jeudi 10 novembre 2016

J'ai déjà inhalé de la marijuana et j'ai aimé ça

Oui, je l'avoue: j'ai déjà inhalé de la marijuana, au mépris des lois et des conventions, comme un vulgaire criminel. J'ai roulé des tas de gros joints. J'ai aspiré la fumée verte à pleins poumons pour planer d'aplomb. J'ai même mangé des biscuits au beurre de cannabis. Et j'ai tâté d'autres drogues dont on ne se vante pas parce que je me foutais royalement de la morale hypocrite de nos lois en matière de consommation de psychotropes. Je suis allé bien au-delà des portes de la perception et je n'ai même pas fréquenté un centre de désintoxication pour cesser de consommer de la drogue. J'ai tout arrêté ça tout seul, comme un grand garçon. Comme si j'étais allé au bout de mes expériences. Je ne consomme plus que du café et un peu de vin de temps à autres. Je suis sobre à 99,987%.

Je n'ai éprouvé aucune honte à consommer du cannabis. Je me suis offert ce plaisir coupable avec délectation. Un plaisir que j'aurai partagé avec des gens de toutes conditions: des assistés sociaux, des travailleurs, des hommes d'affaires, des avocats et même des politiciens. Je ne nommerai personne. Je me contenterai de m'accuser moi-même d'avoir déjà fumé du pot. Et si je puis enfin vous le dire, c'est bien parce que je n'en fume plus. Aucun risque de me faire prendre avec un sac de cannabis chez-moi. Je puis enfin m'exprimer librement sur cette liberté qui m'était jadis refusée.

D'autres États américains se sont ajoutés cette semaine à la liste de ceux qui autoriseront désormais l'usage récréatif ou médical du cannabis. La Californie et le Massachusetts favoriseront l'usage récréatif de la marijuana. Ils s'ajoutent au Colorado, au Nevada, à l'Orégon, à l'État de Washington et à l'Alaska. Fumer du pot pour le plaisir de le faire n'est plus susceptible de vous conduire vers un séjour en prison. L'argent récolté par l'État pourra servir à traiter les toxicomanes ou bien à financer des terrains de jeux pour les enfants. Tout le monde y gagnera en fin de compte. Et je parie qu'il n'y aura pas plus de fumeurs de cannabis pour autant. Il y a plus de fumeurs de pot en France, alors que ça y est interdit. Il y en a moins aux Pays-Bas, là où on l'autorise. C'est tout dire.

Les psychotropes, qu'on le veuille ou pas, font partie de toutes les cultures de l'humanité. Cela va de l'alcool à la feuille de coca en passant par l'amanite tue-mouche, la marijuana, le thé ou le café. La liste est longue des moyens qu'ont pris les hommes pour modifier leur état de conscience. Les animaux eux-mêmes se saoulent à l'occasion en mangeant d'énormes quantités de fruits trop mûrs produisant de l'alcool par fermentation. Les chevreuils peuvent eux aussi ravager une plantation de marijuana. Bref, cela fait partie de l'ordre naturel, voire surnaturel des choses.

La marijuana a été interdite dans les années trente aux États-Unis par un décret de la Food and Drug Administration (FDA). Ce ne sont pas des critères strictement scientifiques qui ont mené à cette interdiction, mais bel et bien des critères racistes. La marijuana était la drogue de prédilection des Mexicains et des Nègres (sic!), disaient péjorativement les promoteurs de l'interdiction. Ils utilisaient cette drogue pour faire leur musique satanique qui pouvait ensuite leur servir à débaucher les honnêtes filles blanches de l'Amérique. L'alcool, cette drogue bien européenne, fut à peine prohibée quelques années pour se rendre compte que son interdiction avait donné naissance à la mafia. L'alcool de contrebande a contribué à mettre des mitraillettes entre les mains de Al Capone et d'autres scélérats.

L'usage récréatif de l'alcool a été rétabli aux États-Unis sans que l'on ne remette en question l'interdiction reliée à l'usage de la marijuana. On a continué à emprisonner des millions de gens aux États-Unis, depuis les années 30, pour avoir osé fumer cette "marijuana", cette vilaine drogue d'hispanophones malpropres et dangereux...

