Raconter des histoires ne se fait pas sans difficultés. La première est sans doute d'avoir à les vivre avant que de les écrire. À moins que vous ne soyez très inventif. Ce n'est pas ma chance. Je n'invente rien. Les aventures viennent à moi sans que je ne veuille les vivre. J'ai été, suis et serai toujours l'aventurier malgré moi. Parce qu'il y a en nous tous quelque chose du Hobbit, une créature qui se cache dans son coin perdu, loin de tout souci, avec suffisamment de conserves pour passer l'hiver.
Je suis comme vous, moi. Exactement comme vous
Cette entrée en matière devrait me permettre d'aborder mon sujet.
Or, je n'ai aucun sujet.
Je croyais qu'il viendrait de lui-même à force de parler d'aventures...
Zut... Flûte... Chapeau pointu...
...
...
Tiens. J'en ai une, d'aventure. Cela me revient.
Cela s'est passé pas plus tard que ce matin.
Je suis allé prendre un café au Caféier. C'est près du fleuve, au centre-ville de Trois-Rivières. C'est charmant. Les plafonds ont trente pieds de hauteur. On n'y étouffe jamais. Ils vendent du bon café.
Il n'y avait personne. Ou presque.
La propriétaire. Avec un employé ou un co-proprio. Tous deux fort sympathiques et avenants.
Mon café americano était aussi bon que d'habitude.
Tant qu'à passer voir le fleuve, je m'arrête là, comme un petit vieux, puis je reprends ma route.
Il n'y avait pas plus de badauds ce matin au centre-ville.
Je ne sais pas pourquoi. La semaine de relâche? Tous les étudiants ont foutu le camp?
Peut-être ceci ou cela.
J'ai marché sur la rue des Forges et je n'y ai vu aucun itinérant. Pas âme qui vive à vrai dire. Hormis le Lonely Rapper, un type qui déambule soir et matin dans les rues du centre-ville en écoutant du hip hop français à plein tube sur un haut parleur qu'il porte sur lui-même. Nous n'allions pas dans la même direction. Je l'ai laissé poursuivre son chemin tonitruant et solitaire comme les deux mille autres fois où je l'ai croisé... (Il y aurait matière à vous raconter des histoires mais je la laisse encore maturer...)
Mes amis les vagabonds semblaient faire relâche.
Il n'y avait donc pas lieu de vivre des aventures. De tomber sur une discussion. Ou bien sur un type déguisé en Charlie Chaplin sur les effets de quelque chose de puissant... Comme ce gars que j'ai croisé l'an passé, celui qui montait dans les poteaux en criant au gens «Le Manitoba ne répond plus!» Il m'avait demandé ensuite s'il pouvait faire un bout de promenade à mes côtés... Why not? Le trottoir appartient à tout le monde bonhomme.
Franchement, il n'y avait rien ni personne aujourd'hui sur mon passage.
Rien à dire.
Rien à écrire.
Rien.
Alors, je suis rentré.
J'avais un peu mal dans le dos. Je travaille physique parfois.
Vous parlez de ma job c'est toujours un peu délicat.
Je vis plein de trucs dans mon métier, comme si j'étais sur un champ de bataille rempli de blessés...
Mais bon, vous vous lasseriez de m'entendre vous parler de maladies et de morts.
Alors j'ai pris un bon café.
Voilà.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire