L'âge d'or du cinéma muet s'est étendu sur une période d'à peine vingt ans. Ses liens organiques avec le théâtre étaient encore manifestes. Les acteurs du muet avaient un jeu affecté. C'était en partie pour pallier à la contrainte imposée par le cinéma muet. C'était aussi dans la droite lignée du jeu théâtral.
On entend encore les vieux dire qu'ils sont allés au "théâtre" lorsqu'ils vont au cinéma. Et ce n'est pas pour rien.
Évidemment, le cinéma muet n'était pas sans sonorités pour autant. On engagea des pianistes, puis des organistes, afin d'accompagner les images. Des orgues qui se sont achetés par milliers pour meubler les salles du septième art à ses touts débuts, lesquels sont tombés en désuétude avec l'arrivée du cinéma parlant.
Aller au cinéma, dans les années vingt, c'était un peu comme se rendre à la messe. Il y avait non seulement l'orgue, mais aussi les dorures, les colonnades, les plafonds voûtés, les lustres. Ce charme s'est rompu au fil des ans. Les salles de cinéma sont devenues sobres, carrées, et même un brin austères.
Hier, je suis allé au Cinéma Le Tapis Rouge pour assister à une séance toute particulière de visionnement et d'écoute.
L'organiste Claude Beaudoin, de Pro-Organo Mauricie, nous a offert une séance d'improvisation à couper le souffle en accompagnant le film Nosferatu de Murnau comme cela se faisait à la Belle Époque. La salle était pleine à craquer pour ce retour dans le passé. Claude Beaudoin jouait sur un orgue virtuel qui reproduisait les sonorités des plus grands orgues spécialement conçus pour les grandes salles de cinéma. Quoi de mieux que ce chef-d'oeuvre des films de vampires pour nous plonger dans une ambiance à la fois occulte et magique. Et quel défi pour l'organiste de suivre les images sans oublier ses doigts qui glissèrent sur les claviers pendant plus de quatre-vingt-dix minutes...
Les organisateurs de l'événement disent que l'événement était inédit. Je les crois. Et je souhaiterais que l'expérience soit renouvelée pour la plus grande félicité de ceux qui n'ont pas eu la chance d'y assister.
Combien de chefs-d'oeuvre du muet mériteraient pareil traitement royal!
Combien de gens, fatigués par la modernité et les scénarios souvent répétitifs du cinéma actuel, trouveraient une raison d'élargir leur esprit et de goûter à ces trésors oubliés de l'histoire du cinéma?
J'imagine tant de films muets accompagnés à l'orgue! Tiens, on pourrait piger un film dans cette liste-ci.
On pourrait croire que la nostalgie n'est pas vendeuse.
Et pourtant, j'ai vu le contraire hier, à la grande surprise des organisateurs de l'événement comme j'ai pu moi-même l'entendre subrepticement.
J'ai la conviction qu'il y aurait salle comble, non seulement pour du cinéma muet accompagné par un organiste improvisant, mais aussi pour du cinéma de répertoire n'ayant pas été porté au grand écran depuis des lustres. La salle serait pleine pour The Good, the Bad and the Ugly. Idem pour un film comme 2001, A Space Odyssey. Toute une génération, la mienne plus particulièrement, ne demanderait pas mieux que de revivre sur grand écran une partie de leurs plus beaux souvenirs de cinéphiles.
Cela dit, je lève mon chapeau au plus qu'excellent organiste Claude Beaudoin et à l'association Pro-Organa Mauricie de nous avoir fait vivre de si beaux moments.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire