mardi 31 octobre 2017

Le magicien d'Oz à Trois-Rivières

Je ne suis pas si courageux que ça voyons!

On me dit courageux. Courageux parce que je fais du vélo tôt le matin quand le mercure frôle le point de congélation.

-Il doit faire froid! Brrr... J'en gèle pour toi!

-Il n'y a aucun courage là-dedans... Cela fait partie de mon hygiène de vie et j'en tire un certain plaisir. C'est parfois la plus belle aventure de ma journée. Ce n'est pas un sacrifice. C'est une libération. Donc, aucun courage là-dedans.

On doit me trouver pisse-vinaigre et sans doute le suis-je un peu.

Vous comprendrez que ça me chicote de passer pour un aventurier seulement parce que je fais du vélo ou vais à pied acheter des trucs au dépanneur. Cela me désole pour eux.

Si moi, le gros lard, je peux faire ça, eh bien pourquoi n'en faites vous pas autant, sinon plus que le gros lard? Je n'y comprends rien.

Et tant qu'à n'y rien comprendre, aussi bien pédaler tout autour de la ville en se laissant pratiquement mener tout seul par son vélo. Ne serait-ce que pour démontrer à toute la ville que les gros lards ne sont pas tous empotés et qu'ils ont parfois des mollets gros comme des troncs d'arbre.

***

Il y avait de fortes pluies assaisonnées de forts vents hier. C'est de saison.

Les vents atteignaient autour de 100 km/h.

Heureusement j'eus le vent dans le dos tant le matin que le soir, pour mon retour.

Et même que mon retour a été spectaculaire.

Je n'aurai jamais roulé aussi vite en vélo. J'étais sur ma plus haute vitesse sur mon Peugeot et c'était comme si je pédalais dans le vide. C'était comme si mon dos servait de voile. J'allais tellement vite que j'avais l'impression que mon vélo était sur le point d'éclater.

Je m'arrête à un stop, au centre-ville, au coin des rues St-Georges et Notre-Dame. Je pose le pied à terre et le vent, croyez-le ou non, m'entraîne dix pieds plus loin. Je ne peux même plus stopper pour faire mes arrêts tellement les vents me poussent. Je monte la côte de la rue Notre-Dame comme si je la descendais. J'ai soudain l'impression que le gros lard ne pèse plus que 75 livres tout trempe. Vers l'infini et plus loin encore... Je suis aspiré par un trou noir... L'espace-temps se dilate... Impressions propres aux intellos qui se farcissent trop de science-fiction.

Je ne me souviens pas d'avoir roulé aussi vite sur un vélo.

Je vous avouerai même que c'était un peu sinistre comme balade en vélo. Les branches des arbres craquaient au-dessus de ma tête. Les toitures laissaient s'envoler des bouts de tuiles goudronnées. Je m'attendais au pire. Comme de recevoir une baleine en pleine figure.

***

Ce matin, les vents sont tout aussi violents.

J'ai roulé à la vitesse d'une tortue, à contre-vents. C'était comme si je n'avançais pas.

Je me suis mis à penser à toutes sortes de niaiseries en pédalant comme si je grimpais l'Everest.

-Il devrait y avoir un système de voiles après les vélos... Ou bien une manière de convertir en énergie un vent de face... Ou bien, pourquoi pas, quelque chose comme une invention de Tesla: capter les ondes gravitationnelles de la Terre dans un oscillateur pour en produire une énergie gratuite et perpétuelle...

Vous voyez bien que je suis un christ de fou.

Ou bien que le vélo ça fait réfléchir...

Ça dépend de qui vous êtes.

Mes amis m'acceptent comme je suis.

Les autres n'ont qu'à ne pas me lire.

On ne gagne jamais rien à se faire tarabuster par des gens méchants.

Ce n'est même pas divertissant.

Aussi bien les flusher tout de suite.

Je crois en leur rédemption mais je ne m'en ferai pas l'initiateur.

J'ai d'autres choses à faire, moi.

Comme faire du vélo par exemple.

Du vélo jusqu'à la première neige.

Dès que je risquerai de me casser la gueule, je rangerai mon vélo.

Et vous savez pourquoi?

Parce que je n'ai pas tant de courage que ça.



lundi 30 octobre 2017

Pourquoi je vais encore voter...

Beaucoup de gens autour de moi n'iront pas voter. Je suis sensible aux raisons qu'ils me donnent. Je comprends leur lassitude, leur refus de jouer un jeu où ils sont toujours perdants quoi qu'il advienne. Comme si les dés étaient pipés et que tout était décidé d'avance.

Je suis sensible aux abstentionnistes qui me disent qu'ils ne veulent pas apporter à notre système électoral une légitimité indue.

Cela dit, j'irai voter.

De reculons, sans doute, mais je vais tout de même y aller.

Parce qu'il n'y a rien d'autre pour le moment.

C'est ça et c'est tout.

J'irai voter. Et puis après?

Et puis après quoi? J'aurai voté...

***

Personnellement, mes idées politiques me semblent à 100 années lumière de celles véhiculées par l'ensemble des politiciens.

D'abord, je ne crois pas aux «leaders» autoproclamés. Ce n'est pas parce que tu as assommé tout le monde autour de toi que tu es un leader. Tu es seulement un hostie de sale qui a assommé tout le monde autour de toi. Pas besoin d'en rajouter pour te donner bonne conscience d'être un hostie de sale.

Bref, je ne voterai pas pour un hostie de sale.

Je vais probablement voter pour ce que l'on m'offre pour le moment. C'est-à-dire pour le moins sale.

Mais cela ne suscitera pas mon adhésion. Ni mon enthousiasme. Et encore moins mon admiration.

Je comprends que notre démocratie est malade.

Son modèle correspond à une époque où 80% de la population ne savait ni lire ni écrire. Aujourd'hui, même les gens qui ne savent ni lire ni écrire peuvent se mettre à parler au monde via les médias sociaux. Ça ne semble pas toujours un progrès. Mais ce serait fou de croire que cela ne changera pas nos rapports sociaux et, ultimement, notre relation avec la politique.

La démocratie parlementaire telle qu'elle existe est déphasée par rapport à notre époque qui, à plein d'autres niveaux, favorise la prise de parole et de pouvoir.

C'est parce qu'il n'y a pas assez de démocratie dans la démocratie que la démocratie indiffère tout un chacun. Nous sommes entrés dans le 21e siècle avec un vieux tacot qui ne nous rend plus service. Il faudra songer à modifier le moteur. Voir à changer de véhicule. Il y en a de meilleurs qui sont plus interactifs...

Des réformes viendront inévitablement.

Quant à moi, je serais pour que l'on choisisse au hasard les représentants du peuple, comme on le fait pour les jurés lors d'un procès.

Je ne m'expliquerai pas plus longtemps sur cette idée.

Elle suivra naturellement son chemin jusqu'à sa réalisation.

Si nous sommes tous égaux, il n'y a aucune raison pour que le vote ne soit pas fait au hasard...

Est-ce utopique? Non. Ça se faisait ainsi, parfois, dans la Grèce antique. Et ça se fait même ailleurs, dont pour la sélection des jurés.

Est-ce la bonne réponse? Non. Il n'y a pas de bonnes réponses en politique. Il n'y a que de bonnes questions...

***

Il y aura des élections municipales le 5 novembre prochain.

L'autocrate et pseudo-maire Yves Lévesque représente tout ce que je n'aime pas de la politique. Son style, apparenté aux années '50, est digne de Duplessis. C'est le gars qui fait sa place à la mairie en criant après tout le monde. Hurler est sa manière de gouverner. Je ne peux pas concevoir qu'on le reconduise pour un troisième mandat, d'autant plus que son principal conseiller, l'ineffable Roger D. Landry, est payé plus cher que lui... Comme si le vrai maire de Trois-Rivières, au fond, c'était Roger D. Landry... En plus de ne pas vouloir voter pour le pseudo-maire Yves Lévesque, je sais qu'en votant pour lui je voterais pour Roger D. Landry. Trois-Rivières mérite mieux que ça. On passe pour une bande de colons pas de colonne qui se font empissetter par des baveux de l'école secondaire qui ont oublié de grandir.

Je vais donc voter pour Jean-François Aubin à titre de maire de Trois-Rivières. Il me semble un peu plus soucieux de promouvoir une vision communautaire pour Trois-Rivières où les consultations populaires ne seront pas méprisées par le Conseil de Ville.

Je vais voter pour Denis Roy pour le poste de conseiller municipal dans mon district. C'est un spécialiste des communications. Un type cultivé. Un gars qui s'est fait chier aux séances publiques de l'Hôtel de Ville plus souvent qu'à mon tour. Chaque fois que j'y suis allé j'ai failli cracher mes tripes à la sortie tellement le spectacle était indigeste. Roy gardait le fort, en quelque sorte. Il a travaillé pour. Il n'arrive pas là avec l'idée de promouvoir seulement sa petite personne. C'est du moins l'impression qu'il m'inspire, à tort ou à raison.

***

Rien n'est parfait.

Je vote dans un système imparfait.

Cela me révulse que l'on puisse remplir des autobus de petits vieux pour bourrer les urnes lors des élections anticipées.

Cela me répugne de voir les manoeuvres crapuleuses des travailleurs d'élections.

Et ça tombe bien parce que je ne suis pas parfait.

Si je suis perfectible, ce système de marde doit bien l'être aussi.

Ça ne m'en prend pas plus pour afficher un sourire.

Faut pas chercher à se prendre au sérieux.

Surtout avec la politique.

Mieux vaut chanter Give Peace A Chance avec Lennon que de perdre son temps avec des cretons qui se présentent aux élections pour arrondir leurs fins de mois.

La révolution, c'est la culture qui l'apporte.

Jamais la politique.

