mercredi 24 décembre 2008

PEUPLE DEBOUT, CHANTE TA DÉLIVRANCE!

«Pourquoi je suis si sage? Pourquoi j'en sais si long? Pourquoi j'écris de si bons livres?» Ce sont des questions auxquelles tenta de répondre Friedrich Nietzsche dans son traité intitulé Ecce homo.

Je relis ça comme si je lisais des jokes de Claude Blanchard, avec le sourire en coin. Nietzsche se présente d'une manière pour le moins narcissique. C'est vrai qu'il était au seuil de la folie à cette époque.

Nietzsche était sur le point de crier comme un fou, parmi les passagers d'un train, pour ensuite sombrer dans le mutisme le plus minéral.

L'homme qui se croyait un surhomme se ferait désormais torcher le cul par des infirmières et gaver comme une oie. Gagagougou. L'ascenseur ne se rendrait plus au cerveau. Et du coup, ce Nietzsche ne me semble que plus humain, trop humain.

Le philosophe de la volonté de puissance vantait le Code de Manou sur lequel repose le système de castes aux Indes, selon lequel tu viens au monde trou-du-cul pour mourir trou-du-cul et noble pour mourir noble. On a déjà vu ça ailleurs. C'est une des maladies de la civilisation. Comme quoi le confort n'a pas que des avantages.

Évidemment Nietzsche se croyait noble, de la noblesse polonaise par ailleurs puisqu'il détestait tout ce qui était allemand, d'où sa fascination pour les cultures de France et d'Italie ainsi que pour la cuisine méditérannéenne. Nietzsche pensait aussi par l'estomac, voyez-vous.

Quoi qu'il en soit, Nietzsche a fini ses jours en se faisant torcher le cul par ses pairs humains qu'il aurait pu classer dans la catégorie des trous-du-cul, selon l'idée qu'il se faisait du monde.

Ce qui fait que Nietzsche n'était pas noble au sens où je l'entends. Avoir passer toute sa vie à chier sur les sous-hommes, à vanter quelque dépassement de soi qui est aussi un dépassement de l'intelligence, à proprement parler une folie, je ne crois pas que cela soit digne de quoi que ce soit, à moins d'avoir le coeur au mauvais endroit.

Être un bon écrivain ne suffit pas. Nietzsche avait une plume. Mais il n'avait pas de coeur. Ou si peu. D'où les piètres qualités de sa philosophie, une décadence de l'esprit, une forme de nihilisme qui s'ignore, un abîme de rancoeur et de ressentiment qui ne pouvait être pris au sérieux que par quelques drogués et alcooliques vaguement baudelairesques. Ça, une philosophie? Vous êtes sérieux, là? Rancoeur, ressentiment, petitesse d'âme... J'ai lu Nietzsche, presque tout Nietzsche, et je sais de quoi je parle pour avoir moi-même souffert de nietzschéisme. À 18 ans, je me croyais un aigle. Et je n'étais qu'un con. Un drogué alcoolique vaguement baudelairesque.

Le coeur est tout ce qui importe.

Dans tout, même dans les arts.

***

Je tiens en plus haute estime les écrivains russes. Pourquoi? Parce que c'est la littérature la plus spirituelle qu'ait produite l'humanité. Le coeur y occupe toujours la première place, même chez les auteurs les plus nihilistes, comme Tchékhov ou Tourguéniev.

Je place au sommet Mikhaïl Boulgakov et Fedor Dostoïevski. Le premier pour son monde fantaisiste et expressionniste. Le second pour sa profonde connaissance du coeur et de l'âme humaine. Ils ont accompli quelque chose de plus grand que tout ce que Nietzsche a pu accomplir en ceci qu'ils aimaient profondément les gens autour d'eux, ce qui se sent dans chaque phrase et nous transporte vers une conception nettement plus idéale de notre rapport avec le monde.

***

Pourquoi j'écris? Oh! pour pas grand' chose.

J'écris pour répondre à des questions que je ne me pose même pas. J'écris pour mieux me connaître. J'écris pour rendre hommage aux gens autour de moi, à ma façon, comme si tout un chacun, même la plus vulgaire crotte de nez, méritait d'occuper le devant de la scène, au moins une fois dans sa putain de vie. Parce que chacun a droit à son numéro.

Et je ne dis pas ça pour me placer dans la foulée des propos de Andy Warhol, selon qui tout le monde allait avoir son cinq minutes de gloire. Je dis ça comme Steinbeck aurait pu le dire, quoi. La vie, je vois ça comme un party des Fêtes. Chacun son tour de pousser sa chanson et d'être le plus grand, les sales comme les propres, les petits comme les grands.

