jeudi 31 août 2017

Observation des baleines par le cachalot que je suis

Les Bergeronnes, 6:15 le matin
Je crains d'être un peu rouillé. Cela fait une semaine que j'ai délaissé mon blog. J'étais en vacances, voyez-vous. Je me suis débranché de tout pour mieux me connecter à la nature. J'ai bien sûr ramener quelques photos. Cependant, elles ne sauraient saisir tout à fait ce goût d'éternité que l'on ressent lorsqu'on fait face à l'immensité.

Nous avons débuté notre voyage par une visite de courtoisie à Baie Saint-Paul, paradis présumé des galeries d'art où l'on peut voir les oeuvres de plusieurs artistes-peintres et sculpteurs du Québec. J'ai vu des Lemieux, des Pellan, des Hudon et j'en passe. C'était les mêmes tableaux que j'ai vus l'an passé. Je présume que ces tableaux invendus servent à mousser la vente d'autres tableaux. C'est le même principe qui anime mon atelier-galerie d'art, à la différence que je n'y expose que mes propres tableaux comme Rembrandt devait le faire dans son échoppe.

Après nous être rincés les yeux avec les tableaux de mes pairs artistes-peintres, moi et ma blonde sommes sagement retournés au même emplacement que nous avions loué l'an dernier au Camping du Gouffre de Baie Saint-Paul. Nous y étions seuls et nous trouvions à deux pas d'une petite ferme où nous pouvions dialoguer avec les chèvres, les moutons et les poules.
Devanture d'une galerie d'art à Baie Saint-Paul

Ça fesse dans le décor.. à Baie Saint-Paul

Camping du Gouffre, Baie Saint-Paul

Le lendemain, nous poursuivions notre road trip en direction d'un camping trouvé au hasard sur Google qui s'appelait le Paradis marin. Ma blonde tenait à voir la mer. Le camping offrait une vue imprenable sur le golfe du Saint-Laurent avec, en prime, la possibilité d'y observer des baleines.

Le camping Paradis marin est propre, bien entretenu, et opère de juin jusqu'à la Fête du travail. On peut y faire du kayak de mer parmi les baleines ou bien les observer à partir de la rive sur plus de dix kilomètres de gros rochers. À vrai dire, je n'aurais jamais cru qu'il était possible de voir des baleines de si près tout en gardant les pieds au sec. Les marsouins, les baleines bleues, les bélugas, les phoques et toutes sortes de volatiles marins surgissent de partout, à quelques mètres des roches. On en voit plus à certaines heures, dont à l'aube ainsi qu'au milieu de l'après-midi. C'est le moment qu'ils choisissent pour se nourrir, je présume.

Les Bergeronnes avec des phoques au loin.
Comme je suis un lève-tôt, j'ai pu profiter d'un véritable bal des baleines que mes photos ne sauraient vous rendre dans toute sa splendeur. À vrai dire, mon Iphone était de trop à certains moments et m'empêchait de savourer la plénitude de ce moment de grâce. De plus, il est difficile de saisir le mouvement avec ce genre d'appareil. Je ne suis qu'un dilettante en matière de photographie. D'aucuns ont certainement pris de plus belles photos que moi. Je me permets tout de même de les partager avec vous.

J'aurais bien des choses à vous raconter encore. J'ai quelques histoires en tête pour alimenter mon blog au cours des prochains jours. Je vous raconterai, entre autres, le récit d'un village où tout le monde quitte le travail quand les baleines font des folies dans la mer: «nous sommes partis sur les roches» peut-on lire sur des petits bouts de papier collés dans toutes les portes des commerces fermés. Pas moyen de vous acheter du lait, du pain, du vin ou des boutons de manchette. Tout le monde a foutu le camp sur les roches. Dans ce village, les gens travaillent seulement pour contempler les baleines à l'année longue. On dirait même que vous les dérangez... Sans doute que je grossis les événements pour leur donner une dimension surnaturelle. Mais n'est-ce pas le but de l'art que d'en mettre plein la vue?

Beaucoup d'impressions de voyages demeurent à étudier avant que de vous les soumettre.

Entre autres, je m'étonne du caractère peu affable et même méfiant des campeurs que j'ai croisés au cours de notre voyage. Est-ce parce que j'ai l'air d'un gros Viking pas très commode avec ma barbe, ma boule à zéro et mon tatouage? Ou bien est-ce parce que les Québécois francophones ne savent pas vivre et ne rendent pas les salutations?

En Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, en Ontario ou bien en Colombie-Britannique, tout le monde se salue le matin. Ce ne sont pas de grandes conversations qui sont nécessairement entamées mais ce petit bonjour fait souvent naître les discussions ultérieurement.

-Good morning! qu'ils se disent sans efforts, naturellement.

