mardi 24 mai 2016

Bravo les autodidactes!

Je vais encore prêcher pour ma paroisse. Enfin, pas tout à fait puisque j'ai obtenu quelques diplômes à force de perdre mon temps. Je me sens pourtant autodidacte de corps et d'esprit.

Vous aurez compris que j'aborderai le thème de l'autodidactie au cours des prochaines lignes.

Tout ce que j'admire dans la vie se tient dans la marge. J'ai peut-être trop dessiné dans les marges de mes cahiers d'écolier à force de m'ennuyer dans des cours magistraux soporifiques.

Louis Armstrong était un autodidacte de la trompette. Il n'a jamais su lire la musique. Il pouvait reproduire tout ce qu'il entendait avec son instrument. Il a inventé de nouvelles sonorités qu'aurait sans doute reniées un chef d'orchestre englué dans une vieille pratique s'apparentant à un tic nerveux.

Jack London fût le plus grand écrivain de son temps et, le plus drôle dans tout ça, c'est qu'il n'a jamais étudié en littérature. Il a fréquenté assidûment les bibliothèques, a travaillé à la dure dans toutes sortes de métiers, puis a couché sur le papier ses récits devenus légendaires. Des tas d'écrivaillons diplômés ne lui arrivent pas à la cheville et ne réussissent qu'à fabriquer des discours inutiles, pour paraphraser l'écrivain René Daumal. Ils ne peuvent que se lire et se complimenter entre eux.

Un certain Christian Mistral, plus près de nous, n'est jamais allé à l'université et démontre une meilleure maîtrise de sa plume que bien des tâcherons bardés tout autant de diplômes qu'enveloppés d'ennui.

Les frères Wright étaient des réparateurs de bicyclettes. Plusieurs physiciens de leur temps avaient conclu qu'il était impossible à un engin plus lourd que l'air de s'envoler de sa propre force. Ils croyaient que le ballon chargé d'un gaz plus léger que l'air était la seule manière de s'élever vers les nuages. Les frères Wright, purs autodidactes, leur firent ravaler leur râtelier. À peine quelques décennies plus tard l'homme marchait sur la Lune.

Albert Einstein était un obscur employé de l'Office des brevets de Berne. Il s'est forgé une carrière de physicien en parfait autodidacte. Il lui était impossible de se conformer aux singeries académiques. L'école lui pesait sur l'esprit comme une prison. On lui doit des avancées phénoménales dans la physique moderne. Notre compréhension de l'univers connu et inconnu s'est accrue sous l'influence d'un drop-out...

Steve Hill, un virtuose de la guitare que j'ai le bonheur de connaître un tant soit peu, se faisait reprocher par ses professeurs de musique du Cégep de ne pas faire ses accords barrés comme il se doit. Il les fait encore de la même manière et gagne sa vie mieux que tous ceux qui se sont laissés décourager par ces pédants pontifiant sur l'art de tenir une guitare.

Des exemples semblables, j'en ai des milliers, dans presque tous les domaines.

Des écrivains, des peintres, des inventeurs, des traducteurs, des musiciens, des cuisiniers, alouette!

Et maintenant, voici la question qui tue: est-ce que l'école est un frein au développement du génie?

Sans aucun doute. Et comme le génie est rare, on n'aura certes pas fini de s'intéresser aux apparences plutôt qu'aux fondements de la sapience. À vrai dire, le savoir importe peu. C'est même un obstacle pour faire partie d'une institution. On veut un outil, pas une nouvelle façon de faire. On veut du silex pour faire du feu, pas un briquet...

Quand on me dit le mot école, je pense invariablement au Magicien d'Oz.

Il y a souvent de la sagesse dans les contes d'enfants et le Magicien d'Oz nous démontre qu'il ne suffit que de remettre un diplôme à un épouvantail pour qu'il se sente tout de suite investi de savoir.

On reprochera aux autodidactes de manquer de méthode et de n'accorder aucune importance aux écrans de fumée.

On leur reprochera de ne pas connaître le solfège ou bien la quadrature du cercle.

Par contre, on continuera de juger l'arbre à ses fruits.

Les fruits seront bien plus mûrs et bien plus juteux dans l'arbre de ceux qui plongent leurs racines dans des terres profondes et jamais fréquentées.

Ils seront petits et secs dans les arbres rachitiques des grands salons de ces courtisans qui ne font qu'ânonner leur petit catéchisme de diplômés sans génie.