Jamais.




dimanche 29 octobre 2017

Je trouve ma consolation dans les arts et les lettres

«Enfin, mon âme fait explosion, et sagement elle me crie : « N'importe où ! n'importe où ! pourvu que ce soit hors de ce monde !» 
Charles Baudelaire, Le Spleen de Paris

Boèce vivait au temps où l'empire romain d'occident s'était effondré. Le résidus d'empereur de Rome, à l'époque, un Ostrogoth dénommé Théodoric, l'a fait arrêté et condamné à mort parce qu'il philosophait un peu trop avec Justin 1er, empereur de Constantinople. Boèce fut accusé de complot et condamné à mort. Dans l'attente de son exécution, en prison, Boèce trouvait sa consolation dans la philosophie. C'est tout ce qui lui restait à faire. Mince consolation avant que de se faire trancher la tête.

***

Je trouve ma consolation dans la pratique des arts. Il y a longtemps que la philosophie me désole. Comme le dit un proverbe chinois, le plus grand siècle de la philosophie fut celui où il n'y avait pas de philosophes...

J'ironise à peine. J'ai tant lu de philosophes qui ne disaient rien pendant des milliers de pages. À vrai dire, je m'accuse d'être insensible aux jeux d'esprit sur la chaise en-soi, l'être, le non-être et p implique q...

J'ai obtenu de bonnes notes à l'université, à la faculté de philosophie. J'ai compris assez tôt qu'il n'y avait rien à comprendre à la philosophie au sein des institutions établies. J'ai réalisé que je préférais de loin la littérature à tous ces concepts qui ne m'ont jamais intéressés. Si c'est laid, mal écrit, boursouflé de métalangage, je décroche. Je ne lis plus ceux qui ne savent pas écrire. Ou si peu...

Je lis pour le plaisir en fait.

Le plaisir de satisfaire ma curiosité insatiable. Le plaisir de dialoguer avec un être humain via cette lecture.

Curiosité qui n'est pas satisfaite par les travaux de Kant, Hegel, Marx, Husserl et les autres. Ils m'emmerdent profondément. Et ce n'est pas parce que je ne les comprends pas. C'est parce que je les comprends qu'ils m'emmerdent. Je ne dialogue jamais avec eux: ils m'emmerdent. Comment pouvaient-ils s'intéresser à des constructions mentales si sèches alors qu'il y a la musique, les arts et les lettres? Leurs thèses, antithèses et synthèses ont pour principal défaut de m'apparaître ennuyantes.

J'ai accroché un tant à Nietzsche pour sa musique et sa poésie maladroite. Encore là, j'ai fini par le trouver bien lourd, bourré de préjugés sociaux et pas si brillant que ses disciples voudraient bien nous le faire croire.

L'homme du ressentiment, il est bien mieux expliqué dans Crime et châtiment de Dostoïevski que dans les oeuvres complètes de Nietzsche. Je vous en torcherais bien un papier mais je n'ai pas tout ce temps-là à perdre. Tout ça pour dire que mille autres écrivains, sans prétentions philosophiques, figurent en tête de lice de mes influences «philosophiques». Bien avant Nietzsche qui n'était pourtant pas le pire de la bande. Je trouve plus de vérité dans un poème de Jacques Prévert que dans toute la section Philosophie des bibliothèques. Donnez-moi du Prévert et je vous rends tout Sartre, Wittgenstein, Bergson et autres fumistes soporifiques!

***

L'art est mon ultime refuge pour résister à la médiocrité de mon époque. J'oublie Trump et bien d'autres encore en me consacrant à créer mon monde quoi qu'il advienne.

Quand j'entends les uns et les autres se déchirer pour des concepts vides, comme une stratégie électorale par exemple, eh bien j'ai seulement l'envie de reprendre mes pinceaux, mes guitares, mes tambours ou mes harmonicas. N'importe quoi sauf me faire chier avec des demi-pensées qui ne valent même pas un simple bonjour routinier.

On veut nous faire accroire que telle idée, telle idéologie ou telle religion est pleine de merveilleux. Puis l'on sait que c'est encore une autre perte de temps et une insulte à la patience. Mieux vaut faire un pas de côté. Mieux vaut fuir et se réfugier dans mon atelier pour peindre des gros nez, des grosses fesses et des gros seins.

Évidemment, cela ne veut pas dire que je sois insensible et indifférent face aux injustices. Bien au contraire! C'est parce que j'y suis sensible que je renonce à la philosophie, à la religion et aux institutions établies. Je sais que je n'y trouverai jamais rien de bon. Je ne ferais que m'enfoncer encore plus dans la désolation, alors que ma liberté de pensée, toute relative, pas nécessairement extravagante, m'est plus précieuse que tout. Je ne veux pas abdiquer ma raison. Je ne veux pas dévisser ma tête pour me soumettre à des idées qui n'en sont pas. Je ne veux ni plaire, ni séduire, ni avoir raison. Je veux seulement avoir la christ de paix.

Bref, je veux créer. C'est ma manière de ne plus avoir tort.

L'important, pour moi, ce n'est pas ce que j'ai fait hier. C'est ce que je crée en ce moment. Ce que je vais créer demain.

