Résister à l'envie de commenter les actualités du jour est un défi d'autant plus grand si l'on s'abstient aussi de ne parler que de soi-même.
Qu'il fasse chaud, tiède ou froid, Julien Kramer a pris le parti de décrire la vie des autres avec le plus d'honnêteté possible sans sombrer pour autant dans le naturalisme. C'est un satané Kramer. Aussi ses amis le surnomment Hostie-d'Krameurre-à-marde
Kramer se croit écrivain pour oublier qu'il est aussi un laissé-pour-compte. Ses grosses lunettes de corne et son bac en arts plastiques, ça ne vaut rien sur le marché. Il vivote d'un petit boulot à l'autre en dévorant des romans et des livres épais comme ça. Oui monsieur. Épais comme ça, comme le Compendium de médecine, oui, oui, mais en moins génial.
Lire, écrire et peindre, ce maigrelet de Krameurre-à-marde ne sait faire que ça, le pauvre.
De l'art! Comme il faut être naïf pour faire de l'art! Ha! Ha! Ha! Que de pertes de temps en ce monde qui a besoin de plus de bras et de sueur, qui nécessite moins de penseurs et pansus.
De l'art! Ça ne vaut rien, de l'art. Tout le monde s'en torche. Ça se vend pour trois fois rien au Bazar du Dollar, de l'art.
L'Hostie-de-Krameurre-à-marde ne fout rien. Les vrais écrivains ne foutent rien, bien sûr. Ils doivent penser, méditer, lire, dormir, manger. Baiser? Kramer ne doit pas baiser souvent... Enfin. Ça le regarde. Le savon, c'est pour tout le monde.
Les pseudo-écrivains opportunistes, comme le gros Bouchard par exemple, sont plus débrouillards. Ils peuvent faire n'importe quoi, sentir le savon et même gagner leur vie. Évidemment le gros Bouchard n'écrit pas aussi bien que Kramer. Mais qui s'en soucie? Les deux sont des écrivains amateurs qui n'ont que cette manie en commun: celle de ne jamais abuser d'adverbes ou d'adjectifs. Ce n'est pas qu'ils soient paresseux. Leurs belles lectures déteignent sur leur belle écriture. Ça sent le Siècle des Lumières et la poutine. Oui.
Donc, Kramer, qui écrit mieux que le gros Bouchard, qui parle parfois de lui-même comme si ça nous intéressait, Kramer, donc, n'écrit que sur autruis. Oui, oui.
Il a lu sa dernière nouvelle hier soir lors d'une rencontre d'écrivains-mon-cul de la Société des écrivains de Mékinak.
Le gros Bouchard était là avec ses tabarnaks d'harmonicas. Il jouait si fort qu'il nous empêchait d'entendre Kramer. Kramer était en sacrament. Mais il a tout de même lu sa nouvelle jusqu'au bout, sans oublier une virgule. Et même qu'il nommait la ponctuation, l'Hostie-de-Krameurre-à-marde. «C'était -virgule- autant que faire se peut -virgule- un ramoneur -point.» Sa lecture s'est tranformée en dictée, pour se venger des harmonicas du gros Bouchard. Et paf dans les dents du gros Bouchard!
Sa nouvelle racontait l'histoire de Jean-Luc Grivoine, lequel est le ramoneur le plus connu du quartier.
Ça paraissait que l'Hostie-d'Kramer-à-marde avait lu tout ce qui existait sur le ramonage des cheminées au cours des derniers mois. À la fin de sa nouvelle, Grivoine s'envolait dans un ballon dirigeable sur un air de Led Zeppelin. Finale un peu fuckée mais dans le ton des récits de Kramer. Très pataphysique.
Le gros Bouchard a refusé de faire une lecture. Il a continué à jouer de l'harmonica en chantant que Jack Kerouac était un hostie de menteur. Bouchard prétend que Kerouac n'a jamais sauté sur un train. Le gros Bouchard l'a fait, lui, jumper sur un train de marchandises. Et il se croit un spécialiste en la matière. Et il emmerde tout le monde avec ça. Tout pour faire chier, vraiment.
Personne n'a gagné quoi que ce soit d'assister à ce duel entre Kramer et Bouchard. Tout le monde s'entend pour dire que Kramer est moins subversif et, par conséquent, plus fréquentable.
Cependant, le gros Bouchard est bien plus beau. Sa vanité nous éteint. Elle n'est que vent et poursuite de vent. On s'en fout qu'il soit beau, le gros Bouchard.
Kramer a beau être laid qu'il ne perd pas son temps à porter des pancartes et à critiquer les politiciens comme un satané anarchiste! Kramer est un esthète, un vrai. Le gros Bouchard est un improvisateur, un hypnotiseur, un mononcle qui joue du blues!!! On déteste son sourire narquois, ses yeux rieurs, son air du gars qui est tout le temps content.
-J'm'appelle Guétan pis chu toujours content! qu'il dit tout le temps, le gros raisin.
Le gros Bouchard!!! Son blog!!! Ses chansons!!! Tabarnak! Réveillez-vous quelqu'un. Ce gars-là, c'est un imposteur!
C'est pas un imposteur. C't'un fou raide !
RépondreEffacer:-)
HAHAHAHA ! J'adore ce post.
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