lundi 13 décembre 2010

Écrire en français avec un accent

J'étais écrasé dans mon fauteuil, hier au soir, autant fourbu qu'assoupi. De la neige mouillante, comme on dit par chez-nous, ce n'est pas comme du duvet dans le creux d'une pelle. Cela prend un peu plus d'huile de coude pour soulever tout ça afin que les moteurs à quatre chevaux circulent sans efforts...

Il y avait à la télé de Radio-Canada les meilleurs moments de Tout le monde en parle, un divertissement léger qui se situe souvent à la limite du badinage. Il y a parfois des éclairs de génie à cette émission, comme n'importe où dans la vraie vie. Il faut seulement tendre ses antennes ou bien se promener avec sa lanterne dans les rues de la cité, à la recherche de quelques traits d'esprit précieux parce que rarissimes.

J'ai été stupéfait par les propos d'un écrivain congolais dont le nom m'a complètement échappé. Laurent Mbogn'o? Laurent Makasso? Laurent Mbwana? Hum... J'y reviendrai quand je n'aurai plus cette lâcheté de délaisser Google pour effectuer cette recherche facile mais hasardeuse.

Je vais plutôt coller à ses propos. L'écrivain congolais prétend écrire avec un accent, celui des siens, au Congo.

-Nous avons été colonisés par la France. C'est à notre tour de coloniser la langue française en l'écrivant avec notre accent! disait-il substantiellement.

Et il avait crissement raison, ce tabarnak.

Nos plus grands écrivains québécois ont écrit avec un accent. Enlevons cet accent et il n'y a plus de littérature, rien que de la pose ou bien de l'imitation.

Émile Nelligan a imité Nerval, Lamartine, Verlaine et Rimbaud. Son oeuvre est plate parce qu'on y cherche l'accent sans le trouver. C'est presque du copier-coller.

Michel Tremblay n'a imité personne. Il a écrit avec son accent. Avec ses tripes. Et son propos est universel. Traduit en plusieurs langues. Et sans doute plus apprécié dans le monde entier que les vers collégiens de Nelligan.

Écrire en français avec un accent québécois... C'est la clé pour faire de la grande littérature au Québec. Autrement, ce ne sera toujours que de l'imitation, de la pose, de la théorie ou, pire encore, que des leçons de grammaire.

Les écrivains québécois et congolais peuvent fièrement coloniser la langue française et la doter de paroles vivantes pour qu'elle n'ait pas l'air d'un bloc de marbre à la Chateaubriand.

Oui tabarnak, on peut écrire comme l'on parle.

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