«Il y avait donc dans une chancellerie un homme, un employé qui, je ne puis le cacher, était d’un extérieur assez insignifiant. De petite taille, il avait le visage quelque peu grêlé, les cheveux quelque peu rouges, le crâne passablement chauve, les tempes et les joues sillonnées de rides, sans compter les autres imperfections. Tel était le portrait de notre héros, comme l’avait fait le climat de Saint-Pétersbourg.»
Nicolas Gogol, Le manteau
Le manteau de Jocelyn était devenu gris, sale et élimé. Il n'était pas particulièrement coquet mais là il avait l'impression de s'enfoncer dans la dèche. Tout son linge était troué. Et ses espadrilles aussi. Ce gars dans la quarantaine grisonnante avait la sale impression de ne plus être de la partie pour se trouver un emploi ou bien une blonde avec ses vieilles nippes dégueulasses. De petite taille, il avait une face d'ananas, les cheveux effilochés, la boîte à poux dégarnie, l'air imparfait. Ce n'était pas un héros et il vivait sous un climat trop chaud, trop froid, bref trop humide.
Un miracle survint comme il en survient rarement.
Jocelyn s'était trouvé un job sous-payé pour une compagnie de livraisons des produits Woufwouf. C'était de la bouffe pour chiens distribuée sur un large territoire qui s'étend de l'Estrie jusqu'au fin fond de la Minganie. Il livrait avec un petit camion-cube. Et, comble de bonheur, il avait droit à un tee-shirt Woufwouf, une calotte Woufwouf et un manteau Woufwouf. Il était équipé de la tête aux pieds par Woufwouf.
Du coup, sa vie s'améliora.
Jocelyn eut l'air moins pauvre.
On voyait que c'était un gars sérieux. Un gars à qui l'on confie un volant et un bel uniforme. Ce qui l'aidait à mieux se sentir en confiance.
Il avait l'air propre avec son uniforme Woufwouf.
Il en avait même un pour toutes les saisons. C'était tout simplement génial.
Puis, le malheur revint.
Jocelyn perdit son emploi en raison d'une restructuration des produits Woufwouf.
On lui reprit le manteau Woufwouf mais on lui laissa le tee-shirt puisqu'il avait un peu trop pué dedans.
Jocelyn retrouva son vieux manteau élimé et sale.
Il attendit son chômage.
Il fouilla dans les bacs bleus pour trouver des contenants consignés.
Ça payait ses cigarettes.
Et son baloney.
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