mercredi 26 novembre 2008

COMMENT IMPOSER LE RESPECT


Dans Ste-Cécile, à Twois-Wivièwes, il est toujours inquiétant de voir arriver de nouveaux venus. Les voisins souhaitent que ce ne soit pas des fous qui foutent le volume au max à trois heures du matin. De sorte qu'ils seront obligés de sortir encore une fois leur bâton de baseball pour refroidir les ardeurs des mélomanes invétérés qui ne consomment drogues et musiques qu'aux petites heures du matin. Ah! ce bruit de la chair et des os broyés aux petites heures du matin... C'est poésie à mes oreilles... (Ben voyons, je blague... Hum!)

Enfin, heureusement qu'il y a des gens plus polis, moi par exemple.

Je n'utilise pas de bâton de baseball pour régler mes différends. Je vais tout simplement cogner chez le voisin qui m'envoie chier après de multiples demandes de baisser le volume. Je frappe fort jusqu'à ce qu'il vienne m'ouvrir. S'il n'ouvre pas, je défonce la porte d'un coup de postérieur et puis je fonce dans le logement et -Paf!- je crisse un grand coup de poing dans son mur, à l'emplacement vide, pour faire un trou dans le gyproc.

Et là j'assène ma réplique dans un nuage de poussière de plâtre accentuant symboliquement ma violence refoulée:

-J'appellerai pas la police pour te dire d'arrêter d'me faire chier à trois heures du matin, mais toé tu vas appeler la police en tabarnak pour me faire sortir d'icitte pour que j'arrête de t'faire chier! M'as-tu compris?

-Oui... hee... monsieur!

-Bonne nuit! que j'ajoute, poliment.

Enfin, je ne conseille pas cette tactique à tout le monde. Elle me réussit parce que je mesure six pieds deux pouces et pèse trois cents livres. Mes bras sont gros comme mes jambes: conséquence d'une pratique soutenue de la natation dans ma jeunesse. Et il n'y a pas trop de mou. Donc, je suis un gentleman. Je ne fais jamais usage d'un bâton de baseball graissé de vaseline au bout pour qu'il soit difficile de retenir les coups. Et si l'on veut me frapper à coups de bâtons, il ne faut pas me rater. J'ai la tête dure.

Évidemment, je ne tiens pas à vous exposer des idées violentes. Je suis d'une nature douce. Je suis un vrai Roger Bontemps. Sauf quand on me fait chier. Alors, je m'impose physiquement avec une détermination qui dépasse la témérité. Je serais prêt à crever là plutôt que de laisser se commettre une atteinte à mon droit viscéral au bonheur.

ET MAINTENANT, LINDA

Où est-ce que je veux en venir?

Ah oui! À la folle qui restait à côté de chez-nous.

Elle était saoule du soir au matin et foutait son radio à plein volume en toutes occasions.

J'aurais des tas d'anecdotes à vous raconter mais quelques-unes suffiront.

D'abord, elle ressemblait à une sorcière. Elle s'appelait Linda. Elle avait quarante ans mais en «paressait» pour soixante tout au moins.

L'hygiène n'était plus sa tasse de thé depuis longtemps. Linda était toujours avec Vidal et Marco, deux ivrognes notoires nauséabonds. Elle portait des bottes de skidoo l'été. Elle puait elle aussi.

Le premier jour qu'elle est arrivée, les deux petites filles de la voisine du bloc d'en face ont eu toute une surprise. Linda n'avait pas de rideaux dans ses fenêtres. Et les petites filles pouvaient la voir en train de se faire manger la snatch par Marco, un grand dadais aussi mêlé chaud que sobre, un grand laid pas vite du cerveau.

-Meuman... qu'est-ce qu'i' fait le monsieur?

Les policiers sont débarqués chez Linda, évidemment. Ils la connaissaient bien.

-Pas encore la christ de folle! dit le matricule 245 à son collègue.

-Ouin, la Linda calice qui s'fait manger la snatch par un cromo, répliqua son collègue.

Ils l'ont arrêtée, embarquée et redumpée dans le quartier trois jours après. C'était par un après-midi d'orage du mois de juillet. Elle portait ses bottes de skidoo sous une chaleur suffocante d'orage tropical perdu au Nord. Elle vacillait d'un bord à l'autre de la rue, avec sa king can de bière en main.

-Mes hosties d'tabarnak! qu'elle disait. Vous êtes tous su' 'es pélules mes hosties!

Elle grimpa jusqu'au balcon de son troisième étage qui, sous l'effet de la pluie et des éclairs, lui conférait l'allure d'une figure de proue grotesque affrontant la tempête en pleine mer. Les éclairs déchiraient le ciel. Des éclairs comme on en voit rarement. Ça claquait comme des bombes.

Et Linda, seule sur son balcon sans toiture, s'étalait à la proue sans soleil excessif. C'était un sacré orage!

-Viens m'charcher! que criait Linda en levant le poing vers les éclairs. Viens m'charcher mon tabarnak!

Les éclairs surgissaient de partout! Comme si Linda les contrôlait. C'est là que j'ai pensé que, vraiment, c'était une sorcière.

-Viens m'charcher! CRÂÂÂÂÂWWWK! KABOUM!

C'était surréaliste. Je vous jure.

