mercredi 7 juillet 2010

Karl et le Smatte-à-Poitras

C'était une journée chaude. Les yeux cuisaient dans leurs orbites. Une pression folle faisait enfler le disque dur sous le caillou. Oua. Il faisait chaud en sacrement.

Karl avait chaud dans son complet veston trois pièces qu'il portait pour se donner de la prestance, histoire d'oublier qu'il n'était qu'un singe pas tout à fait symétrique, avec un testicule plus gros que l'autre qui le faisait boiter d'une jambe.

-Sapristi qu'il fait chaud, disait-il, en se grattant la tête pour faire tomber ses pellicules.

Et c'était une chaleur torride. Une chaleur marécageuse qui vous rendait l'âme et le corps poisseux.

-Sapristi qu'il fait chaud, répétait-il encore.

Karl était assis dans sa petite cabine de préposé au stationnement non-climatisée. L'asphalte semblait gondoler sous l'effet de la canicule. Et voulez-vous bien me dire pourquoi ce pauvre gars portait un complet veston trois pièces pour un boulot aussi peu protocolaire? Justement. C'était protocolaire. Il surveillait le stationnement du Smatte-à-Poitras, un entrepreneur très riche qui se vantait de n'avoir qu'un secondaire un, jurant que les intellectuels devraient tous être aux travaux forcés, que les femmes sont trop émotives pour faire de la politique et qu'il y a trop de tapettes partout. Ses sympathies vaguement fascistes ne l'avaient pas empêché de se faire élire ça et là, histoire de ne pas se tenir trop loin des contrats. Il avait lui aussi un testicule plus gros que l'autre mais s'aspergeait les couilles de cognac pour les désinfecter.

Ce qui fait que Karl lisait des tas de livres dans sa guérite, à regarder des autos toute la journée, suffoquant sous le soleil accablant de juillet dans des vapeurs d'essence et de goudron, tout ça pendant que le Smatte-à-Poitras menait la belle vie climatisée en crachant sur tout ce qui existe, les couilles parfumées au cognac et tout le saint-frusquin.

Oua.

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