On n'est jamais du côté des vainqueurs quand on a du coeur.
Le coeur suppose le courage.
Et quand on a du courage, on prend la rue.
***
On pense à tort, à droite comme à gauche, que l'histoire est modelée par les leaders. On s'invente des dieux, des traîtres et des félons selon les points de vue.
Pourtant, c'est la misère qui recrute pour la rue.
Au lieu de s'en prendre aux leaders, il faudrait s'en prendre à la misère en l'éradiquant.
Au lieu de mettre de l'argent dans les amphithéâtres et autres générateurs à enveloppes brunes bourrées de fric, il faudrait mettre de la bouffe dans le frigo.
La faim tient les discours les plus convaincants.
Elle recrute tous les jours.
Elle augmente sans cesse.
mardi 19 mars 2013
lundi 18 mars 2013
Manifestation contre la brutalité policière à Trois-Rivières
Aucune arrestation. Aucune vitre brisée.
Ça s'est passé vendredi dernier à Trois-Rivières.
Un reportage des amis de 3RTV, la webtélé communautaire TR-ès engagée...
L'aventure, c'est beaucoup trop de trouble pour Berlingot Gascon-Guay
On aurait souhaité qu'il s'avance sur ce terrain glissant et Berlingot, vrai comme il est là, ne nous livre jamais ses opinions tant religieuses que politiques.
-Y'a pas juste ça dans 'a vie! qu'il répète inlassablement aux curieux qui cherchent sciemment son talon d'Achille.
Berlingot Gascon-Guay sait fort bien que le monde abonde de mauvais hommes qui, à l'instar du Cardinal Richelieu, vous trouverait facilement une phrase de votre cru pour vous faire pendre. Évidemment qu'il ne le formule pas comme ça, mais on peut bien l'aider un peu à se sonner une raison d'être aussi tiède et insipide.
Berlingot ne dit et n'écrit jamais rien.
-Comme ça, se dit-il en lui-même, je ne me ferai pas pogner...
Évidemment, Berlingot ne manifeste jamais. Et pourquoi le ferait-il? Pour se faire tabasser par les policiers, hein? Et pour se faire fendre le crâne? Et ensuite être fiché partout comme un type mal fichu tout juste bon à se faire varloper?
-Le moins qu'on en fait, le mieux c'est... ajoute-t-il à ses rares propos pour justifier sa passivité ou bien son inertie. Et je ne parle même pas de son aboulie tout aussi abyssale.
-That's the way it is...
Après avoir dit ça, il bascule son fauteuil de paresseux et il fixe du regard un point quelconque, comme un clou sur un mur ou bien une brindille.
Et le temps passe, s'écoule, disparaît et ne revient plus.
Berlingot Gascon-Guay est bien dans son néant.
N'allez surtout pas le déranger.
L'aventure, c'est beaucoup trop de trouble.
mercredi 13 mars 2013
La flemme de me lire jusqu'au bout
Je vais y aller à la bonne franquette ce matin. Depuis ce temps que l'on se connaît, je ne vais tout de même pas nous gêner.
Il y a un maelstrom de pensées qui me viennent en mémoire et, mauvais capitaine, mon navire prend l'eau dans les virages, mais bon, je présume que j'ai encore bonne coque et que la terre n'est pas si plate qu'on ne le croie.
On peut changer le monde, même si l'on prétend vouloir n'y rien changer. Il va changer, quoi que l'on fasse. Il n'attend après personne, le monde.
Ce qui me permet de sauter facilement par-dessus toutes les indignations et les tempêtes de la vie sociale. Je combats patiemment l'injustice sociale sans mesurer mes moyens. Je monte au front de temps à autres. Et je bats retraite, comme tout le monde, pour refaire mes forces dans un monde spirituel qui me repose de tout ce qui est plat et aplatventrisme.
***
Cela dit, je viens de terminer une ou trois toiles que je me permettrai de vous montrer dès que j'aurai le temps de les numériser.
Il y a entre autres un tableau qui représente une mascotte en train de se faire battre par des enfants dans un centre commercial. La mascotte est un lapin. Un ruban rose indique qu'il s'appelle Jeannot.
Je ne sais pas si c'est de l'Ars Magna. Il y en a qui font tellement mieux avec Photoshop qu'on se demande pourquoi faudrait-il faire vibrer les pinceaux comme s'il s'agissait des poils d'un archet. Le violon, la peinture, c'est tellement classique... Alors que Photoshop, waaaa, tout le monde peut en faire les deux doigts dans le nez. Comme Buddy Holly and the Crickets. Il ne suffit que d'être branché et, hop! La gloire t'appelle comme une plume dans le cul. Les revues d'art, d'or et d'argent parlent de vos nullités. Et c'est tiguidou comme ça puisque là où l'on travaille trop fort on oublie le plaisir de réussir sans efforts...
***
J'en viens à parler de Edgar Allan Poe. Je l'ai souvent lu sans rien n'y comprendre. Je me suis toujours demandé si Charles Baudelaire l'a traduit seulement pour se mettre lui-même en valeur dans sa préface. De même que Flaubert était Madame Bovary, on croirait que Baudelaire est Poe. Le Poe ivrogne et génial, celui qui manie la magie des mots et le fantastique. Je suis en train de relire Poe et, malheureusement, je n'accroche pas. Je m'en veux presque de ne pas accrocher. Poe est sensé être un génie de la littérature. Et je le lis avec le sentiment de m'emmerder...
***
Vous croyez que j'écris n'importe quoi, seulement pour que cela ressemble à une bonne franquette, hein?
C'est que je ne vous ai pas encore parlé de Al Barrett. Ce gars-là fait un peu de tout, dont de la guitare, de la bédé et plein d'autres trucs. Et il produit sans cesse depuis des années. C'est un inlassable artiste que je croise surtout dans les manifs, puisque nous avons les mêmes manies.
Al Barrett vient de lancer Atomman en français. C'est ici. Al Barrett, alias Alain Blanchette, est un artiste originaire de Cap-de-la-Madeleine. Il est sur le ouèbe depuis un bon bout de temps et présente fièrement une production indépendante.
Sa musique est hallucinante, mais je ne sais pas s'il a un lien vers elle. Imaginez-la...
***
J'ai fait le tour de mon univers mental ce matin. C'est le printemps. Enfin, on y est presque.
Je vous laisse. Je ne vous souhaite pas la flemme de m'avoir lu jusqu'au bout.
Il y a un maelstrom de pensées qui me viennent en mémoire et, mauvais capitaine, mon navire prend l'eau dans les virages, mais bon, je présume que j'ai encore bonne coque et que la terre n'est pas si plate qu'on ne le croie.
On peut changer le monde, même si l'on prétend vouloir n'y rien changer. Il va changer, quoi que l'on fasse. Il n'attend après personne, le monde.
Ce qui me permet de sauter facilement par-dessus toutes les indignations et les tempêtes de la vie sociale. Je combats patiemment l'injustice sociale sans mesurer mes moyens. Je monte au front de temps à autres. Et je bats retraite, comme tout le monde, pour refaire mes forces dans un monde spirituel qui me repose de tout ce qui est plat et aplatventrisme.
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Cela dit, je viens de terminer une ou trois toiles que je me permettrai de vous montrer dès que j'aurai le temps de les numériser.
Il y a entre autres un tableau qui représente une mascotte en train de se faire battre par des enfants dans un centre commercial. La mascotte est un lapin. Un ruban rose indique qu'il s'appelle Jeannot.
Je ne sais pas si c'est de l'Ars Magna. Il y en a qui font tellement mieux avec Photoshop qu'on se demande pourquoi faudrait-il faire vibrer les pinceaux comme s'il s'agissait des poils d'un archet. Le violon, la peinture, c'est tellement classique... Alors que Photoshop, waaaa, tout le monde peut en faire les deux doigts dans le nez. Comme Buddy Holly and the Crickets. Il ne suffit que d'être branché et, hop! La gloire t'appelle comme une plume dans le cul. Les revues d'art, d'or et d'argent parlent de vos nullités. Et c'est tiguidou comme ça puisque là où l'on travaille trop fort on oublie le plaisir de réussir sans efforts...
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J'en viens à parler de Edgar Allan Poe. Je l'ai souvent lu sans rien n'y comprendre. Je me suis toujours demandé si Charles Baudelaire l'a traduit seulement pour se mettre lui-même en valeur dans sa préface. De même que Flaubert était Madame Bovary, on croirait que Baudelaire est Poe. Le Poe ivrogne et génial, celui qui manie la magie des mots et le fantastique. Je suis en train de relire Poe et, malheureusement, je n'accroche pas. Je m'en veux presque de ne pas accrocher. Poe est sensé être un génie de la littérature. Et je le lis avec le sentiment de m'emmerder...
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Vous croyez que j'écris n'importe quoi, seulement pour que cela ressemble à une bonne franquette, hein?
C'est que je ne vous ai pas encore parlé de Al Barrett. Ce gars-là fait un peu de tout, dont de la guitare, de la bédé et plein d'autres trucs. Et il produit sans cesse depuis des années. C'est un inlassable artiste que je croise surtout dans les manifs, puisque nous avons les mêmes manies.
Al Barrett vient de lancer Atomman en français. C'est ici. Al Barrett, alias Alain Blanchette, est un artiste originaire de Cap-de-la-Madeleine. Il est sur le ouèbe depuis un bon bout de temps et présente fièrement une production indépendante.
Sa musique est hallucinante, mais je ne sais pas s'il a un lien vers elle. Imaginez-la...
***
J'ai fait le tour de mon univers mental ce matin. C'est le printemps. Enfin, on y est presque.
Je vous laisse. Je ne vous souhaite pas la flemme de m'avoir lu jusqu'au bout.
lundi 11 mars 2013
Rouge
La vague rouge s'en vient. Elle est là, tout près et prête à submerger les idées fixes des conservateurs et des péquistes. Le vieux monde n'a pas tenu son pari de servir et de protéger tout le monde. Le nouveau promet à tout le moins de nous débarrasser d'une certaine élite corrompue qui nous vole à tour de bras avec la complicité des politiciens de métier.
Le drapeau rouge a flotté sur l'Assemblée Nationale du Québec l'an dernier. Je ne sais pas qui a fait ça. Mais le symbole parlait fort. De même que les carrés et les drapeaux rouges frappaient fort l'imagination lors des plus grosses manifs de toute l'histoire du Québec. Le Printemps Érable est d'ores et déjà devenu le Printemps Durable. Le Québec est passé du bleu patriotard au rouge révolutionnaire.
Les Québécois ont toujours été à genoux, sauf l'an dernier.
L'an dernier, ils étaient debouts, sans chef, et libres.
Les bouts de chiffons rouges qu'ils portaient étaient les mêmes que portaient le peuple français matraqué par la garde royale ou républicaine.
Quand le marquis de La Fayette violentait son peuple, par exemple, il faisait hisser le drapeau rouge. Cela signifiait que les troupes allaient foncer sans faire de quartier. Les manifestants, parmi lesquels on trouve toujours des humoristes, adoptèrent le drapeau rouge comme symbole de leur résistance face aux policiers, gendarmes et autres empêcheurs de liberté.
Ce drapeau rouge n'est pas la propriété exclusive de Staline. Loin de là.
Il demeure un symbole fort de la résistance et de l'émancipation du peuple. On ne devrait pas en avoir honte, même s'il s'est parfois couvert de boue pour servir les vils intérêts de petits potentats cannibales.
L'an passé, j'étais un carré rouge. Je le suis encore cette année. Et j'attends patiemment la vague rouge, le tsunami démocratique, les lendemains qui ne déchantent plus.
vendredi 8 mars 2013
La première leçon d'amour de Ernst Wadek
Ernst Wadek n'avait jamais connu l'amour. D'aussi loin qu'il se souvienne, il n'avait jamais ressenti ce qu'on doit probablement appeler l'amour. L'amour qui s'apparentait à de l'ivresse mentale ou bien de la folie pure pour Ernst. Ce qui fait qu'il tenait l'amour pour une illusion. Et comme l'amour ne venait pas vers lui, tant psychiquement que physiquement, Ernst se mettait à crâner sur les beaux sentiments tout autant que sur la Création dans son ensemble.
-Ha! Ha! Vous me faites rire avec vos histoires d'amour! Tout le monde se déteste! Tout le monde s'entretue! Tout le monde se découpe en rondelles!
Ernst voulait aussi dire que personne ne s'intéressait vraiment à lui, mais ça ne se disait pas.
Ernst n'était pourtant pas tout à fait laid. Et même qu'il y a des laids qui avaient nettement plus de succès avec les filles, tout simplement parce qu'ils se croyaient beaux quoi qu'on en médise. Donc, Ernst n'avait pas d'excuses pour vivre ainsi à l'écart de l'amour. Il devait donner à la cause, comme tout le monde, nah!
Et l'amour finit par lui tomber dessus sous la forme d'une fille qui lui disait bonjour tous les jours, une fille qui attendait l'autobus avec lui. C'était même plutôt une femme. Elle était étudiante et faisait des travaux de couture à la maison pour joindre les deux bouts. Elle avait remarqué que notre pauvre Ernst ne savait pas quoi faire de ses bas de pantalon. Il en faisait de gros renforts de matelots plutôt moches. Elsie, puisqu'elle s'appelait ainsi, était une fille beaucoup trop gentille qui souriait et disait bonjour à tout le monde. Ernst croyait qu'elle ne souriait qu'à lui. Et ça lui montait à la tête d'autant plus qu'elle lui avait donné sa carte, avec son numéro de téléphone, au cas où il voudrait faire coudre ses bas de pantalon. Et depuis il ne voyait plus que ses doigts parcourir chaque couture de son pantalon. Et ça le rendait écumant de passion.
Arrivé chez-lui, Ernst contempla longtemps la carte d'affaires de la gentille Elsie. Puis il la renifla, espérant capter un parfum d'elle. Et enfin, il lui donna un doux baiser, puis un baiser plus féroce et quelque chose d'encore moins racontable pour nos chastes oreilles.
Il se mit dans l'idée de lui déclarer son amour. Si, si, son amour... Ernst ressentait l'amour pour la première fois de sa vie. Un amour tellement intense qu'il ne pouvait faire autrement que de téléphoner Elsie pour lui dire simplement combien il l'aimait...
Évidemment, ce n'est pas la meilleure stratégie qui soit pour une conquête. L'inexpérience de notre pauvre Ernst était manifeste. Et pour amoindrir cette inexpérience, quoi de mieux que de boire un bon coup.
Ernst cala d'un trait une bonne gorgée de Capitaine Morgan. Puis une autre. Et encore une autre. Il buvait comme un trou, la main tremblante devant le téléphone, incapable de composer le moindre numéro. Il continua de boire, encore et encore, puis il perdit conscience, avec la carte d'affaires de Elsie toujours bien en main, comme s'il s'agissait d'un talisman.
Douze heures passèrent. C'était un samedi matin ensoleillé. Ernst se réveilla dans ses vomissures, une bouteille vide devant lui.
Il se sentait tellement merdique qu'il conclut que c'était maintenant ou jamais.
Il s'empara du téléphone et composa le numéro de téléphone de Elsie: 8-1-9-3-7-6...
