Germaine ne croyait pas que l'homme était un animal. Elle avait toute une théorie à ce sujet. Une théorie fondée sur les vêtements.
-Les animaux se promènent tout nus. Les humains portent des vêtements. Il faut être une vraie bête pour penser que l'homme est un animal! Est-ce que j'ai l'air d'un animal moi?
À vrai dire, Germaine avait plutôt l'air d'une guenon mais personne n'osait vraiment lui dire puisqu'elle portait des signes religieux ostentatoires. Elle croyait à un fantôme qui pouvait marcher sur l'eau, voler dans les cieux et guérir la lèpre.
Évidemment, Germaine n'avait pas la lèpre. Elle ne ressentait pas plus le besoin de marcher sur l'eau ou bien de voler comme l'oiseau. Ce qui l'intéressait par-dessus tout, c'était de nous endoctriner avec la religion de son fantôme. Du moins en apparence.
On l'aurait cru vertueuse, sainte-nitouche et même chaste comme la neige du Pôle Nord.
Eh bien non! Aussi curieux que cela puisse paraître, Germaine était une sacrée bacchante qui avait toujours le nez fourré dans le cul d'un être humain, quel que soit son genre ou son sexe. Elle passait ses journées à rouler des pelles à des inconnus qu'elle rencontrait au hasard du temps.
Hier, sa victime était un bon monsieur qui avait toujours jusque-là su préserver sa virginité. Ce quinquagénaire bedonnait attendait à la gare lorsque Germaine sauta sur lui en lui demandant s'il voulait bien la suivre aux toilettes pour dames. Ce qu'il fit sans trop se questionner puisque Germaine lui caressait langoureusement les parties génitales tout en lui montrant sa langue, cet épouvantable torchon de huit pouces de longueur et de langueur qui faisait encore sa renommée parmi ses proies.
Ce fût ensuite le tour d'une pauvre nonne absorbée dans la lecture de son bréviaire évangélique. C'était dans la salle d'attente du médecin. Elle entraîna la vieille nonne vers son pitoyable logement pour lui faire des choses pas très catholiques, prétextant de lui faire lire Lacordaire ou Paul Bourget. Cela se termina en séance de broute-minou à en faire miauler toutes les félines du quartier.
Évidemment, pétrie de remords et de péchés, Germaine se présenta une fois de plus au confessionnal.
-Pardonnez-moi mon père parce que j'ai péché! dit-elle au curé qui, une fois de plus, avait la trique rien qu'à penser à ce que cette démone allait encore lui raconter.
-Je vous écoute ma fille...
-J'ai rentré ma langue dans tous les trous... J'ai avalé des liquides corporels... J'ai évacué des torrents de plaisir et de purs péchés!!!
Le curé avait chaud, une fois de plus. Et il lui donnait bien sûr l'absolution, accompagnée de dix Je vous salue Marie et trois Notre Père.
-Allez et ne péchez plus! Je veux vous revoir demain! Rompez!
-Je vais essayer mon père, je vais essayer, lui disait-elle sur le ton de la contrition.
Puis elle recommençait, la paillarde! Germaine repartait à l'affût d'un sexe à renifler.
Ce n'était pas facile tous les jours de ne pas être un animal. Elle ne disait pas le contraire, Germaine.
D'abord, les animaux ne connaissent pas le péché. C'est leur instinct qui les guide. Tout ce qu'ils font, c'est obéir à leurs pulsions qui les obligent à se promener dénudés.
L'homme, cette merveille de la Création, doit constamment combattre la puissance du Malin qui lui rappelle qu'il est tout nu et qu'il en a honte.
On ne va pas au ciel en se contentant de faire le bien, voyez-vous.
Qui n'éprouve pas la sensation du péché ne peut être qu'une bête sans âme, sans coeur et sans sexe.
Forte de ces vérités théologiques, Germaine pouvait poursuivre sa vie dans la Foi et l'Espérance.
Amen.
Ma grand-mère paternelle s ' appelait elle aussi Germaine - Elle était , elle , une vraie grenouille de bénitier accrochée à son chapelet - Mais qui sait , elle était peut-être elle aussi une vraie démone ? C ' est en tous cas ce que je lui souhaitai rétroactivement lorsque , le coude appuyé sur son cercueil , un peu stoned et hilare de quelque chimie de mes vingt ans , je l ' accompagnai dans le corbillard , de Marseille jusqu ' à son cimetière campagnard de haute-Provence - Depuis cette mémorable scène et sans lien avec celle-ci , je n ' ai de cesse d 'enseigner à mes petits élèves d ' école primaire que tous , humains , sommes des mammifères , espérant que ( ce qui ne me regarde pas et sans pédophilie aucune , ce qui n ' est absolument pas mon truc - ) qu ' ils trouveront leur propre voie d ' adulte dans leur sexualité libre d ' adultes et adolescents -
RépondreEffacerWilhelm Reich , avec tous ses délires , a bien mis en valeur l ' importance du sexe , tout comme sans-doute Antonin Artaud ou Le Marquis de Sade -
@monde indien: Je voulais surtout démontrer par cette fable que les délires religieux cohabitent souvent avec les débordements sexuels. C'est un paradoxe que je ne m'explique pas et que je résume par un conte plus ou moins philosophique...
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