vendredi 9 septembre 2016

Patate que oui, patate que non

La patate, comme tout le monde le sait, est un légume-racine qui a conquis le monde. Elle était initialement cultivée par les aborigènes de l'Île de la Tortue que l'on a appelé à tort l'Amérique pour enlever toute importance aux soi-disant Sauvages.

Les Incas en cultivaient plus de trois milles variétés afin de la protéger de ces maladies qui peuvent saccager toute une récolte. C'était une forme de sagesse qui n'échappe pas à leurs descendants de nos jours.

La patate s'empara du monde entier autour du XVIIIe siècle. On s'est vite rendu compte que ce tubercule poussait dans presque n'importe quel type de sable et nourrissait facilement les familles. Elle sauva le monde de la famine en quelque sorte. Il n'y aurait pas eu de littérature russe sans les patates. Ni de vodka par ailleurs...

Les Irlandais connurent cependant une grande famine au milieu du XIXe siècle parce que, contrairement aux Incas, ils ne cultivaient pas trois milles variétés de patates. Les plants de pommes de terre furent attaqués par le mildiou, un organisme apparenté aux algues brunes. Les Irlandais, qui se nourrissaient essentiellement de pommes de terre, s'exilèrent en masse vers le Canada, l'Australie et les États-Unis.

Je m'en voudrais de pousser plus loin l'histoire de la patate.

D'autant plus que ce n'est pas ce souci qui m'anime.

***

J'achète des patates à presque tous les jeudis. J'en mange sous toutes ses formes: en papillotes de légumes, en fricassés, en robes de chambre, en purée, frites au four sur une plaque à biscuits, etc.

Chaque jeudi, donc, je vais au supermarché pour m'approvisionner en patates.

Depuis que j'ai mangé des patates qui goûtaient la moisissure j'ai adopté le rituel de les sentir avant que de les acheter. C'était évidemment sous la recommandation de ma blonde qui en connaît une tranche au sujet de la culture maraîchère puisqu'elle est originaire de Saint-Hyacinthe.

Elle m'a fait découvrir, à mon grand dam, que la grande majorité des patates mises en vente dans les supermarchés sentent la moisissure. Est-ce le prélavage, l'entreposage ou les deux? Je ne suis pas un spécialiste. Mais à force de discuter avec tout un chacun j'ai fini par comprendre que les patates devraient être entreposées dans du sable et, de ce fait, sentir le sable.

Chaque jeudi ma blonde se met à rire de me voir soulever des sacs de patates pour les porter sous mon nez trop fin.

-Beurk! Pouah! Ça sent la calice de marde!!! que je me mets à dire en reculant de plusieurs pas après avoir balancé le sac de patates qui sent le moisi.

J'en soulève un autre puis encore un autre. Ça sent tout autant. J'adopte des mimiques qui témoignent de mon dégoût et de mes hauts-le-coeur devant ces tubercules qui puent.

-Ça sent la vieille moppe à l'eau de javel qui sèche dans l'backstore sacrament!

Puis, à force de chercher, je tombe sur des patates qui sentent le bon sable. Ce sont souvent des patates jaunes. Les plus chères mais en même temps les meilleures. Je vaux bien deux dollars de plus pour ne pas manger de la moisissure.

Désormais, je mange toujours de bonnes patates. Oui monsieur. Oui madame.


Aucun commentaire:

Publier un commentaire