mercredi 20 août 2008
L'été à St-Roch-de-Mékinac
C'était l'été et l'existence était douce.
Les poissons sautaient à la surface des eaux vertes de la rivière Métabéroutin.
J'avais le privilège de conduire seul ma propre barque et je ramais sur la rivière avec la joie au coeur.
J'étais un Indien. J'étais Radisson. Bref, je n'étais pas encore moi-même. J'étais jeune et je me contais des pipes, ce qui était plus facile que de m'en faire moi-même, hého, je ne suis pas si acrobate.
Pour manger, je n'aurais qu'à attraper du poisson. Ou bien qu'à récolter des mûres ou des bleuets. L'autarcie m'était accessible, enfin.
Pour finir, je plongerais dans la rivière pour me rafraîchir un peu et je contemplerais les arbres du Parc National de la Mauricie, sur l'autre rive, l'eau dégoulinant sur mon visage, le soleil cuisant ma peau de Métis.
Ah! ces étés à St-Roch-de-Mékinac, au chalet de mon parrain et ma marraine...
L'autre partie de l'escapade, c'était de faire les quatre cents coups avec mon cousin et mon frère benjamin. Nous nous suivions tous d'un an et faisions tout un trio: le cousin étant le plus vieux, puis moi et enfin mon frère. Moi et mon frère nous foutions des taloches pendant que mon cousin tentait de nous séparer.
Le ski nautique parmi les pitounes (billes de bois) qui flottaient sur la rivière à cette époque, au début des années '80 , c'était tout un sport extrême.
Je vous avouerai que j'étais plutôt maladroit à ce sport. Comme j'étais déjà gros et grand, c'était un peu comme si le moteur vingt forces du yotte ne voulait plus tourner. J'enfonçais dans l'eau plutôt que de surfer sur les vagues et les pitounes. Et quand c'était le temps de remonter dans le yotte, ma christ de grosse veste de flottaison jammait en-dessous. Ce qui fait que l'on me remorquait jusqu'au quai, comme une baleine. Ce qui, vous l'avouerez, était plutôt humiliant. Mon cousin et mon jeune frère se foutaient de ma gueule et, aujourd'hui encore, chaque fois que je les vois ils m'humilient avec cette histoire que je dois aujourd'hui vous raconter, comme si j'étais en thérapie.
***
Cela fait vingt ans que les pitounes ne flottent plus sur la rivière, grâce aux actions des environnementalistes.
Pour moi, malgré les pitounes et la puanteur qui s'en dégageaient, St-Roch-de-Mékinac était tout ce que je pouvais me représenter du paradis terrestre.
En fait, c'était la porte du paradis.
Le paradis était sur la rive ouest de la rivière, du côté du Parc National de la Mauricie.
J'approchais de l'âge où je pourrais parcourir ce parc d'une extrémité à l'autre, dans toutes les directions, à pieds, à bicyclette, à la nage, en canot et en portage.
Tout mon entrainement physique convergerait vers ces buts: l'autarcie, la nature et le paradis terrestre.
Le Parc National, c'est mon Rosebud, pour ceux qui se rappellent le film Citizen Kane.
Pour les autres, eh bien, c'est un christ de beau spot.
Voilà.
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