Et nous? Pas moyen d'extirper un «bon matin» de ces abrutis qui passent devant vous en ignorant que vous êtes là.

À mon avis, et il est encore très primaire, je crois que mon peuple ne sait pas vivre. Les Québécois ne deviennent affables qu'à l'étranger. Chez-eux, ils sont méfiants, exaspérés, repliés sur eux-mêmes. Triste constat. J'espère seulement avoir tort...

Cela dit, je ne me suis pas laissé démonter par ça.

Ils ne répondent pas à mes salutations? Qu'ils mangent leur marde et c'est tout. Je vais saluer le prochain. Et s'il me salue pas, je vais saluer l'autre ensuite. Et si personne me salue, eh bien j'aurai au moins sauvé l'honneur des Québécois auprès des étrangers qui s'étonnent que tout le monde fasse comme s'ils étaient des fantômes.

-Oui, oui... diront-ils. Ils ne vous parlent pas, ne vous regardent jamais... Hormis ce gros lard au crâne rasé, celui qui avait l'air d'un Viking et qui était accompagné par une belle petite madame tout aussi polie et affable...

Enfin! Pardonnez-moi cette impression négative.

J'en ramène de bien plus positives. Dont ces photos.



























vendredi 25 août 2017

Roselinde: c'est moé qui est boss!

-Ci-mettons qu'admettons ci... C-mettons que qui comme qui dirait... A'mettons que c'est c'que c'est qu'c'est... Admettons. Que. Comme.

Chaque fois que Rosalinde leur parlait personne n'y comprenait rien. Ce qui fait qu'elle devenait rouge de colère et se mettait à hurler.

-C'est moé qui est boss!

Et, effectivement, c'était elle la boss, cette quinquagénaire qui était pourrie en communication.

Tout le monde jouait aux devinettes autour d'elle.

Elle renâclait pour signifier un oui ou bien un non.

Elle roulait même des yeux.

Mais parler? N'y pensez même pas. C'était même pire. Un vrai supplice.

-En seulement que c'que c'est qu'c'est comme c'que c'est c'qu'i' ont à penser c'qu'i' disent si c'est comme si mettons c'qu'i' fait comme t'sais veux dire dans la chanson d'Avabo... Adopo... Amomo... Adomo qué'que chose... qu'est-c'est qu'j'disais? VOUS COMPRENEZ RIEN ENCORE? FAUT TOUTTE QU'ON VOUS EXPLIQUE?

Les employés se disaient entre eux que c'était une crisse de folle. Puis ils l'évitaient. Devinaient ce qu'il y avait à faire.

***

Un jour, Roselinde décide de devenir pilote de l'air. Vous direz que c'est étrange d'avoir cette envie à plus de cinquante-cinq ans. Mais bon, Roselinde est dure à suivre.

-D'a yoù'c'que c'est que j'pourrais comme qui dirait comme si y a à avoir un permis... pilote de l'air... un avion... dans le ciel... capitche?

Finalement, ça n'a pas marché. Ça demandait trop de temps et de cours.

Donc. elle a abandonné son rêve de devenir pilote de l'air.

Mais elle a conservé celui de tous les faire chier avec son air de boeuf et son répugnant non-dit.

***

Le chien de Roselinde s'appelle Noiraud.

Il est inutile de lui demander ce qu'il en pense.

Il se contente de japper comme un chien.

***

Les employés l'ont surnommée Grossedinde, évidemment.

Roselinde, Grossedinde: ça sonne pareil.




jeudi 24 août 2017

Mon choix c'est le plaisir

Je ne sais pas comment certains peuvent faire pour carburer à la haine. Personnellement, ça me rendrait malade. Vivre avec les sourcils perpétuellement en accents circonflexes me répugnent. Respirer l'air vicié d'une doctrine haineuse, baignant dans l'auge de tous les ressentiments, ce n'est certes pas mon choix.

Mon choix, c'est le plaisir.

D'aucuns me trouveront un brin esthète, sinon tout à fait insignifiant. Je vivrai très bien avec ça.

L'esprit de sérieux gangrène nos rapports sociaux. Tout devient pesant à l'aune des idéologies. Qu'elles aillent de gauche à droite ou bien de haut en bas, elles finissent toutes par réclamer l'interprétation d'un spécialiste. Je ne serai pas celui-là. Jamais. Je ne me ferai pas l'exégète des formulaires, des sondages et autres éructations des commentateurs sportifs de la petite game politique.

Face au chaos qui menace ce monde, je me réfugie souvent dans les arts et les lettres. Je ne dédaigne pas les luttes sociales. Je participe encore à des manifs. J'envoie encore des lettres aux journaux et signe des pétitions. Cependant, je me tiens à l'écart des groupes. Je participe de mon propre chef aux actions que je juge nécessaire d'entreprendre. Je ne réunis pas de comité pour décider l'orientation que prendra ma conscience sociale. Je donne mais je reprends aussitôt ma liberté, mon droit ultime de rêver, de discuter avec les gens, de parler d'autres choses que de la maudite politique. Bref, je me sens plus près de Docteur Jivago que de Lénine face aux menées de ce monde. Plus poète que prophète. Plus aidant naturel que maltraitant habituel.

