mardi 30 janvier 2018

Bingbong Bibeau

-Bingbong Bibeau avait el trou d'cul slaque en tabarslaque. I' mangeait trop salé. Ou pas assez. Ou trop souvent. En tous 'es cas Bibeau avait el trou d'cul slaque.En faitte c'tait dû à un accident de bécyc' quand y'éta' jeune. I' s'était snappé non seulement el trou d'cul mais aussi les schnolles en jouant au cow-boy. À c't'âge-là on en fait-ti des folies, hein? Ça fait qu'toutte un chacun l'appelait Bingbong Bibeau pour c'te raison, pour son trou d'cul slaque pis ses schnolles. Comment c'que c'est qu'on sait qu'i' avait el trou d'cul slaque? C'est Bibeau qui nous l'a dit. Mais i' nous l'a pas montré. C'est pas du genre à s'montrer el trou d'cul à tout l'monde mettons. Pis là j'sais p'us trop quoi dire...
Ah oui! Bingbong Bibeau...

Germain s'effondra sur le sol. On n'en a jamais su plus à propos de Bingbong Bibeau.

Et on a beau demandé encore et encore à Germain de nous dire qui était ce Bingbong Bibeau qu'il nous jure de ne pas s'en souvenir.

-Ej' d'vais être saoul en tabarnak pour raconter el trou d'cul slaque de Bingbong Bibeau...

Oui. Il l'était.

L'histoire amorale d'un crotté qui s'appelait Moéno Sicotte

Des histoires étranges courraient autour de cette raclure de fond de chiotte qui avait pour nom Moéno Sicotte. Moéno comme dans moineau. Et Sicotte comme dans Sicotte. Et non pas comme dans la guitare à douze cordes à cinq cordes à Sinotte... Vous me suivez encore? Non? Parfait. Je n'aime pas avoir trop d'attention.

Et de toute manière je ne vais pas parler de moi. Vous en savez déjà trop. Alors que vous ne savez rien encore de Moéno Sicotte. Ni moi d'ailleurs. Qu'en sais-je sinon des ragots colportés au fil des âges? Et pourquoi je vous en parle? Parce que. On ne devient pas Isaac Babel en ne racontant pas Odessa. 

Au-delà d'Odessa et de tout ça, on peut dire que ça remonte à plusieurs hivers. Ce qui ne me rajeunit pas. Et ce qui pardonne ma nostalgie d'aspirant vieux croûton à l'aube de sa cinquantaine.

Moéno Sicotte était un drôle d'oiseau. Un oiseau de mauvais augure. Un rapace. 

Il se saoulait la gueule du matin au soir et du soir au matin. 

Son métier était celui de voleur. Il volait tout ce qu'il pouvait. Tout le monde savait que c'était Moéno Sicotte mais personne n'avait jamais de preuve. Bien sûr que ce n'était pas toujours lui. Des fois c'était un autre. Mais les voleurs aussi se partagent des territoires. Et celui de Moéno Sicotte se situait dans le rayon du dépanneur, de la Commission des liqueurs et de la taverne Adam & Ève.

Il buvait en sacrament et avait l'air d'un trou du cul comme de raison. Mais ce n'était pas ça qui faisait autant chicoter le voisinage que le fait qu'il attachait son vieux père après sa chaise pour aller boire son chèque de pension. Seule une ordure peut faire un truc semblable. Et Moéno Sicotte, évidemment, en était une.

Tout jeune, j'avais appris à changer de trottoir lorsque je le croisais.

Ce n'était pas une attitude très chrétienne. Mais c'était sans doute la meilleure solution compte tenu des vices et perversions sordides de Moéno Sicotte.

On n'allait pas jusqu'à dire qu'il mangeait des bébés, mais c'était tout juste.

Il faut dire qu'il avait le physique de ce mauvais rôle.

La barbe et les cheveux hérissés, le brandy nose et les pantalons beurrés de marde, parce qu'il s'était chié dessus, on ne peut pas dire que Moéno Sicotte suscitait la sympathie de quiconque. Il ne payait jamais son loyer, évidemment, se faisait crisser dehors de partout et finissait toujours par attacher son vieux père pour boire son chèque de pension. Ce vieux père qui criait «Détache-moé Moéno pour l'amour du Bonyeu!» Et Moéno qui lui disait de farmer sa yeule «parce qu'i' allait 'i crisser yin qu'une garnotte dans l'front pour l'fai' dormir.» Difficile d'imiter le ton et l'accent gouailleur de Moéno. Disons simplement que c'était un sale type.

La dernière fois que je l'ai vu, Moéno sortait encore de prison.

Il s'était trouvé un logement minable dans la P'tite Pologne, à l'ombre de l'usine de textile Wabasso.

Le logement en question avait été investi par plusieurs chars de police quelques semaines plus tard.

Moéno avait foutu le feu dans un bloc appartement adjacent et il aurait été surpris dans le sous-sol de son logement en train de baiser une morte, sa blonde, qui était vraiment morte.

L'avait-il tuée ou était-elle morte naturellement? Je n'en sais rien. Comment la police a pu le surprendre en train de baiser une morte? J'avais 8 ans... Et je n'avais pas et n'aurai jamais l'envie de baiser une morte. Ce que je sais c'est qu'on se disait ça entre nous. Ils doivent tous s'en souvenir, mes vieux chums de la P'tite Pologne, de Notre-Dame et de Sainte-Cécile. Autrement c'est qu'ils étaient aveugles. Ou bien qu'ils devraient se mettre aux sudokus pour faire travailler la mémoire.

Tout ça pour vous dire que, dans mon imaginaire, il n'y a pas pire ogre que Moéno Sicotte.

Bien sûr, l'histoire me révélera bien d'autres noms de personnes tout aussi répugnantes.

Par contre, c'est toujours un peu abstrait. 

Tandis que Moéno Sicotte, je l'ai vu.

Je sais que des sales types comme lui ça peut exister.

Même si je doute, tout compte, fait, qu'il ait vraiment baisé une morte.

Les crottés, c'est comme ça, on leur mettrait tout sur le dos.



lundi 29 janvier 2018

Mon billet dans le Hufftington Post

C'est ici.

Journée commémorative de l'attentat terroriste de la mosquée de Québec

Il y a un an jour pour jour, aujourd'hui même, qu'est survenu l'attentat terroriste de la mosquée de Québec.

C'était un geste barbare et, disons-le, islamophobe.

On a commencé par casser des vitrines. Puis par baptiser des mosquées avec du sang du porc.

Et tout ça nous a menés vers le bain de sang du 29 janvier 2017.

Les comparaisons avec l'antisémitisme en Allemagne ne sont pas sans fondements. Ce n'est plus la loi de Godwin. C'est une réalité qui frappe aux yeux.

La terminologie fasciste abonde chez les idéologues du nationalisme identitaire, tant Québécois que Canadien ou Français. On y condamne le multiculturalisme comme jadis l'on condamnait le cosmopolitisme. On y dit que les musulmans complotent pour contrôler le monde comme l'on accusait les juifs de le faire dans les années '30. On accuse la gauche libérale de complicité avec les ennemis du peuple, les juifs, les musulmans et les puissances étrangères. Les islamogauchistes ont remplacé les judéobolcheviques dans l'imaginaire néofasciste. On veut des hommes forts. Des hommes à la mâchoire carrée qui parle rudement des vraies affaires en se moquant autant des féministes moustachues que des transgenres albinos...

Et tous ces mots, j'en suis convaincu, vont mener à d'autres bains de sang.

Au lieu des accommodements raisonnables on aura droit à un climat de guerre civile déraisonnable entre la canaille et les partisans de l'État de droit.

