Il en va de la bouffe comme des coutumes. Pas besoin de
traverser les océans pour comprendre qu’elles varient d’un bout à l’autre des
communautés humaines.
Prenons le pain à la viande.
-Voulez-vous dire le pain de viande? m’interroge avec raison
le lecteur attentif.
Non. J’insiste pour parler du pain à la viande. C’est une
particularité gastronomique de la Basse-Ville de Québec, si l’on peut appeler
ça de la gastronomie.
J’étais dans un petit restaurant du quartier Saint-Sauveur
quand j’ai commandé ce fameux « pain à la viande » de Québec. Je m’attendais
à manger du « pain de viande », c’est-à-dire un mélange de viande
hachée, d’œufs, d’avoine et d’épices cuit au four avec amour et une boîte de
soupe aux tomates Campbell’s.
Quelle déception quand j’ai vu ce qu’il y avait dans mon
assiette : deux toasts aspergées de sauce à spaghetti. Je n’avais jamais pensé qu’on pouvait manger
ça même lorsque j’étais pauvre.
-Il y a sûrement une erreur, ai-je dit à la serveuse, j’ai
commandé du pain de viande…
-C’est pas écrit pain de viande, monsieur, mais pain à la viande… Vous connaissez pas le pain à la viande?
-Heu non… Ej’ suis d’Trois-Ivièwes...
J’ai mangé le pain à la viande en maugréant et me suis
promis de ne plus jamais mangé que des mets chinois à Québec.
***
On sait que l’origine de la poutine provient soit de
Drummondville, soit de Victoriaville. Il y a toute une rivalité entre les deux villes autour de la naissance de la poutine. Ce n’est pas nécessairement de la grosse
gastronomie mais tout le monde en mange pareillement. Des frites maison bien
grasses, de la sauce brune avec une cuillerée de ketchup et du fromage cheddar en crottes : de la poutine! C’est tout, bien qu’il y ait quelque variante
dont la fameuse galvaude trifluvienne, servie avec du poulet et des petits
pois. On attribue aussi le nom de poutine à ces boulettes de pâtes qu’on fait
cuire dans un bouillon de porc et bœuf qui rappelle la soupe Won Ton en plus
dégueulasse. Nous les appelions plutôt des « plotes de sœur » mais l’expression
demeure inconnue dès que l’on sort des limites du pont Laviolette.
Parlons maintenant d’un mets qui ne semble exister que dans
la région de Trois-Rivières. Si cela se trouve, c’est appelé à devenir un
produit d’appellation locale qui nous fera certainement moins honte que le « pain
à la viande » de la Basse-Ville de Québec.
Il s’agit bien sûr du « pâté mexicain » qui, comme
le pâté chinois, n’a de mexicain que le nom.
La recette que je connais est celle de ma mère, Jeannine, Trifluvienne de naissance qui la tenait elle-même de ma grand-mère Valéda, originaire de Ste-Clothilde-de-Horton. Il s’agit grosso modo d’une
tourtière constituée d’une garniture unique et digne des dieux que sont les
Trifluviens et les Trifluviennes.
Vous voulez la recette?
Allons-y. C’est bon pour deux pâtés de 23 centimètres de diamètre.
Pour préparer la garniture, faites blanchir à feu moyen un
quart de tasse d’oignons et deux gousses d’ail dans un grand chaudron d’au
moins six litres. Faites revenir une livre de viande hachée (veau, porc ou bœuf)
dans ce même chaudron. Quand la viande est bien cuite, ajoutez une boîte
complète de tomates en dés et remuez jusqu'à ce que cela chauffe à petit bouillon.
Versez ensuite deux tasses de macédoine de légumes (maïs,
fèves vertes et petits pois) dans le chaudron et laissez mijoter pendant une
dizaine de minutes. (Si vous utilisez des produits congelés, faites chauffer de cinq à sept minutes au four à micro-ondes. Les légumes congelés, à défaut d’en
prendre des frais, sont meilleurs que les légumes en boîte qui finissent tous
par goûter la pisse de chat.)
À la fin de la
cuisson, ajoutez une petite boîte de pâte de tomates pour donner de la
consistance au tout. Salez et poivrez au goût. Ajoutez deux cuillères à soupe
de sauce chili et un soupçon de poudre de chili. Faites reposer le mélange pendant une
vingtaine de minutes. Puis versez le mélange dans vos pâtés, mettez une abaisse
par-dessus, badigeonnez le pâté avec un jaune d’œuf pour lui donner de la
dorure en cours de cuisson et enfournez le tout à 350 Celsius pendant une demie heure, jusqu'à ce que la croûte soit bien dorée.
Le résultat? Un délice.
Seuls les fous n’en voudront pas.
On peut aussi ajouter du fromage sur le mélange avant que de
refermer le pâté. Je ne vous le recommande pas. Ce n’est pas le pâté mexicain
de ma mère, ce fromage-là.
Cela dit, il est temps de reconnaître officiellement le pâté
mexicain en tant que mets officiel des Trifluviens, Shawiniganais et autres
Latuquois.
La poutine ne perd rien pour attendre.
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PS : Merci à ma blonde de cuisiner mieux que moi et de
m’en apprendre toujours et encore.
Le pâté mexicain de Trois-Rivières est connu jusqu'ici sur la C-N. Quand ma femme fait sa batch de pâtés à viande je lui demande toujours de m'en faire 2-3 mexicain.À peu près les mêmes ingrédients mais pas mal plus de sauce chili pis du mozza à la fin.
RépondreEffacerTa femme est-elle native de Trois-Rivières mon cher Gaétan? La rivalité existant entre Victoriaville et Drummondville, à propos des origines de la poutine, risque de se reproduire entre la Mauricie et la Côte-Nord pour les origines du pâté mexicain... (Le fromage à la fin je l'ai essayé pis j'ai pas aimé ça: c'est pas de même que mouman faisait ça!!! ;)
RépondreEffacerNon je ne pense pas que le C-N revendique quelque droit que ce soit sur l'origine du pâté mexicain. Au mieux des recettes de morue...;-) Avant le fer et la Gulf Paper c'était la pêche.
RépondreEffacerTant mieux Gaetan parce que ça commençait à m'inquiéter... ;)
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