Le soir même, après que l'orage se soit calmé, Vidal est venu la visiter pour récupérer un vingt dollars. C'est du moins ce qu'il criait, Vidal, un type qui ressemblait vaguement à Charles Manson, en cognant à coups de poing sur la porte fermée à double tour.

-Ouvre-moé Linda tabarnak! J'veux mon vingt piastres hostie!

Bang! Bang! Bang!

J'étais à côté en train de lire les oeuvres de Tchékhov et cela ne me semblait pas du tout approprié. Mon premier réflexe fût de laisser faire.

-Ah pis! Qu'i' s'tuent les tabarnaks!

Mais je suis quand même sorti sur la galerie.

Vidal avait enlevé une de ses bottes et cognait à coups de bottes, de côté de l'embout en acier galvanisé.

-OUVRE-MOÉ MA TABARNAK! DONNE-MOÉ MON VINGT PIASTRES!

Puis j'ai entendu des enfants pleurer. Linda avait des enfants et elle les voyait une fois aux quinze jours. Ça m'a comme fendu le coeur tout ça.

-HEILLE VIDAL TABARNAK! TU M'ARRÊTES ÇA TU-SUITE TU R'METS TA BOTTE PIS TU DÉCRISSES, OK?

Vidal demeura stupéfait.

-Oui capitaine! Ok capitaine! C'parfait capitaine! J'cherche pas l'trouble capitaine!

Je devais avoir l'air mauvais. Il a crissé son camp.

Entretemps la police est arrivée. Les enfants ont été récupérés par la police. Linda est retournée en dedans pour je ne sais trop quel vol de dépanneur. Puis on a pu dormir tranquille quelques jours de plus, avec les voisins qui se parlaient entre eux de bâtons de baseball graissés pour favoriser le respect des règles de bon voisinage.

-Aimons-nous les uns les autres! que je leur disais. Pas vrai?

-Me semble oui... me répondaient-ils, l'oeil méchant.

Sincèrement, les policiers sont moins dangereux que les voisins dans Ste-Cécile. Pensez-y à deux fois avant d'y mener le trouble.

Ce n'est pas la conclusion du siècle.

Mais ça dit ce que ça veut bien dire.

Excusez-là.

14 commentaires:

  1. Tu nous a bien faits rire moi et ma blonde...


    Bonne Journée Makwa!

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  2. Je trouve vraiment triste ces histoires quand des enfants sont impliqués, ça pas de sens.
    Ça me bouleverse.

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  3. Moi, chus mort de rire. Faut dire que j'ai vécu dans ce foutu quartier.

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  4. Pis Terrible qui va te voir samedi: tu vas y foutre la chienne aux os. Dis-y d'apporter la vaseline pis que tu fournis le batte, ça va le rassurer :-)

    Oh là y va être en sweet calisse.

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  5. Maudit que les alcoolos font chier ... j'vous l'avait bien dit !

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  6. Moui, mais ils font quand même moins chier que les sobres.

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  7. Megwetch à toi et ta blonde Misko.

    Mais c'était une histoire triste selon Magenta...

    C'est à rire ou pleurer, je ne sais pas trop. Je ne fais qu'écrire l'histoire. C'est vous qui la lisez au fond.

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  8. Sois sans crainte Terrible. Mistral délire. Fallait ben qu'il ajoute son fion.

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  9. La boésson ne règle rien ...

    Ma grand-mère a fait chier toute sa famille ... Point !

    Je l'ai aimé quand même. Pis comme je n'avais pas assez ramassé sa marde quand j'étais une enfant, car elle chiait et pissait partout sur la brosse, je l'ai torché sur son lit de mort. Je lui avais promit que je prendrai soin d'elle jusqu'à ce qu'elle soit dans l' trou du cimetière. Elle avait peur de crever. Le salon funéraire était vide, moi j'y étais ... Ce n'était pas une promesse d'ivrogne.

    Tous les dopés et les alcoolos dans l'tapis, me font chier. Cependant, s'ils ont besoin de moi je suis là. Bref je prends les êtres humains tel qu'ils sont même s'ils me font chier!

    Je me contre-calice de vos beuveries, ça vous appartient. Ça change crissement rien pour moi ...

    Moi, dans ma vie, chez-nous, je ne veux plus faire de cauchemar à cause de l'ivrognerie, je veux rêvé!

    Le reste, j'en ai rien à foutre!

    Ben sûr les sobres font chier les alcoolos, c'est pour ça qu'ils boivent? Ciboire de bonne raison ... Foutaise !

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  10. C'est l'incontinence, qui est à blâmer ! Même très paqueté, l'homme de qualité ne chie point partout. J'en veux pour preuve le fait qu'aucun de mes amis n'a jamais chié chez moi hors du cabinet de toilette, et pourtant, Vishnu m'est témoin qu'ils ne se sont pas trop rendus coupables de sobriété invétérée. Par contre, une ou deux copines bien à jeun ont eu des accidents liés à certaines pratiques… Non, si le souci est le caca, il faut interdire le caca.

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  11. Vous aurez compris, je l'espère, que je ne chie pas partout.

    Autrement, je ferais chier.

    À moins que je n'aie rien compris du tout, naïf comme je suis.

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  12. Bois du rouge ou du vert, mais chie pas su' l'couvert.

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  13. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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