Cela sonna au bout du fil. La voix de Elsie lui répondit.
-Bonjour, c'est Elsie. Que puis-je faire pour vous?
-Bon...jour... c'est Ernst Wadek...
-Ernst quoi?
-Ernst Wadek... Nous nous sommes rencontrés à l'arrêt d'autobus hier matin... Tu... tu... tu m'as remis ta carte d'affaires... pour mon bord de pantalon...
-Ah oui! J'me souviens d'toi... T'as des gros renforts de matelots, haha! Tu veux que je t'arrange ça mon ami?
-He... ben... C'est parce que j'veux... ben...
-Quoi?
-Je voulais te dire que... que je t'aime.
-...
-Je t'aime... Je t'aime Elsie!!!
C'était la première fois que Ernst disait ça à une femme, voire à un être humain.
C'était comme si la tête allait lui exploser. Il s'étonnait lui-même de lui dire ça. Et il se sentait épuisé comme un marathonien rien que d'y penser.
-Bon ben... excuse-moé de t'avoir dit ça... dut conclure Ernst quand il comprit que Elsie ne savait pas trop quoi lui répondre.
-J'ai un chum moi... qu'elle finit par lui dire avant que de raccrocher. Bye...
-Bye...
C'était comme si elle le tuait.
Ernst raccrocha le téléphone, ramassa sa bouteille de Capitaine Morgan et nettoya son plancher.
On n'allait pas le reprendre de sitôt dans une maudite histoire d'amour!
-Ha! Ha! Vous me faites rire avec vos histoires d'amour! Tout le monde se déteste! Tout le monde s'entretue! Tout le monde se découpe en rondelles!
Ernst voulait aussi dire que personne ne s'intéressait vraiment à lui, mais ça ne se disait pas.
Ernst n'était pourtant pas tout à fait laid. Et même qu'il y a des laids qui avaient nettement plus de succès avec les filles, tout simplement parce qu'ils se croyaient beaux quoi qu'on en médise. Donc, Ernst n'avait pas d'excuses pour vivre ainsi à l'écart de l'amour. Il devait donner à la cause, comme tout le monde, nah!
Et l'amour finit par lui tomber dessus sous la forme d'une fille qui lui disait bonjour tous les jours, une fille qui attendait l'autobus avec lui. C'était même plutôt une femme. Elle était étudiante et faisait des travaux de couture à la maison pour joindre les deux bouts. Elle avait remarqué que notre pauvre Ernst ne savait pas quoi faire de ses bas de pantalon. Il en faisait de gros renforts de matelots plutôt moches. Elsie, puisqu'elle s'appelait ainsi, était une fille beaucoup trop gentille qui souriait et disait bonjour à tout le monde. Ernst croyait qu'elle ne souriait qu'à lui. Et ça lui montait à la tête d'autant plus qu'elle lui avait donné sa carte, avec son numéro de téléphone, au cas où il voudrait faire coudre ses bas de pantalon. Et depuis il ne voyait plus que ses doigts parcourir chaque couture de son pantalon. Et ça le rendait écumant de passion.
Arrivé chez-lui, Ernst contempla longtemps la carte d'affaires de la gentille Elsie. Puis il la renifla, espérant capter un parfum d'elle. Et enfin, il lui donna un doux baiser, puis un baiser plus féroce et quelque chose d'encore moins racontable pour nos chastes oreilles.
Il se mit dans l'idée de lui déclarer son amour. Si, si, son amour... Ernst ressentait l'amour pour la première fois de sa vie. Un amour tellement intense qu'il ne pouvait faire autrement que de téléphoner Elsie pour lui dire simplement combien il l'aimait...
Évidemment, ce n'est pas la meilleure stratégie qui soit pour une conquête. L'inexpérience de notre pauvre Ernst était manifeste. Et pour amoindrir cette inexpérience, quoi de mieux que de boire un bon coup.
