mardi 26 décembre 2017

Voilà!

Hergé a réalisé l'album Tintin au Tibet alors qu'il traversait une période de dépression. C'est pourtant l'un de ses meilleurs albums au plan graphique. Les lignes sont épurées comme la neige l'y oblige. Ce serait un album blanc qui célèbre le vide s'il n'y avait pas le yéti qui y beuglait de temps à autres.

Je peins beaucoup de scènes d'hiver depuis les dernières semaines.

Je ne traverse pas une période de dépression, ne vous inquiétez pas.

Pourtant, les scènes d'hiver pourraient m'y mener si je ne les interrompais pas pour me soigner dans une toile aux couleurs bigarrées qui se bagarrent dans ma tête et mes yeux. La neige exige une certaine maîtrise des tons de blanc, de bleu et de gris. Je n'ai pas cette maîtrise. D'ailleurs, je ne maîtrise rien sinon le hasard. J'arrive à un résultat sans m'y attendre. Ça ne s'explique pas. C'est mon secret d'artiste. Secret qui trouve sa consécration dans l'étape finale de ma production, lorsque j'applique mes dernières retouches de noir ainsi que le vernis.

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La question revient sans cesse chez ceux qui sont sûrs qu'un artiste-peintre n'est rien de son vivant: «Est-ce que ça rapporte beaucoup?»

Est-ce que je demande à Untel combien il fait à vendre des souliers ou des brosses à dents?

Non.

Ce sera tout.

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Ce qui est essentiel dans l'art, c'est l'acte lui-même, c'est la création en cours d'exécution. Le résultat ce n'est déjà plus qu'une vulgaire marchandise. Étape nécessaire pour produire d'autres toiles, d'autres films, d'autres disques et quoi encore.

Musicalement parlant, j'ai toujours préféré les sessions studio en cercle fermé que les shows sur scène devant un public heureux de hurler par-dessus les instruments des saltimbanques. J'ai l'oreille sensible. Entendre crier nuit à mon appréciation.

C'est pareil pour la peinture. Je me sens bien dans l'atelier de l'artiste. Et comme un éléphant dans un jeu de quilles dans les coquetels officiels, vernissages, galeries d'art, etc. Comme si je savais toutes les discussions condamnées d'avance à des poncifs et des mièvreries.

Bref, je suis un hostie de Sauvage. Au sens noble comme au sens figuré.

Il paraît que c'était le surnom de Gauguin, le Sauvage. En compagnie de Gauguin, qui a si bien écrit sur l'art et la vie en général. Je vous recommande cette lecture gratuite. Comme quoi je ne cesse de tout donner...

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26 décembre 2017.

Lendemain de tempête. Avertissement de froid extrême après la tempête de neige de Noël.

C'est aussi le Boxing Day. Fête commerciale foireuse. Horreur à laquelle je n'assiste et n'assisterai jamais.

Le 26 décembre, en plus de peindre, d'écrire, de boire du café et de laver du linge, j'essaie de ne rien faire.

Le plus tôt que j'aurai trouvé le dernier mot ici, le plus tôt je serai étendu sur le canapé à regarder un vieux film ou une vidéo stupide d'un chat qui taquine un chameau.

Le dernier mot sera voilà.

Voilà.