Après les races, on s'occupera des intellectuels qui dérangent, des homosexuels, des artistes, des féministes et des syndicalistes. C'est là où nous en sommes.

Il est possible d'inverser le cours de cette histoire.

Ce ne sera pas facile.

Des tas d'honnêtes visages pâles chroniquent pour le Donald Trump québécois.

Ils voient des chiens de garde là où un être humain un tant soit peu sensible verrait une brute nazie.

Ils invitent la meute des lycanthropes et autres zombies de la jungle capitaliste à se jeter sur ces hordes de crottés, pouilleux et étrangers qui ne veulent pas manger leur ration de bines au lard. Lire la section commentaires dans les journaux jaunes en ligne ça vous donnerait presque l'envie de remettre sur pied des cellules de la Résistance. Ce populisme haineux, alimenté par des animateurs de radio méprisables et des intellectuels de seconde main, mérite d'être dénoncé sur toutes les tribunes. Malheureusement, toutes les tribunes appartiennent au Donald Trump québécois. Ou presque. Il reste un journal publié une fois par semaine et quelques nouvelles de Radio-Canada... Quelques blogues...

J'offre mes condoléances une fois de plus aux proches des victimes ainsi qu'aux blessés de l'attentat terroriste de la mosquée de Québec.

Je leur promets, au-delà de ces condoléances, de tout faire pour que le Québec, notre pays, demeure hospitalier, généreux et ouvert sur le monde.

Je leur promets de combattre le racisme qui dénature notre communauté et nous fait honte.

Je ne laisserai rien passer.

Le devoir d'une personne juste, ce me semble, est de combattre l'injustice.

Non d'y participer.

Cette équation, pourtant si simple, échappe à quelques-uns de nos compatriotes. C'est à se demander pourquoi nous les tolérons au sein de notre communauté...

Rappelons-leur qu'il y a des articles dans notre Code criminel qui rendent passibles de 2 ans de prison les personnes qui font de la propagande haineuse.

Je souhaite la paix aux victimes et aux blessés de l'attentat de la mosquée de Québec.

Je ne souhaite que de troubler le sommeil de ceux et celles qui en voudraient d'autres.





dimanche 28 janvier 2018

La patinoire du Parc des Pins

Trois-Rivières était recouverte d'une forêt de pins il y a quatre ou cinq siècles. Il n'est resté de cette grande forêt de pins qu'un tout petit parc perdu au milieu d'un quartier ouvrier, coincé entre l'usine et la voie ferrée. Eh oui! Il s'agit bien de ce Parc des Pins qui existe encore de nos jours. J'y ai passé la majeure partie de mon enfance et de mon adolescence. Et la patinoire du Parc des Pins, qui existe encore aujourd'hui, méritait cet hommage. Là-dessus, j'ai encore du travail et retourne à mes pinceaux.

samedi 27 janvier 2018

Le coeur et le cerveau

Je ne vois pas les choses que sous l'angle gauche-droite. Comme je ne pourrais pas voir les choses que sous l'angle de la biologie moléculaire ou bien celui de la danse à claquettes.

Je vois les choses sous mon capital de connaissances, de préjugés vaincus et, surtout, selon les plus hautes exigences de l'amour, que j'écris sans majuscule puisque je ne me réfère à aucune doctrine en particulier.

Cet amour est hautement intuitif. Peur-être subjectif. Jamais objectivé.

Voir un être humain souffrir me cause une grande souffrance.

Il m'est arrivé de me battre violemment dans ma vie d' «adulescent» qui s'est étirée jusqu'à l'âge de 25 ans. C'était des cas d'autodéfense ou de protection d'une victime d'agression. Je ne m'étendrai pas longtemps sur le sujet. Mettons, pour faire court. qu'il ne faut pas me chercher longtemps. Ni me pousser dans le bedon. Ni frapper quelqu'un devant moi. Hulk sort de mon corps et je deviens redoutable. Un vrai sauvage. Pas du tout la licorne flocon de neige pacifique inclusive qui prêche l'amour universel.

Ce qui fait que j'ai plus peur de ma violence que de celle d'autrui. Je dois la contrôler mieux que n'importe qui du fait même de ma constitution physique que je considère hors-norme sans chercher à me vanter d'une quelconque manière. Je suis une armoire à glace de 6 pieds 2 pouces, 295 livres. Mes bras sont aussi gros que mes jambes. Des bras que j'ai entraînés à nager pendant trois ou quatre heures en faisant des longueurs. Et des jambes qui ont marché d'un océan à l'autre plusieurs fois en faisant du pouce. Je peux lever des poids considérables d'un coup sec, comme Louis Cyr. Bref, j'ai plutôt l'air d'un lutteur de la WWF. Quelque chose comme George The Animal Steel. Abdoulah le Bouchard.

Et vous savez quoi? Je n'aime pas me battre. Tout sauf souffrir et faire souffrir.

Je ne me suis jamais battu sans avoir la larme à l'oeil.

Comme si je savais que cela ne se faisait pas...

Je me suis toujours excusé auprès de mes agresseurs de les avoir mis hors d'état de nuire. Excusé en pleurnichant tandis que le pauvre gars gisait au sol, assommé par le côté sombre de moi-même, mon Hulk intérieur, ma part de Mister Hyde.

Et c'est toujours le docteur Banner ou le docteur Jekyll qui gagne. L'intellectuel humaniste... Le pauvre animiste judéo-chrétien gnostique à temps partiel... L'artiste... La licorne qui veut que tout le monde ait sa part d'arc-en-ciel. Bref, le poète.

Je suis un potentiellement gros violent contre la violence.

Je ne peux pas oublier cette violence qui est en moi.

Et peut-être que j'aurai un jour ou l'autre à m'en servir pour me protéger ou protéger autrui.

Cependant, je ne me vois pas glorifier la violence, sanctifier la souffrance, bénir ces mauvaises passes de l'humanité désorientée.

Le pire drame serait encore de tuer cette part de sensibilité qui ne fera jamais de moi une grosse brute.

Ce que j'aurais pu facilement devenir.

Comme si tout m'y prédestinait: pauvreté, bagarres de ruelles, humiliations, intimidations...

Je me suis dit que le muscle le plus important c'était le cerveau. Et j'ai lu. J'avais 12 ans et j'empruntais 3 livres le matin à la bibliothèque que je rapportais le midi pour en rapporter 3 autres et ainsi de suite le soir. Je ne voulais pas devenir une grosse brute...

Je me trompais cependant.

Le cerveau a servi tellement de brutes que ce n'est pas le muscle le plus important.

Ça doit être le coeur.

Je ne le savais pas.

Maintenant, je le sais.

Oui, je sais que c'est le coeur...


vendredi 26 janvier 2018

Une roche à la place du coeur

J'avoue avoir essuyé une larme ou deux en visionnant le documentaire de l'équipe d'Enquête de Radio-Canada: La prière où tout a basculé. On a beau se comporter en brute qu'il y a des limites à dissimuler sa sensibilité.

L'attentat terroriste de la mosquée de Québec survenu l'an dernier, le 29 janvier 2017, ne pouvait que dégoûter un être humain digne de ce nom. Pleurer devant une telle tragédie c'est aussi communier avec les victimes. Et il était difficile, voire impossible pour moi, de ne pas me sentir submergé par des émotions allant de la rage au désespoir le plus abyssal face à ce gâchis.

Pendant des semaines, des mois, des années, nous avons laissé gonfler la bulle.

On a commencé par casser des vitrines.

Puis on s'est mis à baptiser des mosquées avec du sang de porc.