Ernst cala d'un trait une bonne gorgée de Capitaine Morgan. Puis une autre. Et encore une autre. Il buvait comme un trou, la main tremblante devant le téléphone, incapable de composer le moindre numéro. Il continua de boire, encore et encore, puis il perdit conscience, avec la carte d'affaires de Elsie toujours bien en main, comme s'il s'agissait d'un talisman.
Douze heures passèrent. C'était un samedi matin ensoleillé. Ernst se réveilla dans ses vomissures, une bouteille vide devant lui.
Il se sentait tellement merdique qu'il conclut que c'était maintenant ou jamais.
Il s'empara du téléphone et composa le numéro de téléphone de Elsie: 8-1-9-3-7-6...
Cela sonna au bout du fil. La voix de Elsie lui répondit.
-Bonjour, c'est Elsie. Que puis-je faire pour vous?
-Bon...jour... c'est Ernst Wadek...
-Ernst quoi?
-Ernst Wadek... Nous nous sommes rencontrés à l'arrêt d'autobus hier matin... Tu... tu... tu m'as remis ta carte d'affaires... pour mon bord de pantalon...
-Ah oui! J'me souviens d'toi... T'as des gros renforts de matelots, haha! Tu veux que je t'arrange ça mon ami?
-He... ben... C'est parce que j'veux... ben...
-Quoi?
-Je voulais te dire que... que je t'aime.
-...
-Je t'aime... Je t'aime Elsie!!!
C'était la première fois que Ernst disait ça à une femme, voire à un être humain.
C'était comme si la tête allait lui exploser. Il s'étonnait lui-même de lui dire ça. Et il se sentait épuisé comme un marathonien rien que d'y penser.
-Bon ben... excuse-moé de t'avoir dit ça... dut conclure Ernst quand il comprit que Elsie ne savait pas trop quoi lui répondre.
-J'ai un chum moi... qu'elle finit par lui dire avant que de raccrocher. Bye...
-Bye...
C'était comme si elle le tuait.
Ernst raccrocha le téléphone, ramassa sa bouteille de Capitaine Morgan et nettoya son plancher.
On n'allait pas le reprendre de sitôt dans une maudite histoire d'amour!
mercredi 6 mars 2013
L'histoire de l'homme qui ne sait pas tout
C'est l'histoire de Jocelyn, alias l'homme qui ne sait pas tout.
C'est un gars sans histoire qui passe le plus clair de son temps à végéter. Jocelyn est sans métier et détient un papier du secondaire en horticulture, un domaine dans lequel il n'a jamais travaillé.
Jocelyn venait tout juste de finir l'école, en 1987, lorsqu'il fut embauché par l'usine de planchers de bois Canadian Home Inc. Elle ferma ses portes quinze ans plus tard pour laisser Jocelyn et ses huit cents autres camarades dans la dèche.
Jocelyn a un triple menton parce qu'il ne travaille plus depuis ce temps-là, ce qui remonte déjà à plus de dix ans. Vous devinerez que Jocelyn entame sa quarantaine. Et que son triple menton est la conséquence de tout ce pain blanc passé date que l'on donne dans les banques alimentaires.
On n'engraisse pas les cochons à l'eau claire. Et Jocelyn, justement, en a assez de se sentir comme un cochon dont on ne remplit l'auge que pour le calmer un peu puisque personne n'envisagerait de consommer du Jocelyn.
Ce qui fait que Jocelyn est seul, seul comme un rat, nourri au pain blanc, à la banque alimentaire du coin, par des bonnes soeurs qui lui donnent aussi des chapelets et des prières à Sainte-Barbe-de-je-t'encule.
Il n'y a pas de femme dans la vie de Jocelyn autrement que sur des images ou bien des vidéos.
Et il se dit lui-même l'homme qui ne sait pas tout.
-J'sais pas tout! qu'il crie souvent sans que personne ne le lui reproche puisque tout le monde ne sait rien.
