lundi 17 décembre 2012

Les autosuceurs

Eusèbe est un écrivain qui ne publie rien parce que tous les gens du milieu des arts et des lettres lui laissent un léger goût de vomissures en bouche à la simple énonciation de leur patronyme de mendiants de prébendes.

Unetelle fait passer ses collages photoshoppées pour le nec plus ultra de l'art, alors que votre beau-frère fait mieux dans son sous-sol sans écoeurer personne avec l'étalage de son mauvais goût. Elle voyage ça et là sur le bras en nous faisant passer pour les maillets d'entre les maillets parmi les peuples et nations du monde, dont les Français et les Belges.

Telautre crie dans un micro des incongruités sur ses passions sexuelles qui, dans les faits, se limitent à plusieurs branlées en solo. Telautre a tellement l'air imbu de lui-même qu'il est du genre à rêver de s'enlever toutes les côtes pour s'autosucer.

Les oeuvres de tous ces guignols sont à la juste mesure de leurs éternels débuts en arts comme en toutes autres choses. Ils sont tous et toutes englués dans la prématernelle de l'art, de cet art qui tape une crise de bassinette quand on doute de son pouvoir d'évocation. L'art puéril, l'art du strict minimum d'efforts pour avoir son bonbon ou bien sa suce.

Eusèbe ne vaut guère mieux que ceux-là en réalité. Mais au moins il ne publie rien. Il s'essaie sur son dactylographe Underwood à un énorme roman intitulé Les autosuceurs. C'est déjà une brique de vingt-sept milles pages où Eusèbe  s'en prend, vous l'aurez compris, à tous ces narcissiques qui pullulent dans le milieu universitaire où il évolue plutôt mal que bien, ce sacré Eusèbe.

Le visage toujours glabre, les oreilles un peu poilues, on ne dirait pas de Eusèbe  qu'il ressemble à Symphorien. Il a plutôt l'air de ressembler à Léon Bloy, tant en photographie qu'en littérature.

Son roman Les autosuceurs est un compendium de mots savants où tout le Littré y passe, voire plus encore. Le plus-que-parfait du subjonctif y est à l'honneur. Et le passé simple aussi. C'est lourd, pesant et pas facile à lire. Par contre, c'est sincère, même si c'est inintéressant.

Il m'en a laissé un exemplaire quand il est venu faire le ménage au département. Il pense, à tort, que je sais apprécier la littérature parce que je suis la seule personne autour de lui qui connaisse Léon Bloy. Ce qui fait de moi le seul lecteur qu'il voudrait se mériter. Un chapeau beaucoup trop grand pour moi qui, fin renard, le complimente beaucoup trop puisque je dois me taper Les autosuceurs en lecture très rapide sur la diagonale. Eusèbe n'a que la littérature et sa moppe dans la vie. Je m'en voudrais de ne lui laisser que sa moppe. Aussi, j'essaie de lui trouver un éditeur, des fois où ça lui ferait du bien, Eusèbe, de voyager un peu avec Unetelle ou Telautre.

Je vous laisse sur l'introduction de son roman. Ça donne le ton aux vingt-sept milles pages qui suivent... Si vous êtes prêts à perdre de l'argent sur cette histoire, faites-lui signe. Eusèbe saura l'apprécier après avoir feint une atteinte à son univers d'artiste maudit, comme tous les autres tarés des arts et des lettres.

«Qu'ils eussent été mille, millions et milliards ils n'étaient tous que fiente dans le fin fond de l'âme et c'est cette matière fétide qu'il voulait faire accroire aussi luisante et propre qu'un cerveau bien fait ayant élégamment maturé dans les méandres aventureux des bibliothèques qui s'élevaient à chacune de ses haltes pour lui permettre de se finement délivrer de ces flagorneurs, pharisiens et autres troglodytes de tous lieux qui sèchent comme de la crotte qui ne voudrait pas sécher au soleil.»

Eusèbe Carrier, Les autosuceurs, manuscrit


2 commentaires:

  1. Réjouissant ; je rêve d'en faire copier des passages, du roman d'Eusèbe, aux cuistres qui étalent sur Fessebouc leur suffisance truffée de fautes d’orthographe, de grammaire, de syntaxe, et tutti quanti. Oui, j'admets, j'ai parfois des côtés pervers. :)

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  2. Un passage d'Eusèbe c'est mieux que de se taper 27 000 pages d'Eusèbe...

    ;)

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