Finalement, un plus exalté a fini par commettre un massacre.

Rien n'est plus troublant que d'entendre le témoignage du fils d'une des victimes au cours du documentaire d'Enquête.

D'autant plus troublant qu'il ne comprenait tout simplement pas, avec son fort accent québécois, pourquoi des gens allaient jusqu'à dire que le tueur n'avait pas suffisamment abattu de musulmans. Et c'était bien sûr publié autant sur Facebook que dans les commentaires des articles des journaux jaunes.

Je me demande comment l'on peut être aussi méchant, aussi déshumanisé, aussi dégoûtant.

On parlera de la nécessité d'éduquer, de combattre l'ignorance et blablabla.

Le fait demeure qu'il y a des gens qui ont une roche à la place du coeur.

Je veux bien apprendre à vivre ensemble avec un musulman, un juif, un zoroastrien, un adventiste du septième jour, un athée et j'en passe. Mais apprendre à vivre avec des sans-coeur et des méchants est au-dessus de mes capacités.

J'ose croire que la grande majorité des Québécois et des Québécoises ne sont pas à l'image de ces commentaires saugrenus qui circulent dans les média sociaux. Il doit y avoir encore un zeste d'hospitalité et de saine curiosité, d'accueil et de solidarité au Québec.

Évidemment, certains politiciens devraient avoir cette dignité de refuser de surfer sur la vague identitaire. Plutôt perdre deux votes que de perdre son âme, n'est-ce pas?



jeudi 25 janvier 2018

C'est normal un râteau

Il était une fois un gars qui était un homme normal en tout.

Et ça tombe bien, qui voudrait être autrement que normal?

Être hors-norme, c'est nécessairement s'exposer à la brutalité des normaux.

Ce sont des normaux qui brutalisent les anormaux.

Vous direz qu'il y a sans doute des anormaux qui le font aussi.

Et vous pourrez même ajouter que ce n'est pas normal.

Et c'est normal que vous envisagiez les choses sous cet angle. Oui c'est normal.

La normalité, c'est ce qui arrive tout le temps. C'est l'habitude. C'est l'uniformité.

Vous sortez dehors. Une goutte d'eau tombe sur votre occiput. C'est la normalité puisque la gouttière déborde toujours au-dessus de l'escalier. Personne ne la répare. Tout le monde se fout de tout le monde. C'est normal.

Par contre, si le soleil disparaît et qu'il n'y a plus de vie sur Terre. eh bien là on peut dire sans l'ombre d'un doute que ce n'est pas normal.

La norme n'est pas si compliquée que ça à comprendre.

Il faut être de mauvaise foi pour être anormal.

La recette existe et elle est facile à suivre.

Être normal c'est être comme tout le monde.

Oui.

Et c'est normal.

Normal comme dans pâtisserie ou charcuterie ou râteau.

C'est normal un râteau.

Un grableurkw ce n'est pas normal.

Mais un râteau? Oui c'est normal.

C'est normal un râteau.

mercredi 24 janvier 2018

Péquisterie 101


L'ivresse cosmopolite

Quand il est arrivé ici il ne parlait pas un traître mot de français.

Il a appris vite en se saoulant et en se défonçant la gueule pendant des mois avec des trous du cul comme vous et moi.

Au bout d'un an, il sacrait comme un bûcheron et vous répondait du tac au tac malgré son fort accent anglais.

D'aucuns pourraient dire qu'il était un exemple d'intégration.

Et c'était pourtant le contraire.

Ce gars-là a intégré tout le monde à des cultures différentes de la leur. Nous nous sommes intégrés à lui.

D'abord parce qu'il a fait découvrir Bob Marley, Yellowman et Lee Scratch Perry à des gens qui seraient demeurés bloqués toute leur vie sur je ne sais trop quel album de rock progressif de l'année 1973. Ainsi la Jamaïque et les bongs débordant de fumée sont entrés fièrement dans nos vies comme une délivrance spirituelle. Ya man! No mo' Babylon! 

Ensuite parce qu'il ouvrait la porte à tous les étrangers du monde, étrangers qui ne seraient jamais rentrés dans la vie quotidienne de ce coin reculé du Québec où ce gars-là avait atterri. Après Mark il y a eu Samir. Et après Samir, Ahmed. Et après eux combien d'autres de tous les continents...

S'il est correct, lui, l'Étranger, alors pourquoi pas les autres? On en avait accueilli un. On en accueillerait d'autres. Ce serait évidemment plus difficile s'ils refusaient de se saouler et de se défoncer la gueule. L'intégration passe aussi par une harmonieuse désintégration. Tout le monde devient frères et soeurs après une brosse. Enfin, ce sont les coutumes du coin qui veulent ça. Un peu de bière, de gin, d'alcool frelaté, de pot, de hasch, de psilocybes, de poudre de perlimpinpin et vous voilà comme un apôtre qui parle dans toutes les langues de l'empire sans même en avoir appris une seule.

J'ai pratiqué le même truc dans l'Ouest. 

J'ai saoulé et gelé mes professeurs d'anglais pour qu'ils soient patients avec mon babillage.

Puis ils se sont mis à lâcher des «tabeurnakès» gros comme le bras pour me faire plaisir.

Je ne prétends pas régler tous les problèmes du monde avec l'alcool et les autres drogues.

Pourtant, j'ai vu bien des masques tomber pendant une brosse. Et j'ai vu des dents se faire casser aussi mais ça, bon, c'est comme pour n'importe quel autre sport.

Fais-je l'apologie de l'ivresse?

Pourquoi pas si la sobriété est raciste.

Bas les masques.

Saoulons-nous. Dansons. Vivons.

Oublions-nous.

Devenons un nouveau Nous.

Ou faites ce que vous voulez.

Moi je m'en fiche.

J'aime tout le monde.

Même les caves.

Parce que je suis cave.

lundi 22 janvier 2018

Une avalanche dans les Rocheuses

Cela s'est passé il y a vingt-cinq ans. Cela ne me rajeunit pas. J'allais avoir 26 ans. J'étais quelque part dans les Rocheuses, entre Revelstoke et Banff. Je voyageais à bord d'un autobus Greyhound avec une vingtaine de passagers de toutes origines. Il y avait des tuques, des foulards, des turbans. J'étais le seul francophone parmi tous ceux-là. Je le sais puisque j'ai eu le temps de tous et toutes leur parler avec mon fort accent québécois.

Et comment ai-je pu tous et toutes leur parler?

Parce que la météo, aussi mauvaise soit-elle, se charge toujours de rapprocher les gens. Tout groupe humain isolé et menacé par la nature se comporte spontanément en tribu et établit de nouvelles règles communes à tous sans qu'il ne soit question de les écrire. Je le sais puisque je l'ai vécu. Je ne parle pas au travers de mon chapeau, vous le savez bien.

Cette histoire s'est probablement passée autour du 3 janvier 1995. Peut-être le 2 ou le 4. Je n'en sais pas plus.

Je me souviens que j'avais quitté Vancouver en fin de matinée, le coeur troublé par plusieurs nouvelles qui me provenaient du Québec et qui nécessitaient mon retour immédiat. On m'avait annoncé que mon père avait un cancer et qu'il lui restait peut-être trois mois à vivre. Par ailleurs, une femme que j'avais aimée me cherchait partout. Ces deux nouvelles m'avaient scié les jambes. Et je me souviens seulement d'avoir passé tout un après-midi sous la pluie, au George Stanley Park de Vancouver, à regarder tristement l'Océan Pacifique. Je mettais en veilleuse mon idée de finir mes jours dans l'Ouest, loin du Québec qui n'avait ni travail ni perspectives à m'offrir. Il fallait que je sois là, pour mon père... C'était ma dernière chance de le voir vivant, mon père, mon meilleur ami... Quant à elle, elle... Hum.