Ce n'est même pas l'idée de voir briller mon nom en lettres de feu qui m'anime, même si j'atteins humblement une certaine popularité tout en demeurant tout seul dans mon coin par pur instinct de préservation spirituelle. Je veux sauver mon âme en quelque sorte. Je ne veux pas devenir ce que je déteste. Je ne serai donc jamais un serviteur de la laideur, de l'immoralité et de l'injustice. Je ne ferai jamais de concessions pour être en paix avec ma conscience qui me dicte de ne pas céder devant les richesses de ce monde. Sans rigoler, elles me seraient acquises si je faisais au moins semblant comme tel ou tel faux-cul opportuniste qui se vante d'être dans les bonnes grâces de telle ou telle communauté hermétique de pantins satisfaits de n'être pas eux-mêmes.

Vous pourriez dire, avec raison, que je suis un christ de fou. Je le prendrais pour un compliment. On doit tous les progrès de l'humanité aux fous. On leur doit surtout de fascinants moments de distraction qui nous permettent de vivre un peu avant que de mourir. On est toujours trop sage. Et jamais assez fou. On se souvient des fous qu'on a rencontrés en voyage. Jamais des gens ordinaires. Ou si peu. Ils n'adhèrent pas à la mémoire par manque de densité existentielle. Ce n'est pas de leur faute ni de la mienne. Il leur faudrait devenir fous.

***

Fou comme moi, tiens.

Fou comme le foin fou.

Fou à délier les langues.

Fou à en giguer sur un air de ruine-babines.

Voilà, c'est ça: je suis fou.

Fou de vivre intensément.

Fou d'aimer.

Fou de croire en la paix dans le monde, en l'amitié, en la tolérance...

Fou de jouer le jeu de la vie à ma façon, jusqu'au dernier souffle.

Fou.

Mais pas tant que ça...

Ça pense sous mon scalp.

Peut-être pas comme l'enseignent les institutions académiques.

Peut-être pas tant que ça aussi...

Bref, je trouve ma consolation dans l'art.

Et je préfère dire n'importe quoi, en toute sincérité, que de mentir élégamment en concepts dont je me contrefous.

vendredi 27 octobre 2017

Le pauvre gars qui était affûteur de couteaux

Résultats de recherche d'images pour « affuteur de couteau photo 1900 »

Il était une fois un gars qui mesurait cinq pieds huit pouces et qui était affûteur de couteaux de son métier.

Quand il rentrait le soir, il n'était jamais épuisé puisque plus personne ne fait affûter ses couteaux de nos jours. Quand le couteau ne coupe plus: on le jette. 

Aussi, ce gars-là, l'affûteur de couteaux au chômage, eh bien il se sentait jeté au panier, abandonné, flushé...

Il en vint à détester notre époque de façon si véhémente qu'il passait son temps à crier le mot Calculatrice!

-Calculatrice! hurlait-il en montrant ses dents un peu tachées et pas très droites.

N'essayez pas de comprendre ce gars-là.

Lui-même ne se comprenait pas.

D'ailleurs, il n'affûtait même plus ses propres couteaux.

C'est tout dire.

Du coup, ses couteaux s'émoussaient.

Et son talent, qu'on avait dit prodigieux il y a 20 ans, disparut totalement.

L'affûteur de couteaux devint un trou du cul de cinq pieds huit pouces qui ne travaille pas et qui se lave avec du savon Irish Spring.

Il tenta pourtant de travailler chez Wal-Marde.

Mais Wal-Marde ne voulait pas de lui. On le trouvait trop laid.

De plus on le disait bizarre. Pendant sa formation, il n'avait pas arrêté de crier Calculatrice! Et il se grattait souvent un testicule ce qui, évidemment, n'avait rien d'obscène.

On voit bien que l'ascenseur ne monte pas jusqu'en haut chez ce gars-là mais comment vous sentiriez-vous devant un gars qui se tient debout devant vous en se grattant toujours la poche? Ne lui diriez-vous pas que vous ne voulez rien savoir de sa tendresse? C'est évident.

Tout le monde mérite de travailler.

Même les snappés comme ce pauvre gars-là.

L'affûteur de couteaux sans travail qui se grattait toujours la poche tout en criant Calculatrice!


jeudi 26 octobre 2017

La fin du monde à n'importe quelle heure

J'avais 10 ans. Peut-être 9. En tout cas, j'étais jeune.

La radio et la télé relayaient une nouvelle qu'un type Untel avait prédit la fin du monde pour le lendemain par une guerre nucléaire.

J'étais jeune et naïf.

J'étais prêt à le croire. Les humains m'avaient toujours semblé stupides. C'était dans l'ordre logique des choses que tout ça finisse par une guerre nucléaire.

Le lendemain, je ne me souviens pas s'il pleuvait ou s'il faisait soleil.

Je me souviens seulement qu'il n'y eut pas de guerre nucléaire ce jour-là.

***

Un peu plus tard.

Je devais avoir 18 ans. Peut-être 19. En tout cas j'étais pubère.

Le sida. Nous allions tous en mourir.

Céline Dion chantait Une colombe devant le pape Jean-Paul II au stade olympique plein à craquer.

Le sida. Maladie de Dieu qui frappait les vicieux...

Désormais, l'amour serait sous scellé au latex.

Et le sida? Eh bien la peur de tous en mourir est passée.

Cela demeure une sale maladie.