Et Jocelyn peut vous dire ça sur tous les sujets: politique, religion, divertissement, drague dans les bars.
-Je suis un gars qui ne sait pas tout. Devrais-je m'en excuser? qu'il se réplique à lui-même puisque personne ne l'écoute vraiment, étant seul comme un rat à manger du pain blanc bénit, à survivre comme un cochon dans ces écuries d'Augias où aucun rayon de soleil ne pénètre de crainte de se salir.
S'il savait au moins quelque chose, Jocelyn, il pourrait faire semblant d'avoir un pouvoir, feindre une magie dans ses rapports sociaux qui lui permettrait de devenir caissier dans un dépanneur ou bien pdg d'une grande banque.
Mais non, Jocelyn ne sait rien du tout.
Et ce n'est pas tant qu'il s'en vante que c'est une forme de nihilisme qui est encore plus nihiliste que le nihilisme lui-même.
Il n'y a rien de philosophique dans la propension de Jocelyn à ne rien savoir.
Jocelyn n'a aucune curiosité.
Et il veut seulement qu'on lui crisse la paix.
-Ej' crois plus en rien de toutes ces affaires-là! On s'fait tout l'temps fourrer dans 'a vie. Pis moé, ben j'va's dire comme c'te gars, moé j'sais pas toutte!
mardi 5 mars 2013
À la redécouverte de Guy de Maupassant
Je relis Guy de Maupassant ces temps-ci. Et c'est fou comme une relecture peut changer le point de vue sur un auteur. L'âge intervient aussi dans le processus de relecture. Je l'ai lu à vingt ans avec ma bonne vieille technique de rat de bibliothèque qui consistait à scanner les livres dans ma tête. Je ne retenais pas tout, évidemment, mais il en restait toujours bien un petit quelque chose.
Je n'avais jamais lu Boule de suif, l'histoire d'une putain qui fuit la guerre parmi une bande de richards qui la regardent de haut, alors qu'elle les nourrit quand il ne trouve rien à manger à cent lieues à la ronde. Boule de suif qui doit ensuite offrir son corps à un officier allemand pour permettre à tous les richards de quitter le cabaret où ils sont placés sous garde. Et les richards de lui dire que ce n'est rien d'offrir son corps puisqu'elle le fait à tous les jours. Et les richards qui continuent de la regarder de haut ensuite parce que c'est une pute qui offre son corps à tout venant... Cette Boule de suif n'est pas ce que j'attendais de cette nouvelle. Je pensais que c'était un vague récit sur la guerre... Et je ne le lisais pas, bêtement. Jusqu'à ce que je tombe dessus et le lise avec ravissement.
J'ai replongé dans Le Horla et ses autres nouvelles, dont L'Auberge, un vrai petit bijou de littérature. C'est Le Horla qui m'a de toutes ses nouvelles le moins intéressé et c'est curieusement celle que l'on véhicule le plus dans les cours de littérature pour une raison qui m'échappe. Le Trou et Clochette lui sont nettement supérieures.
J'aime le ton acerbe de Maupassant. Sa critique sociale est précise et juste comme le scalpel du chirurgien. C'est subtil et efficace. Comme une estampe japonaise.
Puisque Guy de Maupassant est mort il y a plus de cent ans, toutes ses oeuvres sont disponibles gratuitement sur l'Internet. Je puis donc me permettre de vous offrir ce petit cadeau.
lundi 4 mars 2013
Les révolutions russes, les Spartakistes et le Printemps Érable...
Il y a eu deux révolutions russes en 1917. La première, celle de février, mena à l'abdication du tsar Nicolas II et à l'instauration de la république. Les libéraux, les sociaux-démocrates et autres socialistes dits modérés prirent la tête de l'État et du pré-parlement. Ils continuèrent la politique du tsar et optèrent pour la poursuite de la guerre tandis que des tas de déserteurs armés affluaient dans les villes et les villages.