Ça y est j'étais en route pour Montréal via l'Autoroute 1 transcanadienne. L'autobus montait et montait et montait encore. Puis il redescendait et redescendait toujours plus. D'un sommet enneigé à l'autre je devais souvent avaler pour me déboucher les oreilles compte tenu de la pression atmosphérique. De ma fenêtre, je pouvais voir toutes sortes de panneaux routiers qui ne m'étaient pas familiers. Des panneaux qui annonçaient des risques d'avalanche et qui recommandaient aux conducteurs de ne pas s'arrêter et de filer à vive allure en cas d'avalanche.

Un peu plus loin, on ne voyait plus rien. Ni panneaux ni véhicules. Sinon des employés de la voirie et des officiers de la Royal Canadian Mounty Police. Tous les véhicules étaient priés de rebrousser chemin jusqu'à un casse-croûte perdu au milieu de nulle part dans les Rocheuses. Je ne pourrais même pas vous dire où c'était tellement il faisait blanc sous la noirceur.

Il y avait eu une avalanche. La montagne avait déversé un peu plus de six mètres de neige sur la Trans-Canada Highway 1. On ne pouvait plus avancer sur au moins un kilomètre. Et on devait évidemment procéder au déblaiement de tout ça avant que de rouvrir l'autoroute à la circulation.

Il était autour de minuit. Un Sikh coiffé d'un magnifique turban rouge me fit savoir que nous allions demeurer un bon bout de temps au casse-croûte, peut-être une dizaine d'heures. J'en profitai pour lui faire la conversation, à lui comme à tous les autres ou presque. D'autant plus que je m'endormais pas.

Pour m'aider à mieux parler l'anglais j'avais sur moi un joint de secours qu'un ami de Vancouver m'avait donné avant mon départ. C'était un Britannique en situation d'illégalité du point de vue de l'immigration qui vivait depuis deux ans à jouer de la musique dans la rue et à laver des pare-brises avec un squeegee. Je l'accompagnais parfois à l'harmonica et nous partagions la cagnotte. Tarquin qu'il s'appelait. Un chic type qui ressemblait un peu à Sting s'il avait eu une énorme coupe afro blondasse. Un gars qui, comme tant d'autres, hanteront mes souvenirs toute ma vie. Un gars qui me montrait qu'on ne devait pas se casser le cul pour rien. Seulement être là, jouer de la musique et faire l'amour avec des femmes. Point. Tout ce que j'avais envie d'entendre à l'époque.

J'ai fumé le joint avec le Sikh qui en avait vu d'autres. Et on a ri de tout et de rien en s'inventant des chansons à propos des Rockies et des munchies. On arrêtait pas de manger des noix de cajou que l'on prenait à même la distributrice du casse-croûte. Puis on parlait, parlait et parlait. Avec un couple ukrainien obèse. Avec une Métisse de Peace River qui allait visiter une de ses tantes. Avec un Laotien qui vendait des électroménagers à Winnipeg. Avec des Ontariens qui n'avaient pas un sou en poche et espéraient qu'un vieil ami les hébergeraient pour une semaine le temps de recevoir un chèque d'aide sociale. Avec des Terreneuviens, parce que partout où vous irez au Canada vous trouverez un Terreneuvien et un Québécois pour une raison qui m'échappe. Yeah b'y! comme ils disent...

Bon, au bout de dix heures l'autoroute était entièrement déblayée et il faisait soleil si je me souviens bien. Le joint ne faisait plus effet et j'avais l'envie de dormir. Mais pas avant d'avoir vu ces énormes murailles de neige de vingt pieds de hauteur tout le long de l'autoroute.

Je ne sais pas pourquoi ce moment bien spécial me revient en mémoire, aujourd'hui même, et pas hier.

Peut-être parce qu'on annonce une tempête. Du verglas. De la neige. Des vents. De la schnoutte.

Ce sera difficile de battre la tempête du 8 mars 2009 survenue à Trois-Rivières qui avait laissé un peu plus d'un mètre et demi de neige.

Idem pour cette avalanche au milieu de nulle part dans les Rocheuses.

On ne m'enlèvera pas cette sensation de fin du monde à me demander comment allait mon père, mon ex-blonde et l'univers en général.

Une chance que le Sikh me faisait rire...





dimanche 21 janvier 2018

Le manifeste d'un peureux

Éphrem Lavertu n'était pas raciste du temps où il n'y avait que des immigrés qui avaient la décence de se taire lorsqu'il leur parlait. Les immigrés n'avaient pas cette arrogance qu'ils ont de nos jours. Ils savaient à l'époque que Lavertu pouvait tout leur apprendre. Et, pour le remercier mille fois, ils lui donnaient des pâtisseries de leur coin de pays sans rien attendre en retour du seigneur Lavertu qui leur faisait l'hospitalité. Ils ne chignaient pas non plus à faire semblant de giguer sur un vieil air de folklore. Ils n'imposaient pas leur culture mondiale... Et ils l'écoutaient presque religieusement délirer sur l'amitié entre le peuple québécois et le reste du monde...

Éphrem a eu un choc il y a cinq ans. Il était sorti de sa région pour aller visiter Montréal. Et il avait plutôt trouvé Sodome. Une ville contaminée par toutes sortes de drôles de gens qui ne connaissaient pas Richard Huet et Pierre Falardeau. Même les jeunes, qui avaient pourtant l'air de Québécois de souche, parlaient entre eux dans un sabir international incompréhensible.

Revenant dans son patelin, à Saint-Étole-des-Meumeus, Éphrem Lavertu s'était mis en tête de rédiger un manifeste social et national, un appel à défendre notre sapin de Noël, nos bines au lard et Claude Gauthier. Si ce n'avait été que de ça, rien de bien dommageable. Malheureusement Éphrem voulait qu'on nous rentre le sapin de Noël dans le fin fond du trou du cul même si tout le monde s'en crissait.
Idem pour sa bûche de Noël et ses jokes de mononcle. Il ne pouvait même plus parler à une jeune demoiselle en sortant le bout de la langue pour la séduire. On l'aurait traité de porc, imaginez-vous donc! Quelle triste époque...

Son manifeste, évidemment, c'était de la merde.

De la merde comme il s'en est toujours chiée depuis Robert Rumilly jusqu'à nos jours. De la petite foirasse sur le thème de l'invasion des Rouges, des Jaunes ou des Blacks. Rien pour nourrir l'esprit. Tout pour dégueuler.

Le manifeste de Éphrem Lavertu s'intitulait NOUS.

Et nous n'en avions rien à foutre, rien.

C'était un autre délire d'un vieux con qui gueulait après les étrangers en cherchant son dentier parmi ses vieux classiques du temps où il lisait encore les livres autorisés par sa coterie.

Rien de bien original.

La pathétique fin de carrière d'un intellectuel qui n'en avait jamais été un.