Mais bon, on a l'impression que cela ne nous arrivera pas.

***

Il y eut aussi le bogue de l'an 2000. J'avais 31 ans pile puisque le bogue est survenu en 1999.

C'était quoi le bogue de l'an 2000? Eh bien l'on croyait à tort que tous les systèmes informatiques de la planète allaient être paralysés le 1 janvier 2000, lorsque le compteur passerait de 99 à 00 dans la machine numérique. On prédisait le pire: les banques ne fonctionneraient plus. La circulation aérienne serait paralysée. Même les systèmes de défense anti-missiles tomberaient en panne. C'était ça, le bogue de l'an 2000.

Le 1er janvier 2000, j'animais une émission à CKIA radio Basse-Ville, à Québec.

Le bogue n'est pas survenu. Ni le 1er janvier, ni le 2.

Un jour on en parlera comme d'une psychose collective.

***

Le 11 septembre 2001 tout bascula dans le chaos.

Des tas de civils sont morts pour rien.

Après le péril rouge et le péril jaune, place au péril islamique!

Encore une fois la démesure, l'apocalypse...

Puis ce fut la grippe H1N1... L'humanité disparaîtrait à 99,98%. Il fallait absolument aller se faire vacciner.

Ce sera quoi la prochaine niaiserie?





lundi 23 octobre 2017

Lassitude

J'écris peu depuis quelques jours. C'est tout le contraire de mon habitude. Je sens une lassitude face aux débats qui naissent et pourrissent sur les médias sociaux. J'ai envie de contempler les couleurs de l'automne. J'ai envie d'observer le vol d'un vulgaire moineau. J'ai envie de prendre un bon café en ne faisant rien du tout que de boire ce bon café.

Je ne vois heureusement plus le monde comme je le voyais à 20 ans. Les rêves de gloire, l'ambition démesurée, l'action aveugle, la farce politique, tout ça m'indiffère désormais. Je vis pour vivre, point à la ligne. Je m'éloigne de toutes sources de stress, d'anxiété et de commérage.

J'ai des points de vue. Je les émets de vive voix. J'en parle moins sur mon blog. Je me dis que je ne suis pas un guide sûr. Je n'adhère à rien. Je suis un humaniste qui ne voudrait pas devenir membre d'un club d'humanistes. Individualiste? Sans doute un peu. Mais pas nécessairement centré sur mon nombril. Je voudrais que mon voyage sur cette Terre soit agréable, pour moi comme pour les gens qui voyagent à mes côtés. Est-ce trop demander?

Décortiquer les raisons, la logique, la stratégie, la chose à faire ou à ne pas faire, tout ça me fait bayer aux corneilles.

Vivre, aimer et créer. Tout le reste c'est pour nous empêcher d'être heureux.

Je puis me tromper.

Je pourrais même vous tromper.

Je ne suis pas la tête à Papineau.

Et même sa tête, Papineau, il peut bien se la garder pour lui.

Je ne suis qu'un patient dans une salle d'attente, comme tout le monde.

Qui regarde un moineau voler.

Ou bien une craque sur un mur.

Et qui se dit que c'est beau la vie.

Même si ça ne veut strictement rien dire pour d'autres.


vendredi 20 octobre 2017

Une scène tirée du Docteur Jivago de David Lean

Je ne vous cache pas que Docteur Jivago fait partie de mes films préférés. L'original, évidemment, tourné par David Lean. J'ai lu le roman de Boris Pasternak, mais curieusement ce sont les images de ce film qui me hantent lorsqu'on évoque Docteur Jivago au cours d'une conversation.

Je pourrais vous décrire des tas de scènes. J'ai dû voir le film au moins dix fois.

Je voudrais plutôt ne me limiter qu'à une seule.

Ça se passe au printemps de 1917. Les soldats désertent le front. Docteur Jivago fait partie de ces milliers de soldats russes qui ne veulent plus rien savoir de la guerre. Pourquoi de pauvres gars russes devraient tuer de pauvres gars allemands quand de chaque côté l'élite vit toujours à l'abri des bombes?

On voit donc des tas de déserteurs sur la route qui tombent face à face avec un petit régiment de jeunes recrues que l'on envoie au front. Les déserteurs souhaitent d'abord s'enfuir mais leur chef leur fait comprendre qu'ils doivent rester groupés. Il faut dire que les déserteurs sont armés...

Le régiment poursuit son chemin puis les déserteurs leur disent de ne pas aller à la boucherie. Les recrues se mêlent aux déserteurs. Tout le monde s'embrasse. C'est la révolution.

Les chefs du régiment des recrues tentent vainement de se faire obéir.

Leur temps est révolu.


jeudi 19 octobre 2017

En rappel: 6 septembre 2008 / La vie ne tient parfois qu'à un dentier

La vie ne tient parfois qu'à un dentier. Je veux dire la vraie vie, avec la bonne chère, les plaisirs de la chair et tout ce qui coûte cher.

Ce gars-là s'appelait Gaston. Et il n'avait pas de dentier. Il ressemblait vaguement au genre de type qui travaille pour les shylocks, le type fier à bras, mâchoire carrée, traits caucasiens, yeux légèrement bridés, cheveux gris clairsemés au sommet, large d'épaules et bedon dur comme de la brique.

