Je suis en train de lire une biographie de Tolstoï rédigée par Henri Troyat.
Comme c'est toujours le cas, une lecture nous mène à une autre lecture, puis c'est encore une autre, jusqu'à ce que j'en aie marre de ce sujet.
J'approfondis Tolstoï parce que, d'emblée, même ses défauts me semblent sympathiques.
Je découvre un tout autre Tolstoï. C'était bien plus qu'un romancier. C'était aussi un pédagogue hors pair et, malgré tout, un homme juste à une époque toute tissée de contradictions.
Il a favorisé l'éducation du peuple en appliquant des méthodes qui me rappellent vivement celles de mon professeur de philosophie, Alexis Klimov. Tolstoï appliquait la liberté. Et favorisait même la révolte. N'importe quoi pourvu que cela ne soit pas de la tiédeur.
Tolstoï devint aussi un ardent défenseur des droits de la personne. Et les tolstoïens, tel Vladimir Korolenko, résistèrent longtemps à la dictature sous Lénine, Trotsky et Staline. Ils freinèrent l'exécution d'untel ou de telautre, sans ciller des yeux devant les despotes sanguinaires, réclamant la mansuétude du pouvoir au nom d'un humanisme qui réussissait à faire plier les genoux de Saturne, histoire qu'il cesse un moment de dévorer ses propres enfants.
Donc, c'était un grand Tom ce Tolstoï.
Un grand Tom qui s'est fait enterrer en toute simplicité. Pas de croix. Pas de pierre tombale. Rien.
Au hasard de mes pérégrinations sur le ouèbe, je suis tombé sur ce petit texte de Stefan Zweig, le roi des biographes toutes catégories confondues.
Zweig a visité la tombe de Tolstoï, à Iasnaïa Poliana, cette légendaire «clairière lumineuse» où vivait Tolstoï.
Il raconte avoir été ému par cette tombe sans inscription:
«(...) cette tombe est la plus impressionnante du monde par son émouvante simplicité, Un petit monticule quadrangulaire au milieu de la forêt, dominé par de grands arbres - nulla crux, nulla corona! pas de croix, pas de pierre tombale, pas d'inscription, Le grand homme est enterré anonymement, lui qui a souffert comme aucun autre de son nom et de sa gloire, tout comme un vagabond qu'on aurait trouvé, par hasard, comme un soldat inconnu. On n'empêche personne de s'approcher de sa dernière demeure, La légère palissade qui l'entoure n'est pas fermée. Rien d'autre que la vénération des hommes ne protège le dernier repos de celui qui n'a jamais trouvé le repos dans sa vie. Tandis qu'ailleurs la curiosité se presse autour du faste d'un tombeau, la simplicité décourage ici toute badauderie. Le vent murmure comme la parole de Dieu par-dessus la tombe de l'anonyme. Il n'y a point d'autre voix, on pourrait passer là et se dire seulement que quelqu'un y est enterré, un Russe quelconque dans la terre russe. Ni la crypte de Napoléon sous la coupole de marbre des Invalides, ni le cercueil de Goethe dans le caveau des princes, ni les monuments de l'abbaye de Westminster n'impressionnent autant que cette tombe merveilleusement silencieuse, à l'anonymat touchant, quelque part dans la forêt, environnée par le murmure du vent, et qui ne livre par elle-même nul message, ne profère nulle parole.» (Stefan Zweig *)
J'ai encore plein de trucs à apprendre de ce grand Tom.
Il va m'occuper l'esprit encore longtemps, Léon Tosltoï. D'autant plus qu'il a écrit des briques. Guerre et Paix, Anna Karénine, Les Cosaques, Jeunesse, Enfance, Adolescence: ça ne se lit pas en deux temps trois mouvements.
Bon. Assez écrit. Musique.
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Note:
*Vous pouvez lire l'extrait complet sur le site de L'Agora, une encyclopédie québécoise.
Vous m'avez appris la simplicité de son repos ou plutôt de son dernier lit sur terre. Mais, son passage laisse des traces bien plus grandes que son carré de terre. Bon courage avec la suite. Heureusement que vous aimez lire.
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