Mon choix c'est le plaisir.

Suis-je épicurien? Pourquoi tant de mots pour décrire ce qui se passe d'explications... Je prends la vie comme elle vient. Je suis le courant. J'essaie de ne pas gâcher chaque jour avec cet esprit de sérieux qui finit par rendre toxiques les rapports humains.

Ce plaisir que je choisis n'a rien de narcissique ou d'individualiste. Il n'y a pas de plaisirs qui ne soient partagés. On est jamais seul dans l'univers à moins d'être totalement siphonné par les deux bouts.

Quand j'en vois s'enthousiasmer pour un détail de l'histoire, un faits divers ou bien un discours politique, je crains souvent le pire.

Les gens nonchalants ont généralement cette bienveillance silencieuse qui met fin aux guillotines. C'est sur cette bienveillance légèrement indifférente que repose la paix et la tranquillité au sein de toute communauté humaine. Enlever cette nonchalance et nous nous retrouverons vite en présence de bêtes immondes qui s'entre-dévorent. Enlever le plaisir et il ne restera plus rien de bon en l'homme. C'est le méchant qui va sortir.

Bien sûr qu'il y a l'argent. Mais je ne rentrerai pas dans ce sujet.

Je vis comme s'il n'existait pas, l'argent.

Je sais bien qu'il est là, mais ce n'est pas un sujet de conversation digne d'un gentilhomme.

L'argent, c'est une manière d'oublier nos devoirs les uns envers les autres.

Un troc qui n'en est pas tout à fait un.

Cela ne rentre pas dans mon équation quand je parle de la vie, du plaisir.

Même si le fait de ne pas avoir d'argent puisse nuire au plaisir.

Pourtant, il suffit de tomber malade pour que notre notion du plaisir se métamorphose.

Marcher dix kilomètres après avoir boité pendant un an est une forme de plaisir.

Il prend plusieurs autres formes, le plaisir.

Il n'inclue pas le militantisme exacerbé.

L'aveuglement doctrinaire.

La haine.


mercredi 23 août 2017

Nouvelle toile

Et hop! Une nouvelle toile qui représente So, ma belle-fille, à l'Île Saint-Quentin.


mardi 22 août 2017

Ma nouvelle toile

Une commande spéciale: le Grand Prix de Trois-Rivières.

Avec deux autres reproductions de mes toiles trouvées dans mes archives...







lundi 21 août 2017

Absurde, non?

Si l'on me demandait quelle est mon option politique aujourd'hui, je n'aurais qu'une seule formule: aimons-nous les uns les autres. Je ne sais pas les noms de tous ceux qui ont pu dire ça au cours de l'histoire. À vrai dire, même l'histoire m'importe peu. On lui fait dire n'importe quoi, l'histoire. On finirait même par vous étriper pour une virgule que vous n'avez pas comprise.

Au milieu de ce fatras d'idéologies et de prêts-à-penser livrés à toutes les sauces, je m'abandonne au non-dit, à quelque chose comme la sensation de marcher pieds nus sur la terre, simplement.

Évidemment, je ne suis pas imperméable aux doctrines. Elles viennent parfois me siffler des ci et des ça à l'oreille. Quand ce ne sont pas des statistiques ou bien la démonstration mathématique qui justifie toutes formes de préjugés sociaux.

Je résiste du mieux que je peux en me jurant que je ne vais pas mourir pour des idées.

Je vais dénoncer l'injustice.

Je vais encore descendre dans la rue.

Je vais signer des pétitions et résister.

Cependant, je ne m'abandonnerai pas à la haine.

Ni à la violence.

La violence peut être instrumentalisée par les services de renseignements pour discréditer un mouvement d'opposition.

Des États ont pu imiter la violence. Rarement ils ont imité l'amour et la paix. Sinon jamais.

***

La fin ne justifie pas les moyens.

Ce sont les moyens qui justifient la fin.

Le proverbe est toujours formulé à l'envers pour une raison qui m'échappe.

D'où, sans doute, les guerres.

Tout ça parce que le proverbe aura été écrit pendant un moment d'inattention.

Comme quoi l'histoire nous ferait faire n'importe quoi.

Pourvu que ce soit écrit.

Absurde, non?

vendredi 18 août 2017

Ti-Pet, Tipoune, Amadou & ses sacrés lascars

C'était un couple dans la soixantaine qui vivait depuis toujours dans le fin fond du Rang du Pays Brûlé, à Grand St-Esprit.

