jeudi 17 janvier 2019

Mes parents étaient des petits poulets et vous aussi

Il fût un temps où l'image que j'avais de mes parents était un mensonge coutumier.

Je voyais à travers mes parents l'image que ma communauté se fait des parents.

Je suis heureusement tombé sur ce que l'on appelle de bons parents.

Je ne veux certes pas minimiser le rôle qu'ils ont accompli.

Au contraire.

Je les ai vus trop longtemps toujours forts, négligeant leurs faiblesses.

Je veux surtout dire leur droit d'affirmer ces faiblesses.

Ils se seront toujours montrés forts devant moi, mais de plus en plus mollement au fil des ans.

Ils avaient suivi eux aussi ce chemin que j'emprunte en ce moment.

Ils ont pris le chemin de la cinquantaine.

Ce chemin qui nous rend mystérieusement plus sensible, à moins que je ne me trompe.

Pour ma part, il m'arrive d'avoir les yeux embués pour des niaiseries qui ne me foutaient rien il y a trente ans.

Je n'aurais jamais pleuré devant un coucher de soleil, mettons. Ou bien devant un enfant qui rit.

C'est que l'on devient tous et toutes de petits poulets en vieillissant.

Mes parents l'ont été aussi, des petits poulets.

C'est en découvrant leurs faiblesses que je me suis aussi découvert moi-même.

Je porte l'histoire de mes parents, de mes bons parents qui étaient aussi des petits poulets.

Nous sommes des petits poulets parce qu'il y a les maladies, les rêves brisés, les espoirs malmenés, les crimes et les injustices.

Je regarde une vieille photo de ma mère et je la vois en petit poulet, toute menue, douce, fragile,, ballottée par l'espace et le temps dans un quartier pauvre de Trois-Rivières.

Idem pour ma part. Sa photo où il a l'air de Max Gros-Louis ne ment pas sur sa nature de petit poulet. Il est aussi tout petit, doux, fragile mais heureux aux côtés de sa Jeannine, l'amour de sa vie.

Je vois ces deux petits poulets s'aimer.

Et je me regarde, moi aussi, en tant que petit poulet.

Un petit poulet qui perd des plumes, comme à peu près tout le monde.

Et qui se démène tant bien que mal avec ses rêves brisés et sa bienheureuse insouciance de Roger Bontemps.

«Vanité des vanités, tout est vanité et poursuite de vent», disait un type qui s'appelait L'Ecclésiaste.

Je n'ai retenu que cette phrase d'un gros livre qui contenait des milliers de page.

Comme si cette formule de petit poulet me convenait.




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