C'était en fait un ancien travailleur de la Canadian International Pulp and Paper Company, bref de la cé-ail-pi, surnom que les citoyens de Twois-Ivièwes accolaient à cette célèbre papetière. Je dis «accolaient» parce que l'usine a été démantelée. C'est un peu à cause de ça, par ailleurs, que Gaston n'avait plus de dentier. Je m'explique.

Ou plutôt, laissons Gaston s'expliquer. Vous me lisez et m'écoutez trop souvent. Je sens que je vais finir par vous lasser.

Il me faut tout de même expliquer où j'ai rencontré Gaston, sans son dentier. Un récit sans décor, c'est comme une pièce de théâtre sans toit... ou un poisson sans arêtes? Ok, j'arrête!

J'ai rencontré Gaston au Dunkin' Donuts, au coin des rues St-Maurice et Laviolette, à Twois-Ivièwes, bon.

Il s'est approché de moi et m'a demandé s'il pouvait prendre Le Journal de Montréal qui traînait sur la table, devant moi.

-Oui, oui, que je lui ai dit. Pas d'problèmes.

-J'peux-tu m'assoir icitte? J'te dérange pas au moins? qu'il me demanda poliment.

Il ne m'a pas laissé le temps de répondre et il s'est assis, avec son café et son journal.

-Aaaaah! fit-il.

Puis il se moucha, se craqua les doigts, s'étira les jambes, pianota sur la table, se cura les oreilles, se lissa les cheveux, se mouilla le bout du pouce pour tourner les pages et fit semblant de lire.

-Aaaaah! fit-il encore.

J'imagine qu'il voulait me parler.

-Belle journée aujourd'hui, dis-je, par politesse. En fait, je n'avais pas envie de lui parler. Mais le sacrement était dans ma bulle. Je devais maintenant faire avec.

-Aaaaah! Sûr! Sûr! Belle journée! répondit-il. Moé c'est Gaston. Toé?

-Gaétan.

-Guétan? Ok. Salut Guétan!

-Salut Gaston.

-J'ai-tu assez hâte d'avouè' des dents st-crèche! continua-t-il, en s'étirant les commissures de ses lèvres avec le pouce et l'index pour bien me montrer le trou béant de sa bouche fétide.

-Tu woués? poursuiva-t-il. Tu woués-tu? Hein? 'Ai p'us d'dents. P'us pantoute.

-J'ai connu un bonhomme qui croquait des pommes avec ses gencives, que j'ai ajouté pour faire mon comique.

-Ha! Ha! Ha! se plut à rire Gaston, bon public somme toute. St-Crèche! C'est pas moé qui ferait ça! Dès qu'j'va's r'travailler, j'va's m'rach'ter un dentier caliboire de torvisse! J'ai hâte de manger un bon steak sacremouille de coulaille... Hum! Ça c'est bon, hein?

J'ai bu une autre gorgée de café et j'ai refermé mon livre. Je voyais bien que je ne pourrais plus poursuivre ma lecture. C'était pourtant chouette, des contes zen, de Taisen Deshimaru.

-Moé, j'avais un dentier avant quand j'travaillais, continua Gaston. J'travaillais à cé-ail-pi. J'faisais du papier. On m'payait au-dessus d'vingt piastres de l'heure, mon Guétan. C'est d'la grosse argent ça. J'avais un gros camion, une grosse maison pis une grosse femme... Ha! Ha! Ha!

J'ai bu une autre gorgée de café. Et j'ai attendu la suite.

-Pis là, la cé-ail-pi a fermé. J'ai perdu le gros camion, la grosse maison... pis la grosse crisse est partie avec un autre. Au bout de deux ans, j'avais p'us rien. On m'a rentré en psychiatrie à Shawinigan... Arf! J'tais d'venu fou hostie! C'est comme si j'étais p'us là pantoute. J'pognais l'fixe pis je jammais là pendant des heures, des jours, pis j'cré ben une coppeule de s'maines. C'est vrai, Guétan! On m'aura' crissé un coup d'pelle su' 'a tête que j'm'en s'rais jamais rendu compte!

-Ouin... C'est pas facile tout ça... répondis-je, à défaut d'autre chose.

-Pas facile? Mets-en! Pis là, i' m'ont transféré vers Le Refuge, une maison pour itinérants... C'est là que j'reste, jusqu'à c'que je r'trouve une job... Mais qui voudra' d'un gars de cinquante ans, hein? L'plus dur, c'est qu'j'ai p'us d'dentiers! Essèye de passer une entrevue pas d'dentiers! Tu peux pas rire, rien... Pas facile, facile ça sacremaille de maudine! En attendant, j'reste au Refuge... On est deux par chambre. Mon chambreur pue des pieds. J'ai hâte en étol de m'trouver une job pour déménager! Pis des dents! J'ai don' hâte d'avoué des dents!

Triste histoire, n'est-ce pas?

J'ai fini mon café. J'ai salué Gaston en souriant de toutes mes dents, naturelles en plus, et j'ai continué mon petit bonhomme de chemin.