Le départ en fumée d'un peureux.




vendredi 19 janvier 2018

Snipsnap

Snipsnap est toujours là à marcher dans le bureau avec ses crocs qui font snipsnap. On aurait pu l'appeler Émile mais Snipsnap lui allait mieux. Ce surnom auréolait son âme d'un quelque chose de surnaturel. Lui-même ne demandait pas mieux que de se faire appeler Snipsnap. Et même qu'il se faisait imprimer toutes sortes de trucs avec le logo Snipsnap dessus. Puis Snipsnap s'est lancé en affaires. Il s'est mis à produire des biscuits Snipsnap. Des biscuits cheap de restaurant que l'on sert avec le thé. Comme les biscuits Snipsnap ne coûtaient à peu près rien à produire, compte tenu que Snipsnap utilisait de la vieille farine mélangée à de la terre cuite, tous les restaurateurs s'approvisionnèrent chez Snipsnap. Ce qui fait que Snipsnap est riche. Et qu'on l'entend encore faire snipsnap avec ses crocs dans le bureau. Sacré Snipsnap!

jeudi 18 janvier 2018

Lison

Lison a une drôle de bouille. On dirait qu'elle se mange le menton. Et puis ses yeux sont d'un bleu jaune indéfinissable. Elle est toujours assise en avant dans l'autobus de la ville. Et elle raconte sa vie à tout un chacun.

-J'ai acheté quelque chose pis j'ai mis ça dans un sac... Sinon ça aurait tombé, ouais...

Puis elle fixe le vide un temps. On comprend qu'elle n'est pas tout à fait là. Un pied dans notre monde et l'autre dans la lune.

-Eurrrrp!!!

Un gros rot. Lison éructe aussi et ne s'en excuse pas. C'est comme si elle n'était pas là. Ou qu'elle avait trois ans.

On ne part pas tous à Go avec 200$ en poche au Monopoly.

Lison n'a rien, sinon une carte d'autobus. Quelqu'un doit gérer son argent à sa place. 

Que voulez-vous ajouter d'autre?

mercredi 17 janvier 2018

Faisons l'amour et pas la guerre

Je marchais sur la neige qui crispait comme du fécule de maïs sous mes lourdes bottes. Il faisait froid. J'écoutais Frank Sinatra chanté I've Got You Under My Skin tout en marchant.

Puis j'ai eu cette réflexion.

À vrai dire, c'est un slogan.

Et ce n'est même pas de moi.

Plein de gens ont déjà dit ça et le diront encore.

N'empêche que je dois le répéter moi aussi.

Faisons l'amour et pas la guerre.

***

Bien sûr que je passerai pour un zinzin de vous répéter ça.

Ne vous inquiétez pas: ça va.

Tiens, ça me fait penser à la chanson éponyme de Jacques Brel. Le diable revient sur Terre et tient un discours. Il trouve que les affaires vont bien. Ça va!

«Les hommes ils en ont tant vu
Que leurs yeux sont devenus gris
Ça va
Et l'on ne chante même plus
Dans toutes les rues de Paris
Ça va
On traite les braves de fous
Et les poètes de nigauds
Mais dans les journaux de partout
Tous les salauds ont leur photo
Ça fait mal aux honnêtes gens
Et rire les malhonnêtes gens.
Ça va ça va ça va ça va.»


Jacques Brel, Ça va

Ne vous inquiétez pas: ça va...

***

On parle plus souvent de l'extinction des dinosaures que de celle de la sensibilité. C'est normal puisque les cadavres de notre époque ne sont pas encore fossilisés. Le sang humain coule tous les jours. L'aspiration légitime des humains à une vie paisible est compromise par d'autres humains qui méprisent l'humanité.

Pour sortir de la logique de la haine, je me collerai plutôt à l'absurdité de l'amour. Faisons l'amour et pas la guerre.

Et, pendant les entractes, on pourrait aussi redéfinir nos rôles et nos valeurs pour qu'elles soient plus transcendantes.

La sensibilité ne doit pas s'éteindre.

Mettre son coeur à off est la pire insulte qu'un humain puisse se faire à lui-même.

On ne gagnera rien à jouer aux toffes.

Rien à se menacer de claques sur la gueule.

Rien à insulter des étrangers.

Rien à rendre les choses plus compliquées qu'elles ne le sont.


***

Rien ne doit nous distraire de préserver la beauté du monde.

Rien.



mardi 16 janvier 2018

Don Quichote / Projet en cours

Je vais vous épargner avec la politique aujourd'hui. La machine à produire de l'art est repartie. Je travaille en ce moment sur le projet d'une toile représentant Don Quichote. Je m'amuse donc à faire de petits dessins qui devraient me mener vers quelque chose de plus touffu.

Je ne tiens pas à reproduire ce qui s'est déjà fait. Autrement ça ne vaut pas la peine. Alors j'explore. Quitte à tout compromettre, dont la version de Cervantès.

Je vous reviens avec d'autres niaiseries un peu plus tard.


lundi 15 janvier 2018

Céréale Caouette

Céréale Caouette était une bonne femme. Ou bien une femme bonne si vous préférez. Ce n’est jamais évident de jouer avec les mots.

En tout cas elle était gentille, Céréale.

Elle s’appelait Céréale parce que ses parents étaient particuliers. Ils étaient du genre à se promener avec des fleurs dans les cheveux. Et Céréale, ils trouvaient ça nourrissant.

Céréale adopta un surnom pour contrecarrer l’effet loufoque de son prénom. Elle se fit surnommer Wa. Wa comme dans Oua. Wa comme pourquoi pas. Je ne pourrais même pas vous dire d’où venait ce Wa. Mais il était clair que Céréale Caouette n’était maintenant connue que sous ces deux lettres : Wa.

Wa était une bonne femme. Ou bien une femme bonne si vous préférez. Et n'était pas bonne en-soi mais plutôt bonne dans la soie. Elle faisait de la couture à vil prix. Travail, chômage et aide sociale. Puis le cycle reprenait. Inlassablement. Toujours naufragée du capitalisme sauvage et sans espoir de s'en sortir.

Et elle faisait son bonhomme de chemin dans la vie.

Le seul hic c’est qu’elle n’avait jamais d’argent même lorsqu'elle travaillait. Comme c’est le cas de la majorité des gens en ce monde. Il ne suffit pourtant que de tomber dans un voisinage où tout n’existe que par et pour l’argent pour se sentir subitement diminué, sinon humilié.

Wa se sentait toujours mal de n’avoir jamais rien.

Et on la faisait sentir mal parce qu’elle n’avait rien.

À part de ça, elle était gentille, faisait sa bonne femme de chemin même si elle n’avait pas un rond.

«Pourquoi tout ce qui compte c’est l’argent?» demandait-elle naïvement à tout un chacun.

«Qu’est-cé tu veux qu’on fèze?» lui répondait-on en se frottant le nez.

Céréale Caouette, alias Wa, n’était pas riche.

Elle avait donc tort sur toute la ligne.


Des gens qui n’ont rien, comme ça, si on se met à leur prêter attention on pourrait finir par oublier de faire encore plus d’argent.

Ce n'était, bien sûr, qu'un vulgaire exercice d'anthropologie.

Oubliez ça.

La vie des vedettes est tellement plus palpitante...

dimanche 14 janvier 2018

Plufaude et le trou à merde

Plufaude allait à l'école depuis qu'il avait miraculeusement trouvé le moyen d'avoir accès au savoir via une tablette qu'un cousin du Québec lui avait donnée. Il lui avait expliqué comment se brancher gratuitement sur le WiFi via certains points de service de Port-au-Prince. Puis il lui avait laissé un chargeur solaire pour qu'il puisse donner du jus à sa tablette.

Plufaude avait quitté l'école le 12 janvier 2010. Ses parents avaient aussi quitté ce monde le même jour. En fait, la perle des Antilles avait été détruite ce jour-là par un tremblement de terre qui fit plus de 100 000 morts ainsi qu'une multitude de blessés et de sans-abris.

Quoi qu'il en soit, Plufaude avait traversé l'enfer au cours des sept dernières années. Tant et si bien qu'il ne savait plus par où commencer pour vous raconter son parcours. Il savait d'instinct que les gens autour de lui seraient passés à autre chose. Tout le monde était en mode survie.