Ici, au Québec, vous pouvez vous procurer en toute impunité de l'alcool à 94% sans vous faire sermonner par qui que ce soit. Vous pouvez boire huit bouteilles d'affilée et mourir aveugle s'il le faut. John A. McDonald buvait comme un trou. Churchill aussi. C'est donc une drogue de gentlemen. Par contre, si vous vous faites pincer avec un plant de marijuana, vous êtes mieux d'avoir une prescription du médecin. Sinon, on vous fera payer cher d'avoir osé défier une politique discriminatoire envers la drogue de prédilection des non-Blancs. L'alcool, c'est bon pour les Vikings. Le pot, c'est pour les métèques et les marginaux. Pour ceux qui ne veulent pas travailler et qui se promènent avec des fleurs dans les cheveux.

***

Je peux enfin parler de la marijuana. Je n'en consomme plus depuis deux ans. Et je n'ai pas l'intention de m'y remettre. Je peux affirmer sans crainte de me faire pincer que je suis pour l'usage récréatif de la marijuana. On ne trouvera pas un brin de cannabis chez-moi. On en aurait trouvé entre sept et quatorze grammes à une autre époque de ma vie. 

J'aimais fumer, non pas pour me guérir d'une quelconque douleur physique, mais tout simplement pour planer. Je planais devant mon clavier, devant mes pinceaux et mes toiles, avec ma guitare, mes tamtams et mes harmonicas. Un joint et j'oubliais tout ce qui pouvait m'embêter dans la vie. Je devenais l'homme le plus compréhensif du monde. Je n'avais plus aucun ressentiment. Toutes les actions humaines me semblaient théâtrales. Je voyais derrière chaque humain quelque chose que lui-même ne voyait pas. Quelque chose comme sa vraie nature, sa fragilité camouflée, sa douceur. C'est donc dire que la marijuana est une drogue dangereuse. Elle ne vous fait plus prendre conscience du danger. Et, pire encore, elle vous fait aimer la guitare et l'harmonica.

Si je ne fume plus, cela me regarde. Je n'ai même pas l'envie de vous embêter avec ça.

Il se vend de la corde à la quincaillerie. Certains vont en acheter pour attacher des trucs. D'autres pour se pendre. Allons-nous interdire la vente de cordes à la quincaillerie pour le mauvais usage qu'en font les désespérés?

Il y aura toujours des drogues dans la société. Il ne sert à rien de jouer à l'autruche.

Il est sans doute nécessaire de s'assurer de la qualité du produit, mais on ne le fait pourtant pas pour les petits fruits bourrés de pesticides cancérigènes qui ont fait des abeilles une espèce en voie de disparition... Il y a toujours deux poids deux mesures avec la drogue. De plus, si l'État s'était trompé, imaginez les poursuites judiciaires des consommateurs de cannabis incarcérés injustement. Viendra-t-elle au Canada et au Québec la légalisation du cannabis? J'en doute encore quoi qu'ait pu prétendre Justin Trudeau. L'hypocrisie a encore de belles années devant elle.

Je suis en faveur de l'usage récréatif du cannabis. Je suis en faveur de décriminaliser les consommateurs de toutes les drogues. Il ne sert à rien de frapper sur les victimes. Il ne me viendrait pas à l'idée de foutre en prison un type qui s'est acheté de la corde à la quincaillerie pour se pendre. Cette sagesse que nous avons pour la corde, on devrait aussi l'avoir pour les drogues. On doit cesser une fois pour toutes de jouer aux vierges offensées avec cette dope que nous ne voulons pas voir et qui fait largement partie de nos vies du petit matin jusqu'au soir, ne serait-ce que via l'usage médical de produits pharmaceutiques tout aussi euphorisants que douteux.

Légalisons la marijuana au plus vite et passons à autre chose.



9 commentaires:

  1. Les drogues sont des choses les plus simples du monde pour peu qu ' on sache résister ( ce qui n ' est pas simple ) à leur chant de sirènes -
    Personnellement j ' ai fait le LSD , peu souvent , à une époque où on avait du respect pour ces expériences -
    Je garde intacte ma gratitude et mon émerveillement -
    Tout mon amour -
    Forever -

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  2. @Monde indien: Ah! Ça explique pourquoi nous sommes sur la même longueur d'ondes. J'ai fait du LSD aussi. C'était une expérience d'ordre presque mystique: explosions de couleurs, effets kaléidoscopiques, une ouïe centuplée... À faire avec modération dans des conditions très particulières. Je ne recommande pas ça aux fêtards dans les bars. Je ne recommande rien par ailleurs. Je ne suis pas maître d'autrui. Chacun est juge de ce qu'il veut faire dans la mesure où il ne nuit à personne.

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  3. Koool -
    Lucy in the Skyes with Diamonds -
    Ca me fait plaisir que tu connaisse ça -
    J ' ai dû n ' en prendre que 6 ou 7 fois , tant le voyage est fort - ( entre 20 et 30 ans ) -
    Une époque où cette drogue n ' était pas frelatée -
    La recommander ?
    Qui le sait ?
    Je bénis les skyes de me l ' avoir mise entre les pattes !
    Que le miel coule dans ta barbe et dans le bonheur de ta blonde aussi -


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  4. @monde indien: je n'ai plus jamais pensé de la même manière depuis... ;)

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  5. Pareil, aussi. Juste pas sûr de ce que j'avais consommé, en fait. Plus jamais été le même, après ça...une crisse de chance.

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  6. @Misko: Bienvenue dans le club de ceux qui sont contents de ne plus avoir été pareils ensuite... ;)

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  7. Moi aussi j'ai eu le bonheur de connaître le LSD à 16 ans. La première fois ce fut une expérience mystique qui changea ma vie, surtout que j'en avais trop pris: 3 d'une shot, de la tangerine. La deuxième fois, ce fut un bad trip total de bleu, grâce à un con avec qui j'avais décidé d'en prendre. Ce fut ma dernière expérience, pas longtemps après je crois la drogue a disparu des rues ou est devenue très mauvaise, voire ineffective, car j'ai essayé un buvard fin 90, et ça ne m'a rien fait du tout.

    Je suis très heureux, Gaétan, de voir que tu approuves l'usage récréatif du pot. Mais je trouve que nous n'allons pas assez loin: il faudrait approuver l'usage récréatif de toutes les drogues et arrêter d'enfermer des gens pour leurs choix de consommation. On est capable de dealer avec un gars saoul? on est aussi capable de dealer avec un gars en manque. De toute façon, ces consommateurs-là sont déjà en place dans la société. La ville est-elle un chaos pour autant? -Ben non. C'est des peurs qu'on se fait. On est juste pas capable de respecter les choix des autres, c'est tout. C'est une mauvaise habitude de société, appuyée par les tribunaux, l'opinion des ignorants ou des hypocrites, et la police (à laquelle personne ne veut s'opposer).

    Si demain le crack était vendu légalement au coin de ma rue, je n'en reprendrais pas pour autant, mais je voudrai peut-être déménager, car cela ne correspond plus à ma vie actuelle et je n'ai pas envie de voir cette faune. Par contre, il pourrait y avoir un service de livraison à domicile, ce qui réglerait le problème. Voyez-vous, pensons donc un peu plus loin. C'est facile, les vendeurs font déjà ça, on n'a qu'à faire du copiage de méthode. Ça se fait déjà aussi pour certains médicaments. Arrêtons donc de faire les niaiseux et fermons donc une couple de prisons de trop. Envoyons donc par le fait même une couple de juges, d'avocats, de gardiens de prison à la retraite. Arrêtons de stigmatiser des gens pour essayer de se sentir plus bien dans notre peau. Le système est pourri, faisons-y face et réglons donc nos problèmes avant de mettre la faute sur le dos de ceux qui veulent s'amuser un peu dans ce monde froid, gris et indifférent. La consommation n'est pas un problème de société, car l'homme est fait comme ça, il veut expérimenter, il est curieux. C'est plutôt la non-acceptation de la consommation qui est un problème de société.

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  8. @Eremita: l'idée de décriminaliser l'usage des drogues me convient.

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