samedi 31 janvier 2009
CARNAVAL! MARDI GRAS! CARNAVAL!
-Carnaval Mardi Gras! Carnaval! À Québec c'est toutte un festival! chante un groupe de trois jeunes saoulons de cinq pieds huit pouces.
-Touuuuuuuu! fait l'un d'entre eux en soufflant dans sa cornette.
C'est le soir de la Parade. Je m'en vais travailler à l'hôpital. Je n'ai pas l'esprit à la fête.
-C'est le carnaval man! Le carnaval! me dit l'un des trois gars de cinq pieds huit pouces. Bon carnaval man!
-Bon carnaval, ouais, que je lui réponds, pour m'en débarrasser.
-Touuuuu! souffle l'autre cave dans sa cornette.
En descendant vers la rue St-Jean, juste en bas de Grande-Allée, je croise l'une des tentes installées spécialement pour ceux qui souffrent d'un «malaise» pendant le carnaval. Par malaise, entendons-nous. Les trois cents civières sous cette tente, avec une petite chaudière pour vomir à côté, ça ne trompe personne.
C'est l'un des dessoûloirs installés par les autorités pour permettre à la populace de passer un beau carnaval. On ramasse des ivrognes à la pelle, le soir de la Parade, le cul effouaré dans les bancs de neige, par moins vingt Celsius, avec l'humidité du fleuve Magtogoek qui te rentre dans le fin fond des os. Et on les débarque là, sous la tente, cuvant leur alcool sur leur civière, avec une petite chaudière à portée de main pour dégobiller. Ça les empêche de mourir d'hypothermie, les sales cons.
Un peu plus loin, sur le boulevard René-Lévesque, je croise un type qui se pisse dessus. Il a beau visé le parapet de béton que le vent lui renvoie sa pisse sur lui. Le mégot au bord des lèvres, l'air ahuri, il chante lui aussi carnaval, carnaval et je poursuis mon chemin. Salut bonhomme.
Finalement, j'arrive sur la rue St-Jean et je me poste à mon arrêt d'autobus. J'attends cinq minutes. Puis je vois le bus qui tangue à gauche et à droite en fonçant vers moi.
Le bus est bondé de fêtards. D'habitude, il est plutôt vide vers onze heures et demie. C'est le soir de la Parade. Le bus dépasse largement la pleine capacité. Et c'est le chaos total dans le bus. Les gens hurlent.
-Carnaval! Mardi Gras! Carnaval!
-Touuuuuu! fait un type de cinq pieds huit pouces avec sa cornette.
Et c'est pas fini. En voilà un qui vomit pour se faire de l'espace... Personne ne veut tremper ses pieds là-dedans, évidemment. Et le gus qui a vomi, vingt ans, casquette de baseball, barbe de trois jours, se met à avoir chaud, bien entendu.
-Hostie j'ai chaud man j'ai chaud!
-Ouvre la fenêtre man!
-A s'rouvre pas la fenêtre man!
-Ben arrache la fenêtre de sécurité man!
Et là ils s'y prennent à vingt pour arracher les fenêtres du bus, en soulevant le levier de sécurité et en gossant avec les fenêtres. Puis ils arrachent aussi celles de l'autre côté. Beaucoup d'air frais rentre dans le bus. De l'air plus froid que frais. Du coup, tout le monde grelotte.
-Saint-Augustin-de-Desmaures! se met à crier l'un des vickings du groupe.
-Saint-Augustin-de-Desmaures tabarnak! que lui répondent les gus qui viennent d'arracher les fenêtres. Probablement des gus de Saint-Augustin-de-Desmaures, en banlieue de Québec. Comme quoi il n'y a pas qu'à la Manicouagan que l'on s'ennuie.
Le chauffeur d'autobus ne fait rien. C'est le Carnaval de Québec. Il en a vu d'autres.
Moi aussi je ne fais rien. Je suis tout vêtu de blanc, comme l'exige mon poste de préposé aux bénéficiaires. Je porte les couleurs de la paix, les couleurs du carnaval... Et puis je ne suis pas saoul.
-Carnaval! Mardi gras! Carnaval!
-Saint-Augustin-de-Desmaures tabarnak!
-À Québec c'est toutte un festival!
j'aimerais bien une cornette pour faire tuuuut!
RépondreEffacerJ'ai déjà fait des cochonneries dans un parking à Saint-Augustin-des-Maures. Et même plus, mais je ne me rappelle plus.
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