Plufaude est passé par les camps de réfugiés puis a vécu de trois fois rien avec les dix fois rien qu'il trouvait ici et là.

Depuis qu'il avait sa tablette, Plufaude s'était cependant mis en tête de s'instruire.

Il n'allait pas utiliser sa tablette que pour jouer à des jeux en ligne et échanger des photos de petits chats.

Plufaude fit ses classes avec sa tablette. Il apprit d'abord le français de A à Z. Il faisait encore quelques fautes mais son niveau d'écriture était déjà supérieur en finesse et en justesse à celui de la majorité de nos étudiants de niveau collégial au Québec. Puis il se mit à utiliser sa tablette pour faire des affaires. Pour financer ses études en quelque sorte. Ce serait long de tout vous détailler ça.

Quoi qu'il en soit, Plufaude était en train de se tirer de ses malheurs.

Puis vint le 12 janvier 2018.

Le Père Ubu qui habite la Maison Blanche désigna son pays de trou de merde.

C'était les voeux du président des États-Unis aux victimes du tremblement de terre de 2010.

Il prit soin quelques semaines auparavant de se débarrasser des réfugiés haïtiens jusqu'alors protégés par Obama pour pouvoir mieux se défouler sur Haïti.

Plufaude ne fût pas très heureux d'apprendre que le président des États-Unis disait de telles sottises et indignités.

Ça lui fit un peu mal à l'âme de constater que Babylone gouvernait encore le monde.

Puis il prit son cellulaire et parla à son cousin Charles, lequel demeurait à Montréal.

La conversation eut lieu en créole. Charles le parlait mal mais il s'y tentait tout de même.

Il apprit que Plufaude avait été accepté à la faculté de médecine de l'Université Laval suite à toutes sortes de démarches difficiles à vous expliquer ici sans abuser de votre patience.

Et il promit à son cousin Charles qu'un jour les trous du cul comme Donald Trump ainsi que tous les médiocres politiciens corrompus d'Ayiti n'auraient plus aucune influence sur le sort du monde.

jeudi 11 janvier 2018

L'histoire du gars qui voulait sauver Le Monde.

Ce gars-là était plutôt un mauvais gars qui avait appris à bien se raser et à sentir un peu moins la sueur au fil des années. Il avait investi dans toutes sortes de combines et s'était constitué un petit magot à force d'économiser sur le bénéfice de ses larcins. Les tempes grisonnantes, le dentier un peu trop large pour sa bouche, ce gars-là, eh bien il s'appelait Raymond Mondoux. Mais tout le monde l'appelait Ray. Ou Momon. Ou jamais.

Raymond Mondoux voulait sauver Le Monde.

Le Monde avait fermé ses portes depuis le mois de décembre. Le printemps arrivait. Monmon s'était dit qu'il y avait encore du profit à tirer de ce restaurant.

Il acheta donc Le Monde, fit des rénovations, et le rouvrit sous la même enseigne avec le même menu légèrement amélioré. Tous les menus seraient pré-congelés. Il n'y aurait plus de cuisinier. Seulement des types qui dégèlent des menus au micro-ondes et tentent de faire passer ça pour de la fine cuisine à 5,99$ l'assiette.

Les employés furent bien sûr traités comme de la marde. On ne sauve pas Le Monde sans faire de sacrifices. Et ce sont les esclaves qui en subirent les frais. Ils accomplissaient dorénavant l'ouvrage de trois personnes. Et Ray avait établi un véritable régime de terreur, faisant tout en son possible pour contourner les Normes du Travail et crier après ses serviteurs.

Ce qui devait arriver arriva. Ray fût identifié comme étant un étron sur deux pattes qui traite mal son staff sur les réseaux sociaux. Les projecteurs étaient braqués sur cette nouvelle vedette du capitalisme sauvage.

Le Monde ne fût pas sauvé. Enfin, pas cette fois-là.

Les affaires de Raymond Mondoux périclitèrent.

Il dut fermer Le Monde.

Les années passèrent.

Le local qui abritait Le Monde était désert, comme tous les autres locaux commerciaux autour.

Le monde ne sortait plus au centre-ville.

En fait, le monde ne sortait plus du tout.

Le monde restait à la maison en se préparant des pizzas surgelés pour souper.

Puis, un jour, il y eut comme des réunions d'alcooliques anonymes qui se tenaient dans le local vide de l'ancien restaurant Le Monde.

D'une réunion à l'autre, il y avait pas mal de monde. Et cela devint une maison de thérapie.

On y soigne tous les éclopés du centre-ville. Et il y en a beaucoup. Et tout autant de locaux vides, à vendre ou à louer.

Comme quoi Le Monde sert encore à quelque chose...

Et Raymond Mondoux? Je ne sais pas. Tout le monde se contrefout de ce qu'est devenu Raymond Mondoux. Sauf moi qui suis un peu trop sensible.


mercredi 10 janvier 2018

L'islamophobie selon le PQ


La peur des musulmans au Québec


Cela fera bientôt un an qu'est survenu l'attentat de la mosquée de Québec.

La justice se chargera de sévir contre le responsable de l'attentat. Et il serait bien sûr déraisonnable de soutenir des thèses que même les avocats d'Alexandre Bissonnette ne soutiendraient même pas. Mais qu'est-ce que la vérité? comme dirait Ponce Pilate. Tout le monde s'en lave les mains. Pourvu que l'on se conforte dans son idéologie. Son monde tellement à l'ombre que la lumière n'y pénètre plus.

L'islamophobie n'est plus théorique depuis l'attentat de la mosquée de Québec. Elle porte une histoire. Et elle baigne dans le sang cette histoire.

On vous dira que la religion n'est pas une race. Que nulle religion n'est exempte de critique. 

Je ne dirai pas le contraire puisque je ne pratique aucune religion et ne crois pas au concept de race.

Les juifs allemands n'étaient pas une race. On y a pourtant stigmatisé cette communauté tout au cours des années '20, les accusant d'être fourbes, de vouloir dominer le monde et même de manger des bébés pendant le sabbat. On les a écartés de toutes les institutions publiques dans les années '30. Puis on les a menés vers la mort dans les années '40. Plusieurs intellectuels européens ont malheureusement collaboré avec le projet d'exterminer les juifs d'Europe. Ils ont trouvé toutes les logiques du monde pour justifier le massacre. C'était scientifique. C'était comme nettoyer sa maison des rats et des souris.

On aurait pu croire qu'on tournerait à jamais la page sur cette sombre période de l'histoire de l'humanité. Qu'on se dirait tous et toutes que cela ne doit plus jamais se produire. Eh bien non! Ça revient. Et il faudra encore une fois nous soigner de la peste brune.

Je constate que les membres de la communauté musulmane sont quotidiennement stigmatisés non seulement par de piètres personnages des médias sociaux mais aussi par les soi-disant professionnels des médias commerciaux. Des journaux jaunes sont imprimés tous les jours pour distiller la peur des musulmans au sein de la communauté. On s'indigne sur la base de rumeurs, quiproquos et fausses nouvelles abondamment reprises par les médias poubelles qui, à l'instar de Radio Mille-Collines au Rwanda, font appel à la vindicte contre les rats, les parasites, les serpents...

Le racisme existait aussi dans l'Allemagne des années '30 et ne visait pas que la communauté juive. Cependant, il est évident que la communauté juive servit de bouc émissaire à la propagande nazie. 

Et c'est idoine pour la communauté musulmane qui passe dans le tordeur bien au-delà d'une simple critique religieuse...

