lundi 9 janvier 2012

La vraie histoire du bonheur de Varlope Laforêt

Il ne sert à rien de philosopher longtemps si c'est pour se rendre malheureux. Il faut bien sûr faire l'inventaire de ses tristesses de temps à autres. Mais vivre sous le joug perpétuel de malheurs passés, imaginaires ou bien à venir? Jamais! D'un malheur à l'autre le temps est rempli d'un long ennui qu'on peut facilement combler avec des états de grâce si l'on sait se pardonner de ne pas être plus-que-parfait.

Quelqu'un vous dit d'aller chier, par exemple. Cela prend trois secondes de trop dans votre vie, sans doute. Mais les secondes et les minutes et même les jours qui suivent sont à vous.

Varlope Laforêt mettait son breaker à off pour réussir le pari philosophique de vivre heureux avec le sourire aux lèvres et l'oeil pétillant de vivacité d'esprit. Il les oubliait facilement, ces trois secondes désagréables. Il ne se consacrait qu'à vivre un plein bonheur.

Il s'appelait Varlope parce que ses amis étaient impressionnés par la grosse varlope qu'il avait héritée de son arrière-grand-père Mathurin Lafourche, cousin de son arrière-grand-mère Mathilda Laforêt.

Lafourche était ébéniste. Varlope Laforêt n'était rien.

Il passait son temps à ne rien faire, à contempler les nuages ou bien à lire des livres.

On ne savait pas qu'il faisait du télétravail pour une quelconque compagnie de savon. Mais bon, on ne retenait de lui que ce que l'on voyait. Et ce que l'on voyait c'était Varlope Laforêt toujours étendu dans son gros hamac avec une petite bière frette à portée de main. Ça sentait la claque brûlée autour de lui, évidemment. Il fumait des pelures de bananes.

Le grand slim trentenaire à Varlope Laforêt rêvait à voix haute en récitant sur sa galerie des poèmes qu'il improvisait gratuitement devant ses voisins médusés par son attitude trop débonnaire.

-La vie est belle en tirledidondaine! Tirledidondé! qu'il récitait le plus sérieusement du monde, Varlope Laforêt.

La grande majorité de ses voisins avaient l'air triste, déprimé, défait, contrit, tragique, nauséeux, etc.

Mais pas Varlope Laforêt.

Ce calice-là était toujours de bonne humeur.

Ça fait longtemps qu'on ne l'a pas revu Varlope. Ça fait un crisse de boutte.

La dernière fois qu'on l'a vu c'était en avril quatre-vingt-seize.

Je me souviens qu'il disait qu'il étranglerait quiconque voudrait le faire travailler.

Puis Varlope est disparu dans la brume.

Certains prétendent l'avoir vu à Québec.

D'autres à La Tuque.

En ce qui me concerne, je n'en sais rien du tout.

Pas plus que je ne sais quoi que ce soit aux leçons de bonne heure.

Il est 6:41 sur mon écran et tout ce que je trouve à raconter c'est l'histoire d'un gars qui est disparu dans la brume. Varlope alias Archie Laforêt. Oui, il s'appelait Archie, vrai comme je suis là.

Enfin, presque là.

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