***

Les mois et les années passèrent.

Cet été, alors que j'étais en train de faire mon épicerie au Super Calice, voilà qu'il y a un type qui gueule mon nom derrière moi.

-Guétan! Guétan!

Sacrement! C'est Gaston.

Et il a changé de fond en comble.

D'abord, il a des dents. Son sourire est éclatant de blancheur.

Ses cheveux gris sont teints en noir de jais.

Gaston porte des bagues et des bracelets en or, ainsi que des vêtements à la mode qui jurent un peu sur lui qui n'a plus quinze ans. Il tient une bonne femme dans sa main, une bonne femme qui n'arrête pas de l'embrasser dans le cou et de lui palper les fesses tandis qu'il me sourit. Cette grassouillette, elle aussi dans la cinquantaine, ressemble à Ginger de l'île de Gilligan avec cent cinquante livres et plusieurs rides de plus.

-J'te présente Ginette. Ginette, j'te présente Guétan.

-Enchanté, que je lui dis.

On se serre la main. Et elle replonge sur Gaston qui se fait caresser et minoucher par Ginette tandis qu'il essaie de me parler.

-J'me suis trouvé une job! J'm'occupe des blocs de Ginette. J'ai commencé à travailler pour elle y a deux mois pis ça 'a été tout d'suite comme un grand caline de coup d'foudre.

-Le grand amour! miaule Ginette.

-L'amour avec un grand A, ouais, poursuit Gaston. J'étais en train de r'peinturer un appartement pis là Ginette est venu me voir pis m'a mis ses mains sur les épaules... Brrr... Les pinceaux pis la peinture ont r'volé, toé chose! On a fourré comme ça, dans le logement vide, beurrés d'peinture! Ha! Ha! Ha! Au moins cinq à six fois d'suite... C'était bon en hostie... D'pu's c'temps là, on est inséparables!

-Grand fou! remiaule Ginette.

-On fourre à tou' 'es jours, poursuit Gaston. Hostie! la queue va m'arracher! J'suis p'us jeune, jeune! Ha! Ha! Ha!

-Écoute- pas, i' dit n'importe quoi! rajoute Ginette tout en poursuivant son minouchage.

Ils m'ont tout l'air d'être en rut ces deux-là.

Je salue Gaston, fier de sa réussite. Je salue Ginette aussi, mais elle ne me porte pas attention. Elle est plongée sur Gaston et le dévore tout cru.

Gaston m'invite à aller prendre un café au Dunkin' Donuts. Je n'ai pas le temps. Ou je n'ai pas envie de voir un couple en train de se lécher les oreilles.

Et je pense, tout bonnement, aux dents.

Je ne sais pas si la fée des dents existe.

Mais je sais qu'il n'y a pas de contes de fées sans dentier.

Parlez-en à Gaston, si vous le croisez.

Il est facile à reconnaître.

Il se tient au Dunkin' Donuts et il y a toujours une bonne femme à ses côtés en train de lui jouer dans les cheveux ou de lui caresser l'entre-jambes.

***

Parlant de dentier, voici un numéro de haute voltige avec dentier.

Martin le roi déchu du disco

Il convient que je vous raconte ce qui l'a rempli de honte.

C'était à l'époque du disco.

Martin était toujours tout de blanc vêtu lors de ces soirées.

Un soir, après avoir trop bu, l'irréparable arriva alors qu'il était au beau milieu de la piste de danse.

Martin chia dans ses culottes.

Ses pantalons blancs étaient tout beurrés de marde et, évidemment, tout le monde le pointait du doigt en se bouchant le nez. Les moqueries ne cessèrent pas pour autant le lendemain. Martin devint la risée du bar qu'il avait choisi pour temple. C'en était trop.

Martin sombra dans une profonde dépression et ne pointa plus jamais le nez dehors. Il se sentait en exil du royaume des brosseux. Rongé par la honte, il en venait à ne plus pouvoir se regarder le visage dans le miroir. Du coup, ses sourcils devinrent fort longs, de même que sa barbe et ses poils de nez.

On le voit parfois derrière la fenêtre de son modeste taudis du centre-ville.

Martin se berce, café dans la main droite et cigarette dans l'autre. Il est toujours tout de brun vêtu. Le disco, c'est fini pour lui. Il écoute des imbéciles s'engueuler sur les lignes ouvertes des radios poubelles de Québec. Il s'est juré de ne plus jamais porté de blanc. Il ne voudrait pas être cuisinier ou préposé aux bénéficiaires. Aussi, pour être bien sûr de ne pas mal finir, Martin ne travaille pas. Ou plutôt il ne travaille plus. Enfin, il fait ce qu'il peut.

mercredi 18 octobre 2017

Quelques images tirées de mon monde

Voici quelques images tirées de ma galerie d'art qui est tout aussi simplement mon atelier et mon refuge.


































mardi 17 octobre 2017

Les citrons de Mon-Mon

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Le citron n'est jamais trop pressé.

Il reste toujours un peu de jus.

Suffit que d'y mettre un peu d'efforts.