Je rappelle par ailleurs que l'extermination des Sioux a été facilitée dans l'opinion publique américaine à la suite d'un certain Sitting Bull qui célébrait la religion de ses ancêtres dans les Plaines, pratiquant la cérémonie sacrée de la Ghost Dance qui terrifiait les gentils colons dotés évidemment de la vraie religion.

Je pense qu'il y a lieu de faire notre examen de conscience en tant que communauté.

Il y a lieu de réfléchir sur la notion de vérité.

Le premier devoir d'un ou d'une patriote, selon moi, reste encore de protéger les minorités de la majorité. C'est d'ailleurs cette attitude qui permit à notre pays de devenir justement une terre d'accueil. Il serait dommage de sacrifier une si belle conception de la vie ensemble pour satisfaire la rage de personnes fondée sur des rumeurs et des reportages fallacieux de TVA Nouvelles.


lundi 8 janvier 2018

Exégèse des stupidités racistes entendues fréquemment sur les médias sociaux



1- La religion n'est pas une race

Cette affirmation n'est pas illogique en-soi. D'autant plus que l'on ne croie pas au concept de race. Cela dit, on retrouve souvent cette formule chez ceux qui dissimulent ou ignorent (peut-être) leur racisme. Cette affirmation justifie la stigmatisation de la communauté musulmane, des «Arabes» pour faire court, puisque les Arabes forment une race.  La religion n'est pas une race... Allez dire ça aux Juifs qui ont survécu à l'enfer du camp de concentration d'Auschwitz. S'il en reste.

2- Je ne suis pas raciste mais

Tout ce qui vient après le mais est une logorrhée de propos ignobles et indignes d'être repris ici.


3- Ils nous demandent de les respecter, alors qu'ils nous respectent!

Les femmes ont obtenu le droit de vote au 20e siècle. Les hommes qui s'opposaient au vote des femmes trouvaient que les suffragettes manquaient de respect envers les hommes... Martin Luther King manquait de respect envers les Blancs qui travaillent dur pour tolérer des Noirs dans leurs affaires. Et même que les Visages Pâles ont bâti des toilettes rien que pour les «gens de couleur»... Quels ingrats ces Noirs qui passent leur temps à revendiquer!

4- Ils mangent des bébés

On disait des Juifs qu'ils mangeaient des bébés. Des Sioux qu'ils scalpaient tout le monde. Tout ce que l'on dit à l'encontre des Musulmans est souvent du même ordre. Rien que du racisme ordinaire. Avec les «preuves» à l'appui. Le Protocole des Sages de Sion par exemple: un faux fabriqué par la police du Tsar de toutes les Russies et réimprimé par les gogos qui croient au complot des Illuminatis et autres Reptiliens à la peau grise...

5- Djemila Ben Habib

C'est comme demander à un Québécois parti vivre en Alberta de ne pas dénigrer le Québec et les mesures sociales d'extrême-gauche du cheikh Philippe Couillard, adorateur de Karl Marx... Comme s'il avait une poussière libertarienne dans l'oeil qui faussait son jugement et l'incitait à déformer la réalité.

6- Pourquoi ils viennent icitte s'ils ne nous aiment pas?

Je ne vous aime pas, vous les racistes, et pourtant je ne suis pas encore parti. Par contre, je les aime bien, eux, les étrangers. C'est comme s'ils apportaient un peu d'air frais dans un contexte qui sent le renfermé. Un besoin de décoloniser notre pensée, de revoir nos certitudes, d'ouvrir la société à des innovations et discussions d'un autre ordre.

7- 319

Il y a des limites à ne pas dépasser quand on argumente avec un raciste. Il ne faut pas oublier que nos chartes des droits et libertés canadienne et québécoise nous protègent des préjugés comme du racisme. Sans compter l'article 319 du Code criminel canadien qui est très clair à cet effet. Quelqu'un prétend qu'il faut expulser les Musulmans du pays? Relevez son identité. Article 319. Et qu'il mange sa marde. Merci bonsoir.


#319racistes


samedi 6 janvier 2018

Le bon Léon

Léon a toutes les qualités du monde bien que d'aucuns l'auraient traité de raté. Heureusement que Léon ne croise aucun de ceux-là sur son chemin.

-J'vis parmi du bon monde... dit Léon. C'est facile d'avoir les qualités du bon monde parmi tant de bons exemples...

J'oubliais de vous présenter ses formes pour que vous puissiez vous en faire une image mentale.

Léon ressemble à Lou Reed. Et si vous ne savez pas plus qui c'est, mettons Tony Curtis. Ou René Simard. En tout cas, Léon ne ressemble ni à vous ni à moi.

Il vit humblement. Son statut change aux neufs mois. Il passe de l'assistance sociale au travail, puis du travail au chômage, et du chômage à l'aide sociale. Le cycle normal de la survie au pays de l'injustice. Et ne me demandez pas de tout vous expliquer. Il ne suffit que d'arrêter de se regarder le nombril et de renifler l'air vicié des quartiers pauvres un tant soit peu.

Or, Léon est une bénédiction pour son quartier.

Il n'a rien, mais il a tout.

Il a, d'abord et avant tout, son éternel sourire aux lèvres.

On le voit piquer de saintes colères, de temps à autres, mais elles ne durent jamais longtemps et font place à des chansons burlesques de son cru à propos des patates, des carottes et des oignons.

-Patate que oui! Patate que non! Carotte rote l'oignon! Excusez-là! Pompompompom...

Et il poursuit son chemin en chantonnant, communiquant de bonnes paroles aux uns et aux autres, aidant tout un chacun, faisant même de son logis un refuge pour tous les miséreux et loqueteux de son coin.

On vient chez-lui pour prendre un café. Il en a toujours pour tout le monde. Il achète de grosses boîtes de café en spécial. Et ses invités ne font jamais les difficiles. À cheval donné, on ne regarde pas la bride. Et toutes ces sortes de choses.

Donc, Léon est foncièrement un homme bon. Il ne juge personne. Il a des bons mots pour les menteurs et les vauriens. Il trouverait moyen de pardonner un tas de marde.

De temps à autres, pour aider les pauvrichons affamés vers le milieu du mois, il organise chez-lui des repas communautaires. Rien de bien compliqué. Du spaghetti ou des bines. Tout le monde y trouve son compte. Ça rit et ça se dit des folies.

La tablée de Léon est les Nations-Unies. Ça vient de partout et de nulle part. D'Albanie et de Toxicomanie. Il y a même un Inuit. Stud. Celui qui veut devenir Jimmy Hendrix. Sauf qu'il n'a qu'une guitare sèche. Et qu'il a encore des croûtes à manger.

Tout le monde aime Léon, évidemment.

Qui peut ne pas aimer Léon?

Eh bien j'en ai trouvé un.

Jérôme. Celui qui est prof de philo à l'université. Vous savez le petit gars qui porte des tee-shirts moulants à l'effigie de Albert Einstein? C'est lui. Il n'a pas l'air d'un prof, hein? Ça fait longtemps qu'ils n'ont pas plus l'air que la chanson...

On penserait que ces gens-là sont des demis-dieux, des purs génies dotés de toutes les vérités en toutes choses. Et on n'a finalement affaire qu'à des séminaristes prétentieux, infatués d'eux-mêmes et gonflés de vanité puérile.

J'ai rencontré Jérôme le philosophe au hasard d'une promenade. Comme j'ai étudié avec lui il y a longtemps, j'ai cru bon de le saluer et même de lui parler.

Comme il me parlait de Wittgenstein et autres produits universitaires soporifiques, j'ai cru bon de lui faire part de mon admiration pour Léon. Il le connaît puisque Jérôme a longtemps été son voisin, du temps où il étudiait.

