lundi 8 septembre 2008
Christian Mistral, Éric McComber et Stanley Péan
Ce matin, je ne vous raconterai pas d'histoires, petits coquins et petites coquines!
Vous croyez que je ne suis là que pour vous amuser, hein? «Lui, Bouchard, c't'un hostie d'fou mais n'empêche que des fois, l'gros christ, y'en pousse des câmiques!»
Moi comique? C'est vous qui le dites.
Et vous trouvez ça drôle?
Pas moi. Je veux devenir un écrivain sérieux. Je n'ai pas envie que l'on me prenne pour un amuseur public, un avaleur de sabres ou bien un joueur d'accordéon.
Je veux devenir Honoré De Vouconnaistre, le génial auteur de Roman en 22 chapitres, ou rien.
Si la place de De Vouconnaistre est déjà prise, je me contenterai d'un poste de membre honoraire de la Société des écrivains de la Région 04... ou de la Région 03. Ou bien du titre d'écrivain de mon quartier. Voire d'écrivain de ma rue. Ou bien, quoi, qu'est-ce qu'on s'en torche.
Bref, je suis un câmique.
***
Parlant de comique, j'en ai trouvé une bonne dose chez Éric McComber. Je suis en train de dévorer son dernier roman Sans connaissance, publié en 2007 dans la collection Littératures, chez Autrement. C'est du solide ce roman, croyez-moi. Cela me fait l'effet de lire Nègres blancs d'Amérique, de Pierre Vallières, sans tout le prêchi-prêcha politique qui nuit tant à ce livre. Sans cela, Nègres blancs serait un grand livre. Quand Vallières racontait son enfance à Cartierville, ça fessait plus que lorsqu'il délirait sur les Black Panthers ou la soupe aux pois.
Autrement dit, Sans connaissance est un grand livre parce qu'il n'y a pas de prêchi-prêcha. L'histoire se passe à Montréal-Nord, tiens, dans le tournant des années '80.
McComber fait dans l'hyperréalisme en décrivant les années d'apprentissage d'Emile Duncan. Ça joue dur. Ça cogne dur. Et c'est surtout vrai. L'auteur ne fait pas dans la dentelle. De plus McComber fait preuve d'une maîtrise exceptionnelle du joual. J'y reviendrai. Promis.
C'est Christian Mistral qui m'a fait connaître McComber, Mistral que j'avais apprécié pour Vamp, un vent de fraîcheur dans la littérature québécoise d'alors, et que je suis sur son blogue depuis quelques temps.
Récemment, Mistral m'a envoyé un commentaire à propos de L'héritage des crosseurs, un récit paru sur mon modeste mais ô combien sympathique blogue.
Je n'ai pas pu faire paraître son commentaire pour une raison bien évidente qu'il a comprise avec sagesse, compte tenu des circonstances. Il s'ensuivit une correspondance par courrier électronique. Vous voulez la lire? Pas question! Je respecte la vie privée, hostie.
Donc, Mistral m'écrit que certains de mes textes lui rappellent Duncan, personnage central du roman Sans connaissance de McComber. Je ne sais pas qui c'est, moi, ce McComber. Comme Mistral m'a l'air d'être un écrivain fiable, qui peut t'écrire cent pages par jour et plus, jusqu'à ce qu'il tombe d'épuisement sur son clavier, eh bien je me suis dit qu'il fallait que je lise ce satané McComber.
Avant de le lire, je lui ai écrit. Des conneries, évidemment. Je ne me vois pas en train de faire des «cher monsieur» pour parler avec un écrivain. Avec un comptable peut-être, ou bien un commis aux pièces chez Canadian Tire, mais pas avec un écrivain.
Hého. Un écrivain, ça aime écrire, être surpris et, sans doute, lire un brin. Donc je lui ai torché un beau petit courriel en deux ou trois rangées de doigts entrecroisés et ça s'est envolé jusqu'en France, en quelques micro-secondes, là où se trouve McComber ces derniers temps, à vélo le mec, et il en parle même sur son blogue sans que cela ne vous coûte une crisse de cenne.
Hostie d'artistes qui ne pensent jamais à l'argent! Esprits peu pratiques qui pratiquent le vélo ou partagent des beignes passées date avec les goélands, dans l'arrière-cour des Duncan Donuts! (Et je ne suis même pas choqué!)