Les conseils ouvriers avaient la balance du pouvoir, dans la mesure où ils occupaient la rue que les socialistes dits modérés souhaitaient ramener à l'ordre en s'alliant avec les éléments les plus réactionnaires de l'armée en faveur de la guerre.
Le peuple voulait du pain et souhaitait aussi la paix. C'était le programme des bolcheviques, un petit groupe de rien de tout, qui petit à petit, s'est emparé des soviets, les conseils ouvriers, pour finalement commettre un coup d'État au moment où les socialistes dits modérés voulaient les rayer de la carte.
La révolution d'Octobre devint inévitable. Les déserteurs revinrent du front pour mener la guerre civile. Le vieux monde n'a pas voulu se délivrer de son avidité et de ses guerres. Le nouveau monde accoucha dans la douleur.
***
Un peu plus tard, en Allemagne, les socialistes dits modérés matraquaient les Spartakistes, des tas de pauvres gens qui réclamaient un monde plus juste et moins servile. Le vieux monde résista. Et il accoucha d'un monstre: le national-socialisme... La gauche efficace s'était rendue dégoûtante en plus de se réfugier dans des tours dorées.
***
La semaine dernière, le Parti Québécois a fait matraquer le peuple. Le sang du peuple a encore coulé dans la rue. Ces sociaux-démocrates dits modérés, cette gauche dite efficace: cela m'inquiète pour l'avenir.
Je souhaite que nous accouchions d'un nouveau monde parmi des tas de sages-femmes et de sages-hommes qui sauront nous éloigner de la douleur.
Mais je ne me fais pas trop d'illusions sur la nature humaine.
Personne ne va lâcher le morceau sans combattre.
Voilà pourquoi la lutte continue.
Je la poursuis avec les idéaux de Tolstoï bien plus qu'avec ceux de Lénine. Mais je ne rejette pas toute la faute chez ceux et celles qui furent pris dans la tempête.
Les conseils ouvriers avaient la balance du pouvoir, dans la mesure où ils occupaient la rue que les socialistes dits modérés souhaitaient ramener à l'ordre en s'alliant avec les éléments les plus réactionnaires de l'armée en faveur de la guerre.
Le peuple voulait du pain et souhaitait aussi la paix. C'était le programme des bolcheviques, un petit groupe de rien de tout, qui petit à petit, s'est emparé des soviets, les conseils ouvriers, pour finalement commettre un coup d'État au moment où les socialistes dits modérés voulaient les rayer de la carte.
La révolution d'Octobre devint inévitable. Les déserteurs revinrent du front pour mener la guerre civile. Le vieux monde n'a pas voulu se délivrer de son avidité et de ses guerres. Le nouveau monde accoucha dans la douleur.
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Un peu plus tard, en Allemagne, les socialistes dits modérés matraquaient les Spartakistes, des tas de pauvres gens qui réclamaient un monde plus juste et moins servile. Le vieux monde résista. Et il accoucha d'un monstre: le national-socialisme... La gauche efficace s'était rendue dégoûtante en plus de se réfugier dans des tours dorées.
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La semaine dernière, le Parti Québécois a fait matraquer le peuple. Le sang du peuple a encore coulé dans la rue. Ces sociaux-démocrates dits modérés, cette gauche dite efficace: cela m'inquiète pour l'avenir.
Je souhaite que nous accouchions d'un nouveau monde parmi des tas de sages-femmes et de sages-hommes qui sauront nous éloigner de la douleur.
Mais je ne me fais pas trop d'illusions sur la nature humaine.
Personne ne va lâcher le morceau sans combattre.
Voilà pourquoi la lutte continue.
Je la poursuis avec les idéaux de Tolstoï bien plus qu'avec ceux de Lénine. Mais je ne rejette pas toute la faute chez ceux et celles qui furent pris dans la tempête.