C'est ce que se disait Siméon Mon-Mon Fafard. C'était une manière de conjurer sa vieillesse.


À 63 ans bien sonnés on ne peut pas dire que Mon-Mon avait encore beaucoup de jus dans le citron. Mon-Mon était un semi-retraité semi sur l'aide sociale et semi sur le marché noir.

Pourtant, il refusait de croire qu'il n'allait plus livrer sa goutte à force de se presser le citron.

Aussi se pressait-il le citron.

Bien plus fort qu'auparavant sans doute.

Mais bon. Vers la fin il faut s'attendre à ce que le jus s'évapore un tant soit peu.

Quant au citron, eh bien Mon-Mon en mettait surtout sur le poisson et parfois dans le riz.

Pourquoi vous parle-t-on ainsi de citron, pressé ou pas?

À vrai dire, c'est Mon-Mon qui nous imposait ce thème.

Tout est citron pour Mon-Mon.

Je veux dire que tout se rapporte au citron: proverbes, paraboles, allusions, comparaisons...

-Hé citron! qu'il dit Mon-Mon.

Vous entendez? C'est toujours pareil. Citron par ici. Et citron par là.

-Mon char de v'là dix ans, ma Buick, c'était un vrai citron. C't'un vrai citron c'te candidat à la mairie. Citron que c'est bon cette crème en glace! Inspecteur Citron, citrouillard, trognon de citron rôti!

Mon-Mon disait n'importe quoi.

Et personne ne l'écoutait.

Non.

Cré citron.

lundi 16 octobre 2017

Eugène le bédéiste repenti


Titre de l'article: Je ne le sais pas

Non, je ne vous avouerai pas toutes mes détestations quant au domaine de la politique.

Je vais m'en tenir à ce que j'aime.

J'aime d'abord et avant tout la simplicité.

Ce n'est pas pour rien que mon blog s'intitule Simplement.

La simplicité est mon guide dans les nuits obscures de notre époque.

Cette simplicité n'est pas si simple qu'elle en a l'air. Peu sont capables de s'en prévaloir. Moi-même, je me trouve encore trop compliqué pour correspondre à mon idéal.

En fait, plus les réponses sont compliquées et plus j'ai l'impression qu'on essaie de m'en passer une.

Je suis accroché au Siècle des Lumières pour les questions linguistiques. Je veux dire qu'une idée qui ne peut pas s'expliquer le tout simplement du monde ne mérite pas d'en être une.

J'aime donc la beauté, on l'aura compris.

J'aime les belles phrases, les beaux mots, les émotions bien ressenties.

J'aime évidemment les beaux gestes.

Mais simplifions encore: j'aime.

Et parce que j'aime, c'est bien simple, je ne peux pas haïr.

Je pardonne à tout un chacun, même les plus bêtes, en me disant que je ne vaux pas mieux à d'autres points de vue.

L'erreur n'est jamais éternelle.

Je crois en la rédemption. En la mienne. Comme en celle de n'importe qui: je ne suis pas jaloux du bonheur d'autrui.

J'aime les fleurs, donc.

Et j'aime les arbres, les rivières et tout ce qui ne se compte pas, le ciel par exemple, voire les étoiles.

On peut toujours tenter de les compter, les étoiles.

Mais à quoi bon?

La simplicité consiste à les contempler.

C'est peut-être idiot ce que je vous dis.

Mais on vous dit des idioties pires que ça dans la vie sans que vous ne réagissiez.

Alors, franchement, laissez-moi vous divertir.


dimanche 15 octobre 2017

Saucisse qu'il était bien...

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Il était une fois quelqu'un qui passait le plus clair de son temps à ne rien faire.



Il avait le teint pâle, pesait à peine 43 kilos et mesurait pas plus de 132,5 centimètres.

Il s'appelait Valentino. Vrai comme je vous le dis: Valentino Gélinas.

Il n'avait pas choisi son prénom et ça ne lui faisait plus rien.

Il avait quarante-six ans bien sonnés. C'était fini le temps où les camarades de classes lui déversaient de la mélasse dans les oreilles en hurlant son prénom ridicule. Désormais, tout le monde lui foutait la paix et lui ne demandait pas mieux que d'avoir affaire à personne.

Il lui semblait même légitime de ne rien faire puisqu'il avait tant souffert de cette société qui finit par vous verser de la mélasse dans les oreilles par pure mesquinerie.

Il n'était pas question qu'il travaille.

Son médecin ne le voulait pas plus que lui-même.

Il avait établi pour Valentino un diagnostic de fatigue chronique agrémenté d'un quelconque statut de fou à lier. Seulement parce que Valentino lui répétait sans cesse le mot «saucisse» pendant l'évaluation psychiatrique. On fait des fous en criant «saucisse» au Québec, voyez-vous.

Et saucisse qu'il était bien Valentino.

Il mangeait comme un oiseau.

Il demeurait dans une maison de chambres.

Il lui restait toujours un peu d'argent pour s'acheter un chips et une liqueur.

Il n'en demandait pas plus à la vie, Valentino.

Et il était plein de gratitude de pouvoir vivre pleinement son néant.

Saucisse qu'il était bien...