Bob ramasse des bouteilles et des canettes vides tôt le matin dans les rues de Trois-Rivières. C'est un grand gaillard qui sait à peine lire et écrire. Il boite d'une jambe et se plaint d'affreux maux de dos qu'il soigne avec de l'aspirine. Il complète son traitement avec des bouts de joints qu'il récupère sur les trottoirs devant la sortie des bars du centre-ville.
-El' monde jette leu' choux gras mon Guétan! Moé ej' me lève tous 'es matins d'bonne heure pis ej' trouve toutte c'qu'i' m'faut dans 'a rue. Des bouteilles vides, des bouttes de joints, des fois des vingt piastres roulés pis même des sachets d'poudre... Ej' me trouve même du parfum dans 'es poubelles d'la pharmacie... Drakkar Noir qu'ça s'appelle... Tu sens bon en tabarnak avec ça... C'est pas parce que t'es un trou d'cul qu't'es obligé d'puer... Pis ej' trouve aussi des pâtisseries dans 'es poubelles des épiceries pis toutes sortes d'affaires de même... J'va's jamais charcher d'la bouffe à 'a banque alimentaire, moé, parce que c'est pas mal plus frais c'que j'trouve dans 'es poubelles. Tu veux-tu une barre de chocolat? C'est du chocolat qui coûte cher... Du chocolat d'la Belgique tabarnak... Check ça Guétan... T'en veux-tu, hein?
Bob me montre une barre de chocolat Lindt. Comme je suis un peu bec fin je refuse de la lui prendre prétextant que je me fais un régime sans sucre en parfait faux-cul que je suis.
Puis Bob me parle d'un autre ramasseux de bouteilles vides et de mégots, le Père Colateur qu'il se surnomme, parce qu'il mendie du café à tous les paumés de la ville. C'est un vieux bonhomme d'à peu près soixante-huit ans qui porte un manteau d'hiver même l'été puisqu'il souffre de rhumatismes sévères.
-Le Père Colateur a mangé une hostie d'volée c'te nuitte, Guétan. T'as entendu parler des jeunes crottés qui volent du monde à trois heures du matin dans l'quartier St-Philippe? Ej' pense que c'est les mêmes qui ont crissé une volée au Père Colateur. I' faisait sa run dans l'stationnement étagé du centre-ville quand c'te gang de pleins d'marde sont tombés dessus. Ils lui ont faitte les poches pis quand qu'i' ont vu qu'i' avait rien, i' l'ont fessé dans face, dans l'ventre pis partout toé chose. Le Père Colateur en a mangé une calice... I' saignait quand y'est arrivé chez Mononcle Lafond, mon voisin, t'sais el' gars qui s'promène en bicycle à trois roues... Mononcle Lafond y'a callé l'ambulance mais l'ambulance pensait que l'Père Colateur s'était faitte ça lui-même en se saoulant la yeule comme d'habitude... Mononcle Lafond y'a sacré après eux autres pis y'ont fini par emmener el' Père Colateur à 'pital... Cibouère de chiens sales les ceusses qui lui ont crissé une volée... Ej' me traîne tout l'temps un couteau à dépecer su' moé... Qu'i' viennent s'essayer avec moé m'en va's t'les ouvrir de haut en bas les étols de viârge!
Bob a déjà travaillé, évidemment. Je dis ça pour ceux qui ont l'habitude de mépriser les itinérants ou bien de les battre à mort. Il a travaillé pour une compagnie de textile jusqu'à sa fermeture en 1986. Depuis, il s'est appauvri un peu plus chaque année, au point d'en perdre la santé et un petit peu de sa raison. Qui voudrait engager ce gaillard de soixante-trois ans? Personne. Il en a fait son deuil. D'autant plus qu'il ne changerait pas de vie. Sa vie, il la conçoit comme la meilleure qui soit.
-Moé j'ai pas d'femme, pas d'enfants à faire vivre, rien. Ej' dépends de parsonne pis parsonne dépend d'moé... Mon chèque est pas gros, mais j'compense avec les bouteilles vides, les vingt piastres roulés par les sniffeux d'poudre que j'trouve su' 'es trottoirs pis toutte c'que j'peux r'vendre de c'que j'trouve dans 'a rue... Heille! J'ai même trouvé une chaîne en or de plusieurs carats. J'ai été vendre ça au pawnshop... J'ai eu trente piastres pour ça... J'me suis acheté un gramme de pot pis du steak haché... J'fais quasiment une semaine avec un gramme de pot pis du steak haché... Oui monsieur... T'es sûr que tu veux pas du chocolat? Y'est bon en tabarnak!
-Merci Bob... J'digère pas l'sucre... Salut Bob... Prends soin d'toé... Bonne journée...
-Bonne journée mon Guétan... Pis r'garde à terre su' 'es trottoirs... J'te l'dis tu pourrais trouver vingt piastres! Ha! Ha! Ha!
jeudi 30 avril 2015
mercredi 29 avril 2015
Loin, très loin du bruit
J'ai tenté tant bien que mal de me soumettre au bruit pour ne pas subir l'ostracisme de mes pairs. J'ai fait semblant d'aimer les décharges de décibels, comme tout le monde. Pourtant, rien ne m'a jamais été plus agréable que le chant des oiseaux, la bise du matin dans les feuillages et le léger clapotis des eaux contre les rochers. Tout ce qui est un son humain m'est parfaitement étranger. Je dirais même que je n'aime que ce qui ne rappelle pas la présence des humains.
Plus je vieillis, plus je trouve ma volupté dans le silence ou bien dans les musiques minimalistes de la nature.
Mon poil se hérisse sur tout mon corps quand j'entends les moteurs vrombir et les systèmes de son projetés à tous les vents des hurlements synthétiques.
On combat le stress et la dépression de notre civilisation tonitruante avec des pilules alors qu'un peu de silence ferait tout aussi bien l'affaire. Il est malheureusement plus facile de s'acheter des pilules que de trouver le silence dans ces zoos qui nous servent d'habitat bien malgré nous. Tous les espaces urbains sont occupés par le bruit des affaires, le bruit des moteurs, le bruit des plaisirs humains, le bruit des souffrances humaines...
Je ne suis pas tout à fait normal, vous l'aurez compris, et je ne mérite aucunement l'approbation de ces foules que je fuis.
Les manifs auxquelles je participe vont paradoxalement à l'encontre de mes préférences. J'y participe puisque j'ai encore un fonds de compassion et de philanthropie. Si ce n'était que de moi, je défilerais sans dire un mot. Le moi, en ces cas-là, est sans doute secondaire. La liberté de mes compatriotes, qui partagent avec moi les mêmes cages du zoo, méritent bien quelques moments d'exultation et de tapage. Il faut bien briser nos chaînes ainsi que les barreaux de ces prisons dans lesquelles veulent nous maintenir les garde-chiourme d'une élite qui profite du silence dans des paradis fiscaux de sable fin...
À l'instar des riches, il y a peut-être quelque chose d'aristocratique dans ma volonté de me détacher du bruit. Comme les riches, j'aime les Gymnopédies de Satie et autres musiques lancinantes qui nous préservent de la migraine. J'aime les plages de sable fin et les chalets enfoncés dans quelque forêt vierge.
Peut-être que cette propension que j'ai à développer des maux de tête depuis ma tendre enfance a nourri mon combat contre la pollution sonore.
Il est six heures quarante-sept en ce moment. Je m'apprête à enfourcher mon vélo pour pédaler dans les rues presque désertées de la ville. À cette heure-ci, tout est encore très calme. C'est à peine si l'on entend les chants des corbeaux, des goélands et des outardes. Je vais pédaler jusqu'au fleuve Magtogoek (anciennement Saint-Laurent) pour me remplir l'âme d'un peu de béatitude avant que d'affronter mes obligations quotidiennes et le bruit que cela suppose...
***
PS: La photo a été prise ce matin au Port de Trois-Rivières.
mardi 28 avril 2015
Pauvre Bouboule Gagnon, chevalier de la drette!
Bouboule Gagnon ne s'appelait pas Bouboule mais tout le monde l'appelait Bouboule puisqu'il était gros et court sur pattes. Il était comme une pierre qui roule sauf qu'il amassait de la mousse entre les deux oreilles. Il faut dire que Bouboule Gagnon était un fier défenseur des idées de droite, c'est-à-dire un larbin ennuyeux doté d'une personnalité falote qui le condamnait à des passions médiocres: le sport télévisé, les morceaux d'automobile, les hamburgers et les frites.
Il ne lisait à peu près rien et s'il allait parfois au théâtre c'était l'été pour assister à une pièce burlesque où le mari trompe sa femme avec son char en hurlant des onomatopées. Pour ce qui est du cinéma, Bouboule était un fan fini des films de chars qui explosent et de gars qui disent des trucs du genre salopard d'enculé de merde je vais te buter.
Bouboule Gagnon détestait la gogauche et tous ces maudits artistes crottés qui parlent de droits de la personne, de protection des rivières et autres conneries. Les changements climatiques et tout le tralala lui donnaient l'envie de fesser sur les écologistes, ces malpropres qui faisaient fermer les shops.
-L'argent pousse pas dans les arbres! qu'il disait souvent en se savonnant avec du Irish Spring sans que personne ne l'entende vraiment puisque personne ne voulait rien savoir de lui. Ses rares blondes, imbéciles comme mille, finissaient toutes par le tromper avec des artistes ou bien des séparatistes qui rêvent comme des endormis.
Alors Bouboule revenait vers son écran pour alimenter son blogue intitulé "Vive le Canada et la droite!", ses sujets de prédilection bien entendu. Bouboule pouvait vous donner mille raisons d'aimer l'unifolié, les gouvernements Harper et Couillard ainsi que la droite. Tout le reste n'était que du vomi sur la gogauche assorti d'expressions salaces où figuraient des godemichés enfoncés dans le trou du cul des artistes tous plus ou moins homos qui critiquent le Grand Prix automobile ou bien le maire de tel ou tel patelin de gars de chars incapables d'apprécier un tableau de Picasso.
Il lui arrivait souvent de visiter Twitter pour vanter, évidemment, le Canada, Harper, Couillard et la droite. Son pseudonyme était à l'image de son blogue: Canada Number One. Comme il connaissait dix phrases en anglais Bouboule Gagnon les employait à toutes les sauces pour mieux marquer son mépris des maudits têteux de la langue française qui lui rappelaient qu'il ne savait pas écrire sans fautes.
-Fuck you all, you artists and pieces of shit! Canada number one! qu'il disait sur Twitter. On va vous écraser osti d'communisses!
À force de s'exprimer ainsi Bouboule s'était créé un réseau de crétins pratiquant une forme plus ou moins désespérante de masturbation anti-intellectuelle.
Ça lui permettait de se trouver une raison de vivre. Pour ceux-là, Bouboule était un chevalier de la droite, un pourfendeur de la gogauche qui ne sent pas le Irish Spring.
Dans les faits, c'était un gros christ d'épais inculte qui vivait dans un décor de merde et mangeait à la cuiller du manger pour chien.
Pauvre Bouboule Gagnon!
Oui, il faut savoir plaindre ces gros calices de caves.
Il ne lisait à peu près rien et s'il allait parfois au théâtre c'était l'été pour assister à une pièce burlesque où le mari trompe sa femme avec son char en hurlant des onomatopées. Pour ce qui est du cinéma, Bouboule était un fan fini des films de chars qui explosent et de gars qui disent des trucs du genre salopard d'enculé de merde je vais te buter.
Bouboule Gagnon détestait la gogauche et tous ces maudits artistes crottés qui parlent de droits de la personne, de protection des rivières et autres conneries. Les changements climatiques et tout le tralala lui donnaient l'envie de fesser sur les écologistes, ces malpropres qui faisaient fermer les shops.
-L'argent pousse pas dans les arbres! qu'il disait souvent en se savonnant avec du Irish Spring sans que personne ne l'entende vraiment puisque personne ne voulait rien savoir de lui. Ses rares blondes, imbéciles comme mille, finissaient toutes par le tromper avec des artistes ou bien des séparatistes qui rêvent comme des endormis.
Alors Bouboule revenait vers son écran pour alimenter son blogue intitulé "Vive le Canada et la droite!", ses sujets de prédilection bien entendu. Bouboule pouvait vous donner mille raisons d'aimer l'unifolié, les gouvernements Harper et Couillard ainsi que la droite. Tout le reste n'était que du vomi sur la gogauche assorti d'expressions salaces où figuraient des godemichés enfoncés dans le trou du cul des artistes tous plus ou moins homos qui critiquent le Grand Prix automobile ou bien le maire de tel ou tel patelin de gars de chars incapables d'apprécier un tableau de Picasso.
Il lui arrivait souvent de visiter Twitter pour vanter, évidemment, le Canada, Harper, Couillard et la droite. Son pseudonyme était à l'image de son blogue: Canada Number One. Comme il connaissait dix phrases en anglais Bouboule Gagnon les employait à toutes les sauces pour mieux marquer son mépris des maudits têteux de la langue française qui lui rappelaient qu'il ne savait pas écrire sans fautes.
-Fuck you all, you artists and pieces of shit! Canada number one! qu'il disait sur Twitter. On va vous écraser osti d'communisses!
À force de s'exprimer ainsi Bouboule s'était créé un réseau de crétins pratiquant une forme plus ou moins désespérante de masturbation anti-intellectuelle.
Ça lui permettait de se trouver une raison de vivre. Pour ceux-là, Bouboule était un chevalier de la droite, un pourfendeur de la gogauche qui ne sent pas le Irish Spring.
Dans les faits, c'était un gros christ d'épais inculte qui vivait dans un décor de merde et mangeait à la cuiller du manger pour chien.
Pauvre Bouboule Gagnon!
Oui, il faut savoir plaindre ces gros calices de caves.
lundi 27 avril 2015
Selma, Martin Luther King et le droit à la désobéissance civile
J’ai vu le film Selma hier. Il a été réalisé par Ava
DuVernay en 2014 et relate un épisode de la vie de Martin Luther King.
Nous sommes en 1964. Le Docteur Martin Luther King vient de
se voir remettre le Prix Nobel de la Paix pour récompenser son engagement
envers la pleine reconnaissance des droits civiques des Noirs. Son combat est
loin d’être terminé. Le racisme sévit encore dans le Sud des États-Unis, en
Alabama par exemple, où le pasteur compte organiser une marche. Le film,
produit entre autres par Oprah Winfrey qui y tient aussi un rôle, nous rappelle
que l’esprit est plus fort que les matraques.
Ce film nous rappelle aussi une page de l’histoire sombre des États-Unis
d’Amérique... À cette époque, le pouvoir Blanc refusait toute remise en question
de sa suprématie. Un Noir qui réclamait la reconnaissance de ses droits civiques, dans l’Alabama des
années ’60, ça méritait d’être battu à mort par les policiers. Évidemment, toute
manifestation était déclarée illégale avant même qu’elle ne débute. (Ce qui rappelait à certains moments les manifs québécoises...)
Si je vous parle de ce film, ce n’est pas pour vous raconter
le scénario de long en large. Vous irez le voir si ça vous chante. Je crois que
vous ne le regretterez pas. À moins d’être un ardent défenseur libéral de la
loi, de l’ordre et de la pègre. Alors vous trouverez que l’histoire est injuste
envers ceux qui matraquent les foules et ceux qui ordonnent aux policiers de le
faire. L'histoire est injuste envers George Wallace et Lyndon B. Johnson pour qui les droits civiques des Noirs sont plus que secondaires.
Il y a un jour férié aux États-Unis pour souligner la
contribution exceptionnelle de Martin Luther King à son pays. Une contribution
qu’il a payée avec coups, blessures et emprisonnements. Les charognes qui ont
frappé les manifestants se sont mérités le mépris des générations présentes et
futures. Comme quoi la justice est parfois de ce monde.
Je vous parle de ce film, en fait, pour faire le parallèle
entre le mouvement des droits civiques aux États-Unis et le mouvement contre l’austérité
au Québec. Ici aussi nous faisons face à
des politiciens infâmes et autres cancrelats des médias corporatifs pour
réclamer la bastonnade contre des manifestants pacifiques et désarmés. Ici
aussi l’on blesse et l’on emprisonne des combattants en faveur des droits
civiques et de la justice sociale. Ici aussi des foules de racistes et autres
larbins hurlent qu’il faut battre à mort les manifestants et les priver de
leurs droits fondamentaux. Ici aussi l’on dit des manifestants qu’ils bloquent
la circulation et empêchent le bon fonctionnement de la société et de ses
institutions. Ici aussi des personnes de petite vie hurlent qu’il faut faire
cesser l’agitation des singes, des nègres et des crottés…
Pourtant, ici aussi, ces gens-là qui se gaussent de ceux qui ont faim
et soif de justice seront jetés dans les caniveaux de l’histoire…
Si je vous recommande d’aller voir ce film, chers frères, chers soeurs, c’est
parce qu’il vous donnera encore plus de
courage et de détermination pour mettre fin à l’ignominie des libéraux qui
croient pouvoir faire verser le sang du
peuple impunément dans nos rues. Il démontre la légitimité de la désobéissance
civile pour dénoncer les injustices sanctifiées par les oppresseurs.
Il y a des tas de Martin Luther King qui, dans notre
société, se donnent corps et âme pour la justice et l’équité. Peu vont les
reconnaître mais ce sont ceux-là qui comptent vraiment en définitive. Les
salauds finiront toujours par perdre. Un homme qui se tient debout, fusse-t-il
seul, a plus de poids dans l’histoire qu’un million de personnes maintenues
dans l’aboulie, l’ignorance et l’indifférence.
Amen et, bien sûr, alléluia.
vendredi 24 avril 2015
Comme un chevreuil blessé parti mourir dans la forêt
Un vieux sage aborigène a dit de sa culture qu'elle était comme un chevreuil blessé qui s'enfonçait dans la forêt pour y mourir. Son nom m'échappe. J'ai lu ça quelque part dans un livre intitulé Pieds nus sur la terre sacrée de Teresa Carolyn McLuhan, Il s'agit d'une anthologie de textes et paroles autochtones qu'il vous est loisible de googler sans mon aide.
Plus je vieillis, plus je me sens comme ce chevreuil blessé. Je passe mes vacances à m'enfoncer dans la forêt, comme Dante et tant d'autres fuyant la mauvaise compagnie de ces hommes vouant un culte à l'infamie, à l'injustice ainsi qu'à la corruption.
Est-ce que mon temps est passé? Je ne le crois pas. L'époque ne roule pas pour moi et pour bon nombre de mes frères et soeurs de combat.
La politique est à l'image des électeurs. Elle est terne, mesquine, envieuse et désolante.
Le citoyen moyen n'est pas pour la justice, la liberté et la poésie. Il ne travaille que pour la satisfaction de ses besoins personnels et se détourne de toute lutte sociale. Il croit que le monde appartient à la mafia et cherche les moyens de collaborer avec elle pour voler lui aussi la part qui ne lui revient pas.
De temps à autres, une voix plus forte que toutes ses voix qui se taisent se fera entendre. Une voix qui rappellera à la masse qu'elle est marteau et que son mode de vie est insignifiant.
Cette voix se fera entendre quand le fruit sera bien mûr.
Pour le moment, la musique joue à pleins tubes et personne n'entend rien.
Les fanfares du capitalisme sauvage éteignent toute possibilité de prêter attention aux propos des sages et des poètes.
On en a que faire de la beauté. Elle ne vaut pas une giclée de plaisir dans le cadavre encore fumant d'une victime du capitalisme.
La forêt de Sherwood accueille ceux que l'on appelle à tort les voyous et les voleurs.
Les vraies crapules sont au pouvoir, avec l'assentiment de la foule résignée qui cherche moyen de payer son tribut aux rois et autres saigneurs de la Terre.
Robin des Bois prépare sa revanche.
Il faut être patient, mes frères et soeurs.
La lutte continue. Elle sera longue et semée d'embûches.
Pourtant, tout finira par passer, même ce temps des bouffons et autres bandits à cravates.
La nature a horreur du vide. Et ce vide qui s'est emparé de notre pays, de notre culture et de nos institutions n'a aucun avenir. Zéro plus zéro égale zéro. Il ne suffit que d'une personne debout pour que les zéros s'effacent.
La Terre, la forêt et même le ciel nous soutiendront.
jeudi 23 avril 2015
Mon restant de christianisme
Il reste en moi un fonds de christianisme qui n'a rien à voir avec celui du maire de Saguenay et des pharisiens hypocrites qui s'en prennent aux publicains et autres crottés.
L'image qu'il me reste de Jésus est celle d'un homme qui promet l'avènement d'un monde où ceux qui ont faim et soif de justice seront rassasiés. Il fait partie du petit nombre de ceux qui ne lapident pas les prostituées. Il fouette les marchands du temple et renverse leurs tables parce qu'il a compris que l'argent est la représentation la plus authentique du Mal sur notre Terre. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a été crucifié, bien que je ne puisse vous apporter de preuves historiques irréfutables. Jésus a été battu, torturé et mis en croix parce qu'il s'en prenait à l'argent et aux autorités publiques de son temps. Bref, il est mort comme un voyou. Et c'est pourquoi Jésus continue d'être une source d'inspiration pour bien des gens qui ont faim et soif de justice, d'amour, de poésie et même de pardon.
Bien sûr, le christianisme a dévoyé le message de son prophète. L'argent a repris le dessus. La nature humaine, avec toutes ses imperfections, ne pouvait s'accommoder de tels sermons qui incitaient les gens à vivre comme les oiseaux du ciel. Les papes, les cardinaux et les évêques, puis les empereurs chrétiens, se chargèrent de lapider le ciel ainsi que de tuer Jésus une deuxième fois.
Ce que je dis là n'a rien de bien original.
Pourtant, malgré la science, il me reste un fonds de christianisme originel, une volonté inexplicable de rassasier ma soif de justice et de liberté.
Tout ce que j'aime, de près ou de loin, colle à la culture chrétienne des premiers temps.
Je déteste l'argent.
Je préfère pardonner les prostituées que de les lapider.
Je pense même qu'il faut nous aimer les uns les autres,
Et j'irais jusqu'à tendre l'autre joue si l'on me frappait sur la gueule... (Bien que je ne conseille à personne de me le faire. Mes réflexes étant plus naturels que mes idées...)
Tout ce que j'aime et trouve beau chez les êtres humains me rattache à l'altruisme, à la compassion et à la grandeur d'âme. Le mépris, la mesquinerie et toutes les envies n'ont pas trop d'emprise sur moi.
Ma liberté de science et de conscience m'interdit de me faire le prosélyte d'une religion en laquelle je ne saurais croire pleinement. Je mentirais de me dire chrétien, déiste ou bouddhiste alors que j'ai tant de questionnements sans réponses que je ne saurais abdiquer pour trouver du réconfort dans une croyance magique institutionnalisée.
Mon coeur n'est heureusement pas rationnel. Il me permet, en quelque sorte, de me rallier à certaines idées qui n'ont pas la cote par les temps qui courent.
Je demeure hanté par certains éléments de christianisme, tout comme je ne saurais renier l'héritage de la contre-culture des années '60. Je savoure encore la musique, le cinéma et la littérature de cette époque. Je trouve même qu'il ne s'est rien fait de mieux depuis. Les années '70 ont fait revenir l'atavisme et l'argent. Les années '80 furent ternes comme ça ne se peut pas. Les années '90 sont passées dans l'indifférence générale. Je ne parlerai même pas des années 2000. Tout ce qu'il me reste, au fond, c'est des fleurs au bout du fusil, des manifestations pour les droits civiques, des chansons qui imaginent un monde où tout un chacun serait libre et heureux.
L'image qu'il me reste de Jésus est celle d'un homme qui promet l'avènement d'un monde où ceux qui ont faim et soif de justice seront rassasiés. Il fait partie du petit nombre de ceux qui ne lapident pas les prostituées. Il fouette les marchands du temple et renverse leurs tables parce qu'il a compris que l'argent est la représentation la plus authentique du Mal sur notre Terre. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a été crucifié, bien que je ne puisse vous apporter de preuves historiques irréfutables. Jésus a été battu, torturé et mis en croix parce qu'il s'en prenait à l'argent et aux autorités publiques de son temps. Bref, il est mort comme un voyou. Et c'est pourquoi Jésus continue d'être une source d'inspiration pour bien des gens qui ont faim et soif de justice, d'amour, de poésie et même de pardon.
Bien sûr, le christianisme a dévoyé le message de son prophète. L'argent a repris le dessus. La nature humaine, avec toutes ses imperfections, ne pouvait s'accommoder de tels sermons qui incitaient les gens à vivre comme les oiseaux du ciel. Les papes, les cardinaux et les évêques, puis les empereurs chrétiens, se chargèrent de lapider le ciel ainsi que de tuer Jésus une deuxième fois.
Ce que je dis là n'a rien de bien original.
Pourtant, malgré la science, il me reste un fonds de christianisme originel, une volonté inexplicable de rassasier ma soif de justice et de liberté.
Tout ce que j'aime, de près ou de loin, colle à la culture chrétienne des premiers temps.
Je déteste l'argent.
Je préfère pardonner les prostituées que de les lapider.
Je pense même qu'il faut nous aimer les uns les autres,
Et j'irais jusqu'à tendre l'autre joue si l'on me frappait sur la gueule... (Bien que je ne conseille à personne de me le faire. Mes réflexes étant plus naturels que mes idées...)
Tout ce que j'aime et trouve beau chez les êtres humains me rattache à l'altruisme, à la compassion et à la grandeur d'âme. Le mépris, la mesquinerie et toutes les envies n'ont pas trop d'emprise sur moi.
Ma liberté de science et de conscience m'interdit de me faire le prosélyte d'une religion en laquelle je ne saurais croire pleinement. Je mentirais de me dire chrétien, déiste ou bouddhiste alors que j'ai tant de questionnements sans réponses que je ne saurais abdiquer pour trouver du réconfort dans une croyance magique institutionnalisée.
Mon coeur n'est heureusement pas rationnel. Il me permet, en quelque sorte, de me rallier à certaines idées qui n'ont pas la cote par les temps qui courent.
Je demeure hanté par certains éléments de christianisme, tout comme je ne saurais renier l'héritage de la contre-culture des années '60. Je savoure encore la musique, le cinéma et la littérature de cette époque. Je trouve même qu'il ne s'est rien fait de mieux depuis. Les années '70 ont fait revenir l'atavisme et l'argent. Les années '80 furent ternes comme ça ne se peut pas. Les années '90 sont passées dans l'indifférence générale. Je ne parlerai même pas des années 2000. Tout ce qu'il me reste, au fond, c'est des fleurs au bout du fusil, des manifestations pour les droits civiques, des chansons qui imaginent un monde où tout un chacun serait libre et heureux.
mercredi 22 avril 2015
Le temps des fleurs
En 1950, on s'achetait des frites, des hot-dogs et des boissons gazeuses. Puis on n'avait pas besoin de se chercher une poubelle. On balançait tous les emballages au gré de notre route. Rues, trottoirs et autres lieux publics étaient jonchés de détritus, signe manifeste d'une économie qui roulait à toutes vapeurs.
L'été, les gens pouvaient se baigner dans des eaux polluées par de bienveillantes industries qui permettaient aux gens de s'acheter toutes sortes de cochonneries qu'ils pouvaient ensuite balancer dans la rivière ou le fleuve pour aller rejoindre le flot de sécrétions du capitalisme sans âme.
Le monde riait, il riait tellement que ce ne pouvait être que le bon vieux temps. Le monde riait de blagues qu'on ne comprend plus de nos jours, parce que nous sommes devenus trop propres, incapables de saisir la bonhomie d'un "ouin, ouin, tiguidi-ha-ha ha-rique-ah-potinque-aweille-catin-pis-passe-dans-l'coin-sping-spong-oups-wiii!". Maintenant, on veut du contenu, des mots, des discours... Les gens riaient d'une onomatopée du temps où ils cessaient d'aller à l'école à douze ans pour aller travailler dans les shops. Ils étaient simples et faciles à manipuler. Ils laissaient les gouvernements gouverner et les travailleurs travailler. Le travail, la famille et la patrie étaient bien servis. Aweille Mathilda dans 'a boête à bois...
Comme il y avait peu de règlements, dans le bon vieux temps, il y avait des casse-croûtes à tous les coins de rue dans les quartiers ouvriers. Des casse-croûtes qui prenaient en feu de temps à autres pour faire disparaître trois ou quatre pâtés de maison, ce qui redonnait de l'ouvrage au pauvre monde.
Les politiciens étaient bien sûr tout aussi corrompus, voire moins que ceux d'aujourd'hui. Le clergé bénissait les déchets et chérissait la pourriture au pouvoir.
On fumait partout, dans les restaurants, dans les autobus, dans les hôpitaux.
On conduisait son véhicule avec une petite bière frette entre les jambes, sans attacher sa ceinture de sécurité.
Quand un syndicaliste montait le ton, on le foutait en prison.
Quand un intellectuel écrivait un livre, on l'obligeait à prendre le chemin de l'exil.
Quand une femme voulait l'égalité avec les hommes, on la traitait de petit gars manqué ou bien de gouine communiste.
Si elle voulait divorcer, son mari pouvait lui foutre une taloche.
On sortait sa ceinture ou bien son bâton de baseball pour éduquer les enfants.
C'était vraiment le bon vieux temps.
L'essence coûtait trois fois rien,
On s'achetait des gros chars et on roulait sur des routes bien asphaltées en jetant de la marde par la fenêtre tout le long du chemin qu'on empruntait.
J'en passe et j'en oublie.
Je ne suis pas né en 1950, voyez-vous,
Je suis né en 1968, l'année où plein de gens un peu partout dans le monde en ont plein le pompon de ce modèle de gouvernance conservatrice et rétrograde.
Je suis né avec le progrès, la propreté et la promesse de l'éducation gratuite pour tous, du primaire à l'université.
Je suis né au temps des fleurs.
dimanche 19 avril 2015
La virginité peut conduire au désespoir
On a beau rigoler que la virginité peut conduire au désespoir. L'hédonisme aussi. Et même des relations sexuelles répétées avec plusieurs personnes plusieurs fois dans la même journée. Comme quoi le désespoir est consubstantiel de la nature humaine. Cela signifie, en d'autres termes, qu'il faut savoir faire avec.
Ferdinand Laframboise aurait bien vendu son âme au diable pour tremper un peu son pinceau, ne serait-ce qu'une seule fois dans sa vie, dusse-t-il le tremper dans le cloaque d'une prostituée. Cependant le diable ne venait pas à son secours. Laframboise était pauvre comme Job et n'avait pas de job. Aucune prostituée n'aurait accepté de baiser à crédit. Et Laframboise était tellement coincé avec les femmes qu'il n'aurait pas été capable de faire sa demande à la plus humanitaire des péripatéticiennes. Ce qui fait qu'il s'étirait le muscle de l'entre-jambes en contemplant des photos de femmes en sous-vêtements imprimées dans les catalogues des grandes chaînes de la vente au détail.
Ferdinand Laframboise devait bien avoir cinquante-et-un an et, n'eût été de sa foi en Dieu, il se serait pendu depuis longtemps. Dieu seul lui permettait de survivre à ces flots de semence qu'il déversait en pure perte presque deux ou trois fois par jour depuis l'aube de sa puberté.
Évidemment, il était très laid. Ferdinand se lavait peu et sentait le dessous de bras. Des poils lui poussaient partout où d'ordinaire l'on ne s'y attend pas. Ses oreilles, son nez et ses sourcils étaient plus que touffus. L'homme moyen, celui qui trempe parfois son pinceau, sait qu'il doit se trimer un tant soit peu pour ne pas déplaire à la gente féminine, à moins qu'il ne dispose d'autres charmes, comme une sensibilité exceptionnelle; un quelconque talent pour faire du fric ou bien de la poésie. D'aucuns diront que chaque torchon trouve sa guenille, mais avouons qu'il est un peu méprisant de traiter Laframboise d'une matière encore plus vile qu'un torchon qui ne trouva jamais sa guenille.
Laframboise s'était pourtant essayé de séduire toutes les serveuses des cafés et restaurants environnants en leur laissant de généreux pourboires. C'était généralement autour du premier ou du deux du mois, lorsqu'il recevait son chèque d'inadapté social.
Le problème, c'est qu'elles acceptaient toutes le pourboire sans dire un mot de plus que merci.
-J'apprécie beaucoup vos services mademoiselle... qu'il leur disait. C'est pourquoi je vous donne un BON POURBOIRE!!! Je laisse toujours UN GROS POURBOIRE aux serveuses qui offrent UN BON SERVICE!!!
Les serveuses se disaient toutes en elles-mêmes qu'il n'avait qu'à laisser son pourboire et débarrasser le plancher. Laframboise pouvait passer deux heures à siroter un café tout en reluquant leurs jambes gratuitement. Son gros pourboire de trente-cinq sous pour un café à deux dollars cinquante... Laframboise ne montait jamais au-delà de cinquante sous, pour un repas complet à sept dollars cinquante-trois sous... Vous aurez compris qu'il n'avait aucun succès tant avec les femmes qu'avec les serveuses.
Ferdinand Laframboise retournait chaque fois dans son modeste studio, déçu de la gente féminine, ces péronnelles que les hommes devraient mater afin qu'elles obéissent à leur mari ainsi qu'aux garçons gentils et affables comme Ferdinand.
-Je suis désespéré! disait-il de plus en plus fréquemment. Les femmes ne savent pas reconnaître la bonté chez les hommes et préfèrent les plus méchants! Qu'est-ce qu'un homme bon comme moi peut espérer d'une femme, hein? Elles me méprisent toutes pour ma gentillesse et ma grandeur d'âme!
Comme il disait ça, Ferdinand croisa un bar de danseuses nues. Il lui restait dix dollars dans ses poches. De quoi s'acheter une bière sans doute tout en regardant une femme nue pour la première fois de sa vie.
Il se décida donc à rentrer dans le bar de danseuses qui s'appelait Le Monopoly. Le nom n'avait rien d'excitant, c'est vrai, et les danseuses y semblaient un peu amochées par la vie. Pour Ferdinand qui n'y connaissait rien en frais de femmes, chacune de ces danseuses ressemblait à une déesse descendue des nuées pour lui faire vivre l'illusion de mille et une nuits rutilantes.
Au premier vagin qu'il vit, Ferdinand dût se rendre aux toilettes pour essuyer sa semence qui avait jaillie spontanément dans son pantalon sans qu'il n'eusse besoin de se frotter les parties. Il revint s'asseoir à sa table, un peu étourdi, constatant que sa bière n'était plus là.
Une femme portant un maillot de bain à l'effigie de la marque de bière Budweiser vint le voir pour prendre sa commande.
Ferdinand constata, en tâtant frénétiquement ses poches, qu'il avait perdu son portefeuille. À moins qu'on ne le lui ait volé. Dans tous les cas, il n'avait plus un rond.
-J'ai perdu mon portefeuille... qu'il lui dit en fixant le plancher du regard, bien qu'un de ses yeux continua de dériver à la hauteur des mamelons de la serveuse, une grande rousse au nez retroussé.
-No money, no candy, bébé... Va falloir que tu t'en ailles sinon j'vais d'mander au gros doorman là-bas de t'sortir... I' va être pas mal moins sensuel que moé bébé...
Ferdinand sortit du bar la queue entre les deux jambes, se demandant comment il ferait pour récupérer sa carte de débit, sa carte d'assurance-maladie et son numéro d'assurance sociale.
-J'ai perdu mon portefeuille caline de bines!
Il se sentait encore plus nu qu'un ver.
Et peut-être même plus ver qu'un ver.
Oui, la virginité peut conduire au désespoir...
jeudi 16 avril 2015
Concert de casseroles à Trois-Rivières
Moi et ma blonde nous sommes joints à un concert de casseroles qui tenait son point de ralliement dans le Parc Champlain, à Trois-Rivières, c'est-à-dire à deux pas de chez-nous.
Ma blonde s'y trouvait depuis cinq minutes. Je suis arrivé au moment où la foule, composée d'une centaine de personnes, prenait la rue pour manifester.
Ma blonde m'a raconté que les policiers ont demandé qui était l'organisateur. Tout le monde a répondu qu'il n'y avait pas d'organisateur. Il m'était donc difficile de ne pas me joindre à cette manifestation spontanée contre le capitalisme sauvage. J'ai donc emprunté les rues Royale, des Forges, Notre-Dame et Bonaventure avec mes frères et soeurs de combat.
Je reconnaissais plusieurs visages parmi les manifestants: une commis de dépanneur, un commis d'une boutique de vidéos, un assisté social, un chômeur, une enseignante, une cuisinière, un assistant-comptable, une étudiante, etc. Ce n'était pas une manif contre la hausse des frais de scolarité, comme il y en eut tant en 2012. C'était plutôt une manif contre "toutte", de ce genre de manif qui nous rapproche chaque jour un peu plus d'une vraie et authentique révolution.
Les terrasses de la rue des Forges, la rue principale à Trois-Rivières, n'étaient pas tout à fait pleines compte tenu du temps un peu frisquet. Pourtant, ceux qui s'y trouvaient sentaient sans doute qu'on ne peut rien faire contre cent personnes qui prennent la rue pour souligner leur dégoût du gouvernement de Philippe-Flop Couillard, un Premier Ministre douteux qui sait entretenir des liens privilégiés avec le régime totalitaire d'Arabie Saoudite, le présumé fraudeur Arthur Porter, le Service canadien de renseignements et de sécurité et tout le tralala-lalère qui te donne l'envie de gueuler dans un porte-voix.
C'était le premier concert spontané de casseroles de l'année 2015 pour les Trifluviens et Trifluviennes, des citoyens généralement sages, pour ne pas dire dociles et soumis.
Si l'indocilité et la désobéissance s'emparent de ma ville, c'est que le régime libéral ne l'aura pas facile partout dans le reste de la province.
C'était donc un autre grand soir pour moi et ma blonde.
Nous sommes rentrés à la maison avec la satisfaction de ne pas être seuls à nous battre contre l'austérité, les politiciens corrompus et les bandits à cravates.
La lutte continue. Nous pouvons dormir à tête reposée. Il y a plus de cent personnes ce soir qui ne tiennent pas à abdiquer leur souveraineté entre les mains sales des libéraux.
***
En complément:
Petite vidéo (gracieuseté du camarade François Veilleux).
Ma blonde s'y trouvait depuis cinq minutes. Je suis arrivé au moment où la foule, composée d'une centaine de personnes, prenait la rue pour manifester.
Ma blonde m'a raconté que les policiers ont demandé qui était l'organisateur. Tout le monde a répondu qu'il n'y avait pas d'organisateur. Il m'était donc difficile de ne pas me joindre à cette manifestation spontanée contre le capitalisme sauvage. J'ai donc emprunté les rues Royale, des Forges, Notre-Dame et Bonaventure avec mes frères et soeurs de combat.
Je reconnaissais plusieurs visages parmi les manifestants: une commis de dépanneur, un commis d'une boutique de vidéos, un assisté social, un chômeur, une enseignante, une cuisinière, un assistant-comptable, une étudiante, etc. Ce n'était pas une manif contre la hausse des frais de scolarité, comme il y en eut tant en 2012. C'était plutôt une manif contre "toutte", de ce genre de manif qui nous rapproche chaque jour un peu plus d'une vraie et authentique révolution.
Les terrasses de la rue des Forges, la rue principale à Trois-Rivières, n'étaient pas tout à fait pleines compte tenu du temps un peu frisquet. Pourtant, ceux qui s'y trouvaient sentaient sans doute qu'on ne peut rien faire contre cent personnes qui prennent la rue pour souligner leur dégoût du gouvernement de Philippe-Flop Couillard, un Premier Ministre douteux qui sait entretenir des liens privilégiés avec le régime totalitaire d'Arabie Saoudite, le présumé fraudeur Arthur Porter, le Service canadien de renseignements et de sécurité et tout le tralala-lalère qui te donne l'envie de gueuler dans un porte-voix.
C'était le premier concert spontané de casseroles de l'année 2015 pour les Trifluviens et Trifluviennes, des citoyens généralement sages, pour ne pas dire dociles et soumis.
Si l'indocilité et la désobéissance s'emparent de ma ville, c'est que le régime libéral ne l'aura pas facile partout dans le reste de la province.
C'était donc un autre grand soir pour moi et ma blonde.
Nous sommes rentrés à la maison avec la satisfaction de ne pas être seuls à nous battre contre l'austérité, les politiciens corrompus et les bandits à cravates.
La lutte continue. Nous pouvons dormir à tête reposée. Il y a plus de cent personnes ce soir qui ne tiennent pas à abdiquer leur souveraineté entre les mains sales des libéraux.
***
En complément:
Petite vidéo (gracieuseté du camarade François Veilleux).
Le marathon du changement social
La réforme de nos moeurs tient plus du marathon que du sprint. Il faut se préparer psychologiquement à une course de longue haleine pour espérer, au final, voir deux ou trois choses publiques se transformer.
Les arts et la culture sont les souliers idéaux pour mener cette longue course à son terme. La politique est nécessaire, évidemment, mais ce n'est pas tout le monde qui peut avoir cette patience d'absorber les codes de procédures de délibération avec tout ce que cela suppose d'ennui. Une chanson des Beatles a parfois plus d'impact sur les changements politiques que d'assister à l'assemblée de tel ou tel parti pour discuter du sort de l'industrie de la fabrication des baguettes chinoises.
Le monde change, que nous le voulions ou pas, mais il ne changera pas nécessairement à la vitesse que nous aurions pensée. Parfois, le changement se produira plus vite que prévu. Souvent, il sera plus lent, fera deux pas en arrière pour faire trois pas en avant. Néanmoins, rien ne sera fixé à jamais dans le statu quo puisque rien n'est immuable: même la Terre, même le Soleil, même la Voie Lactée, même le cosmos tout entier.
Nous sommes poussière qui retournera vers la poussière. Nous sommes vanité et poursuite de vents. Au fond, nous ne sommes pas grand' chose. Seulement des primates qui portent des vêtements et se demandent comment vivre au bas des arbres dans une savane hostile où nos congénères sombrent parfois dans le cannibalisme.
L'essentiel, en toutes circonstances, c'est de porter un rêve suffisamment fort afin de poursuivre notre course jusqu'au bout, aussi absurde qu'elle puisse paraître.
L'essentiel est invisible pour certains d'entre eux.
Pour nous, il est visible, palpable et atteignable, dusse-t-on crever avant que d'être parvenu à s'y rendre.
Il ne sert à rien de désespérer. Nous féconderons d'autres printemps ou bien d'autres cieux.
Rien ne sera jamais pareil.
Tout sera toujours en changement.
Comme disait Héraclite, on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve.
Les arts et la culture sont les souliers idéaux pour mener cette longue course à son terme. La politique est nécessaire, évidemment, mais ce n'est pas tout le monde qui peut avoir cette patience d'absorber les codes de procédures de délibération avec tout ce que cela suppose d'ennui. Une chanson des Beatles a parfois plus d'impact sur les changements politiques que d'assister à l'assemblée de tel ou tel parti pour discuter du sort de l'industrie de la fabrication des baguettes chinoises.
Le monde change, que nous le voulions ou pas, mais il ne changera pas nécessairement à la vitesse que nous aurions pensée. Parfois, le changement se produira plus vite que prévu. Souvent, il sera plus lent, fera deux pas en arrière pour faire trois pas en avant. Néanmoins, rien ne sera fixé à jamais dans le statu quo puisque rien n'est immuable: même la Terre, même le Soleil, même la Voie Lactée, même le cosmos tout entier.
Nous sommes poussière qui retournera vers la poussière. Nous sommes vanité et poursuite de vents. Au fond, nous ne sommes pas grand' chose. Seulement des primates qui portent des vêtements et se demandent comment vivre au bas des arbres dans une savane hostile où nos congénères sombrent parfois dans le cannibalisme.
L'essentiel, en toutes circonstances, c'est de porter un rêve suffisamment fort afin de poursuivre notre course jusqu'au bout, aussi absurde qu'elle puisse paraître.
L'essentiel est invisible pour certains d'entre eux.
Pour nous, il est visible, palpable et atteignable, dusse-t-on crever avant que d'être parvenu à s'y rendre.
Il ne sert à rien de désespérer. Nous féconderons d'autres printemps ou bien d'autres cieux.
Rien ne sera jamais pareil.
Tout sera toujours en changement.
Comme disait Héraclite, on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve.
mercredi 15 avril 2015
À la guerre, on ne tire pas sur les ambulances
À la guerre, il semble qu'il soit inconvenant de tirer sur les ambulances. On ne respecte pas grand chose, à la guerre, mais les blessés ont encore droit à la commisération des militaires de métier. Comme quoi la noblesse d'esprit est imprévisible. On ne s'attend pas à la trouver là.
En-dehors des champs de bataille, il se trouve pourtant des hordes de pleins de marde pour tirer sur les assistés sociaux, les chômeurs et autres victimes du capitalisme sauvage.
On s'attendrait à un peu de bonté entre civils. D'où la civilité, la politesse, le respect, bref l'humanisme. Mais non! Il faut toujours qu'en temps de paix l'on trouve des trous du cul pour tirer sur les ambulances. Il faut toujours des repus et des larbins pour s'en prendre à plus petit que soi, comme si les paroles d'Évangile ne comptaient pour rien. Ce qui ne serait pas si grave si ce n'était pas les plus hypocrites des chrétiens qui s'adonnassent à cracher sur les victimes du capitalisme sauvage. Combien de ces faux chrétiens à préférer la foi à la charité? Combien de faux-culs qui donnent à la guignolée une fois par année pour ensuite chier sur les pauvres jusqu'en décembre de l'année suivante?
Au Québec, les libéraux et leur cohorte de charognards s'en prennent à ceux qui sont déjà écrasés. Ils fessent sur les pauvres avec une délectation sadique qui ne peut que révolter un humain digne de ce nom.
Pour ces deux de trèfle, nous n'avons plus les moyens de soigner les blessés.
Ils réquisitionnent les ambulances pour les remplir avec le fric de la populace afin de le redistribuer ensuite aux plus riches.
Ils prennent aux victimes pour redonner aux bourreaux.
Ce sont vraiment des chiens sales.
À la guerre, on ne tire pas sur les ambulances.
À la guerre, on tire sur les chiens sales.
Enfin, on leur dit à tout le moins qu'ils ne sont pas fins, fins...
La guerre, la guerre, c'est pas une raison pour se faire mal, non? Ne me dites pas que vous n'avez pas retenue cette leçon tirée du film La guerre des tuques, bien qu'il ne soit plus de saison...
Le printemps est revenu.
Il n'en tient qu'à nous de nettoyer nos rues et nos parlements de tous les bandits qui nous détroussent pour enrichir les riches et appauvrir les pauvres.
En-dehors des champs de bataille, il se trouve pourtant des hordes de pleins de marde pour tirer sur les assistés sociaux, les chômeurs et autres victimes du capitalisme sauvage.
On s'attendrait à un peu de bonté entre civils. D'où la civilité, la politesse, le respect, bref l'humanisme. Mais non! Il faut toujours qu'en temps de paix l'on trouve des trous du cul pour tirer sur les ambulances. Il faut toujours des repus et des larbins pour s'en prendre à plus petit que soi, comme si les paroles d'Évangile ne comptaient pour rien. Ce qui ne serait pas si grave si ce n'était pas les plus hypocrites des chrétiens qui s'adonnassent à cracher sur les victimes du capitalisme sauvage. Combien de ces faux chrétiens à préférer la foi à la charité? Combien de faux-culs qui donnent à la guignolée une fois par année pour ensuite chier sur les pauvres jusqu'en décembre de l'année suivante?
Au Québec, les libéraux et leur cohorte de charognards s'en prennent à ceux qui sont déjà écrasés. Ils fessent sur les pauvres avec une délectation sadique qui ne peut que révolter un humain digne de ce nom.
Pour ces deux de trèfle, nous n'avons plus les moyens de soigner les blessés.
Ils réquisitionnent les ambulances pour les remplir avec le fric de la populace afin de le redistribuer ensuite aux plus riches.
Ils prennent aux victimes pour redonner aux bourreaux.
Ce sont vraiment des chiens sales.
À la guerre, on ne tire pas sur les ambulances.
À la guerre, on tire sur les chiens sales.
Enfin, on leur dit à tout le moins qu'ils ne sont pas fins, fins...
La guerre, la guerre, c'est pas une raison pour se faire mal, non? Ne me dites pas que vous n'avez pas retenue cette leçon tirée du film La guerre des tuques, bien qu'il ne soit plus de saison...
Le printemps est revenu.
Il n'en tient qu'à nous de nettoyer nos rues et nos parlements de tous les bandits qui nous détroussent pour enrichir les riches et appauvrir les pauvres.
mardi 14 avril 2015
L'Occupation conservatrice et les collabos
Imaginons que votre pays soit gouverné par un type qui a eu des rapports douteux avec l'Arabie Saoudite, les paradis fiscaux, Arthur Porter, l'ex-maire de Laval, les services secrets, les ploutocrates et autres crapules libertariennes qui bandent sur Pinochet et Thatcher... Que feriez-vous? Si je me fie à ce qui se passe dans ma province qui n'est pas un pays, probablement que vous ne feriez rien. Comme vous vous sentiriez moches de n'avoir rien fait, vous vous trouveriez un bouc émissaire pour vous laver du déshonneur de votre servilité. Vous ne seriez braves qu'avec les gens qui refusent d'être exploités. Vous seriez à genoux devant les exploiteurs, satisfaits de votre cuillerée de caca bouilli quotidienne.
Pendant l'Occupation allemande, en France, les lâches pouvaient s'en prendre aux Juifs, aux communistes, aux socialistes et autres saboteurs de la Résistance. C'était plus facile que de s'en prendre à la Gestapo, aux SS et autres nazillons qui brandissaient leurs mains comme des palmes devant le Maréchal Pétain. Vous ne risquiez rien à réclamer la bastonnade, la pendaison ou bien la chambre à gaz contre ceux et celles qui s'en prenaient au rêve d'une grande Europe aryenne aux yeux bleus où la bière coulerait à flots de Londres à Berlin.
Sous l'Occupation conservatrice, au Québec, les couards s'en prennent aux jeunes et aux étudiants qui refusent de vivre comme des pleutres à se faire plumer comme des poulets pas de tête. On les accuse de tous les torts, dont celui de coûter trop cher à l'État, tandis que des personnages douteux dirigent la province d'une main de fer en recevant des récompenses de tous les fumiers capitalistes du monde entier qui veulent se farcir nos ressources naturelles pour dix milles fois rien en plus de recevoir de généreuses subventions payées à même les poches de tous les larbins de la colonie.
Évidemment, sous l'Occupation allemande ou l'Occupation conservatrice, seuls les collabos ont droit de parole et de réplique dans les médias nationaux. On ne saurait tolérer des voix discordantes au royaume des paradis fiscaux et du capitalisme sauvage. Tout va très bien madame la marquise. Tout va toujours très bien. Ces crottés qui manifestent seront battus à mort, soyez sans crainte. Ils regretteront amèrement de s'en être pris au chef, au peuple et à l'empire. On va se débarrasser de ces moustiques en les aspergeant de Raid. Et si la grogne prend de l'ampleur, on arrêtera les meneurs, puis les syndicalistes, les communistes, les anarchistes, les socialistes, les étudiants, les intellectuels, bref tous ceux qui ne collaborent pas avec l'Arabie saoudite, Arthur Porter ou bien le Service canadien de renseignements et de sécurité (SCRS).
Il y a des limites à la désobéissance quand tant d'intérêts étrangers et de billets verts sont en jeu...
Pourtant, je me réjouis de constater que les despotes finissent toujours dans les caniveaux de l'histoire.
Je me réjouis de croire que les forces de la Résistance auront raison un jour ou l'autre des Collabos.
Le patriotisme, le vrai, celui qui s'indigne de voir couler le sang du peuple dans nos rues, ce patriotisme-là finira par l'emporter sur ceux et celles qui violent notre pays en riant à gorge déployée de voir des jeunes sans armes se faire tabasser par le Nouveau Désordre mondial.
Un jour viendra, camarades, où nous célébrerons la victoire.
Pendant l'Occupation allemande, en France, les lâches pouvaient s'en prendre aux Juifs, aux communistes, aux socialistes et autres saboteurs de la Résistance. C'était plus facile que de s'en prendre à la Gestapo, aux SS et autres nazillons qui brandissaient leurs mains comme des palmes devant le Maréchal Pétain. Vous ne risquiez rien à réclamer la bastonnade, la pendaison ou bien la chambre à gaz contre ceux et celles qui s'en prenaient au rêve d'une grande Europe aryenne aux yeux bleus où la bière coulerait à flots de Londres à Berlin.
Sous l'Occupation conservatrice, au Québec, les couards s'en prennent aux jeunes et aux étudiants qui refusent de vivre comme des pleutres à se faire plumer comme des poulets pas de tête. On les accuse de tous les torts, dont celui de coûter trop cher à l'État, tandis que des personnages douteux dirigent la province d'une main de fer en recevant des récompenses de tous les fumiers capitalistes du monde entier qui veulent se farcir nos ressources naturelles pour dix milles fois rien en plus de recevoir de généreuses subventions payées à même les poches de tous les larbins de la colonie.
Évidemment, sous l'Occupation allemande ou l'Occupation conservatrice, seuls les collabos ont droit de parole et de réplique dans les médias nationaux. On ne saurait tolérer des voix discordantes au royaume des paradis fiscaux et du capitalisme sauvage. Tout va très bien madame la marquise. Tout va toujours très bien. Ces crottés qui manifestent seront battus à mort, soyez sans crainte. Ils regretteront amèrement de s'en être pris au chef, au peuple et à l'empire. On va se débarrasser de ces moustiques en les aspergeant de Raid. Et si la grogne prend de l'ampleur, on arrêtera les meneurs, puis les syndicalistes, les communistes, les anarchistes, les socialistes, les étudiants, les intellectuels, bref tous ceux qui ne collaborent pas avec l'Arabie saoudite, Arthur Porter ou bien le Service canadien de renseignements et de sécurité (SCRS).
Il y a des limites à la désobéissance quand tant d'intérêts étrangers et de billets verts sont en jeu...
Pourtant, je me réjouis de constater que les despotes finissent toujours dans les caniveaux de l'histoire.
Je me réjouis de croire que les forces de la Résistance auront raison un jour ou l'autre des Collabos.
Le patriotisme, le vrai, celui qui s'indigne de voir couler le sang du peuple dans nos rues, ce patriotisme-là finira par l'emporter sur ceux et celles qui violent notre pays en riant à gorge déployée de voir des jeunes sans armes se faire tabasser par le Nouveau Désordre mondial.
Un jour viendra, camarades, où nous célébrerons la victoire.
lundi 13 avril 2015
Laissons le soleil briller
Une première volée d'outardes passaient au-dessus de notre grand fleuve Magtogoek (anciennement Saint-Laurent) hier après-midi. Il faisait suffisamment chaud pour que les mouches elles-mêmes se défroissent les ailes suite à une longue hibernation. Le printemps était enfin arrivé. La neige fondait. La terre frémissait.
Les terrasses des cafés, bistros et restaurants de la rue des Forges, à Trois-Rivières, étaient remplies de clients qui se faisaient dorer la couenne au soleil en sirotant un café, un jus d'orange, une boisson gazeuse, une bière ou bien une coupe de vin. Les mendiants eux-mêmes souriaient à la reprise des affaires.
Les badauds laissaient glisser une pièce ou deux dans le galurin ou bien le contenant de café en styromousse que les quêteux tendaient pour leur bonne fortune.
Des gens me saluaient, Des gens au teint blême heureux de savourer un peu de chaleur et de soleil. Des gens que je connaissais ou bien que j'avais connus dans une autre vie.
-Salut Guétan!
-Salut! que je leur répondais.
Des tas de chiens en laisse voulaient renifler mon cul que je leur refusais d'atteindre avec leur museau sale.
Des motocyclistes faisaient vrombir le moteur de leur tondeuse, insouciants de polluer le printemps avec du bruit et des émissions de gaz à effets de serre. Ils juraient dans ce décor, comme d'habitude. Leur petit plaisir égoïste de se pavaner sur une tondeuse en faisant roter son moteur est sans doute un droit démocratique. Que puis-je y faire, sinon écrire ici que cela me dégoûte?
Heureusement, il fera encore beau et chaud aujourd'hui.
Les corneilles font déjà entendre leurs cris.
Le ciel est sans nuages.
Et déjà, oui déjà, je dois vous quitter, chers lecteurs et lectrices, sans qui ces mots ne seraient qu'un passe-temps solitaire.
Merci de lire mes niaiseries.
Vous êtes d'ailleurs toujours plus nombreux depuis que je poste mes billets sur Twitter,
Cela me fait peur, cette célébrité.
Je me sens obligé de parler favorablement du printemps au lieu de vous emmerder une fois de plus avec le Couillard d'Arabie, Arthur Porter, Gilles Vaillancourt et Al Capone.
Bonne journée, qui que vous soyez. Soyez heureux, gentils et prospères.
Les terrasses des cafés, bistros et restaurants de la rue des Forges, à Trois-Rivières, étaient remplies de clients qui se faisaient dorer la couenne au soleil en sirotant un café, un jus d'orange, une boisson gazeuse, une bière ou bien une coupe de vin. Les mendiants eux-mêmes souriaient à la reprise des affaires.
Les badauds laissaient glisser une pièce ou deux dans le galurin ou bien le contenant de café en styromousse que les quêteux tendaient pour leur bonne fortune.
Des gens me saluaient, Des gens au teint blême heureux de savourer un peu de chaleur et de soleil. Des gens que je connaissais ou bien que j'avais connus dans une autre vie.
-Salut Guétan!
-Salut! que je leur répondais.
Des tas de chiens en laisse voulaient renifler mon cul que je leur refusais d'atteindre avec leur museau sale.
Des motocyclistes faisaient vrombir le moteur de leur tondeuse, insouciants de polluer le printemps avec du bruit et des émissions de gaz à effets de serre. Ils juraient dans ce décor, comme d'habitude. Leur petit plaisir égoïste de se pavaner sur une tondeuse en faisant roter son moteur est sans doute un droit démocratique. Que puis-je y faire, sinon écrire ici que cela me dégoûte?
Heureusement, il fera encore beau et chaud aujourd'hui.
Les corneilles font déjà entendre leurs cris.
Le ciel est sans nuages.
Et déjà, oui déjà, je dois vous quitter, chers lecteurs et lectrices, sans qui ces mots ne seraient qu'un passe-temps solitaire.
Merci de lire mes niaiseries.
Vous êtes d'ailleurs toujours plus nombreux depuis que je poste mes billets sur Twitter,
Cela me fait peur, cette célébrité.
Je me sens obligé de parler favorablement du printemps au lieu de vous emmerder une fois de plus avec le Couillard d'Arabie, Arthur Porter, Gilles Vaillancourt et Al Capone.
Bonne journée, qui que vous soyez. Soyez heureux, gentils et prospères.
dimanche 12 avril 2015
États de grâce et autres états des lieux
Rien ne me rend plus heureux que d'avoir cette faculté de m'émouvoir d'un rien. Ressentir des états de grâce me semble un privilège arraché de haute lutte aux inévitables abîmes de l'existence.
Ce matin, j'ai vécu l'un de ces moments indicibles. Tout me semblait beau et merveilleux. Mon âme se faisait bercer par les vagues d'un bonheur intemporel et infini.
Je vais sans doute passer pour un fêlé de vous dire ça.
Pourtant, je n'en ai pas honte.
Tout concourt à rendre la vie douce et fascinante en ce dimanche matin ensoleillé où les corneilles virevoltent dans le ciel par couples de deux. Elles annoncent le printemps qui s'est fait tant attendre cette année. D'ailleurs, des corneilles ont fait leur nid dans la lumière de rue située devant mon logement. Leurs oeufs profitent d'une douce chaleur au cours de la nuit. Cela doit bien faire trois ans que les corneilles s'en servent comme d'un incubateur.
***
Je m'étonne aussi que ma mémoire soit imprégnée par des événements anodins.
Comme cette conversation entre deux adolescents que j'ai subrepticement captée cette semaine.
Il y avait un petit gros sans couvre-chef et un grand chevelu portant une calotte de baseball.
Le petit gros disait au grand chevelu que son père avait perdu son emploi mais qu'il espérait être embauché chez Subway où, bien sûr, il pourrait devenir gérant.
-Mon père m'a dit que si Subway l'engage, il pourrait vite devenir gérant... I' commencerait à faire des sandwiches pis des sous-marins pendant une dizaine de jours pis quand i' verraient comment y'est vite pis toutte, ben y'auraient juste pas l'choix de l'nommer gérant... Mon père y'a perdu sa job parce que là où i' travaillait le gérant l'aimait pas parce qu'i' savait qu'mon père pourrait faire un meilleur gérant qu'lui... Ça fait que là, si i' l'engagent chez Subway, ben là i' va devenir gérant pis on va pouvoir voyager pis i' va pouvoir m'acheter un iphone... I' me l'a dit pis, sérieux man, mon père i' pourrait être gérant d'n'importe quoi pis faire d'l'argent au boutte... Seulement, y'a des jaloux... Y'a du monde qui aime pas qu'mon père soit bon pis toutte... Mais chez Subway, sérieux, i' respectent el monde qui veut travailler pis qui travaille ben... Ça fait qu'mon père va devenir gérant, man, pis moé j'va's pouvoir avoir une job d'été pis toutte...
Le grand chevelu se contentait d'écouter le petit gros en hochant la tête. De temps à autres il grognait en guise de réplique.
-Aoumphe! Sérieux? Han...
Je ne sais pas pourquoi, mais je trouvais que le petit gros faisait pitié. Son père aussi. Et probablement que cette pitié regroupait tous ceux et celles qui partageaient avec moi cet autobus. Je faisais moi-même pitié. Nous faisions tous pitié. Nous aurions tous pu travailler chez Subway.
***
Le lendemain, j'ai croisé une bande d'adolescents à un arrêt d'autobus du boulevard Saint-Madeleine, à Cap-de-la-Madeleine. Les jeunes crachaient partout sur les trottoirs pour se donner un peu de virilité. L'un d'entre eux s'amusaient à traverser la rue sur sa planche à roulettes en faisant des doigts d'honneur à tous les automobilistes suite à leur passage. Ses amis riaient sans trop de convictions. Cela faisait chill d'envoyer chier ainsi des inconnus.
Je ne suis pas intervenu. Je me suis rappelé que mes amis étaient aussi arrogants à leur âge. Je me suis même rappelé d'avoir montré mon majeur au pape Jean-Paul-II lors de sa visite à Trois-Rivières, en 1984. Je me révoltais de constater qu'on avait retapé seulement le décor qui collait au trajet du pape. Tout ce qui était derrière demeurait laid, gris et sale. Le pape devait voir la beauté de notre ville. Nous, les pauvres des quartiers cachés derrière le Chemin du Roy, pouvions demeurer à jamais dans notre laideur et notre crasse urbaine. D'où le fait de rendre au pape un fuck you bien ressenti.
Ce rappel du passé m'a permis de tout pardonner aux ados du boulevard Sainte-Madeleine et de les regarder avec bienveillance, malgré leur manque de savoir-vivre.
***
Et maintenant, quoi d'autres?
Rien. Je reviens à mon état de grâce.
Tout est pardonné.
Rien n'est regretté.
Tout se poursuivra.
Ce matin, j'ai vécu l'un de ces moments indicibles. Tout me semblait beau et merveilleux. Mon âme se faisait bercer par les vagues d'un bonheur intemporel et infini.
