samedi 4 juin 2016

La beauté sauvera le monde (Dostoïevski)

"La beauté sauvera le monde", écrivait Dostoïevski dans son roman L'idiot.

On m'objectera sûrement que Dostoïevski était un conservateur, un ancien révolutionnaire qui se moquait de ses anciens camarades.

Charles Dickens aussi était conservateur et, malgré cela, il a mieux dénoncé la pauvreté et la misère auxquelles faisaient face ses compatriotes que bien des réformateurs sociaux de salon.

C'est que Dostoïevski, tout comme Dickens, se méfiaient des fanatiques.

Dans Crime et châtiment, Dostoïevski met en scène un idéaliste du nom de Raskolnikov qui souhaite lui aussi entreprendre de grandes rénovations sociales. Dans sa folie, il se dit que si Napoléon n'hésitait pas à faire mourir des milliers d'hommes sur un champ de bataille il ne devait pas hésiter, lui-même, à tuer une vieille dame pour lui voler quelques kopecks.

Raskolnikov la tue et, tout au long du roman, il éprouve son châtiment sous la forme de la mauvaise conscience.

Dostoïevski n'était pas parfait et c'est pourquoi son étude de l'âme humaine touche parfois à la perfection. Tous les personnages de ses romans, les bons comme les mauvais, sont représentatifs d'une partie de lui-même. Il aura été un fanatique, un joueur compulsif, un pêcheur, un vaurien, mais aussi un homme bon, un humaniste et un rêveur.

Quand je jette un regard sur mon monde, je ne peux souvent que constater la profonde originalité du regard qu'il portait sur l'humanité.

Dostoïevski avait la foi. Je ne l'ai pas. Pourtant, en passant par-dessus cette marotte, je ne peux que me sentir en parenté d'esprit avec ce publicain converti en prophète du désert intellectuel de notre temps.

Il y a des tas de Raskolnikov autour de nous qui n'éprouveront jamais de mauvaise conscience pour ces crimes qu'ils croient commettre pour le bien commun.

Et, fort heureusement, il se trouvera aussi dans le monde quelques docteurs Jivago pour réparer ces vies que l'on aura brisés.

J'ai un parti pris évident pour ceux qui soignent les gens au lieu de les blesser.

J'ai un parti pris pour les Walt Whitman qui sont infirmiers à la guerre et poète le reste du temps.

Et, oui, j'entretiens l'innocence de croire que la beauté sauvera le monde.

Cette innocence que m'a inculqué feu Alexis Klimov, mon professeur de philosophie, lui-même grand spécialiste de l'oeuvre de Dostoïevski.




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