Jacques détestait la fournaise à l'huile de tout ce que lui permettait son coeur d'enfant.
La fournaise à l'huile lui faisait peur. Les nuits d'hiver, quand tout le monde ronflait et que dehors il faisait tempête, Jacques peinait à s'endormir. Le vent rentrait par le trou de la cheminée et venait lécher les flammes, pour les faire grossir, au point où toute la carcasse de la fournaise était chauffée à blanc. On y aurait déposé un steak qu'il aurait instantanément rôti des deux côtés.
L'huile sentait mauvais. Et la fournaise en redemandait, suçait l'huile pour faire grelotter de peur le pauvre petit Jacques, un garçon de sept ans à l'imagination trop fertile. La fournaise brûlait et brûlait encore, réminescence de l'enfer qui attendait tous les mauvais hommes.
Il y avait eu des tas de feux tout autour de chez Jacques. Quand ce n'était pas des feux de patates frites c'était des feux de fournaise à l'huile. C'est traître, l'huile. Et ça pue, même pour les frites.
Jacques et sa famille vivaient dans un vieux logement mal isolé, aux murs recouverts de moisissure que plusieurs couches de peinture et plusieurs rinçages à l'eau de javel n'arrivaient pas à tuer. La seule source de chaleur, bien sûr, c'était la fournaise à l'huile. Le chauffage électrique n'était pas encore à la mode dans les taudis de la P'tite Pologne. Il y avait bien sûr des chaufferettes électriques à prises directes, mais ça ne faisait qu'augmenter les risques d'incendie.
Une nuit de janvier très froide, le vent s'est engouffré dans la cheminée avce plus de vigueur qu'à l'habitude. Et le feu s'est mis à circuler dans les murs. Le proprio avait fait semblant de ramoner la cheminée. Du bon combustible pour les flammes qui montèrent dans la cheminée et se frayèrent un chemin dans le carton et le plâtre moisi. Finalement, elles s'emparèrent de l'immeuble au complet.
Cette nuit-là, Jacques n'avait pas eu peur pour rien. Ce n'était plus que de l'imaginaire. C'était un hostie de gros feu!
La fournaise hurlait d'un rire sardonique au milieu des flammes. Et Jacques hurlait aussi, de sorte que tous les ronfleurs eurent la vie sauve grâce à sa peur surnaturelle de la fournaise à l'huile.
L'immeuble était une perte totale. Jacques et toute sa famille fûrent hébergés chez la tante de sa maman, Raymonde, une infirmière qui possédait une maison qui ne chauffait qu'à l'électricité. C'était réconfortant le ronronnement des plinthes électriques. Surtout après cet incendie traumatisant.
-M'man, j'veux pas qu'on aille rester dans une place où'sse qu'i' a une fournaise à l'huile! fut tout ce que répéta Jacques pendant le mois où ils demeurèrent chez sa tante Raymonde.
Ils emménagèrent finalement dans un logement neuf. Une habitation à loyer modique. On venait tout juste de les construire à l'emplacement d'anciens taudis chauffés à l'huile qui avaient été des pertes totales, eux aussi. C'était propre. Moderne. Insonorisé. Et pas cher. Le gouvernement payait presque le loyer.
Jacques se croyait vivre dans un château. Il était passé d'un taudis au plancher de terre battue recouvert de palettes de bois et de bouts de prélarts à un HLM de béton armé, véritable bunker sans moisissure et sécuritaire. Il y avait une grande salle de bain. Et le salon était immense. Aucune fournaise à l'huile. Rien que des plinthes électriques. Youppi!
Joli conte ! comme quoi ça sert d'être doué pour gueuler des fois....sans le Jacques y aurait eu plein de macchabées !
RépondreEffacerIl a eu de la chance, un beau logement, ça n'arrive pas à tout le monde !
"les phobies sont parfois des humanismes." (jean-bernard macaron)
RépondreEffaceret surtout "on dirait que c'était comme si t'oubliais que t'étais con, quand t'écris"
RépondreEffacerjean mécouilles cherchait du travail en arrivant en ville. il vit un policier et lui demanda :
RépondreEffacer- pardon, merci. je voudrais du travail s'il vous plait.
le gros lui lança un regard méprisant (on était en 2013); puis lui regarda la pantalon.
- engagé! dit-il.
il y eut un bruit de fourgonette.
http://www.youtube.com/watch?v=PEFhuvg1SEA
Merci pour les compliments. C'est mieux qu'un coup de pied au cul.
RépondreEffacer***
JP, le gars dans la fourgonnette a été obligé de se rendre bosser dans un lave-auto pour un salaire de misère.