Sa femme l'appelait Ti-Pet. Ti-Pet par-ci. Ti-Pet par-là.

-C'est parce que je l'aime qu'j'appelle Ti-Pet mon Ti-Pet! disait-elle lorsqu'elle était en présence d'inconnus étonnés par ce sobriquet.

Ti-Pet ne trouvait rien à redire. Il s'était habitué à ce que sa femme l'appelât Ti-Pet. 

Lui-même l'appelait Tipoune.

Et Tipoune ne s'en offusquait pas. Même qu'elle trouvait ça joli, Tipoune.

***

Amadou n'avait jamais mangé de sandwich au gingembre.

Sauf qu'on lui avait fait accroire que ça existait, des sandwichs au gingembre.

Face à son incrédulité ses copains ont tranché du gingembre qu'ils ont déposé entre deux tranches de pain badigeonnées de mayonnaise. Puis ils lui ont tendu ce sandwich au gingembre qui lui semblât trop croquant.

-Ça goûte la marde ça tabarnak! lança Amadou en crachant sa bouchée de gingembre cru au pain brun.

Les gars s'esclaffèrent. Puis ils lui expliquèrent que c'était la première fois qu'il voyait quelqu'un manger un sandwich au gingembre. 

C'est plutôt mince comme histoire, je sais.

Mais bon. ça change de la routine.

On finirait par s'asphyxier l'âme à force de s'en prendre à Amadou pour sa religion ou ses coutumes culinaires.

D'abord, non, «ils» ne mangent pas de sandwichs au gingembre.

Personne ne mange ça.

Voilà un préjugé de moins à bas prix.

Je ne vous demanderai même pas de me dire merci.

***

Où en étais-je?

Je ne sais plus.

Je voulais écrire quelque chose d'important. De quoi de sérieux. Puis je l'ai effacé. J'ai recommencé dans le même registre: les droits de l'homme, la lutte contre le racisme, etc. Puis j'ai tout effacé encore. Tout ça pour me concentrer sur Ti-Pet, Ti-Poune, Amadou et ses sacrés lascars.

Ça m'a fait du bien...




jeudi 17 août 2017

Special K

K. était un gars bin correct pis toutte.

On l'appelait K à cause des céréales. I' mangeait des Special K. Pas plus compliqué que ça, son surnom. Pis el' pire c'est que personne savait son nom. En tout cas, ni moé ni Jos Létourneau, mon autre voisin.

K. restait juste entre moé pis Jos Létourneau. Lui ça devait être 855. Moé c'tait 857 pis Létourneau 859... En tous 'es cas... On ne fera pas des logarithmes. Compter des ci pis des ça moé là... Pas rien qu'ça à faire.

Ça fait que K. y'était un gars bin correct pis toutte. Pis c'tait bin tant mieux parce que K. c'était mon voisin.

Ej' sais bin pas de qu'est-cé qui faisait dans 'a vie. J'pense qu'i' faisait de la mécanique. Y'arrivait toujours graissé comme ça y'avait couché en d'sour d'un char. Peut-être bin qu'i' travaillait dans un garage. Peut-être qu'i' mettait des pneus pis toutte. Pie peut-être pas aussi. Ça fait pas mal de peut-être. Bin c'est d'même. C'est pas moé qui décide dans 'a vie.

Ça fait que K., Special K toé chose, i' s'met l'autre jour à m'parler.

-Salut, qu'i' m'dit.

C'est vrai que c'était la première fois qu'i' répondait à un des trois cents salut que j'y avait faitte avant. Comme quoi i' m'arrivait d'penser que c'te calice-là i' savait pas vivre pis toutte. Des fois on juge trop vite. T'sais veux dire?

-Salut, qu'i' m'dit, donc.

Dis donc...

Dis don'... Ha! Ha! Dis doncques toi!

En tous 'es cas...

J'y réponds salut.

-Salut!

-Fait beau...

-Ouep.

Pis pas plus que ça. Le lendemain j'le r'voés encore. 

-Salut.

-Salut, qu'i' m'répond.

-Pis les Special K?

-J'mange tout l'temps des Special K.

-E' l'sais. On dirait qu'tu manges juste ça coq! Les poubelles sont pleines de boîtes de Special K.! Ha! Ha!

-J'aime ça des Special K.

Ah bin sûr que j'me dis. On peut aimer ça des Special K.

C'est pour ça qu'on l'appelle K.

Mais ça s'arrête pas là.

Trois jours après i' meurt frappé par une auto.

J'veux bien croire que ce sont des choses qui arrivent à tous 'es jours. El' monde meurt pis vit à tous 'es jours. C'est pas moé qui décide ça dans 'a vie!

Bin ça m'rentre pas tout l'temps dans 'a tête, t'sais.

Y'était spécial, K. Special K. Ouais.



Quelques bédés en rappel...