Je vais sans doute passer pour un fêlé de vous dire ça.
Pourtant, je n'en ai pas honte.
Tout concourt à rendre la vie douce et fascinante en ce dimanche matin ensoleillé où les corneilles virevoltent dans le ciel par couples de deux. Elles annoncent le printemps qui s'est fait tant attendre cette année. D'ailleurs, des corneilles ont fait leur nid dans la lumière de rue située devant mon logement. Leurs oeufs profitent d'une douce chaleur au cours de la nuit. Cela doit bien faire trois ans que les corneilles s'en servent comme d'un incubateur.
***
Je m'étonne aussi que ma mémoire soit imprégnée par des événements anodins.
Comme cette conversation entre deux adolescents que j'ai subrepticement captée cette semaine.
Il y avait un petit gros sans couvre-chef et un grand chevelu portant une calotte de baseball.
Le petit gros disait au grand chevelu que son père avait perdu son emploi mais qu'il espérait être embauché chez Subway où, bien sûr, il pourrait devenir gérant.
-Mon père m'a dit que si Subway l'engage, il pourrait vite devenir gérant... I' commencerait à faire des sandwiches pis des sous-marins pendant une dizaine de jours pis quand i' verraient comment y'est vite pis toutte, ben y'auraient juste pas l'choix de l'nommer gérant... Mon père y'a perdu sa job parce que là où i' travaillait le gérant l'aimait pas parce qu'i' savait qu'mon père pourrait faire un meilleur gérant qu'lui... Ça fait que là, si i' l'engagent chez Subway, ben là i' va devenir gérant pis on va pouvoir voyager pis i' va pouvoir m'acheter un iphone... I' me l'a dit pis, sérieux man, mon père i' pourrait être gérant d'n'importe quoi pis faire d'l'argent au boutte... Seulement, y'a des jaloux... Y'a du monde qui aime pas qu'mon père soit bon pis toutte... Mais chez Subway, sérieux, i' respectent el monde qui veut travailler pis qui travaille ben... Ça fait qu'mon père va devenir gérant, man, pis moé j'va's pouvoir avoir une job d'été pis toutte...
Le grand chevelu se contentait d'écouter le petit gros en hochant la tête. De temps à autres il grognait en guise de réplique.
-Aoumphe! Sérieux? Han...
Je ne sais pas pourquoi, mais je trouvais que le petit gros faisait pitié. Son père aussi. Et probablement que cette pitié regroupait tous ceux et celles qui partageaient avec moi cet autobus. Je faisais moi-même pitié. Nous faisions tous pitié. Nous aurions tous pu travailler chez Subway.
***
Le lendemain, j'ai croisé une bande d'adolescents à un arrêt d'autobus du boulevard Saint-Madeleine, à Cap-de-la-Madeleine. Les jeunes crachaient partout sur les trottoirs pour se donner un peu de virilité. L'un d'entre eux s'amusaient à traverser la rue sur sa planche à roulettes en faisant des doigts d'honneur à tous les automobilistes suite à leur passage. Ses amis riaient sans trop de convictions. Cela faisait chill d'envoyer chier ainsi des inconnus.
Je ne suis pas intervenu. Je me suis rappelé que mes amis étaient aussi arrogants à leur âge. Je me suis même rappelé d'avoir montré mon majeur au pape Jean-Paul-II lors de sa visite à Trois-Rivières, en 1984. Je me révoltais de constater qu'on avait retapé seulement le décor qui collait au trajet du pape. Tout ce qui était derrière demeurait laid, gris et sale. Le pape devait voir la beauté de notre ville. Nous, les pauvres des quartiers cachés derrière le Chemin du Roy, pouvions demeurer à jamais dans notre laideur et notre crasse urbaine. D'où le fait de rendre au pape un fuck you bien ressenti.
Ce rappel du passé m'a permis de tout pardonner aux ados du boulevard Sainte-Madeleine et de les regarder avec bienveillance, malgré leur manque de savoir-vivre.
***
Et maintenant, quoi d'autres?
Rien. Je reviens à mon état de grâce.
Tout est pardonné.
Rien n'est regretté.
Tout se poursuivra.
vendredi 10 avril 2015
La prise de la Bastille plutôt que la prise de la pastille
Un policier a tiré une capsule de poudre de perlimpinpin en plein visage d'une jeune femme lors d'une manifestation devant l'Assemblée Nationale, à Québec. Le maire de ce trou reculé du conservatisme nord-américain s'est demandé ce qu'elle faisait là pour ensuite s'excuser au bout de vingt-quatre heures. Ses conseillers ont dû lui faire remarquer qu'il manquait de tact. On aurait pu se demander ce que faisait le manifestant de la Place Tien-An-Men tout fin seul devant une colonne de chars d'assaut. Et ce que faisaient ces étudiants sur ladite place, comme s'il fallait remettre en question l'ordre et la sécurité d'un pays, tous deux incarnés par les bottes reluisantes des crapules au pouvoir où que l'on se trouve dans le monde.
Les médias traditionnels alimentent la grogne des brebis serviles envers les moutons noirs. Les riches peuvent faire plier les pauvres et soustraire des milliards aux impôts. Grâce à leurs marionnettes de l'Assemblée Nationale et de la Chambre des Communes, ils pourront refiler la facture aux brebis serviles qui leur diront merci, je vous aime, je vous comprends... On se servira des pauvres, des étudiants et des intellectuels pour les rôles de boucs émissaires. Et tout rentrera dans l'ordre, dusse-t-on envoyer des chars d'assaut sur ces jeunes crottés qui empêchent le roulement quotidien de l'économie et l'application de ses lois encore plus sacro-saintes que celles de la gravité. On fera rentrer dans le crâne des gérants d'estrade qu'il est normal de vivre dans une société qui produit une personne qui rit pour quatre-vingt-dix-neuf qui pleurent. On leur fera comprendre que la démocratie n'est pas un droit, mais un devoir, le devoir d'obéir en regardant le bout de ses souliers troués sans rechigner.
Dostoïevski, qui était pourtant un conservateur, avait parfois de ces visions qui transcendent toutes les doctrines. Si nous vivions sous un dôme de verre, laisse entendre Dostoïevski via Les carnets du sous-sol, un dôme sous lequel tout serait merveilleux et ordonné, eh bien l'avenir de l'humanité dépendrait de celui qui balancerait une brique dans le dôme pour qu'il éclate en mille morceaux.
Évidemment, n'allez pas répéter cela à vos enfants. Ils vous prendraient au pied de la lettre et croiraient aussi qu'il faut prendre la Bastille plutôt que la pastille contre l'anxiété et l'injustice sociale...
Je suis pour la paix, bien entendu. J'aime la tarte aux pommes, comme tout le monde. Cependant, à l'instar de Desmond Tutu et de Nelson Mandela, je crois que lutter contre l'injustice, même par des moyens que je me refuse d'employer, est préférable au fait de se satisfaire de l'injustice en croisant les bras.
Seuls des mangeurs d'excréments peuvent se réjouir de voir le sang du peuple couler dans les rues sous les matraques des serviteurs du fascisme libertarien.
La démocratie, pour ceux-là, consiste essentiellement dans le fait de fermer sa gueule et de marcher la queue entre les jambes comme des hosties de têtards.
Le pouvoir du peuple, s'il signifie encore quelque chose, s'incarne selon moi dans l'indignation des rebelles vis à vis l'injustice sociale et l'esclavage moderne.
Je me soucie peu du petit peuple libéral qui se soumet aux propos des larbins auxquels on remet un microphone, larbins de métier soumis au chèque de paie que leur remet les ordures qui souhaitent renverser notre pays pour y appliquer les méthodes éculées du capitalisme sauvage.
Nous avons pour Premier ministre du Québec un type qui a collaboré avec l'une des pires dictatures de la planète, l'Arabie Saoudite. Il a même siégé avec le présumé fraudeur Porter sur le comité de surveillance du Service canadien de renseignements et de sécurité (SCRS). Vous trouvez ça normal que l'Arabie Saoudite nous surveille?
Les vrais patriotes, à mon avis, manifestent dans nos rues en ce moment.
Les vrais traîtres sont au pouvoir.
À chacun son camp.
À chacun son côté.
jeudi 9 avril 2015
L'argent ne se mange pas
J'ai planté un arbre dans le Parc des Pins en 1977. C'était dans le cadre d'une activité parascolaire. L'arbre, un érable, s'y trouve encore, On peut maintenant s'allonger sous lui l'été pour profiter de l'ombre bienfaisante de sa maturité.
D'autres arbres ont été planté au fil des ans dans les quartiers ouvriers de Trois-Rivières. Le quartier Sainte-Cécile, naguère triste et sans vie, profite maintenant de l'ombre de nombreux feuillus qui ont résisté aux assauts de cohortes de vandales ayant tenté de les déraciner au fil des ans. Tel arbre qui avait perdu une branche en a fait repousser dix autres en remplacement. Les troncs qui avaient d'abord le diamètre d'un manche à balai sont devenus les colonnes d'un temple naturel que plus aucun humain ne saurait renverser à mains nues. Le soleil de plomb qui rendait nos étés si déprimants n'atteint plus l'asphalte en de nombreux endroits du quartier. Les arbres plantés dans les années '80 permettent à ses habitants de profiter d'une relative fraîcheur.
La rivière Tapiskwan Sipi (anciennement Saint-Maurice) a bien changé elle aussi. Des intellectuels de Greenpeace sont débarqués au delta de celle-ci au cours des années '80 pour dénoncer le flottage du bois et le déversement de produits toxiques. Ce qui a mené à des lois qui ont permis de protéger notre belle rivière du capitalisme sauvage.
Trente ans plus tard, l'eau de la rivière est redevenue claire. On peut pêcher de la truite dans le secteur des Forges, signe évident que l'eau est propre et oxygénée. Des gens se baignent tous les étés dans une eau presque limpide à l'Île Saint-Quentin. L'eau d'autrefois goûtait le vomi et on ne voyait rien au-delà d'un centimètre de profondeur. Maintenant, on peut voir nager les barbotes à dix pieds. Notre eau est redevenue potable et l'on peut s'y baigner sans trop de risques pour la santé.
Un miracle s'est produit. Un miracle qui s'avère encore éphémère compte tenu des nombreux promoteurs qui vous détruiraient tous ces arbres s'ils y trouvaient une piastre à faire. Ils pisseraient de l'acide dans l'eau de la Tapiskwan Sipi si c'était payant. Ils cracheraient de la poudre de chlore dans l'air. Rien qu'ils ne feraient pas pour profiter d'une exploitation anarchique de nos ressources. J'en vois même qui referaient travailler les enfants dans les mines puisque l'austérité l'oblige...
D'où l'importance de bénéficier de la surveillance et de la bienveillance de nombreux intellectuels pour qui notre pays doit demeurer vert et fleuri.
Notre plus belle richesse, c'est de vivre en un lieu qui est préservé de l'appétit vorace des capitalistes.
D'aucuns vont me reprocher de ne pas me soucier de l'économie. Je m'en fous à vrai dire. L'économie doit être au service des humains. Ce ne sont pas aux humains de goûter aux sévices de l'économie. Comme disent les vieux sages aborigènes, l'argent ça ne se mange pas.
D'autres arbres ont été planté au fil des ans dans les quartiers ouvriers de Trois-Rivières. Le quartier Sainte-Cécile, naguère triste et sans vie, profite maintenant de l'ombre de nombreux feuillus qui ont résisté aux assauts de cohortes de vandales ayant tenté de les déraciner au fil des ans. Tel arbre qui avait perdu une branche en a fait repousser dix autres en remplacement. Les troncs qui avaient d'abord le diamètre d'un manche à balai sont devenus les colonnes d'un temple naturel que plus aucun humain ne saurait renverser à mains nues. Le soleil de plomb qui rendait nos étés si déprimants n'atteint plus l'asphalte en de nombreux endroits du quartier. Les arbres plantés dans les années '80 permettent à ses habitants de profiter d'une relative fraîcheur.
La rivière Tapiskwan Sipi (anciennement Saint-Maurice) a bien changé elle aussi. Des intellectuels de Greenpeace sont débarqués au delta de celle-ci au cours des années '80 pour dénoncer le flottage du bois et le déversement de produits toxiques. Ce qui a mené à des lois qui ont permis de protéger notre belle rivière du capitalisme sauvage.
Trente ans plus tard, l'eau de la rivière est redevenue claire. On peut pêcher de la truite dans le secteur des Forges, signe évident que l'eau est propre et oxygénée. Des gens se baignent tous les étés dans une eau presque limpide à l'Île Saint-Quentin. L'eau d'autrefois goûtait le vomi et on ne voyait rien au-delà d'un centimètre de profondeur. Maintenant, on peut voir nager les barbotes à dix pieds. Notre eau est redevenue potable et l'on peut s'y baigner sans trop de risques pour la santé.
Un miracle s'est produit. Un miracle qui s'avère encore éphémère compte tenu des nombreux promoteurs qui vous détruiraient tous ces arbres s'ils y trouvaient une piastre à faire. Ils pisseraient de l'acide dans l'eau de la Tapiskwan Sipi si c'était payant. Ils cracheraient de la poudre de chlore dans l'air. Rien qu'ils ne feraient pas pour profiter d'une exploitation anarchique de nos ressources. J'en vois même qui referaient travailler les enfants dans les mines puisque l'austérité l'oblige...
D'où l'importance de bénéficier de la surveillance et de la bienveillance de nombreux intellectuels pour qui notre pays doit demeurer vert et fleuri.
Notre plus belle richesse, c'est de vivre en un lieu qui est préservé de l'appétit vorace des capitalistes.
D'aucuns vont me reprocher de ne pas me soucier de l'économie. Je m'en fous à vrai dire. L'économie doit être au service des humains. Ce ne sont pas aux humains de goûter aux sévices de l'économie. Comme disent les vieux sages aborigènes, l'argent ça ne se mange pas.
mercredi 8 avril 2015
Mononcle Caouette est un gros christ de cave
Mononcle Caouette est un gérant d'estrade qui vote libéral parce qu'il en a assez de payer pour les BS, c'est-à-dire les assistés sociaux.
Mononcle Caouette n'a jamais signé une pétition et s'il a défilé dans la rue c'était pour célébrer les Canadiens de Montréal lorsqu'ils ont remporté la Coupe Stanley la dernière fois.
Mononcle Caouette déteste les féministes, les gauchistes, les socialistes, les communistes, les anarchistes et tous ceux qui ne pensent pas comme un gérant d'estrade libéral.
Mononcle Caouette ne fait jamais de sport et souffre de tous les maux qui peuvent vous conduire quelqu'un vers son tombeau avec vingt années d'avance sur l'espérance de vie nationale.
Mononcle Caouette mange gras, parle gras et rit grassement.
Mononcle Caouette a un gros char, une grosse maison et une grosse piscine qu'il paie en faisant travailler des BS au noir ou bien en plaçant ses revenus douteux à l'écart de l'impôt.
Mononcle Caouette traite les féministes de lesbiennes et les gauchistes de tapettes.
Mononcle Caouette déteste les écologistes et les intellectuels. Il arrose son stationnement avec l'eau potable de la ville et jette ses emballages de Big Macs sur les trottoirs. Quand on lui reproche de polluer il prétend que les changements climatiques sont inventés par ceux qui n'aiment pas Stephen Harper et Philippe Couillard.
Mononcle Caouette a visité Las Vegas et Dubaï. Il ne saurait se passer d'un hôtel quatre étoiles en voyage et ne visite que les endroits protégés par la police ou l'armée.
Les enfants de Mononcle Caouette sont ingrats. Ils sont féministes, écologistes, socialistes, anarchistes, etc. Ils prétendent pouvoir vivre sans argent et souhaitent devenir artistes plutôt que gérants d'estrade libéraux corrompus et dégueulasses.
Mononcle Caouette s'en veut parfois de ne pas les avoir dressés au fouet et à la ceinture.
Mononcle Caouette est content de voir les policiers matraqués ses enfants pour leur apprendre des leçons de vie.