Bon, McComber m'a répondu. Et depuis, je lis Mistral et McComber en simultané. J'ai Léon, Coco et Mulligan à me taper. C'est un roman de Mistral publié en 2007 chez Boréal. L'histoire de Léon, un écrivain qui n'a jamais publié, et de Coco, un schizo. Deux itinérants du carré St-Louis, à Monrial. Il est devant mes yeux. Je vais le commencer aujourd'hui. Je vous reviendrai là-dessus, promis!
Ces maudits écrivains, ça écrit tout le temps et il faudrait les lire tout le temps. Comme si nous n'avions que cela à faire! Et en plus, il faut que ces écrivains s'intéressent aux originaux et détraqués, alors que je pensais que c'était mon fonds de commerce, à moi et à moi seul. Grrr!
Mistral a bien maturé depuis Vamp, qui n'était pas un petit roman non plus. Quand la vie te rentre dedans, les mots pèsent de plus en plus lourd et visent de plus en plus juste. Ce n'est plus le jeune premier, Mistral, et c'est tant mieux que je vous dis.
C'est le mois de septembre, le mois le plus doux pour lire des romans québécois. Pourquoi n'iriez-vous pas lire Mistral et McComber, hein? Donnez-moi une bonne raison. Ou crissez-moé patience.
***
Hum... Voilà que je viens de créer un nouveau genre de critique littéraire. Je devrais en parler à Stanley Péan ou d'autres types qui pourraient m'être payants. «Man! Je torche de beaux billets littéraires sur mon blogue. Donne-moé vingt piastres, ou des beignes, n'importe quoi, un rabais de 20% pour aller manger au resto, un deux pour un sur les cravates... Hein?»
Le problème, c'est qu'on ne prend plus la littérature au sérieux.
Même si Stanley Péan torche aussi de belles émissions de jazz à la radio de Radio-Canada.
Même s'il y a des problèmes beaucoup plus sérieux.
Comme la possibilité que les suceux de balustres forment un gouvernement majoritaire.
Ouche! I don't wanna be an american idiot...
Des beignes ! Mouahaaaaa je te posterai un croissant. Merci pour les bons mots, cher collègue. Ça fait du bien par où ça passe.
RépondreEffacerMoi, ce que j'aime dans les beignes, c'est le trou, Je te le laisse le reste. :-)
RépondreEffacerC'est important, pour moi, de préciser: je ne t'ai jamais dit que certains de tes textes me rappelaient Duncan, c'est pure calomnie, libelle et diffamation, pour l'excellente raison que, comme chacun sait, je n'ai jamais lu un livre de Mac, pas plus que de Hamelin ou Brisebois, I mean c'est établi on the record, je lis pas Barbe ni Vigneault, plus ils sont proches de mon coeur et loins de la tombe moins je les lis, c'est écrit dans tous les journaux, ce doit être vrai, et toi tu infirmes en une phrase vingt ans de patiente érection d'une mythologie. Patiente et coûteuse.
RépondreEffacerJe t'ai dit que toi, tu me faisais irrésistiblement songer à Mac. Puis, quand tu m'as demandé d'élaborer, je t'en ai parlé, cinq ou six lignes superlatives et plutôt bien torchées se terminant par une expression d'espoir, celui que je te l'aie décrit en termes qui t'inciteraient à le visiter.
Résultat: tu lis son roman avant le mien! Et on dit qu'il n'y a pas de mafia de sauvages! Et on prétend que je sais écrire! Si c'était vrai, j'aurais réduit la dose, mesuré l'effet, j'aurais pas dithyrambé ce biker apatride, ce Dionysos à roulettes au point de le faire passer devant moi!
P'tite misère.
Si je l'avais lu, je vous dirais probablement que Duncan, si Écossais soit-il de sang, un sang carreauté, tartané aux couleurs des McC..., n'est qu'un trompe-l'oeil, une diversion, un leurre pour vous lancer dans la direction où la vérité ne va pas, et vous éloigner d'où elle va. Je vous dirais même, si vous me payez une bière, que la vérité est Macbeth...
In this light, Macbeth is punished for his violation of the moral order by being removed from the bicycles of nature (which are figured as female.
The bell invites me.
Hear it not, Duncan; for it is a knell
That summons thee to heaven or to hell.
Macbeth. ACT II Scene 1
Pour un keg, je vous en dirais des épaisseries de la même farine, comme si je savais de quoi je parle: je ne me sentirais pas forcé, sans qu'on me le demande, de révéler que je ne fais que répéter ce que Dan Bigras et Lapointe Éric avançaient hier dans la bat-bibliothèque, ce légendaire repaire urbain où les deux super-littéraires peuvent être eux-mêmes sans dissimuler leur réelle identité derrière le masque de chanteurs populaires, libres de porter des lunettes et de traduire MacBeth en joual et McComber en poular et en soninké.
