Il n'y avait pas de bizutage à la faculté de philosophie de l'université où j'allais. Nous méprisions ce type d'humiliation consentie. Tout comme nous méprisions l'ensemble des comportements des petits-bourgeois qui nous entouraient.
Nous nous logions à peu près tous dans la frange la plus incandescente de la révolution sociale, de tendance dadaïste, nihiliste ou jemenfoutiste, sinon carrément artiste. Aussi, l'accueil des nouveaux consistait tout bonnement en un souper bien arrosé, jusqu'à ce que les convives zigzaguent autant que faire se peut et se mettent à dormir n'importe où, au hasard d'une halte improvisée où il nous était loisible de délirer sur Lao Tseu, Nietzsche, Élisée Reclus et Diogène de Sinope.
La rentrée la plus spectaculaire fût sans contredit celle de Planète, un freak dans la quarantaine qui s'était fait couper son chèque d'assistance sociale suite à une fraude quelconque de sa part. Pour trouver de quoi survivre sans avoir à travailler, il avait trouvé le moyen de décrocher un chèque du programme de Prêts et bourses en effectuant un retour aux études à l'université.
Dès qu'il encaissa son chèque, le jour même de la rentrée, il entreprit de se saouler la gueule et de se droguer avec la passion qui lui était familière. À midi, il était fini. Il nous avait parlé un petit peu, en souhaitant vouloir devenir philosophe, comme il disait. Il trouvait ça cool la philosophie. L'amour de la sagesse. Et il s'enfilait un verre après l'autre, les yeux cross side.
On le perdit de vue jusqu'à dix-sept heures. J'étais en train de boire ma vingtième bière de la journée, sans doute, histoire de me détendre l'atmosphère. Planète était salement amoché. Il avait déboulé l'escalier qui menait au sous-sol, là où se trouvait incrusté le bar étudiant.
-Oyoyoye! dit-il en riant, le crâne ensanglanté et la peau couverte d'ecchymoses.
-Que s'est-il passé Planète? D'où reviens-tu? lui demandé-je.
-J'viens d'pardre mon char pis mon permis calice! répondit Planète. J'su's rentré dans l'poste de police su' 'a rue des Forges... Saoul raide hostie... J'ai faitte une manoeuvre pour éviter un flic qui sortait de son char pis j'su's rentré dans l'poste de police...
Pour une rentrée scolaire, j'ai beau fouiller dans ma mémoire, il me semble que c'en était toute une.
Et je ne vous raconte même pas la suite du récit. Parce qu'un black-out, ça ne se raconte pas.
haha! Tu as de loin l'histoire de rentrée scolaire la moins commune de tous les blogueurs!
RépondreEffacerJe ne pourrais même pas approcher cette histoire complètement ahurissante. Ya être saoul pi ... être saoul !
RépondreEffacertu l'avais déjà racontée, cette histoire
RépondreEffacermis à part que planète rigolait en annonçant qu'il avait perdu son permis
il était mort de rire tout le temps dans la dernière version