Au fond, Mononcle Caouette est un gros christ de cave.
lundi 6 avril 2015
Le cure-dent du vieux chauve
La littérature peut conférer une dimension surnaturelle à la moindre banalité. Elle me permet, entre autres, de ne pas se limiter aux opinions convenues et aux lieux communs.
La littérature me délivre du fardeau du réalisme et du gros bon sens, fardeau que je laisse aux gens sérieux pour qu'ils soient tristes sans moi.
Je pourrais commenter nuit et jour les actualités, ce que je ne fais pratiquement jamais, sinon pour marquer mon temps d'un pavé jeté dans la mare. Toute personne éclaboussée bénéficiera tout de suite de mes excuses et de ma compassion puisque je ne prends aucun plaisir à rendre les gens malheureux, surtout mes ennemis. L'inimitié m'est étrangère. Je n'arrive pas à haïr les gens qui me détestent. Je suis bien trop paresseux pour ça. Haïr, c'est de la grosse ouvrage...
Haïr, c'est le propre des actualités, sur Twitter entre autres. Je m'en lasse assez rapidement.
Il n'y a rien de transcendant à commettre avec les actualités. On livre son opinion à chaud sur un événement déjà refroidi que déjà l'on se sent piégé par la médiocrité des faits divers.
En ce lundi qui succède au dimanche de Pâques, je profite d'un congé férié en m'abandonnant à ma bonhomie proverbiale ainsi qu'à la procrastination trop rare qui l'accompagne. J'aimerais ne rien faire plus souvent mais mon âge encore peu vénérable m'oblige à bûcher sans cesse pour je ne sais quelle cause, sinon celle de mon garde-manger.
Toute mon attention s'est portée ce matin sur un vieux monsieur au crâne dégarni qui mâchouillait un cure-dent au Restaurant La Belle Mauricienne où je suis allé déjeuner avec ma douce.
Les actualités ne me disaient rien qu'y vaille, d'autant plus qu'il n'y avait que Le journal de Montréal à se mettre sous mes yeux. Je n'ai pas lu la chronique ringarde de Richard Martineau. Il répète les mêmes âneries depuis 2012. Ses thématiques de larbin repus m'indiffèrent. J'ai plutôt lu Bock-Côté qui se servait de Mordecai Richler pour remettre au goût du jour l'oeuvre de l'abbé Groulx. C'est vrai qu'une grande oeuvre ne peut se limiter qu'à des propos de mauvais goût. Néanmoins je crois que Mordecai Richler est un plus grand écrivain que l'abbé Groulx. Je n'ai pas envie de lire Groulx et ses délires nationalistes qui sentent le moisi: Ô Dollard des Ormeaux, nous brandirons nos mains comme des palmes pour honorer ta mémoire... C'est nul à chier, l'oeuvre de l'abbé Lionel Groulx. Je lis encore Richler, comme je lis Dostoïevski ou Voltaire, des auteurs qui portent leur part d'ombres mais qui livrent aussi des éclairs de génie que je n'ai jamais trouvé chez l'abbé Groulx. Non pas parce que je méprise le nationalisme. Mais parce que la littérature de curé me fait vomir. La virilité d'un curé? On repassera...
Cela dit, au risque de m'engluer dans l'actualité, je me dois de revenir sur le vieux barbon qui mâchouillait son cure-dent.
J'avais la sensation que cela pouvait être moi dans trente ou quarante ans, bien que je n'ai pas coutume de me curer les dents en public.
Pourquoi toute mon attention était-elle dérivée vers le cure-dent du vieux monsieur? Pourquoi en suis-je à passer si rapidement sur le texticule de Bock-Côté?
Parce que je suis un écrivain, pas un chroniqueur, ni même un gérant d'estrade.
Le cure-dent du vieux chauve m'en disait plus long que tous ces mots alignés par quelque infographiste du dimanche dans Le journal de Montréal.
Ce cure-dent a pris des dimensions olympiennes que je ne m'explique pas encore.
Il est le symbole de la retraite, de la fin de toute activité lucrative, de tous travaux et de toutes obligations courantes.
Ce cure-dent représente, en quelque sorte, une forme de liberté.
La liberté de se foutre du regard de l'autre.
La liberté de se curer les dents sans même avoir à se les curer puisque le vieillard ne prenait que du café, ce qui ne colle généralement pas entre les dents ou bien sous le dentier.
Que passent les écrivains nationalistes et les commentateurs de l'actualité!
À la fin de mon aventure sur terre, j'aurai peut-être un dernière pensée pour le cure-dent du vieux schnok. J'en aurai sans doute aucune pour l'abbé Groulx.
L'appel de la race, de la crasse ou de la mélasse: je m'en lasse.
Je combats les turpitudes de mes semblables en les aimant du mieux que je puisse faire. Je suis en faveur de l'indépendance du Québec et en défaveur du nationalisme. Mon point de vue purement administratif ne mérite aucun éloge. Small is beautiful... D'où mon hommage au cure-dent. Et mon intérêt démesuré pour ces petites vies ordinaires qui n'intéressent pas le commun de ceux qui aspirent à l'immortalité en inspirant aux autres le ressentiment, le dégoût de la vie et la haine des déjeuners tranquilles.
Comme Nietzsche, je me méfie de l'esprit de sérieux des Huns et des autres.
J'aspire à la liberté et à la joie de l'esprit.
J'aspire à la bonté, à la beauté et à cette liberté libre dont parlait le poète Rimbaud en des jours meilleurs.
Ainsi soit-il.
La littérature me délivre du fardeau du réalisme et du gros bon sens, fardeau que je laisse aux gens sérieux pour qu'ils soient tristes sans moi.
Je pourrais commenter nuit et jour les actualités, ce que je ne fais pratiquement jamais, sinon pour marquer mon temps d'un pavé jeté dans la mare. Toute personne éclaboussée bénéficiera tout de suite de mes excuses et de ma compassion puisque je ne prends aucun plaisir à rendre les gens malheureux, surtout mes ennemis. L'inimitié m'est étrangère. Je n'arrive pas à haïr les gens qui me détestent. Je suis bien trop paresseux pour ça. Haïr, c'est de la grosse ouvrage...
Haïr, c'est le propre des actualités, sur Twitter entre autres. Je m'en lasse assez rapidement.
Il n'y a rien de transcendant à commettre avec les actualités. On livre son opinion à chaud sur un événement déjà refroidi que déjà l'on se sent piégé par la médiocrité des faits divers.
En ce lundi qui succède au dimanche de Pâques, je profite d'un congé férié en m'abandonnant à ma bonhomie proverbiale ainsi qu'à la procrastination trop rare qui l'accompagne. J'aimerais ne rien faire plus souvent mais mon âge encore peu vénérable m'oblige à bûcher sans cesse pour je ne sais quelle cause, sinon celle de mon garde-manger.
Toute mon attention s'est portée ce matin sur un vieux monsieur au crâne dégarni qui mâchouillait un cure-dent au Restaurant La Belle Mauricienne où je suis allé déjeuner avec ma douce.
Les actualités ne me disaient rien qu'y vaille, d'autant plus qu'il n'y avait que Le journal de Montréal à se mettre sous mes yeux. Je n'ai pas lu la chronique ringarde de Richard Martineau. Il répète les mêmes âneries depuis 2012. Ses thématiques de larbin repus m'indiffèrent. J'ai plutôt lu Bock-Côté qui se servait de Mordecai Richler pour remettre au goût du jour l'oeuvre de l'abbé Groulx. C'est vrai qu'une grande oeuvre ne peut se limiter qu'à des propos de mauvais goût. Néanmoins je crois que Mordecai Richler est un plus grand écrivain que l'abbé Groulx. Je n'ai pas envie de lire Groulx et ses délires nationalistes qui sentent le moisi: Ô Dollard des Ormeaux, nous brandirons nos mains comme des palmes pour honorer ta mémoire... C'est nul à chier, l'oeuvre de l'abbé Lionel Groulx. Je lis encore Richler, comme je lis Dostoïevski ou Voltaire, des auteurs qui portent leur part d'ombres mais qui livrent aussi des éclairs de génie que je n'ai jamais trouvé chez l'abbé Groulx. Non pas parce que je méprise le nationalisme. Mais parce que la littérature de curé me fait vomir. La virilité d'un curé? On repassera...
Cela dit, au risque de m'engluer dans l'actualité, je me dois de revenir sur le vieux barbon qui mâchouillait son cure-dent.
J'avais la sensation que cela pouvait être moi dans trente ou quarante ans, bien que je n'ai pas coutume de me curer les dents en public.
Pourquoi toute mon attention était-elle dérivée vers le cure-dent du vieux monsieur? Pourquoi en suis-je à passer si rapidement sur le texticule de Bock-Côté?
Parce que je suis un écrivain, pas un chroniqueur, ni même un gérant d'estrade.
Le cure-dent du vieux chauve m'en disait plus long que tous ces mots alignés par quelque infographiste du dimanche dans Le journal de Montréal.
Ce cure-dent a pris des dimensions olympiennes que je ne m'explique pas encore.
Il est le symbole de la retraite, de la fin de toute activité lucrative, de tous travaux et de toutes obligations courantes.
Ce cure-dent représente, en quelque sorte, une forme de liberté.
La liberté de se foutre du regard de l'autre.
La liberté de se curer les dents sans même avoir à se les curer puisque le vieillard ne prenait que du café, ce qui ne colle généralement pas entre les dents ou bien sous le dentier.
Que passent les écrivains nationalistes et les commentateurs de l'actualité!
À la fin de mon aventure sur terre, j'aurai peut-être un dernière pensée pour le cure-dent du vieux schnok. J'en aurai sans doute aucune pour l'abbé Groulx.
L'appel de la race, de la crasse ou de la mélasse: je m'en lasse.
Je combats les turpitudes de mes semblables en les aimant du mieux que je puisse faire. Je suis en faveur de l'indépendance du Québec et en défaveur du nationalisme. Mon point de vue purement administratif ne mérite aucun éloge. Small is beautiful... D'où mon hommage au cure-dent. Et mon intérêt démesuré pour ces petites vies ordinaires qui n'intéressent pas le commun de ceux qui aspirent à l'immortalité en inspirant aux autres le ressentiment, le dégoût de la vie et la haine des déjeuners tranquilles.
Comme Nietzsche, je me méfie de l'esprit de sérieux des Huns et des autres.
J'aspire à la liberté et à la joie de l'esprit.
J'aspire à la bonté, à la beauté et à cette liberté libre dont parlait le poète Rimbaud en des jours meilleurs.
Ainsi soit-il.
dimanche 5 avril 2015
Du temps où j'allais chercher de l'eau de Pâques avec mon père
Mon père allait chercher de l'eau de source à tous les matins de Pâques. La source était située au bout de l'Île Caron, près du pont qui mène à l'Île Saint-Quentin, à l'embouchure de la rivière Tapiskwan Sipi (anciennement Saint-Maurice).
Je n'ai jamais cru aux vertus de cette eau miraculeuse, cette eau dite de Pâques qui était sensée nous guérir de tous les maux et nous porter chance. Mon père y croyait. Il me reprochait par ailleurs de ne croire en rien.
-Même les Témoins de Jéhovah croient en quelque chose! qu'il me disait. Mécréant! Faut que tu croies en quelque chose!
Selon moi, son argument était faible. Et son eau de Pâques n'était qu'une superstition parmi tant d'autres. Pourtant, j'y suis souvent allé avec lui, les matins de Pâques. Le miracle étant que j'avais un père qui aimait ses enfants et les traînait partout pour prodiguer ses enseignements avec des paroles sibyllines.
Alors que tant d'autres hommes se perdent en sessions psychanalytiques pour surmonter leur complexe de fils manqué et de père manquant, je puis dire que j'ai été gâté par mon père, cet homme qui croyait fermement au Christ et à son message évangélique.
-Thomas y'a mis les doigts dans les trous de Jésus pis là, Thomas, y'a braillé parce qu'i' a ben vu que Jésus était ressuscité... Heureux ceux qui auront cru sans avoir vu... Mais qui aurait pas fait comme Thomas, hein? Un gars ressuscite pas à tous 'es jours. Ça fait que Thomas y'a su pour vrai que Jésus était ressuscité des morts... Des trous dans les mains pis les pieds, ça trompe pas!
-Jésus ne devait pas être tout à fait mort lorsqu'on l'a retiré de la croix... Quand t'es mort, normalement, t'es mort... que je disais à mon père.
-Ouin,,, Ben Jésus était le Fils de Dieu... En seulement qu'i' se demandait su' 'a croix pourquoi que Dieu l'avait abandonné... T'es cloué su' une croix entre deux bandits pis t'as mal partout... Tu t'sens pas mal tout seul, ben entendu... Même Jésus connaissait ça, le désespoir, parce qu'autrement y'aurait jamais compris qui on est, nous autres, les humains... Pis y'a des mystères dans 'a religion, autrement ça serait pas une religion... En seulement qu'i' faut pas croire toutte c'que disent les curés parce qu'i' a une maudite gang de mange-marde parmi eux. Y'en a qui aiment mieux faire la piastre que de défendre les pauvres... Mais comme disait Jésus: y'est plus facile à un chameau d'entrer par le chas d'une aiguille qu'à un riche d'entrer au paradis... Que les ceusses qui comprennent comprennent... Pis qu'les autres mangent un char de marde!
-P'pa! Ta cruche d'eau déborde...
-Ok... On a notre eau d'Pâques. On peut r'tourner à 'a maison.
On remontait ensuite la côte pour embarquer sur nos vélos. Le père s'allumait une cigarette et se la clouait aux commissures de ses lèvres. Il pédalait en pompant sa boucane, comme il l'avait toujours fait. Nous rentions à la maison autour de sept heures et demie le matin pour se taper un petit déjeuner préparé par ma mère, bien contente de recevoir un nouveau flacon d'eau de Pâques afin de chasser les mauvais esprits et de bénir la chambre de son garçon athée qui n'arrêtait jamais de parler de la révolution, des communistes et de toutes ces affaires effrayantes qui démolissent des églises et portent malchance dans la vie.
-D'la religion, ça en prend, qu'elle me disait sans plus de justifications. Même les Témoins de Jéhovah croient en quelque chose!
Le déjeuner terminé, je pourrais replongé dans mes chers livres ou bien écouter les disques de mes parents: Harry Belafonte, Roger Whitaker, Elvis, les Beatles... J'irais à la messe de onze heures en maugréant. Je pourrais au retour me farcir une large tranche de coco de Pâques sucré de marque Laura Secord. À midi, il y aurait de la lutte à la télévision et je me battrais dans le salon contre mes frères sous l'oeil bienveillant de mon père pour qui la lutte était sa deuxième religion.
samedi 4 avril 2015
Albert Laberge et la place des intellectuels au Québec
Il n'y a jamais eu de place pour les intellectuels au Québec. Il n'y en aura probablement jamais. Notre société est fondée sur du toc, comme la plupart des communautés humaines j'imagine. Tout ce qui brille n'est pas or nous dit le proverbe. Pourtant, le monde dit ordinaire ne s'intéresse qu'à ce qui brille. C'est-à-dire à ce qui remporte la caution morale des baveux. Que ce soit de l'or ou que ce n'en soit pas importe peu. On aimera ce que tout le monde aime et on détestera ce que tout le monde déteste. C'est la loi dite du moindre effort. Pourquoi faudrait-il s'efforcer à comprendre quelque chose à ce monde? Les intellectuels sont anxieux et on les choisit toujours les derniers pour jouer une partie de ballon-chasseur. Qui voudrait partager le sort de ces abrutis qui veulent changer un monde qui ne veut pas changer? Franchement, on a mieux à faire que de lire des livres tabous et de prendre au sérieux les visions apocalyptiques des laiderons à lunettes. L'essentiel est visible pour les yeux: ça se mange, ça se boit, ça se suce et ça se digère. Les concepts, les idées et les opinions, c'est bon pour ceux que personne n'aime de toutes façons.
