de format 2 pieds par 3 pieds, sera exposé chez Ti-Ben et tous ses invités se sentiront bientôt obligés de m'acheter des tableaux.

-N'est-ce pas que j'suis rusé mon Ti-Ben?

-Attends ti-peu! qu'il me répondra. Je réclame 0,1% de 1% sur toute vente effectuée sans mon consentement légitime! Et pour le vernissage de cette oeuvre, j'organise un grand dîner au spaghetti samedi prochain! J'va's faire une grosse batche de sauce pour tout l'monde, même pour ceux qui sont pas du monde! Mes p'tits oiseaux qui ont faim mérite de faire bombance! Alléluia! Jésus est bon!

Et là, il foutra du Neil Young dans son système de son et sortira sa bouteille de brandy pour faire un petit café amélioré. Et puis il racontera une histoire, comme d'habitude.

-J't'ai-tu conté l'histoire du vieux bonhomme qui avait une terre à St-Éleuthère, près de Rivière-du-Loup, pis qu'i' faisait semblant d'la vendre pour r'cevoir d'la visite, juste parce qu'i' s'ennuyait?

-Hee... Non, tu n'me l'as pas contée...

-Ah... Pis celle d'la guitare à douze cordes à six cordes de Luc Sinotte?

-Hein?

-Attends ti-peu. On va d'abord verser du brandy dans l'café. Ça va éclaircir les idées, rincer le coeur pis en plus c'est compris dans l'forfait!

-Keep on rockin' in a free world...

-Yeah!

4 commentaires:

  1. Aaahhhh, ça fait du bien à entendre ça!

    "...Pis celle d'la guitare à douze cordes à six cordes de Luc Sinotte?..."

    Luc Sinotte, je l'ai seulement catchée celle-là quand j'ai relu ton billet à ma blonde...ouain! je l'sais, pas vite-vite le gars! Mais yé d'bonheur, pis le taux de sang dans mon café est encore un peu bas.

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  2. C'est vraiment très beau ta toile, j'aime beaucoup...

    Vous devez être drôle à voir, Ti-Ben et toi... Deux raconteurs nés! Ça doit faire des dîners spaghetti pas mal endiablés, full nouilles !

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  3. Saint-Éleuthère ? Crisse, j'ai de la famille là, moé.

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  4. Un jour, Misko, j'la raconterai l'histoire de Luc Sinotte. Ça va dépendre de Ti-Ben qui ne s'est pas encore rendu au fin fond de cette histoire.

    Juste pour te donner un aperçu, Magenta, il me parlait aujourd'hui même d'un gars qui était resté collé avec une cerise de police sur la tête qu'on lui a enlevée à l'urgence de l'hôpital Ste-Marie... Je lui pardonne de charrier quand ce n'est pas banal.

    Le vieil homme serait-il un des membres de ta famille, É.? Il a un truc infaillible pour recevoir de la visite, faut l'avouer...

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