Le rédempteur, semble-t-il, a brisé toutes entraves.

Il voit un frère où n'était qu'un esclave.

L'amour unit ceux qu'enchaînait le fer...

Relisez bien les paroles du Minuit Chrétiens.

Ça ne se finit pas par Peuple à genoux. Mais par le refrain Peuple debout, chante ta délivrance. Normal. L'auteur Adolphe Adam était un communard protestant. Ce qui fait qu'on devait chanter cette chanson avant le début de l'office religieux chez les catholiques, compte tenu que ce n'était pas assez vaticanesque...

PEUPLE DEBOUT, CHANTE TA DÉLIVRANCE!

Joyeux Noël, tiens.

12 commentaires:

  1. Monsieur Bouchard
    Je me suis pris un compte de bloggeur exprés pour pouvoir vous répondre. je m'attendais à une dyatribe anti-cato assez facile comme on en connaît tant, mais non au lieu de cela votre propos est fort juste. Cet aprés-midi j'en suis justement à écouter le Minuit chrétien de Richard verreau, las plus célébre des versions jamais enregistrée de ce classique du Canada-français. Oui un peuple debout qui espére sa délivrance c'est une fort bonne idée. Si mon souvenir est bon, il y a de cela quelques années il y a un prêtre québécois qui publiquement avait protesté contre le caractére soit disant non-catholique de ce classque de Noêl Tant pis pour lui et vive Noêl d'une maniére ou d'une autre. Merci pour ce texte.

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  2. Beau Noël chaud, mon Grizzly, son Elbie; bonnes odeurs fumantes de mangeaille qui mijote et de coeurs qui s'accotent.

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  3. Un trés bon Noêl à toi et à Elbie , et à tous ceux qui vous sont chers ...

    Blue

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  4. J'ai presque tout lu Nietzsche moi aussi. Il est vrai que je n'ai pas pigé le propos de certains livres (Naissance de la tragédie, par exemple), mais la plupart du temps il était accessible. Et moi aussi je riais à la lecture de ses aphorismes décapants.

    Pourtant je n'ai jamais succombé à son concept de la bêtise de l'Homme supérieur. (T'inquiète, j'avais déjà trop d'orgueil !!!) Je pense que j'ai soigné une partie de mon orgueil naturel en me frottant au colossal orgueil de Nietzsche.

    C'est cela qui l'a peut-être rendu fou.

    Joyeux Noël (encore une fois, je ne les comptep plus!) ;)

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  5. Ta fierté muette n'est jamais de leur goût ; ils jubilent quand, pour une fois, tu es suffisamment modeste pour être vaniteux.
    — Friedrich Nietzsche ; Ainsi parlait Zarathoustra

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  6. «Aimons-nous les uns les autres.»

    Jésus

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  7. Tiens les bons vœux maintenant ...

    Je vais vomir et je reviens! S'il ne me reste pas trop d'mottons entre les dents, je TE ferai la bise!

    Mon grizzly ... Beurk !

    Son Elbie te dis VTFF

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  8. Adolphe Adam, un Communard ? Un Communard mort en 1856 ???

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  9. J'allais oublier : non seulement ce "Communard" est mort en 1856, soit une petite quinzaine d'années avant la Commune, mais ce "Protestant" a eu des funérailles catholiques romaines en l'église Notre-Dame-de-Lorette à Paris.

    La seule chose vraie dans votre propos est que le haut clergé de la seconde moitié du XIXe et de la première moitié du XXe siècle (je parle ici pour l'Europe francophone, ignorant la situation canadienne) n'aimait pas ce cantique car il en jugeait la musique trop martiale, insuffisamment "digne". Accessoirement, le fait que l'auteur des PAROLES, Placide Cappeau, soit devenu un anticlérical à sympathies socialistes (fait anecdotique mais dont les anticléricaux faisaient des gorges chaudes n'a pas contribué à séduire le haut clergé - le peuple, lui, adorant ce cantique. Après Vatican II, la tendance moderniste du clergé a de facto banni ce cantique qui osait mentionner le péché originel et la colère de Dieu le Père. Pas assez progressiste. Ce n'est que depuis peu que "Minuits Chrétiens" redevient populaire dans les paroisses catholiques romaines de France & environs.

    (je précise être neutre dans les controverses entre Catholiques romains, étant moi-même protestant)

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  10. Merci pour les précisons LE.

    1848 et 1871 ce n'est pas la même chose...

    Si loin de l'Europe, j'en perds mon histoire de la France...

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