«Publier c'est mettre aux enchères l'esprit humain.» C'est un aphorisme d'Emily Dickinson, une grande poétesse américaine du XIXe siècle qui n'a écrit que pour ses tiroirs. Elle n'a rien publié de son vivant, sinon quelques petits poèmes dans son journal local. Pour qui écrivait-elle alors? Pour elle-même, pour mettre en pratique la maxime de Socrate, maxime qui figurait par ailleurs au fronton du temple d'Apollon: «connais-toi toi-même». Emily Dickinson a donc appris à se connaître, au fil de ses poèmes, de la dentelle philosophique qu'il faut lire tendrement, pour ne pas froisser cette pauvre vieille fille qui n'a pas su trouver d'autre passe-temps ou bien une bonne paire de bras pour confier ses secrets. Ses secrets sont dans sa poésie. Et sa poésie a tout de même fini par se publier, après sa mort, de sorte qu'elle est l'une des plus grandes plumes de la littérature américaine, aux côtés de Poe, Whitman et Melville.
Cela dit, Emily Dickinson écrivait tout de même que publier c'est mettre aux enchères l'esprit humain. Elle ne voulait pas marchander sa poésie ni la soumettre à quelques marchands de poetry qui lui auraient dit, par exemple, de remplacer le mot snow pour le mot calliflower.
Je me sens un peu comme Emily Dickinson parfois.
J'ai des tas de manuscrits dans mes tiroirs.
J'hésite à les envoyer aux éditeurs.
Si je voulais les rendre publics, par la voie de l'édition sur papier, je devrais attendre jusqu'en 2009 ou 2010, compte tenu des carnets de commande des maisons d'édition. D'ici là, des tas de morpions du langage viendraient fouiner dans mon manuscrit pour me dire de remplacer le mot neige par le mot choufleur. Ça me mettrait en beau tabarnak, je me connais.
Par ailleurs, je pourrais très bien publier mes manuscrits demain matin sur l'Internet, en me crissant bien des éditeurs et en me crissant aussi de l'idée de mettre aux enchères mon esprit.
Et c'est probablement ce que je vais faire, tiens.
Je vais vous donner un roman bientôt, chers lecteurs.
Et ce sera gratuit.
Vous cliquerez plusieurs fois sur mon blogue pour me payer par la bande...
Bon, les enchères commencent...
Aucun commentaire:
Publier un commentaire