***
Ce paragraphe me permet de vous introduire cavalièrement à mon sujet du jour. J'ai promis dans un vieux billet écrit le mois dernier que je vous parlerais bientôt de La Scouine d'Albert Laberge. Je me suis fait attendre et je suis convaincu que cela ne vous a pas empêché de dormir.
Je compte mes lecteurs presque sur le bout des doigts. Pourtant, je m'évertue à vous servir comme si vous étiez des millions. C'est que je suis moi aussi un satané intellectuel. Un type qui a toujours les deux pieds dans la marge et qui considère Rimbaud, Nietzsche et Albert Laberge pour des hérauts de la littérature.
Les trois n'ont publié qu'une centaine d'exemplaires de leurs livres et n'avaient pas mille lecteurs de leur vivant. Néanmoins, on peut les considérer pour des génies si l'on se tient dans la marge...
Le message que porte ce trio d'auteurs est tellement intense qu'un esprit raffiné ne peut pas l'ignorer, sachant à l'avance que le plus bas dénominateur commun est ce qui se veut utile au plus grand nombre, dont les horaires de chemins de fer et les annuaires téléphoniques.
A-t-on besoin d'un poète, d'un philosophe ou d'un conteur de génie? Pas du tout. Ce n'est pas avec ce genre de trucs qu'on fait une piastre.
Albert Laberge est une créature à part de la littérature québécoise. On trouve sous sa plume les prémisses de notre modernité littéraire. C'est encore un écrivain d'aujourd'hui et du futur, comme c'est le cas pour Rimbaud et Nietzsche, d'où leur génie transcendant toutes les époques.
Albert Laberge vivait au temps de la curetaille catholique et de ses interdictions intégristes. Comme il est né en 1871, vous imaginez sans aucun doute que c'était une sale époque pour avoir une tête bien faite qui s'exprime librement. Aussi débuta-t-il dans sa carrière d'homme de lettres par son renvoi du Collège Sainte-Marie de Montréal pour avoir lu des livres interdits: Zola, Maupassant, Hugo, nommez-les tous.
Au lieu de se morigéner lui-même en se rendant à ses devoirs d'obéissance envers notre très sainte merde l'Église, Laberge prit le parti de devenir un auteur dit pornographique par tous les curés, évêques et pédophiles du Québec.
Pourtant, il n'y avait rien de pornographique dans son oeuvre. Rien qui ne soit vrai et bien raconté, simplement, avec même une certaine sobriété de détails. Laberge avait osé écrire qu'une dame faisait l'amour avec un type sur une botte de foin et voilà que les censeurs de l'Église montaient sur toutes les chaires pour dénoncer ce pitoyable auteur qui n'a jamais publié plus de cent exemplaires de ses livres, dont La Scouine, un roman où il décrit la misère et le cynisme des habitants de la campagne qui se mangent la couenne sur le dos à l'ombre du clocher. Laberge n'était pas pornographique: il pointait du doigt la misère sociale des ouailles catholiques.
Alors que d'autres romanciers de son temps vantaient la très sainte merde l'Église et son troupeau d'idiots obéissants, Albert Laberge secouait leur joug et criait son mépris de ce pain sûr et amer marqué d'une croix que tout le monde se devait de manger sans jamais remettre en question la médiocrité de la vie qu'on leur faisait mener.
On le dit près de Maupassant en termes d'écriture. Ce n'est pas tout à fait faux. Mais il y a plus encore puisque c'est à nous, Québécois et Québécoises, que Laberge s'adresse directement et sans détours.
Je ne me suis pas encore tapé toute son oeuvre et, croyez-moi, cela ne saurait tarder.
J'ai trouvé en Laberge un frère d'esprit et de combat.
Je suis tombé la semaine dernière sur un conte de Laberge via une anthologie des conteurs canadiens-français publiée par les bons soins d'Adrien Thério. Le conte s'intitule Mame Pouliche et relate la vie sale et désolante d'une femme de ménage condamnée à laver les crachoirs et les toilettes dans une compagnie de marchands d'assurances. Laberge, que l'on dit pornographe et mauvais chrétien, nous fait pourtant ressentir bien plus de compassion et d'humanité pour cette pauvre femme que pouvaient en avoir tous les mafieux catholiques de son temps envers les pauvres et les opprimés.
Évidemment, La Scouine de Laberge a été porté au programme des lectures obligatoires au collégial par toute une flopée d'intellectuels québécois qui manifestent dans les rues pour y prêcher la révolution,,,
D'aucuns voudraient bien que les curés reviennent enseigner à notre belle jeunesse québécoise les joies de l'obéissance et de la sodomie passive.
À défaut de curés, comme il ne s'en produit plus beaucoup, on pourrait à tout le moins remplacer les profs de gauche par des enseignants conservateurs qui n'ont pas perdu la foi ni le fouet.
Finalement, je vous déconseille de lire Albert Laberge si vous souhaitez être choisi en premier pour une partie de hockey ou de ballon-chasseur. Même si Laberge a surtout gagné sa vie en tant que chroniqueur sportif et critique d'art de La Presse, un journal qui a déjà été un peu à gauche en plus d'avoir été un temps le plus grand quotidien francophone d'Amérique du Nord.
Vous pouvez d'ailleurs relire ses chroniques sportives en microfiches dans toutes les bonnes bibliothèques de la province, à moins que vous n'ayez pas de temps à perdre, comme moi et toute une flopée de mécréants qui ne vouent pas un culte à l'argent et méprisent toute forme d'autorité.
Le cinéaste Pierre Jutras aurait, par ailleurs, tourné un film à propos d'Albert Laberge, Le film s'intitule Lamento pour un homme de lettres et met en vedette le comédien Gilbert Sicotte, Je n'ai jamais vu le film, pour dire vrai, Il a été tourné en 1987, Et je ne sais pas ce que je donnerais pour mettre la main dessus...
Je passerai donc une belle année 2015 grâce à Albert Laberge qui me nourrira intellectuellement plus que je n'en demandais. Je vais pouvoir lire ses contes, ses chroniques et ses lettres, si cela se trouve, bien entendu.
Comment pourrais-je ne pas ressentir de sympathie pour un écrivain qui ne publiait jamais plus de cent exemplaires de ses oeuvres, opuscules qu'il donnait à des personnes choisies, se souciant peu de devenir populaire ou bien adulé par l'élite crasseuse du Québec?
***
Ce paragraphe me permet de vous introduire cavalièrement à mon sujet du jour. J'ai promis dans un vieux billet écrit le mois dernier que je vous parlerais bientôt de La Scouine d'Albert Laberge. Je me suis fait attendre et je suis convaincu que cela ne vous a pas empêché de dormir.
Je compte mes lecteurs presque sur le bout des doigts. Pourtant, je m'évertue à vous servir comme si vous étiez des millions. C'est que je suis moi aussi un satané intellectuel. Un type qui a toujours les deux pieds dans la marge et qui considère Rimbaud, Nietzsche et Albert Laberge pour des hérauts de la littérature.
Les trois n'ont publié qu'une centaine d'exemplaires de leurs livres et n'avaient pas mille lecteurs de leur vivant. Néanmoins, on peut les considérer pour des génies si l'on se tient dans la marge...
Le message que porte ce trio d'auteurs est tellement intense qu'un esprit raffiné ne peut pas l'ignorer, sachant à l'avance que le plus bas dénominateur commun est ce qui se veut utile au plus grand nombre, dont les horaires de chemins de fer et les annuaires téléphoniques.
A-t-on besoin d'un poète, d'un philosophe ou d'un conteur de génie? Pas du tout. Ce n'est pas avec ce genre de trucs qu'on fait une piastre.
Albert Laberge est une créature à part de la littérature québécoise. On trouve sous sa plume les prémisses de notre modernité littéraire. C'est encore un écrivain d'aujourd'hui et du futur, comme c'est le cas pour Rimbaud et Nietzsche, d'où leur génie transcendant toutes les époques.
Albert Laberge vivait au temps de la curetaille catholique et de ses interdictions intégristes. Comme il est né en 1871, vous imaginez sans aucun doute que c'était une sale époque pour avoir une tête bien faite qui s'exprime librement. Aussi débuta-t-il dans sa carrière d'homme de lettres par son renvoi du Collège Sainte-Marie de Montréal pour avoir lu des livres interdits: Zola, Maupassant, Hugo, nommez-les tous.
Au lieu de se morigéner lui-même en se rendant à ses devoirs d'obéissance envers notre très sainte merde l'Église, Laberge prit le parti de devenir un auteur dit pornographique par tous les curés, évêques et pédophiles du Québec.
Pourtant, il n'y avait rien de pornographique dans son oeuvre. Rien qui ne soit vrai et bien raconté, simplement, avec même une certaine sobriété de détails. Laberge avait osé écrire qu'une dame faisait l'amour avec un type sur une botte de foin et voilà que les censeurs de l'Église montaient sur toutes les chaires pour dénoncer ce pitoyable auteur qui n'a jamais publié plus de cent exemplaires de ses livres, dont La Scouine, un roman où il décrit la misère et le cynisme des habitants de la campagne qui se mangent la couenne sur le dos à l'ombre du clocher. Laberge n'était pas pornographique: il pointait du doigt la misère sociale des ouailles catholiques.
Alors que d'autres romanciers de son temps vantaient la très sainte merde l'Église et son troupeau d'idiots obéissants, Albert Laberge secouait leur joug et criait son mépris de ce pain sûr et amer marqué d'une croix que tout le monde se devait de manger sans jamais remettre en question la médiocrité de la vie qu'on leur faisait mener.
On le dit près de Maupassant en termes d'écriture. Ce n'est pas tout à fait faux. Mais il y a plus encore puisque c'est à nous, Québécois et Québécoises, que Laberge s'adresse directement et sans détours.
Je ne me suis pas encore tapé toute son oeuvre et, croyez-moi, cela ne saurait tarder.
J'ai trouvé en Laberge un frère d'esprit et de combat.
Je suis tombé la semaine dernière sur un conte de Laberge via une anthologie des conteurs canadiens-français publiée par les bons soins d'Adrien Thério. Le conte s'intitule Mame Pouliche et relate la vie sale et désolante d'une femme de ménage condamnée à laver les crachoirs et les toilettes dans une compagnie de marchands d'assurances. Laberge, que l'on dit pornographe et mauvais chrétien, nous fait pourtant ressentir bien plus de compassion et d'humanité pour cette pauvre femme que pouvaient en avoir tous les mafieux catholiques de son temps envers les pauvres et les opprimés.
Évidemment, La Scouine de Laberge a été porté au programme des lectures obligatoires au collégial par toute une flopée d'intellectuels québécois qui manifestent dans les rues pour y prêcher la révolution,,,
D'aucuns voudraient bien que les curés reviennent enseigner à notre belle jeunesse québécoise les joies de l'obéissance et de la sodomie passive.
À défaut de curés, comme il ne s'en produit plus beaucoup, on pourrait à tout le moins remplacer les profs de gauche par des enseignants conservateurs qui n'ont pas perdu la foi ni le fouet.
Finalement, je vous déconseille de lire Albert Laberge si vous souhaitez être choisi en premier pour une partie de hockey ou de ballon-chasseur. Même si Laberge a surtout gagné sa vie en tant que chroniqueur sportif et critique d'art de La Presse, un journal qui a déjà été un peu à gauche en plus d'avoir été un temps le plus grand quotidien francophone d'Amérique du Nord.
Vous pouvez d'ailleurs relire ses chroniques sportives en microfiches dans toutes les bonnes bibliothèques de la province, à moins que vous n'ayez pas de temps à perdre, comme moi et toute une flopée de mécréants qui ne vouent pas un culte à l'argent et méprisent toute forme d'autorité.
Le cinéaste Pierre Jutras aurait, par ailleurs, tourné un film à propos d'Albert Laberge, Le film s'intitule Lamento pour un homme de lettres et met en vedette le comédien Gilbert Sicotte, Je n'ai jamais vu le film, pour dire vrai, Il a été tourné en 1987, Et je ne sais pas ce que je donnerais pour mettre la main dessus...
Je passerai donc une belle année 2015 grâce à Albert Laberge qui me nourrira intellectuellement plus que je n'en demandais. Je vais pouvoir lire ses contes, ses chroniques et ses lettres, si cela se trouve, bien entendu.
Comment pourrais-je ne pas ressentir de sympathie pour un écrivain qui ne publiait jamais plus de cent exemplaires de ses oeuvres, opuscules qu'il donnait à des personnes choisies, se souciant peu de devenir populaire ou bien adulé par l'élite crasseuse du Québec?
vendredi 3 avril 2015
Le professeur K. et la lutte contre le totalitarisme des honnêtes gens
Le professeur K. avait connu la Seconde guerre mondiale. Il avait été témoin des atrocités commises par les nazis. Il se souvenait du sang qui inondait la place publique de Liège. Il n'avait que huit ou neuf ans. Pour punir les forces de la Résistance et ceux qui les soutenaient, les nazis s'étaient emparés de citoyens désignés au hasard. Les nazis les avaient mis au milieu de la place et les avaient fait exploser avec des grenades qu'ils avaient placés autour du corps de leurs victimes.
-Si vous ne nous dites pas où vous cachez les terroristes, nous choisirons encore dix personnes parmi vous demain et nous leur ferons connaître le même sort... Heil Hitler!
Le lendemain, je ne pourrais vous dire ce qui s'est passé. Probablement que les Québécois, les Canadiens, les Britanniques et les Américains ont mis fin à l'Occupation allemande. Les terroristes sont probablement devenus des héros. Et les nazis ont probablement fui en Argentine.
Je ne sais pas ce qui a motivé le professeur K. à venir s'établir au Québec. Peut-être pour fuir cette vieille Europe et ses odeurs de sang. Je vous avouerai que je ne lui ai jamais posé la question.
Cela dit, le professeur K. avait été particulièrement affecté par toutes les formes de totalitarisme. Sa famille avait connu les effets pervers du stalinisme et de l'hitlérisme. Le professeur K. était d'origine russe. Et il s'accrochait à Dostoïevski, Chestov et Berdaïev pour mieux saisir l'esprit de cette sale époque. Ce qui faisait de lui un philosophe d'exception dans mon université où il y avait beaucoup trop d'idéologues à courte vue et autres logiciens pour machines à calculer.
-Vous savez monsieur Bouchard, qu'il me disait au cours d'un dialogue entre le maître et l'élève, le monde est rempli de larves et de bêtes rampantes... Même ici à l'université... Plusieurs n'hésiteraient pas à éviscérer leur propre mère pour s'assurer une bonne place dans le monde... Quelqu'un qui reçoit une médaille ou des honneurs, dans un tel contexte, doit être regardé avec suspicion... Sur qui s'appuient les régimes totalitaires? Sur les honnêtes gens, sur les tièdes qui, comme le rapporte l'Apocalypse de Saint-Jean, sont vomis tant par le Ciel que par l'Enfer... "Que votre parole soit oui, oui, non, non, mais tièdes je vous vomirai de ma bouche..." Voilà ce qu'enseignent les Saintes-Écritures tout autant que l'expérience de la vie... Les régimes totalitaires n'ont que faire des rebelles et des révoltés: ils seront même les premiers sacrifiés! Les dictatures ont besoin de l'homme sans regard ni visage, de l'homme objectivé, réduit à l'état de chose sans cervelle que l'on peut pousser à commettre toutes les ignominies... Vous savez, monsieur Bouchard, qu'il y avait très peu de psychopathes dans les camps de la mort nazis ou communistes... On n'y trouvait essentiellement que des honnêtes gens soucieux d'accomplir leur devoir et d'obéir aux ordres... Le Ciel et l'Enfer, pour peu qu'ils existent, regarderont favorablement un révolté parce que l'un et l'autre feront fi des êtres serviles et dépersonnalisés... Méfions-nous des marchands de bonheur et des vendeurs d'assurance... N'est-ce pas Bernanos qui disait que si le Diable se présentait à nous de nos jours il se présenterait sous les traits d'un vendeur d'assurance? Que nous reste-t-il pour résister à toutes ces infamies, cher monsieur Bouchard? Il nous reste les arts, la culture, l'amour de la sagesse et de la connaissance...