-Léon, admirable? C'est un foutu chrétien!

-Léon est chrétien? Je ne savais pas...

-Catholique! Il croit que le Frère André peut te guérir...

-Ah bon... Et alors?

-Je ne peux pas admirer quelqu'un qui croit en Dieu! Je n'admire pas les gens superstitieux!

La conversation s'est arrêtée là. Je voyais bien que Jérôme était toujours aussi cave. Un diplôme n'est pas un gage d'intelligence. On connaît tous le truc du Magicien d'Oz qui donne un diplôme à un épouvantail stupide pour lui conférer l'illusion qu'il a de l'esprit.

Léon est admirable. C'est un bon gars, chrétien ou pas.

Et Jérôme, cette petite crotte séchée de docte rat, athée d'opérette et fion fin finaud, ne lui va pas à la cheville.

D'abord, il ne donne rien à personne. Tout le monde le trouve cupide, stupide, avide et même vide.

Et même moi, qui suis tout de même athée à temps partiel, je préfère de loin Léon le chrétien à tous ces crétins de Jérôme bardés de diplômes qui ont le coeur desséché et l'esprit sectaire.

Léon a d'ailleurs invité Jérôme à son dîner aux bines dimanche prochain.

Il m'a invité aussi. J'y vais parfois. Pas tout le temps.

Jérôme n'y va plus depuis vingt ans. Ça faisait son affaire de bouffer sur le bras de Léon quand il était cassé, dans le temps qu'il était étudiant.

Jérôme se demande comment je fais pour me tenir avec des gens aussi répugnants qui ne nourrissent aucune forme de vie intellectuelle.

Comment ne pas aimer des gens comme Léon, hein?

J'échangerais huit millions de Jérôme pour un Léon, chrétien ou pas.

jeudi 4 janvier 2018

Nous sommes tous des Sioux

Qui veut faire l'ange fait souvent la bête. C'est une formule qui vient de Pascal.

Cela vaut aussi pour les anges exterminateurs. Surtout pour ces derniers. Pour tous ceux qui rêvent de plonger le monde dans une fournaise pour servir je ne sais trop quelles lubies, quels massacres.

Sitting Bull ne faisait pas l'ange. Il priait le Grand Esprit et célébrait le culte de ses ancêtres dans une danse des Esprits qui résonnait dans les Prairies. Ça faisait trembler les Visages Pâles d'entendre les chants des Sioux. On les a bien sûr exterminés. À Wounded Knee entre autres. Et partout ailleurs ensuite. Jusqu'à ce que les Sioux soient parqués dans des réserves, dépouillés de tout, ruinés, punis...

On oublie que le mépris de la religion des Sioux a été déterminant pour susciter l'approbation des massacres par les «philanthropes» de la Maison Blanche. On détestait la religion du Sioux, religion satanique, démoniaque et barbare. On préférait la vraie religion. Celle du Christ conjuguée à celle du Veau d'Or.

On n'a qu'à lire les Relations des Jésuites pour prendre conscience du mépris que les Robes Noires ont pu avoir envers les moeurs de leurs hôtes. Un mépris à la mesure d'une relation qui n'est jamais partie sur de bonnes bases avec les humains de l'Île de la Tortue. Le Sauvage pue. Le Sauvage est adultère. Le Sauvage n'a que des chants sataniques. La religion du Sauvage est fausse. Par contre, ils font du bon sirop d'érable...

***

On a décrit la période des années '60 comme celle de la décolonisation.

Des tas de pays déclarèrent leur indépendance en Afrique et en Asie.

Pourtant, il me semble que cette décolonisation, loin d'être terminée, est encore plus forte aujourd'hui.

Elle nous pousse à remettre en question nos préjugés sociaux, culturels et économiques.

D'autant plus que le monde a rapetissé.

Quelques heures d'avion nous séparent de l'autre côté du globe.

Même pas une micro seconde par l'Internet.

La décolonisation se poursuit par d'autres voies.

L'histoire, telle qu'on l'avait connue, n'est déjà plus.

Le doute s'est installé.

Le temps fera son oeuvre.

***

Un de mes amis Bosniaques aime Geronimo. Il se reconnaît dans ce héros qui a combattu pour que son peuple ne soit pas réduit en poussière par les colons américains.

Je connais aussi des Palestiniens qui apprécient Geronimo.

Et je dirais que moi-même, lorsque j'étais jeune, je préférais toujours jouer le rôle de Geronimo ou Crazy Horse quand d'autres voulaient jouer au Général Custer. Une fierté inconsciente d'être un Sauvage. De ne pas se plier devant le Veau d'Or. De combattre pour sa tribu. Pour la rue Cloutier. Pour les travailleurs floués de l'usine de textile Wabasso. Pour les gars de la Reynold's Aluminium où travaillait mon père. Pour les préposées aux bénéficiaires des foyers et les couturières, comme le fût ma mère. Pour tous ceux et celles qui n'ont pas le sourire aux lèvres quand on leur parle des succès de la Bourse et des miracles de l'économie de marché.

Nous sommes tous traités comme des Sioux.

Nos religions dérangent.

Nos idées dérangent.

Nos existences dérangent.

On voudrait nous faire tous plier l'échine.

Tous comprendre qu'en-dehors de l'argent il n'y a rien.

Soumettons-nous tous au nouveau dieu, Moloch infâme qui réclame ses bûchers et son lot incommensurable de sacrifices humains!

Et pourtant...

***

Et pourtant, un autre monde est possible.

Un monde qui ne repose pas sur ce qu'il y a de plus laid en l'homme.

Ce monde-là, je sais qu'il existe.

J'y vis. Il est bien réel. Ce n'est pas une utopie. Ce n'est pas du pelletage de nuages.

Il y a de la bonté en ce monde.

Il y a du bon monde.

Et ils ne pensent pas tous comme moi.

Et je ne leur demande pas de s'habiller comme moi.

Je demande seulement le respect des uns et des autres.

Respect pour le dieu des autres, même si je n'y crois pas.

Un respect qui ne fait pas abstraction des droits civiques et constitutionnels de tout un chacun. Surtout des marginaux.

La majorité a un devoir moral de protéger les minorités.

Ça s'appelle de la solidarité.

Et c'est vraiment post-colonialiste comme pensée et surtout comme geste...

Je ne peux pas être totalement heureux si mes frères et soeurs souffrent en ce monde.

Traitez-moi de brute hypersensible si vous voulez.

Vous ne trouverez rien en moi pour justifier les pogromes, les razzias et les guerres.

Nous sommes tous des Sioux.

Nous sommes tous des Juifs.

Nous sommes tous des Musulmans.

Nous sommes tous des Québécois.

Et puisque nous sommes dans la ligne de mire des crapules qui asservissent ce monde, il serait utile de nous entendre pour ne plus leur obéir.

Cela se fera, j'en ai la ferme conviction.

Mais je ne sais pas quand.

Kitché Manitou, alias le Grand Esprit, en décidera.




mercredi 3 janvier 2018

Aparté pour mes lecteurs et lectrices

J'ai peu écrit au cours des derniers jours et c'est tant mieux.

J'en ai profité pour recharger mes batteries.

Je débute l'année 2018 sans me presser.

Je nous souhaite la paix, la santé, l'amour et toutes ces sortes de choses.

J'envisage la nouvelle année avec un mélange de crainte et d'espoir.

Je crains que cela ne devienne encore pire.

J'espère que ce ne sera pas le cas.

Je touche du bois.

Pour le moment, tout va bien...

Merci de m'avoir lu en 2017.

Merci de me lire en 2018.

Et coetera,