Réponse à Mistral :
RépondreEffacerWô menute! Je vous lis tous les deux en simultané… Et je ne sais pas encore lequel des deux romans je vais terminer en premier.
Pour la mythologie de Mistral je dois dire que je suis navré de tout rapporter tout croche. J’ai trop été influencé par Éphrem dans Symphorien, du génial dramaturge Marcel Gamache.
Tu avais dit que moi et McComber avions été séparés à la naissance et, dans ma tête, ça faisait « tu dois lire le roman de McComber ». Hostie que je fais dur.
Moi, je lis tout le monde, même mes amis, même si c’est tout croche et tout de travers avec des traces de moutarde et de sauce à spag sur les pages.
Cela dit, je lis, je n’analyse pas. Je laisse l’analyse aux crétins qui n’ont pas de vie.
GB
Bien aimable. J'y tiens, à ma job. Chu hyper-qualifié. Tellement crétin et tellement pas de vie que même PKP hésite à m'embaucher, de peur de ne pouvoir me verser les émoluments que commande mon expertise. Il pige pas que si je suis si bon dans ce que je fais, c'est que j'adore ça: je serais crétin et pas de vie gratis s'il fallait, je ferais du temps partiel ou du bénévolat, c'est tellement plus satisfaisant que la philatélie.
RépondreEffacerComme tu dis vrai! Et quelle amère déception de constater que, cette année encore, le TNM ne programme aucune oeuvre de Marcel Gamache. Faut-il rappeler qu'il s'agit d'un théâtre à 80% subventionnné par nos taxes, et que nos enfants s'y déversent 180 jours par an d'autobus jaunes aussi polluants que désuets?
RépondreEffacerIl est grand temps que notre belle jeunesse soit exposée aux textes fondateurs de notre dramaturgie: si le gouvernement mettait ses culottes, on jetterait Michel Tremblay, Marcel Dubé et Wajdi Mouawad hors des théâtres subventionnés par nos taxes et on les renverrait dans leurs pays faire du trouble tant qu'ils veulent, nous on veut voir Marcel Gamache sortir du purgatoire et entrer au TNM, et je conseillerais pour commencer, parmi cette oeuvre vaste et dense et si riche, un classique, la tragédie désopilante Oscar Bellemare fait son rapport d'impôts.
J'ai une affiche géante sur mon vélo de son fameux show under-ground 1001 jokes de Newfies. Show qui lui a d'ailleurs valu d'être affublé par la critique du désopilant sobriquet de trash-fifi.
RépondreEffacerLes lecteurs outre-marins de Gaétan trouveront peut-être utile que l'on précise: certes, le Symphorien d'Amiante est une distinction que seul Michel Tremblay s'était méritée, de 1968 à 1992 inclusivement, à l'exception de 1982 lorsque Mgr Desmond Tutu remit la récompense si convoitée à Douglas Coco Leopold sur son lit d'hopital, huit minutes avant que le Sida ne coupe court à la cérémonie, mais la liste des lauréats subséquents témoigne de l'ouverture de la dramaturgie québécoise (la meilleure du monde) sur le monde (le meilleur monde du monde). Persistent toutefois l'injustice, l'inéquité toujours plus criantes de cette absence: Marcel Gamache, âgé, malade, ce géant des planches comparé à Orson Welles, Charles Chaplin et Tennessee Williams allait s'éteindre sans étreindre SON Symphorien d'Amiante...
RépondreEffacerDe quoi je parlais, déjà?
Quand je pense que j'ai jamais vraiment étudié ce prolifique et génial auteur. J'ai toujours voulu garder le Gamache pour le dessert.
RépondreEffacerTu devrais avoir honte, te moquer d'un tel visionnaire, qui a souffert pour son art, qui a sacrifié tant! Nomme-m'en un autre qui a eu la fortitude de n'écrire et faire jouer que des merdes émétiques durant quarante ans, conservant modestement ses chefs-d'oeuvre par-devers lui en attendant que sa société soit prête, ne les montrant à personne et les détruisant avant de mourir, ne laissant derrière qu'une montagne de puantes et,en apparence, paresseuses imbécillités destinées aux exégètes, enfin à nous tous? Même Yves Thériault n'a pas eu ce courage. Marcel Gamache rules!!!
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