Il y en a qui s'accroche à des époques comme de parfaits imbéciles.
Don Quichote s'accrochait à la chevalerie en une époque où elle n'existait plus. On ne peut pas dire qu'il était brillant. Combattre des moulins à vent, quelle perte de temps! C'est comme battre un trottoir à coups de bâton de baseball en se prenant pour, mettons, Babe Ruth ou quelque autre chevalier O'Keefe.
Je ne vaux pas mieux que les autres. Voilà que je patauge dans les eaux du symbolisme. Je viens de lire une monographie sur l'artiste-peintre Gauguin et toute l'époque me revient en mémoire. Je suis subitement redevenu un symboliste...
Je me revois sur le campus de l'université, bouteille de vin à la main, en train de lire Rimbaud, Corbière, Verlaine, Maeterlinck, De Gourmont ou bien de contempler des reproductions de Klimt, Moreau, Van Gogh ou Gauguin.
Nelligan était aussi mis à contribution dans ma passion pour le symbolisme, ne serait-ce que pour avoir écrit «Vive le vin et l'Art!», que j'aimais tous deux également. Vive le vin et l'Art, c'était bien mieux que «ma vitre est un jardin de givre». Et puis Nelligan, avouons-le franchement, a écrit des poèmes qui n'étaient souvent que des imitations de Verlaine ou Gérard de Nerval. C'est ce qui finit par me lasser de Nelligan, où l'originalité du poète se limite parfois au talent d'un copieur.
La réalité brute n'est pas la réalité vraie pour moi. Tout ce transcende la réalité, pour lui conférer une dimension supplémentaire, ne peut s'exprimer convenablement qu'à travers l'art.
C'est ce qui me ramène toujours vers le symbolisme, cette nécessité de se transfigurer à travers l'art, de transcender la réalité et les conventions pour en venir à «retrouver l'Éternité» (Rimbaud).
Je retourne à mes pinceaux et ma toile pour profiter de ce que le symbolisme m'inspire afin de terminer ce Peau-Rouge dans son canot d'écorce qui s'apprête à accoster sur une plage remplie de tortues, de lapins volants et d'ours noirs. La présence des animaux sur la plage en est encore au stade de l'hypothèse - je suis symboliste, mais je me demande si je ne charrie pas un peu avec l'ours noir... Je pourrais aussi dessiner Antonin Artaud, sur la plage, ou bien le chien Milou. Mais le surréalisme ne me sied guère. Je suis accroché aux symboles...
Je vous laisse sur cet air de Fauré.
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