-Et pour ce qui est de l'examen oral? lui demandé-je, puisque j'étais sensé le rencontrer pour passer un examen.
-Vous savez bien que vous vous méritez un A. Les questions oiseuses, je ne les réserve qu'à ceux qui obéissent servilement et ne s'en remettent qu'au syllabus du cours... Vous lisez plus que tous les autres étudiants... Vous ne craignez pas de donner votre opinion, quitte à me contrarier... Franchement, je vous donne même un A plus. Cela dit, parlez-moi de ce que vous lisez en ce moment? Je suis toujours curieux de voir où vous en êtes avec vos lectures...
J'ai donc parlé de mes lectures au professeur K. Je ne me souviens plus trop de ce que je lisais à ce moment-là. Probablement Les formes nouvelles en peinture, de Stanislas Ignacy Witkiewicz... Ce qui dut l'enchanter. Il voyait bien que je me forçais le cul pour lire des textes rares et compliqués, sans avoir à m'en remettre à la mémoire de mes profs.
Évidemment, je ne vous écris pas ça pour me vanter. J'ai toujours été un lecteur compulsif. Je détestais tellement l'école que je tenais les bibliothèques pour mon refuge mental. Je n'ai aucun mérite d'avoir appris à me protéger des balivernes avec les livres. Chaque livre me protégeait de l'ennui et de la bêtise.
C'était bien la première fois que je trouvais quelqu'un, hormis mon père et mon frère aîné, pour m'encourager à lire sans ressentir la culpabilité de risquer de devenir fou...
S'il fallait que je devienne un fou, se serait un fou comme lui, le professeur K., alias mon ami Alexis Klimov...
-Si vous ne nous dites pas où vous cachez les terroristes, nous choisirons encore dix personnes parmi vous demain et nous leur ferons connaître le même sort... Heil Hitler!
Le lendemain, je ne pourrais vous dire ce qui s'est passé. Probablement que les Québécois, les Canadiens, les Britanniques et les Américains ont mis fin à l'Occupation allemande. Les terroristes sont probablement devenus des héros. Et les nazis ont probablement fui en Argentine.
Je ne sais pas ce qui a motivé le professeur K. à venir s'établir au Québec. Peut-être pour fuir cette vieille Europe et ses odeurs de sang. Je vous avouerai que je ne lui ai jamais posé la question.
Cela dit, le professeur K. avait été particulièrement affecté par toutes les formes de totalitarisme. Sa famille avait connu les effets pervers du stalinisme et de l'hitlérisme. Le professeur K. était d'origine russe. Et il s'accrochait à Dostoïevski, Chestov et Berdaïev pour mieux saisir l'esprit de cette sale époque. Ce qui faisait de lui un philosophe d'exception dans mon université où il y avait beaucoup trop d'idéologues à courte vue et autres logiciens pour machines à calculer.
-Vous savez monsieur Bouchard, qu'il me disait au cours d'un dialogue entre le maître et l'élève, le monde est rempli de larves et de bêtes rampantes... Même ici à l'université... Plusieurs n'hésiteraient pas à éviscérer leur propre mère pour s'assurer une bonne place dans le monde... Quelqu'un qui reçoit une médaille ou des honneurs, dans un tel contexte, doit être regardé avec suspicion... Sur qui s'appuient les régimes totalitaires? Sur les honnêtes gens, sur les tièdes qui, comme le rapporte l'Apocalypse de Saint-Jean, sont vomis tant par le Ciel que par l'Enfer... "Que votre parole soit oui, oui, non, non, mais tièdes je vous vomirai de ma bouche..." Voilà ce qu'enseignent les Saintes-Écritures tout autant que l'expérience de la vie... Les régimes totalitaires n'ont que faire des rebelles et des révoltés: ils seront même les premiers sacrifiés! Les dictatures ont besoin de l'homme sans regard ni visage, de l'homme objectivé, réduit à l'état de chose sans cervelle que l'on peut pousser à commettre toutes les ignominies... Vous savez, monsieur Bouchard, qu'il y avait très peu de psychopathes dans les camps de la mort nazis ou communistes... On n'y trouvait essentiellement que des honnêtes gens soucieux d'accomplir leur devoir et d'obéir aux ordres... Le Ciel et l'Enfer, pour peu qu'ils existent, regarderont favorablement un révolté parce que l'un et l'autre feront fi des êtres serviles et dépersonnalisés... Méfions-nous des marchands de bonheur et des vendeurs d'assurance... N'est-ce pas Bernanos qui disait que si le Diable se présentait à nous de nos jours il se présenterait sous les traits d'un vendeur d'assurance? Que nous reste-t-il pour résister à toutes ces infamies, cher monsieur Bouchard? Il nous reste les arts, la culture, l'amour de la sagesse et de la connaissance...
-Et pour ce qui est de l'examen oral? lui demandé-je, puisque j'étais sensé le rencontrer pour passer un examen.
-Vous savez bien que vous vous méritez un A. Les questions oiseuses, je ne les réserve qu'à ceux qui obéissent servilement et ne s'en remettent qu'au syllabus du cours... Vous lisez plus que tous les autres étudiants... Vous ne craignez pas de donner votre opinion, quitte à me contrarier... Franchement, je vous donne même un A plus. Cela dit, parlez-moi de ce que vous lisez en ce moment? Je suis toujours curieux de voir où vous en êtes avec vos lectures...
J'ai donc parlé de mes lectures au professeur K. Je ne me souviens plus trop de ce que je lisais à ce moment-là. Probablement Les formes nouvelles en peinture, de Stanislas Ignacy Witkiewicz... Ce qui dut l'enchanter. Il voyait bien que je me forçais le cul pour lire des textes rares et compliqués, sans avoir à m'en remettre à la mémoire de mes profs.
Évidemment, je ne vous écris pas ça pour me vanter. J'ai toujours été un lecteur compulsif. Je détestais tellement l'école que je tenais les bibliothèques pour mon refuge mental. Je n'ai aucun mérite d'avoir appris à me protéger des balivernes avec les livres. Chaque livre me protégeait de l'ennui et de la bêtise.
C'était bien la première fois que je trouvais quelqu'un, hormis mon père et mon frère aîné, pour m'encourager à lire sans ressentir la culpabilité de risquer de devenir fou...
S'il fallait que je devienne un fou, se serait un fou comme lui, le professeur K., alias mon ami Alexis Klimov...
jeudi 2 avril 2015
En avril Claudette ne se découvre pas d'un fil
Que l'on soit en avril ou bien en juillet, jamais Claudette ne se découvre d'un fil.
On la voit marcher d'un bout à l'autre du Chemin du Roy, du Cap-de-la-Madeleine jusqu'à Trois-Rivières-Ouest, avec sa tuque, ses bottes de caoutchouc, son manteau d'hiver et sa grosse chemise carreautée rouge et noire. Qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il fasse un soleil de plomb, Claudette ne se départit jamais de ses nippes, comme si elle appréhendait un malheur qui l'obligerait à vivre dehors en pleine rue.
Elle se parle à elle-même en arpentant la ville d'un bout à l'autre, Claudette. C'est une petite dame trapue d'à peu près mon âge. Je ne sais pas quel malheur lui est arrivé pour qu'elle s'enrage ainsi après les fantômes de son esprit. C'est à la fois triste et amusant. Triste parce que l'on ne peut pas s'amuser du malheur des gens. Amusant parce qu'on ne peut pas toujours s'attrister devant ce déferlement de mots orduriers qui sortent de sa bouche.
-Mes hosties d'tabarnak! Haha! Vous pensez que c'est d'même, hein? Mais c'est pas d'même! Non monsieur! Non mes hosties d'tabarnak! Haha!
La dernière fois que je l'ai vue, elle était au pied d'un crucifié en bronze grandeur nature qui surplombe la rue Fusey à Sainte-Marie-Madeleine-du-Cap-de-la-Madeleine. Elle était là, à deux pas du Christ, et elle semblait lui dire quelque chose qui m'échappait, quelque chose qui visiblement la mettait en colère.
Un peu plus tard, je l'ai surprise devant la cathédrale de Trois-Rivières. Elle s'en prenait encore une fois au Bon Dieu.
-Hostie d'calice de ciboire! Ça va faire!!! Ça va faire!!! Mon hostie d'tabarnak toé!
Le soleil commençait un peu à chauffer. Elle portait pourtant un foulard autour des oreilles et de la bouche. Elle ignorait cette piètre chaleur qui nous poussait à croire que nous pouvions enfin enlever un fil ou deux en avril.
Je pourrais vous en raconter sur son compte une autre et deux autres. Malheureusement j'aurais bientôt fait le tour du sujet. Pour en savoir plus sur Claudette, vous n'avez qu'à vous promener tout le long de la 138, alias le Chemin du Roy, du pont Laviolette au Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap. Sûr que vous la verrez. À moins d'être aveugle. Ou sourd. Ou muet. Ou indifférent.
On la voit marcher d'un bout à l'autre du Chemin du Roy, du Cap-de-la-Madeleine jusqu'à Trois-Rivières-Ouest, avec sa tuque, ses bottes de caoutchouc, son manteau d'hiver et sa grosse chemise carreautée rouge et noire. Qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il fasse un soleil de plomb, Claudette ne se départit jamais de ses nippes, comme si elle appréhendait un malheur qui l'obligerait à vivre dehors en pleine rue.
Elle se parle à elle-même en arpentant la ville d'un bout à l'autre, Claudette. C'est une petite dame trapue d'à peu près mon âge. Je ne sais pas quel malheur lui est arrivé pour qu'elle s'enrage ainsi après les fantômes de son esprit. C'est à la fois triste et amusant. Triste parce que l'on ne peut pas s'amuser du malheur des gens. Amusant parce qu'on ne peut pas toujours s'attrister devant ce déferlement de mots orduriers qui sortent de sa bouche.
-Mes hosties d'tabarnak! Haha! Vous pensez que c'est d'même, hein? Mais c'est pas d'même! Non monsieur! Non mes hosties d'tabarnak! Haha!
La dernière fois que je l'ai vue, elle était au pied d'un crucifié en bronze grandeur nature qui surplombe la rue Fusey à Sainte-Marie-Madeleine-du-Cap-de-la-Madeleine. Elle était là, à deux pas du Christ, et elle semblait lui dire quelque chose qui m'échappait, quelque chose qui visiblement la mettait en colère.
Un peu plus tard, je l'ai surprise devant la cathédrale de Trois-Rivières. Elle s'en prenait encore une fois au Bon Dieu.
-Hostie d'calice de ciboire! Ça va faire!!! Ça va faire!!! Mon hostie d'tabarnak toé!
Le soleil commençait un peu à chauffer. Elle portait pourtant un foulard autour des oreilles et de la bouche. Elle ignorait cette piètre chaleur qui nous poussait à croire que nous pouvions enfin enlever un fil ou deux en avril.
Je pourrais vous en raconter sur son compte une autre et deux autres. Malheureusement j'aurais bientôt fait le tour du sujet. Pour en savoir plus sur Claudette, vous n'avez qu'à vous promener tout le long de la 138, alias le Chemin du Roy, du pont Laviolette au Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap. Sûr que vous la verrez. À moins d'être aveugle. Ou sourd. Ou muet. Ou indifférent.
mercredi 1 avril 2015
Un poisson d'avril comme il ne s'en fait pas
Il est dans la tradition du premier jour d'avril de faire des farces. Certains se contentent d'accrocher un poisson de papier dans le dos des gens ou bien de coller une pellicule de plastique transparente sur le bol de la bécosse.*
Comme ces blagues sont éculées, vous comprenez qu'elles ne font pas l'affaire des plus inventifs.
Évidemment, les plus inventifs ne sont pas nécessairement les plus empathiques, autrement on n'aurait jamais inventé la bombe à neutrons.
Jos Borduas n'était pas nécessairement des plus inventif mais il savait se démarquer par sa volonté de ne pas répéter toujours les mêmes niaiseries. Il se renouvelait toujours, d'un séjour de prison à l'autre, pour que l'habitude n'ait jamais raison de lui.
L'histoire que je vous raconte s'est passée un premier avril, vous vous en doutez bien.
Jos Borduas profitait d'un moment de libération conditionnelle en avril 2012. Au lieu de savourer le printemps à l'extérieur des quatre murs de la prison, il se torturait l'esprit afin de commettre un poisson d'avril qui soit à la hauteur de ce qu'il croyait être, c'est-à-dire le roi des farceurs.
Une idée finit par lui venir à l'esprit après avoir bu, reniflé et fumé toutes sortes de psychotropes.
Il s'invita chez Jacques Normandeau, son grand chum de prison qui avait lui aussi été libéré depuis au moins trois mois. Pendant que Normandeau était aux toilettes, Jos Borduas dévissa les garde-fous du balcon de l'appartement de son grand chum. Quand Normandeau sortit des toilettes, il alla rejoindre son ami sur le balcon qui l'attendait avec une bière à la main et un joint dans l'autre.
-Christ de belle journée, hein? dit Normandeau à Jos Borduas.
-Oui m'sieur! Une journée pour s'accoter sur une rampe de balcon en buvant une p'tite broue!
Normandeau, comme de raison, s'appuya sur le garde-fou et piqua du nez jusqu'au sol, trois étages plus bas.
Il n'était pas tout à fait mort, mais plus tout à fait fort aussi.
Jos Borduas riait comme un damné.
-Poisson d'avril! qu'il disait entre ses rires entrecoupés. Poisson d'avril! Ha! Ha! Ha!
Franchement, personne n'a besoin d'amis comme Jos Borduas. Sa place est en prison pour tous les jours de l'année, et pas seulement le premier jour d'avril.
Tenez-vous toujours très loin de cet hostie d'cave.
_____
*bécosse= québécisme issu de back-house, un cabanon pour aller chier...
Comme ces blagues sont éculées, vous comprenez qu'elles ne font pas l'affaire des plus inventifs.
Évidemment, les plus inventifs ne sont pas nécessairement les plus empathiques, autrement on n'aurait jamais inventé la bombe à neutrons.
Jos Borduas n'était pas nécessairement des plus inventif mais il savait se démarquer par sa volonté de ne pas répéter toujours les mêmes niaiseries. Il se renouvelait toujours, d'un séjour de prison à l'autre, pour que l'habitude n'ait jamais raison de lui.
L'histoire que je vous raconte s'est passée un premier avril, vous vous en doutez bien.
Jos Borduas profitait d'un moment de libération conditionnelle en avril 2012. Au lieu de savourer le printemps à l'extérieur des quatre murs de la prison, il se torturait l'esprit afin de commettre un poisson d'avril qui soit à la hauteur de ce qu'il croyait être, c'est-à-dire le roi des farceurs.
Une idée finit par lui venir à l'esprit après avoir bu, reniflé et fumé toutes sortes de psychotropes.
Il s'invita chez Jacques Normandeau, son grand chum de prison qui avait lui aussi été libéré depuis au moins trois mois. Pendant que Normandeau était aux toilettes, Jos Borduas dévissa les garde-fous du balcon de l'appartement de son grand chum. Quand Normandeau sortit des toilettes, il alla rejoindre son ami sur le balcon qui l'attendait avec une bière à la main et un joint dans l'autre.
-Christ de belle journée, hein? dit Normandeau à Jos Borduas.
-Oui m'sieur! Une journée pour s'accoter sur une rampe de balcon en buvant une p'tite broue!
Normandeau, comme de raison, s'appuya sur le garde-fou et piqua du nez jusqu'au sol, trois étages plus bas.
Il n'était pas tout à fait mort, mais plus tout à fait fort aussi.
Jos Borduas riait comme un damné.
-Poisson d'avril! qu'il disait entre ses rires entrecoupés. Poisson d'avril! Ha! Ha! Ha!
Franchement, personne n'a besoin d'amis comme Jos Borduas. Sa place est en prison pour tous les jours de l'année, et pas seulement le premier jour d'avril.
Tenez-vous toujours très loin de cet hostie d'cave.
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*bécosse= québécisme issu de back-house, un cabanon pour aller chier...