Le boulevard Saint-Joseph à Montréal était d'une laideur totale aux yeux de Gaston.
C'est vrai qu'il avait pour ainsi dire touché le fond du baril. Sa job le faisait chier, sa blonde était mariée avec un autre et il vivait dans un petit studio minable sur le boulevard Saint-Joseph.
Il n'avait presque rien. Quelques vêtements, des harmonicas, une radio et un vieil ordinateur. Rien ne le retenait dans cette vie de merde d'artiste qui se maudissait lui-même, seul parmi un coefficient trois millions de solitude.
Un beau matin d'avril, il a ressenti quelque chose comme une illumination. C'était au cours de sa promenade matutinale. Gaston se promenait dans le cimetière Côte-des-Neiges, le plus beau parc de Montréal. Il faisait soleil. Le ciel était bleu vif et sans nuage. De fines gouttelettes de rosée se formaient au sommet des brins d'herbe. Les feuilles venaient tout juste de jaillir des bourgeons. C'était tout plein de pissenlits et de choux gras.
-Moé, j'calisse mon camp d'icitte! qu'il s'était dit, Gaston, devant tant de beauté.
Il était illico retourné chez-lui pour plier ses bagages et prendre la clé des champs.
Gaston prit le bus jusqu'à Répentigny. Puis il fit du pouce en direction du Nord. N'importe où mais loin de Montréal, loin du studio sordide du boulevard Saint-Joseph, loin de cette vie vide, insensée, dégueu.
Deux heures plus tard, ouais, la vie était redevenue belle pour Gaston.
Il jouait de l'harmonica devant un champ, à la hauteur de Berthierville, sur le bord de la 40, avec son packsac.
Tout redevenait possible.
Gaston a réalisé le fantasme de pas mal de monde...
RépondreEffacerÇa fait quand même du bien, le temps d'une lecture, de croire que tout est encore possible.
RépondreEffacerFaut pas grand chose pour du bonheur, des fois....juste prendre ses pieds pis les emmener plus loin...
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