8 commentaires:

  1. Merci pour ce texte très important !
    Tout ce qui nous est donné , nous est donné -
    Nous l ' acceptons , ou pas -
    Il n ' y a aucun affront dans ça -
    Ni a proposer ( au contraire ) ni a refuser ( au contraire ! ) -
    Tout ce qui tente de nous imposer est inacceptable -
    C ' est toute la question de l ' éducation -
    Avons-nous le droit d ' imposer quelque chose aux petits ?
    A-priori non -
    Mais tous ces beaux petit-e-s sont si souvent tellement ignorants et inexpérimentés !
    Pour finir, Picasso disait qu ' après avoir appris , il nous fait désapprendre ...

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  2. @monde indien: Je n'ai rien contre l'éducation. Rien contre les enseignants. Rien contre ceux qui transmettent le savoir. J'en ai contre l'institution qui finit par produire des kapos qui ne jurent que par les règlements et nuisent au développement de l'intelligence.

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  3. J'ai quitté l'école à seize ans, après le secondaire, pour me lancer dans toutes sortes de projets farfelus, dont celui d'écrire : le seul qui persiste toujours. J'ai dû m'inscrire, guidé par mon instinct social, comme un plat et impeccable idiot, au cégep et à l'université une dizaine de fois ensuite : chaque fois pour m'en désinscrire avant que ça commence, ou après avoir assisté à un seul cours ; m'enfuyant ainsi à toutes jambes comme si on avait essayé de mettre une tarentule dans mon caleçon. Une seule fois j'ai enduré le coup, comme étudiant libre, à l'université. Une expérience traumatique. Au début, j'étais enthousiaste. J'étais assis à l'avant, comme un élève modèle. Lorsque j'ai constaté à quel point c'était lent et linéaire, j'ai cessé d'aller aux cours. Ou j'écrivais des poèmes dans le fond de la classe. J'ai d'ailleurs trouvé le moyen d'échouer le cours que je trouvais le plus passionnant ! Ce qu'il y a de trop, à l'école, ce sont les cours, justement. Les enseignants devraient être de simples ressources à consulter au besoin. On étudie dans son coin. On se présente au moment dit aux examens. On me dirait : il existe la TELUQ. Même ça, c'est trop carré à mes yeux. Et malgré tout, phénomène récent et incompréhensible, je me suis laissé empoisonner par toutes ces personnes qui font l'apologie d'une vie propre, parfaite, d'un destin hyper-scolarisé. Je me suis laissé conditionner, on dirait ; pourtant, mon esprit me murmure que l'autodidactisme, y a que ça de vrai ! Or, te voir détruire ces futiles toiles d'araignée en y lançant une brique, ça fait du bien !

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  4. J'abonde dans ton sens. :)

    Les universités sont vraiment de la merde aujourd'hui, ainsi que les diplômes qu'elles décernent. C'est littéralement une perte de temps et d'argent qu'aller à l'université. Il est plus profitable de sucer des queues, et ensuite de monter l'échelle de cette façon, et ensuite d'aller chercher un papier pendant qu'on est là pour prouver qu'on est compétent.

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  5. Moi aussi je suis révolté contre l ' institution de l ' éducation nationale et sa production de kapos -
    Je voulais juste pointer que dans notre responsabilité d ' adultes par rapport aux petits , ils font souvent n ' importe quoi qui peut leur être dangereux , que dans ce cas nous n ' avons pas d ' autre choix que de leur imposer un peu ( sans excès ) d " obéissance " - Il ne s ' agit pas de les formater , juste de les protéger de leurs propres conneries - légitimes - d ' enfants .
    Parfois on appelle ça l " autorité " -
    On dit : " faire autorité " : cela veut-dire , avoir un peu de savoir -
    .../...

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  6. @Guillaume Lajeunesse: Tu es l'exemple même des gens que j'admire pour leur volonté d'apprendre par eux-mêmes pour mieux se surpasser.

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  7. @Eremita: Pour monter l'échelle sociale, pas besoin de sucer des queues: seulement avoir la langue bien brune...

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  8. @monde indien: Il est plus facile pour un adulte de baisser les bras face à un enfant que de s'épuiser à lui dire comment faire... Il y a l'école, puis il y a la vie. La vie est dure. L'école devrait être douce... On devrait aimer y aller pour se stimuler l'esprit et permettre aux plus brillants de ne pas avoir à subir des cours magistraux soporifiques qui n'apportent rien. Une heure à la bibliothèque surpasse dix heures le cul assis sur une chaise à bayer aux corneilles.

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